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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1240/2021  
 
 
Arrêt du 23 mai 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Muschietti et Hurni. 
Greffière : Mme Thalmann. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Opposition tardive à une ordonnance pénale, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre 
pénale de recours, du 7 septembre 2021 
(P/2576/2020 ACPR/587/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par ordonnance du 13 août 2021, le Tribunal de police du canton de Genève a constaté l'irrecevabilité, pour cause de tardiveté, des oppositions formées par A.________ aux ordonnances pénales nos 3237475, 3327908, 4102396, 4153401 et 4174947, respectivement des 11 avril 2016, 11 juillet 2016, 26 octobre 2018, 18 décembre 2019 et 17 janvier 2019, lesquelles étaient assimilées à des jugements entrés en force. 
 
B.  
Par arrêt du 7 septembre 2021, la Chambre pénale de recours a déclaré le recours interjeté par A.________ contre l'ordonnance du 13 août 2021 irrecevable, car tardif. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire contre l'arrêt du 7 septembre 2021. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'il admet son recours du 30 août 2021 et "annule les jugements des 13 août et 7 septembre 2021". Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt du 7 septembre 2021 et au renvoi de la cause à l'autorité inférieure afin qu'il soit entendu. Il sollicite en outre l'octroi de l'effet suspensif et le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2 p. 188).  
 
1.2. Le recourant forme un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire contre l'arrêt attaqué. La décision de la dernière instance cantonale a toutefois été rendue en matière pénale, de sorte que c'est la voie de recours prévue par les art. 78 ss LTF qui est ouverte, sans que l'intitulé erroné du recours porte préjudice au recourant (cf. ATF 134 III 379 consid. 1.2). Le recours constitutionnel subsidiaire est dès lors exclu (art. 113 LTF).  
 
 
2.  
Invoquant les art. 6 par. 3 let. c CEDH et 29 al. 3 Cst., le recourant se plaint d'une violation du droit à l'assistance d'un défenseur. 
 
2.1. Aux termes de l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. Cette disposition confère au justiciable - à l'instar de l'art. 6 par. 3 let. c CEDH - une garantie minimale, dont le Tribunal fédéral examine librement le respect (ATF 142 III 131 consid. 4.1 p. 136; arrêt 6B_1322/2021 du 11 mars 2022 consid. 4.2 et la référence citée), à l'exception des constatations de fait qui s'y rapportent, qu'il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 134 I 12 consid. 2.3 p. 14; 128 I 225; arrêts 6B_1322/2021 précité consid. 4.2; 6B_1069/2021 du 12 novembre 2021 consid. 3.1).  
 
2.2. Le recourant soutient que les autorités cantonales auraient systématiquement refusé ses requêtes tendant à l'assistance gratuite d'un avocat alors que la cause était manifestement complexe car "elle incluait de multiples procédures pénales différentes sous le droit international pénal Franco-Suisse et Européen" (mémoire de recours, p. 2).  
Il ne ressort toutefois pas de l'arrêt attaqué (cf. art. 80 al. 1 LTF) ni du recours cantonal que le recourant aurait sollicité, dans les délais, l'assistance judiciaire devant la cour cantonale et que celle-ci l'aurait refusée ou aurait refusé de se prononcer sur la requête. Le grief du recourant apparaît donc irrecevable. 
 
3.  
Le recourant se plaint ensuite d'une violation de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1), qui stipulerait que la remise des actes de procédure et des décisions judiciaires "concernant les personnes poursuivies se trouvant à l'étranger doi[t] faire l'objet d'une requête formelle auprès des autorités françaises" (mémoire de recours, p. 2). Il soutient en substance que les décisions dans les "multiples procédures référencées" ne lui ont pas été notifiées en personne et n'ont donc pas été valablement notifiées en conformité avec la CEEJ. 
Le raisonnement du recourant ne saurait être suivi. En effet, selon l'art. X de l'Accord entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République française conclu le 28 octobre 1996 en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 (RS 0.351.934.92), toute pièce de procédure et toute décision judiciaire en matière pénale peuvent être adressées directement par la voie postale aux personnes qui se trouvent sur le territoire de l'autre État. 
Il s'ensuit que tant l'ordonnance du tribunal de police du 13 août 2021 que l'arrêt entrepris pouvaient, sans violer le droit fédéral ou international, être notifiés directement au recourant en France. Le grief est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
4.  
Invoquant l'art. 6 par. 3 let. b CEDH, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu et de son droit de disposer du temps nécessaire à sa défense. 
 
4.1. L'art. 6 par. 3 let. b CEDH garantit au prévenu le droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. Cette disposition est en principe respectée si le prévenu a la possibilité d'organiser sa défense de manière appropriée et sans restriction quant à la possibilité de présenter au juge tous les moyens de défense pertinents et par là même d'influencer l'issue de la procédure (ATF 122 I 109 consid. 3a; arrêts 1B_14/2022 du 8 février 2022 consid. 3.1; 1B_273/2019 du 3 décembre 2019 consid. 2.1).  
 
4.2. Selon l'art. 91 al. 2 CPP, les écrits doivent être déposés au plus tard le dernier jour du délai à l'autorité pénale, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral. Le dépôt auprès d'un office postal étranger n'a pas d'effet sur le respect du délai (arrêts 6B_950/2021 du 28 avril 2022 consid. 4.1; 6B_256/2022 du 21 mars 2022 consid. 2.1; cf. notamment arrêt 5D_193/2015 du 26 février 2016 consid. 2.2). Dans un tel cas, il faut se baser sur la date à laquelle le courrier est reçu par la Poste suisse pour être acheminé (arrêts 6B_950/2021 précité consid. 4.1; 6B_256/2022 précité consid. 2.1; 6B_522/2021 du 6 septembre 2021 consid. 1.1). La partie recourante qui choisit de déposer son recours auprès d'une poste étrangère doit ainsi faire en sorte que celui-ci soit reçu à temps en le postant suffisamment tôt (arrêts 6B_590/2021 du 29 septembre 2021 consid. 4; 6B_225/2021 du 15 juillet 2021 consid. 3 [ad art. 48 al. 1 LTF]). Une application stricte de cette règle s'impose pour des raisons d'égalité de droit et ne relève pas d'un formalisme excessif (ATF 125 V 65 consid. 1; arrêts 6B_950/2021 précité consid. 4.1; 6B_256/2022 précité consid. 2.1 et la référence citée).  
 
4.3. Il ressort de l'arrêt attaqué que l'ordonnance du 13 août 2021 (de trois pages) a été notifiée au recourant le 19 août 2021 et que le dernier jour du délai a été reporté au lundi 30 août 2021. Il s'ensuit que le recourant a disposé d'un temps suffisamment long pour rédiger et envoyer son recours. À cet égard, c'est en vain que le recourant invoque le temps pour "transmettre par courrier à l'international" et que "toute réponse [de l'étranger] serait reçue tardivement", dès lors qu'il ressort de l'arrêt attaqué qu'il n'a expédié son recours que le 31 août 2021, soit après l'échéance du délai.  
Pour le surplus, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que le recourant aurait requis de restitution du délai au sens de l'art. 94 CPP, ce que l'intéressé ne prétend d'ailleurs pas. Il se contente en effet à cet égard de soutenir qu'il aurait "nécessité un délai d'un seul jour supplémentaire pour préparer sa défense", sans toutefois prétendre qu'il aurait présenté une demande de restitution de délai en invoquant l'existence d'un empêchement non fautif d'agir dans le délai fixé (cf. arrêt 6B_1079/2021 du 22 novembre 2021 consid. 2.1 destiné à la publication et les références citées). 
Le grief du recourant est dès lors rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
5.  
Invoquant les art. 6 par. 3 let. d CEDH et 29 Cst., le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu et de son droit à la preuve ainsi que de son droit à un procès équitable. Il reproche en particulier à la cour cantonale, qui avait connaissance de son opposition, de l'avoir "ignorée intentionnellement et de manière arbitraire en invoquant un délai arbitraire incompatible avec le droit international" (mémoire de recours, p. 4). 
En tant que le recourant soutient que le délai n'était pas conforme au droit international, il est renvoyé au consid. 3 supra; il est également rappelé que le délai de recours contre une décision d'un tribunal de première instance est fixé à 10 jours selon les art. 393 al. 1 let. b et 396 al. 1 CPP. Pour le surplus, le recourant semble perdre de vue que l'irrecevabilité qui sanctionne le non-respect d'un délai n'est pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., une stricte application des règles relatives aux délais étant justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (cf. ATF 125 V 65 consid. 1 p. 66; arrêts 6B_659/2021 du 24 février 2022 consid. 2.1; 6B_1079/2021 du 22 novembre 2021 consid. 2.1 destiné à la publication; cf. également arrêts CourEDH Üçdag contre Turquie du 31 août 2021, requête n° 23314/19, § 38; Sabri Günes contre Turquie du 29 juin 2012, requête n° 27396/06, §§ 39 ss et 56 s.). Il s'ensuit que son grief est rejeté dans la mesure où il est recevable.  
 
6.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, ce qui rend par ailleurs sans objet la requête d'effet suspensif. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires, qui seront fixés en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Une partie des frais judiciaires, arrêtée à 1'200 fr., est mise à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 23 mai 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Thalmann