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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_106/2022  
 
 
Arrêt du 31 octobre 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Hurni. 
Greffier : M. Tinguely. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Service des contraventions du canton de Ge nève, chemin de la Gravière 5, 1227 Les Acacias. 
 
Objet 
Demande de nouveau jugement tardive; arbitraire, droit d'être entendu, etc., 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale 
de recours, du 23 novembre 2021 
(P/2576/2020 ACPR/813/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement rendu par défaut le 17 août 2021, à la suite des oppositions formées par A.________ aux ordonnances pénales rendues par le Service des contraventions les 22 juillet 2020 (n° ttt) et 23 octobre 2020 (n° uuu), le Tribunal de police de la République et canton de Genève l'a condamné pour violation des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR) à une amende de 160 francs. 
 
B.  
Par ordonnance du 24 septembre 2021, le Tribunal de police n'est pas entré en matière sur la demande de nouveau jugement que A.________, domicilié en France, lui avait adressé, tardivement, le 20 septembre 2021. 
Le recours formé par A.________ contre cette ordonnance a été rejeté par arrêt rendu le 23 novembre 2021 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise. 
 
C.  
Parallèlement, par ordonnance du 13 août 2021, le Tribunal de police a constaté l'irrecevabilité, pour cause de tardiveté, des oppositions formées par A.________ aux ordonnances pénales nos vvv, www, xxx, yyy et zzz, rendues respectivement les 11 avril 2016, 11 juillet 2016, 26 octobre 2018, 18 décembre 2019 et 17 janvier 2019, lesquelles étaient assimilées à des jugements entrés en force. 
Par arrêt du 7 septembre 2021, la Chambre pénale de recours a déclaré irrecevable, car tardif, le recours interjeté par A.________ contre l'ordonnance du 13 août 2021. 
Le 20 octobre 2021, A.________ a saisi le Tribunal fédéral d'un recours contre l'arrêt du 7 septembre 2021 (cause 6B_1240/2021). 
 
D.  
Par acte du 21 janvier 2022, A.________ forme un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire contre l'arrêt du 23 novembre 2021. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que la demande de nouveau jugement datée du 17 septembre 2021 est admise et que le jugement du 17 août 2021 est annulé. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt du 23 novembre 2021 et au renvoi de la cause à l'autorité inférieure afin qu'il soit entendu. Il sollicite en outre l'octroi de l'effet suspensif. 
 
E.  
Statuant par arrêt 6B_1240/2021 du 23 mai 2022, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours en matière pénale que A.________ avait formé contre l'arrêt du 7 septembre 2021. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2 p. 188). 
 
1.1. Le recourant forme un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire contre l'arrêt du 23 novembre 2021. La décision de la dernière instance cantonale a toutefois été rendue en matière pénale, de sorte que c'est la voie de recours prévue par les art. 78 ss LTF qui est ouverte, sans que l'intitulé erroné du recours porte préjudice au recourant (cf. ATF 134 III 379 consid. 1.2). Le recours constitutionnel subsidiaire est dès lors exclu (art. 113 LTF).  
 
1.2. La décision écartant une demande de nouveau jugement est une décision finale au sens de l'art. 90 LTF, dès lors qu'elle met fin à cette procédure. Le recours en matière pénale est donc recevable sous cet angle (arrêts 6B_1165/2020 du 10 juin 2021 consid. 1; 6B_1175/2016 du 24 mars 2017 consid. 5.3; 6B_860/2013 du 7 mars 2014 consid. 1).  
 
2.  
Invoquant les art. 6 par. 3 let. c CEDH et 29 al. 3 Cst., le recourant se plaint en premier lieu d'une violation du droit à l'assistance d'un défenseur. 
 
2.1. En dehors des cas de défense obligatoire (art. 130 CPP), l'art. 132 al. 1 let. b CPP soumet le droit à l'assistance d'un défenseur d'office aux conditions que le prévenu soit indigent et que la sauvegarde de ses intérêts justifie une telle assistance. S'agissant de la seconde condition, elle s'interprète à l'aune des critères mentionnés à l'art. 132 al. 2 et 3 CPP. Ainsi, les intérêts du prévenu justifient une défense d'office notamment lorsque la cause n'est pas de peu de gravité et qu'elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter (art. 132 al. 2 CPP). En tout état de cause, une affaire n'est pas de peu de gravité lorsque le prévenu est passible d'une peine privative de liberté de plus de quatre mois ou d'une peine pécuniaire de plus de 120 jours-amende (art. 132 al. 3 CPP).  
Les critères énoncés par l'art. 132 al. 1 let. b, 2 et 3 CPP reprennent largement la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d'assistance judiciaire, rendue sur la base des art. 29 al. 3 Cst. et 6 ch. 3 let. c CEDH (ATF 143 I 164 consid. 3.5). Si les deux conditions mentionnées à l'art. 132 al. 2 CPP doivent être réunies cumulativement, il n'est pas exclu que l'intervention d'un défenseur soit justifiée par d'autres motifs (comme l'indique l'adverbe "notamment"; cf. arrêts 1B_591/2021 du 12 janvier 2022 consid. 2.1; 1B_194/2021 du 21 juin 2021 consid. 3.1). La désignation d'un défenseur d'office peut ainsi s'imposer selon les circonstances, lorsque le prévenu encourt une peine privative de liberté de quelques semaines à quelques mois si, à la gravité relative du cas, s'ajoutent des difficultés particulières du point de vue de l'établissement des faits ou des questions juridiques soulevées, qu'il ne serait pas en mesure de résoudre seul (ATF 143 I 164 consid. 3.5; arrêt 1B_172/2022 du 18 juillet 2022 consid. 2.1). En revanche, lorsque l'infraction n'est manifestement qu'une bagatelle, en ce sens que son auteur ne s'expose qu'à une amende ou à une peine privative de liberté de courte durée, la jurisprudence considère que l'auteur n'a pas de droit constitutionnel à l'assistance judiciaire (ATF 143 I 164 consid. 3.5; arrêts 6B_363/2022 du 26 septembre 2022 consid. 3.1; 1B_591/2021 précité consid. 2.1; 1B_157/2021 du 31 mars 2021 consid. 3.2). 
 
2.2. Il est déduit du jugement du Tribunal de police du 17 août 2021 que les faits reprochés au recourant avaient trait en l'espèce à des violations simples des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR), soit à des contraventions, commises en l'occurrence dans le canton de Genève, s'agissant, pour la première ordonnance pénale, du dépassement de 1 km/h de la vitesse maximale autorisée à l'intérieur d'une localité (ordonnance pénale du 22 juillet 2020) et, pour la seconde, du dépassement de la durée du stationnement autorisée (ordonnance pénale du 23 octobre 2020).  
Dès lors, compte tenu de la faible gravité des infractions en cause, le recourant ne peut manifestement pas se prévaloir d'un droit constitutionnel à l'assistance d'un défenseur. Contrairement à ce que le recourant laisse entendre par les griefs qu'il développe, la cause ne saurait au demeurant être considérée comme complexe par le seul fait qu'il n'est pas domicilié en Suisse, mais en France. 
Le grief doit dès lors être rejeté. 
 
3.  
Quant à une violation de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1), le recourant développe, mot pour mot, le même grief que celui déjà traité dans l'arrêt 6B_1240/2021 du 23 mai 2022 le concernant (cf. consid. 3). Il suffit à cet égard de l'y renvoyer. 
Ainsi, en l'occurrence également, les ordonnances pénales des 22 juillet 2020 et 23 octobre 2020, le jugement par défaut du 17 août 2021, l'ordonnance du 24 septembre 2021 ainsi que l'arrêt entrepris pouvaient être notifiés directement au recourant à son domicile français, cela en vertu de l'art. X de l'Accord entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République française conclu le 28 octobre 1996 en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 (RS 0.351.934.92). 
 
4.  
A l'instar de ce qui a prévalu dans le recours en matière pénale ayant donné lieu à l'arrêt 6B_1240/2021 précité, le recourant invoque l'art. 6 par. 3 let. b CEDH, reprochant à la cour cantonale une violation de son droit d'être entendu ainsi que de son droit à disposer du temps nécessaire à sa défense. Il entend ici plus spécifiquement faire valoir que tout résident étranger devrait disposer d'un délai supplémentaire pour tenir compte des difficultés à acheminer son courrier à un office postal suisse. 
 
4.1. L'art. 6 par. 3 let. b CEDH garantit au prévenu le droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. Cette disposition est en principe respectée si le prévenu a la possibilité d'organiser sa défense de manière appropriée et sans restriction quant à la possibilité de présenter au juge tous les moyens de défense pertinents et par là même d'influencer l'issue de la procédure (ATF 122 I 109 consid. 3a; arrêts 6B_1240/2021 du 23 mai 2022 consid. 4.1; 1B_14/2022 du 8 février 2022 consid. 3.1).  
 
4.2. Aux termes de l'art. 368 al. 1 CPP, si le jugement rendu par défaut peut être notifié personnellement au condamné, celui-ci doit être informé sur son droit de demander un nouveau jugement au tribunal dans les dix jours, par écrit ou oralement.  
Selon l'art. 91 al. 2 CPP, les écrits doivent être déposés au plus tard le dernier jour du délai à l'autorité pénale, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral. Le dépôt auprès d'un office postal étranger n'a pas d'effet sur le respect du délai (arrêts 6B_1240/2021 du 23 mai 2021 consid. 4.2; 6B_256/2022 du 21 mars 2022 consid. 2.1; cf. notamment arrêt 5D_193/2015 du 26 février 2016 consid. 2.2). Dans un tel cas, il faut se baser sur la date à laquelle le courrier est reçu par la Poste suisse pour être acheminé (arrêts 6B_1240/2021 précité consid. 4.2; 6B_256/2022 précité consid. 2.1; 6B_522/2021 du 6 septembre 2021 consid. 1.1). La partie recourante qui choisit de déposer son recours auprès d'une poste étrangère doit ainsi faire en sorte que celui-ci soit reçu à temps en le postant suffisamment tôt (arrêts 6B_590/2021 du 29 septembre 2021 consid. 4; 6B_225/2021 du 15 juillet 2021 consid. 3 [ad art. 48 al. 1 LTF]). Une application stricte de cette règle s'impose pour des raisons d'égalité de droit et ne relève pas d'un formalisme excessif (ATF 125 V 65 consid. 1; arrêts 6B_1240/2021 précité consid. 4.2; 6B_256/2022 précité consid. 2.1 et la référence citée). 
 
4.3. En l'espèce, le jugement par défaut du 17 août 2021 a été notifié au recourant le jeudi 2 septembre 2021, de sorte que le délai pour demander un nouveau jugement est arrivé à échéance le lundi 13 septembre 2021.  
Remise à la Poste suisse le lundi 20 septembre 2021, la demande était donc manifestement tardive, comme l'a jugé la cour cantonale. 
 
4.4. Au surplus, le recourant ne saurait valablement se prévaloir d'avoir bénéficié d'un délai plus court qu'un résident suisse, le délai légal de dix jours ayant en effet commencé à courir dès le lendemain de la notification de l'acte (cf. art. 90 al. 1 CPP), comme cela aurait été le cas s'il avait été domicilié en Suisse.  
Le recourant ne précise par ailleurs pas les motifs qui l'auraient empêché de déposer, dans le délai légal, sa demande de nouveau jugement auprès de la Poste suisse ou d'une représentation consulaire ou diplomatique suisse. En particulier, il n'explique nullement en quoi consistaient concrètement les difficultés qu'il auraient rencontrées pour déposer son acte en lieu et temps utiles, étant observé qu'en l'occurrence, l'acte a finalement été remis à la Poste suisse sept jours après l'échéance du délai, et non un jour après comme il le prétend (cf. mémoire de recours, ch. 13 p. 3). A cet égard, il ne ressort pas non plus de l'arrêt attaqué que le recourant avait requis une restitution de délai à titre de l'art. 94 CPP, en invoquant un empêchement non fautif d'agir dans le délai, tel que pourrait l'avoir été, selon les circonstances, une impossibilité de se déplacer pour des motifs médicaux. 
Dans ce contexte, c'est en vain que le recourant invoque une " violation du droit à l'égalité ", le grief ne répondant en tout état pas aux exigences de motivation déduites des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF. 
 
5.  
En tant que, dans les mêmes termes que ceux utilisés dans son précédent recours au Tribunal fédéral, le recourant se plaint aussi d'une violation de son droit à la preuve ainsi que son droit à un procès équitable, il est renvoyé à l'arrêt 6B_1240/2021 précité (cf. consid. 5). 
On rappellera encore à cet égard que l'irrecevabilité qui sanctionne le non-respect d'un délai n'est pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., une stricte application des règles relatives aux délais étant justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (cf. ATF 125 V 65 consid. 1; arrêts 6B_659/2021 du 24 février 2022 consid. 2.1; 6B_1079/2021 du 22 novembre 2021 consid. 2.1 destiné à la publication; cf. également arrêts CourEDH Üçdag contre Turquie du 31 août 2021, requête n° 23314/19, § 38; Sabri Günes contre Turquie du 29 juin 2012, requête n° 27396/06, §§ 39 ss et 56 s.). 
 
6.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, ce qui rend par ailleurs sans objet la requête d'effet suspensif. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires, qui seront fixés en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF), selon ce qui a été constaté dans la cause 6B_1240/2021. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Service des contraventions du canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 31 octobre 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Tinguely