114 Ia 80
Chapeau
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12. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 1er février 1988 dans la cause Commune de X. contre Commission cantonale de recours en matière d'impôt du canton de Fribourg et commune de Y. (recours de droit public)
Regeste
Autonomie communale; répartition intercommunale de l'impôt.
Conditions et portée du recours de droit public pour violation de l'autonomie communale (consid. 1 et 2).
En droit fribourgeois, les communes ne peuvent exiger une répartition intercommunale de l'impôt perçu sur certains contribuables qu'aux conditions exhaustives prévues par la loi fiscale; elles ne disposent donc d'aucune autonomie en cette matière (consid. 3).
Domicilié dans la commune de Y., A. exerce sa fonction de conseiller d'Etat sur le territoire de la commune de X. De 1982 à
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1984, l'impôt communal sur le produit de son activité a été partagé par moitié entre les deux communes.Le 16 janvier 1986, la commune de Y. a requis la Commission cantonale de recours en matière d'impôt du canton de Fribourg de lui reconnaître le droit d'imposer la totalité du traitement du conseiller d'Etat.
Constatant que la possibilité offerte par l'art. 9 al. 3 de la loi fribourgeoise du 10 mai 1963 sur les impôts communaux et paroissiaux (LICP) d'effectuer une répartition de l'impôt ne concerne que le contribuable qui "exerce, en dehors de sa commune de domicile, une activité indépendante ou une fonction dirigeante dans une entreprise", la Commission cantonale de recours a jugé qu'une fonction dirigeante dans le secteur public, et en particulier la charge de conseiller d'Etat, ne satisfait pas aux conditions légales puisqu'elle ne s'exerce pas au sein d'une entreprise. La requête de la commune de Y. a par conséquent été admise.
La commune de X. a formé un recours de droit public contre cette décision qui, à son avis, viole son autonomie dans la mesure où la notion de "fonction dirigeante" y reçoit arbitrairement un sens différent de celui admis en matière de double imposition intercantonale.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure où il était recevable.
Extrait des considérants:
1. Saisi d'un recours, le Tribunal fédéral examine d'office les questions de recevabilité sans être lié par les conclusions des parties, ni par les moyens qu'elles peuvent faire valoir (ATF 111 Ia 252 et les arrêts cités).
a) Une commune a qualité pour agir par la voie du recours de droit public en invoquant une violation de son autonomie lorsque la décision attaquée l'atteint en tant que détentrice de la puissance publique. Déterminer si, dans un domaine juridique particulier, la commune jouit effectivement de l'autonomie qu'elle invoque, n'est pas une question de recevabilité, mais constitue l'objet d'une appréciation au fond (ATF 113 Ia 202, ATF 112 Ia 269, ATF 111 Ia 253 et les références). En l'espèce, la décision entreprise, qui supprime le droit de la commune de X. de percevoir une partie de l'impôt frappant le revenu du conseiller d'Etat, touche la recourante en sa qualité de détentrice de la puissance publique. Elle a donc qualité pour agir.
b) Selon l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit notamment contenir - sous peine d'irrecevabilité - un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la violation. Cette exigence minimale de motivation du recours de droit public concerne aussi bien le recours déposé par un particulier que celui formulé par une commune pour violation de son autonomie.
Une commune ne peut donc se contenter d'invoquer son autonomie en laissant le soin au Tribunal fédéral d'examiner lui-même l'éventuel fondement de cette allégation. Elle doit au contraire non seulement expliquer en détail en quoi consiste son autonomie dans le domaine particulier, mais encore démontrer pourquoi la décision attaquée en constitue une violation (arrêt non publié du 4 mars 1988 en la cause politische Gemeinde Savognin).
Dans la mesure où, en l'espèce, la recourante se borne à invoquer l'art. 1 al. 1 LICP, sans pour autant montrer en quoi cette disposition lui accorderait une éventuelle autonomie en matière fiscale, ni préciser sur quels points celle-ci serait ignorée par la décision attaquée, la motivation du recours apparaît des plus discutable. Cette question peut toutefois demeurer indécise, dès lors que le recours s'avère de toute manière mal fondé.
2. a) Selon la jurisprudence, une commune est autonome dans les domaines que le droit cantonal ne règle pas de façon exhaustive, mais laisse en tout ou partie dans la sphère communale, en conférant aux autorités municipales une appréciable liberté de décision (ATF 110 Ia 199 consid. 2 et les références). Lorsqu'elle est reconnue autonome dans un domaine spécifique, une commune peut agir par recours de droit public pour obtenir notamment que les autorités cantonales de recours ou de surveillance respectent le cadre formel de leur pouvoir d'examen; elle peut également faire valoir qu'en appliquant les normes de droit communal, cantonal ou fédéral en vigueur dans le domaine concerné, l'autorité intimée est tombée dans l'arbitraire. Enfin, dans la mesure où est en cause une disposition de droit constitutionnel cantonal ou fédéral, la corporation publique peut aussi se plaindre d'une fausse interprétation ou application de cette norme (ATF 112 Ia 63 consid. 3a, 270 consid. 2a, 282 consid. 3a, 342 consid. 2 et les références).
En revanche, dans un recours pour violation de son autonomie, une commune ne peut pas invoquer la violation des droits constitutionnels des citoyens. Rien ne l'empêche cependant de faire valoir que les instances cantonales ont interprété trop largement un droit
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fondamental en faveur de sa partie adverse ou qu'elles ont transgressé un principe constitutionnel à son désavantage, limitant ainsi de manière inadmissible son autonomie (ATF 112 Ia 63 consid. 3a, ATF 110 Ia 200 consid. 3b et les arrêts cités). Dans ces cas, la commune a la possibilité d'interjeter un recours fondé sur l'art. 4 Cst. si, en relation avec son recours, elle peut se prévaloir d'une violation de son autonomie (ATF 112 Ia 269 consid. 1a, 110 Ia 51 consid. 4a).b) Il appartient à la constitution et à la législation cantonale de déterminer si et dans quelle mesure une commune est autonome dans un domaine particulier; à cet égard, il convient de ne pas perdre de vue qu'une partie - non écrite - de la réglementation de l'autonomie communale peut résulter de l'évolution historique du canton considéré (GIACOMMETTI, Staatsrecht der schweizerischen Kantone, p. 76). Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral examine l'application de ce droit cantonal librement ou sous l'angle de l'arbitraire, selon que les dispositions qui délimitent le champ de l'autonomie communale sont de niveau constitutionnel ou de niveau légal (ATF 112 Ia 342 et les arrêts cités).
3. a) En droit fribourgeois, les impôts que les communes sont autorisées à percevoir sont définis dans la loi cantonale sur les impôts communaux et paroissiaux. L'art. 1er al. 1 LICP, invoqué par la recourante, garantit aux communes la faculté d'"imposer les personnes et les biens". Toutefois, s'agissant des impôts communaux ordinaires, leur assiette est la même que celle de l'impôt cantonal (art. 41 LICP a contrario) et leurs taux sont fixés en pour-cent de l'impôt cantonal (art. 3 al. 3 LICP). En outre, des limites précises sont tracées à la souveraineté des communes aux art. 7 ss LICP et notamment par l'art. 9 al. 3 LICP. A défaut de règles cantonales concernant la répartition des impôts entre les diverses communes, l'art. 11 LICP déclare applicables les principes admis en matière de double imposition intercantonale. Enfin, lorsqu'un conflit de souveraineté fiscale surgit entre deux ou plusieurs communes, il incombe à la Commission cantonale de recours de trancher le litige (art. 43 LICP).
b) Dès lors, si la loi cantonale garantit aux communes le droit de percevoir des impôts directs, celles-ci n'ont - sous réserve de quelques exceptions (par exemple, la fixation des taux, art. 4 à 6 LICP) - aucune liberté dans l'aménagement de leur système fiscal. Elles ne peuvent en particulier exiger une répartition de l'impôt qu'aux conditions exhaustives prévues par l'art. 9 al. 3 LICP: les autorités municipales ne jouissent donc pas en la matière
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d'une autonomie suffisante (cf. arrêt non publié du 3 mai 1985 en la cause commune de Semsales). Au demeurant, la délimitation de la souveraineté fiscale des communes entre elles ne saurait être englobée dans le champ de leur autonomie, dès lors que leurs compétences sur ce point ne pourraient que s'exclure mutuellement. Le partage des souverainetés doit, par conséquent, être opéré nécessairement par un organe appartenant à une collectivité publique de rang supérieur, c'est-à-dire par un organe cantonal (ATF 110 Ia 50).c) Dans la mesure où les autorités communales ne disposent pas d'une appréciable liberté de décision dans le domaine litigieux, l'autorité intimée n'avait pas à respecter en l'occurrence une éventuelle autonomie de la recourante, mais à appliquer uniquement les prescriptions cantonales réglementant la répartition intercommunale de l'impôt. Dès lors, conformément à la jurisprudence rappelée précédemment, ne pouvant se prévaloir d'une violation de son autonomie, la commune n'a pas non plus qualité pour se plaindre de l'interprétation jugée arbitraire de la notion d'activité dirigeante défendue par l'autorité intimée.
références
ATF: 112 IA 269, 112 IA 63, 111 IA 252, 113 IA 202 suite...
Article: art. 90 al. 1 let. b OJ, art. 4 Cst.