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Chapeau
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21. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 30 juillet 1999 dans la cause X. contre Procureur général du canton de Genève (pourvoi en nullité)
Regeste
Art. 190 CP; viol; coactivité.
Même si seul un homme peut être l'auteur direct d'un viol, une femme peut également se rendre coupable de cette infraction comme coauteur (consid. 2).
Celui qui s'associe pleinement et en toute connaissance de cause à la décision de l'auteur direct de violer la victime, encourageant en outre celui-ci par son comportement durant le viol, se rend coupable de cette infraction en qualité de coauteur (consid. 3).
Le matin du 20 décembre 1996, X. et son amant Y., accompagnés de Z., ont attendu M., qui sortait de son domicile pour se rendre à son travail. Après avoir été attirée dans le véhicule de Y., M. a été conduite de force au domicile de celui-ci, où elle a été enfermée dans le salon. Y. a alors demandé aux deux femmes de se déshabiller; X. s'est exécutée sur le champ; M., qui refusait et pleurait, y a été contrainte par Y. Ce dernier a ensuite forcé M. à se coucher sur le canapé; il l'a alors violée, changeant de positions à de nombreuses reprises, la mordant violemment au- dessus du sein gauche et la pénétrant encore par derrière, avant de tenter d'obtenir d'elle des fellations; ces actes se sont poursuivis durant approximativement trois heures. Tout au long de cette scène, X., toujours déshabillée, était présente, fumant des cigarettes et stimulant son amant par des caresses pendant qu'il agissait. Le forfait accompli, Y. et X. sont
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sortis de la pièce, laissant la victime seule et prostrée, avant que Z. n'entre dans le salon, où il a à son tour violé la victime pendant une demi-heure environ.Le 5 septembre 1998, la Cour d'assises de Genève a notamment condamné X., pour viol en commun ainsi que pour enlèvement et séquestration, commis en qualité de coauteur, à la peine de 5 ans de réclusion et à 10 ans d'expulsion du territoire suisse. Le recours formé par la condamnée contre ce jugement a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation genevoise du 16 avril 1999.
X. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Contestant sa condamnation pour viol en tant que coauteur, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué.
Le Tribunal fédéral a rejeté le pourvoi dans la mesure où il était recevable.
Extrait des considérants:
2. La recourante fait d'abord valoir que le viol est un délit «personnalissime» (eigenhändiges Delikt), de sorte que cette infraction ne peut être retenue à sa charge.
La question de savoir s'il existe des délits personnalissimes et, en particulier, si, le cas échéant, le viol entre dans cette catégorie de délits est controversée en doctrine (cf. TRECHSEL/NOLL, AT I, 4ème éd., Zurich 1994, p. 183; REHBERG/SCHMID, Strafrecht III, 7ème éd. 1997, p. 397; JENNY, Angriffe auf die sexuelle Freiheit, Bâle 1977, p. 31 ss; ANNIK NICOD-PASCHOUD, Le viol, thèse Lausanne 1983, p. 102 ss; PHILIPP MAIER, Die Nötigungsdelikte im neuen Sexualstrafrecht, Zürich 1994, p. 347 s.; SCHUBARTH, Eigenhändiges Delikt und mittelbare Täterschaft, RPS 1996 p. 325 ss, 329; STRATENWERTH, Gibt es eigenhändige Delikte?, RPS 1997 p. 86 ss, 91; SCHUBARTH, Binnenstrafrechtsdogmatik und ihre Grenzen, ZStW 1998, p. 827 ss, 839 ss). Quoi qu'il en soit, et c'est ce qui est ici déterminant, il est très généralement admis que, même si seul celui qui, en usant de contrainte, fait subir l'acte sexuel à une personne de sexe féminin et, partant, un homme, peut être l'auteur direct d'un viol, une autre personne, aussi une femme, peut également se rendre coupable de cette infraction comme auteur médiat ou comme coauteur (cf. STRATENWERTH, BT I, 5ème éd. Berne 1995, p. 158 no 5; TRECHSEL, Kurzkommentar, 2ème éd., art. 190 CP no 8; JENNY, Kommentar zum schweizerischen Strafrecht, BT IV, p. 75; PHILIPP MAIER, op.cit., loc.cit.; SCHUBARTH, RPS 1996, p. 335/336).
Dans son message relatif à la modification du code pénal et du code pénal militaire du 26 juin 1985 (FF 1985 II 1021ss), le Conseil fédéral, au passage cité par la recourante (FF 1985 II 1112/1113), ne se réfère aux ATF 89 IV 85 ss et ATF 98 IV 97 ss que pour souligner que le nouvel art. 200 CP doit permettre de considérer tous les cas de viol en commun comme des viols qualifiés. Dans ces arrêts, le Tribunal fédéral ne s'est d'ailleurs pas du tout prononcé sur la question, qui ne lui était pas soumise, du degré de participation de l'auteur, qui, dans les deux cas, avait, entre autres, été reconnu coupable de complicité de viol aggravé en instance cantonale. La recourante ne peut donc rien en tirer à l'appui de sa thèse.
Il n'y a dès lors pas lieu de s'écarter de l'avis de la doctrine majoritaire, selon laquelle peut également se rendre coupable de viol celui qui participe à cette infraction en tant que coauteur.
a) Est un coauteur celui qui collabore, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes à la décision de commettre une infraction, à son organisation ou à son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux; il faut que, d'après les circonstances du cas concret, la contribution du coauteur apparaisse essentielle à l'exécution de l'infraction. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas; il n'est toutefois pas nécessaire que le coauteur ait effectivement participé à l'exécution de l'acte ou qu'il ait pu l'influencer. La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet; il peut y adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Ce qui est déterminant c'est que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 120 IV 136 consid. 2b p. 141, 265 consid. 2c/aa p. 271 s. et les arrêts cités).
b) L'arrêt attaqué constate que, le soir du 19 décembre 1996, la recourante a tenté à trois reprises, de concert avec Y., d'amener la victime à les rejoindre et que, n'y étant pas parvenue, elle est allée le lendemain matin, accompagnée de ses comparses, attendre la victime à l'entrée de son domicile, sachant que celle-ci en sortirait vers
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7 heures pour se rendre à son travail; la recourante a alors attiré la victime dans le véhicule sous le prétexte de la conduire à son travail; par la suite et alors que la victime était conduite de force au domicile de Y., la recourante l'a menacée en lui disant qu'elle allait payer pour ce qu'elle avait fait; toujours pendant le trajet, la recourante s'est notamment opposée fermement à la suggestion de libérer la victime; sur place, la victime a été conduite dans le salon, dont la recourante a fermé la porte à clef à la demande de Y. Ce comportement démontre clairement que la recourante savait qu'il s'agissait de conduire la victime dans l'appartement de Y. pour y violer celle-ci et qu'elle adhérait pleinement à ce projet, aux préparatifs duquel elle a en outre apporté une contribution essentielle, notamment en attirant la victime dans le véhicule et en exigeant que celle-ci soit conduite sans désemparer chez Y. L'arrêt attaqué constate du reste que la recourante a fait sienne la volonté délictueuse de Y., mue par l'antagonisme qui l'opposait à la victime; ce mobile, comme le fait que la recourante a menacé la victime en lui disant qu'elle allait payer pour ce qu'elle avait fait tendent au demeurant à démontrer que la recourante avait personnellement un intérêt au viol de la victime aux fins de l'humilier pour la punir.Pendant les quelque trois heures durant lesquelles la victime a été violée par Y., la recourante, contrairement à ce qu'elle allègue, n'est pas restée «purement passive». Certes, elle n'a pas elle-même usé de contrainte physique à l'encontre de la victime. Elle a en revanche non seulement assisté à toute la scène sans aucunement protester et en fumant des cigarettes, mais aussi et surtout en stimulant son amant par des caresses pendant qu'il violait la victime. Un tel comportement était de nature à accroître le sentiment d'humiliation et d'impuissance de la victime; l'arrêt attaqué relève du reste que la victime a souligné devant le médecin qui l'avait prise en charge à quel point le comportement de la recourante avait été incompréhensible et insupportable pour elle; plus est, le fait de stimuler le violeur par des caresses était propre à encourager et à renforcer celui-ci dans l'accomplissement de sa volonté délictueuse. Le comportement de la recourante confirme en tout cas que cette dernière a, en toute connaissance de cause, adhéré pleinement à la décision de Y. de violer la victime.
c) Il résulte de ce qui précède, que la recourante, qui avait manifestement un intérêt personnel au viol de la victime, qu'elle voulait voir humiliée et ainsi punie, s'est non seulement associée pleinement et en toute connaissance de cause à la décision de Y. de violer
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la victime mais qu'elle a en outre participé activement et de manière prépondérante aux préparatifs de cette infraction, qu'elle a de surcroît encouragée par son comportement durant le viol, contribuant en outre personnellement à l'humiliation de la victime. La recourante a ainsi collaboré intentionnellement au viol commis par Y., dans des conditions et dans une mesure qui la font apparaître comme un participant principal, et non pas secondaire. On ne voit dès lors pas que la cour cantonale ait violé le droit fédéral en considérant que la recourante avait agi en tant que coauteur du viol.d) Les arguments avancés par la recourante pour le contester sont impropres à l'infirmer.
Contrairement à ce qu'elle semble penser, il n'est pas nécessaire que le coauteur soit le maître de la situation de fait, mais qu'il ait «une certaine maîtrise des opérations», c'est-à-dire qu'il apporte une contribution déterminante à la survenance du résultat (cf. ATF 118 IV 397 consid. 2b p. 400, auquel renvoie notamment l' ATF 120 IV 136 consid. 2b p. 141 cité par la recourante). En l'espèce, ainsi qu'on l'a vu, c'est la recourante qui a attiré la victime dans la voiture et qui a ensuite fait en sorte que celle-ci soit conduite sans désemparer chez Y., où elle a encore assisté au viol en s'employant à accroître l'humiliation de la victime et en stimulant son amant pendant qu'il agissait; elle ne s'est pas bornée à favoriser l'infraction voulue par l'auteur principal, mais a fait pleinement siennes la décision et la volonté de ce dernier de commettre cette infraction et l'a manifesté par des actes, contribuant de manière prépondérante aux préparatifs et encourageant l'auteur principal dans l'accomplissement de l'acte délictueux.
Le fait que ce soit à la demande de Y. que la recourante s'est elle aussi déshabillée ne permet nullement de conclure qu'elle était «totalement soumise» à ce dernier. Outre qu'elle a donné suite immédiatement et sans la moindre réticence à ce fantasme, sa prétendue soumission à Y. est clairement infirmée par l'ensemble de son comportement.
Pour les motifs exposés ci-dessus (cf. supra, consid. 2), c'est en vain que la recourante tente de tirer argument de l' ATF 98 IV 97 ss.
Pour le surplus, l'argumentation de la recourante se réduit à une rediscussion des faits retenus dans l'arrêt attaqué, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière.