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Chapeau
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18. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Dame X. et X. contre Grand Conseil du canton de Genève (recours en matière de droit public)
2C_230/2010 du 12 avril 2011
Regeste
Art. 8 al. 1 et 2, art. 13 al. 1 et 2, art. 27 et 49 al. 1 Cst. ; art. 8 CEDH; LPD; loi genevoise du 17 décembre 2009 sur la prostitution; égalité et non-discrimination, sphère privée (protection des données) et domicile, liberté économique, primauté du droit fédéral.
Présentation et concours entre les droits constitutionnels invoqués (consid. 3).
L'exigence légale selon laquelle le responsable d'un salon de prostitution ou d'une agence d'escorte doit obtenir l'accord préalable du propriétaire de l'immeuble pour y exploiter son établissement viole la liberté économique (consid. 4). Interprétation conforme à la Constitution de l'obligation du responsable d'empêcher toute atteinte à l'ordre public (consid. 6), des contrôles effectués par les autorités dans les établissements (consid. 7) et, par rapport à la base légale et à la proportionnalité, du traitement des données relatives à la prostitution (consid. 9). Constitutionnalité de l'obligation du responsable d'un établissement de tenir à jour un registre interne des prostitué(e)s et des prestations offertes (consid. 5). Les spécificités liées à la prostitution justifient des mesures de recensement et des obligations d'annonce qui ne sont pas contraires à la Constitution (consid. 8).
A. (...) Le Grand Conseil de la République et canton de Genève (ci-après: le Grand Conseil) a adopté la loi sur la prostitution le 17 décembre 2009 (LProst/GE; RSG I 2 49). A l'issue du délai référendaire, le Conseil d'Etat a promulgué la LProst/GE par arrêté du 10 février 2010. Publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève n° 275 du 15 février 2010, elle est entrée en vigueur le 1er mai 2010 et dispose notamment:
CHAPITRE I: DISPOSITON GENERALES
Article 1: Buts
La présente loi a pour buts:
a) de garantir, dans le milieu de la prostitution, que les conditions d'exercice de cette activité sont conformes à la législation, soit notamment qu'il n'est pas porté atteinte à la liberté d'action des personnes qui se prostituent, que celles-ci ne sont pas victimes de la traite d'êtres humains, de menaces, de violences, de pressions ou d'usure ou que l'on ne profite pas
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de leur détresse ou de leur dépendance pour les déterminer à se livrer à un acte sexuel ou d'ordre sexuel;b) d'assurer la mise en oeuvre des mesures de prévention et promotion de la santé et de favoriser la réorientation professionnelle des personnes qui se prostituent, désireuses de changer d'activité;
c) de réglementer les lieux, heures et modalités de l'exercice de la prostitution, ainsi que de lutter contre les manifestations secondaires fâcheuses de celle-ci.
(...)
CHAPITRE II: RECENSEMENT
Article 4: Obligation d'annonce
1 Toute personne qui se prostitue est tenue de s'annoncer préalablement aux autorités compétentes. Elle doit être majeure.
2 Le Conseil d'Etat fixe les modalités de cette procédure qui est gratuite.
3 La législation en matière de protection de la personnalité et de protection des données est applicable.
4 La personne se prostituant obtient des informations circonstanciées lorsqu'elle s'annonce aux autorités compétentes. (...)
Article 5: Cessation d'activité
1 La personne qui cesse toute activité liée à la prostitution est tenue d'en informer les autorités compétentes.
2 Elle est alors soit considérée comme étant en fin d'activité, soit, en fonction de sa demande, radiée de tous les fichiers de police mentionnant son activité de prostitution, y compris celui des personnes se prostituant.
3 Pour le surplus, les demandes de renseignements, de rectification ou de radiation sont traitées conformément aux dispositions de la loi [genevoise] sur les renseignements et les dossiers de police et la délivrance des certificats de bonne vie et moeurs, du 29 septembre 1977. (...)
CHAPITRE IV: PROSTITUTION DE SALON
(...)
Article 9: Obligation d'annonce
1 Toute personne physique qui, en tant que locataire, sous-locataire, usufruitière, propriétaire ou copropriétaire, exploite un salon et met à disposition de tiers des locaux affectés à l'exercice de la prostitution doit s'annoncer, préalablement et par écrit, aux autorités compétentes en indiquant le nombre et l'identité des personnes qui y exercent la prostitution. (...)
3 La personne qui effectue l'annonce est considérée comme personne responsable au sens de la présente loi.
Article 10: Conditions personnelles
La personne responsable d'un salon doit remplir les conditions personnelles suivantes: (...)
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d) être au bénéfice de l'accord écrit du propriétaire ou des copropriétaires de l'immeuble pour y exploiter un salon; (...)
Article 11: Communications à l'autorité
La personne responsable d'un salon est tenue de communiquer immédiatement aux autorités compétentes tout changement des personnes exerçant la prostitution et toute modification des conditions personnelles intervenues depuis l'annonce initiale.
Article 12: Obligations du responsable
La personne responsable d'un salon a notamment pour obligations: (...)
a) de tenir constamment à jour un registre mentionnant l'identité, le domicile, le type d'autorisation de séjour et/ou de travail et sa validité, les dates d'arrivée et de départ des personnes exerçant la prostitution dans le salon, ainsi que les prestations qui leur sont fournies et les montants demandés en contrepartie; (...)
c) d'y empêcher toute atteinte à l'ordre public, notamment à la tranquillité, à la santé, à la salubrité et à la sécurité publiques. (...)
Article 13: Contrôles
1 Les autorités compétentes peuvent en tout temps, dans le cadre de leurs attributions respectives et au besoin par la contrainte, procéder au contrôle des salons et de l'identité des personnes qui s'y trouvent.
2 Ce droit d'inspection s'étend aux appartements ou aux locaux particuliers des personnes qui desservent ces salons ou qui y logent, lorsque ceux-ci sont à proximité du salon.
Article 14: Mesures et sanctions administratives
(Cette disposition instaure des mesures et sanctions administratives en cas de violation, notamment, des art. 9, 10, 11 et 12).
CHAPITRE V: PROSTITUTION D'ESCORTE
(...)
Article 16: Obligation d'annonce
1 Toute personne physique qui exploite une agence d'escorte est tenue de s'annoncer, préalablement et par écrit, aux autorités compétentes en indiquant le nombre et l'identité des personnes qui exercent la prostitution par son intermédiaire. (...)
Article 17: Conditions personnelles
La personne responsable d'une agence d'escorte doit remplir les conditions personnelles suivantes: (...)
d) être au bénéfice de l'accord écrit du propriétaire ou des copropriétaires de l'immeuble pour exploiter une agence d'escorte; l'autorité compétente peut toutefois renoncer à cette condition, notamment lorsque l'exploitant n'utilise pas de locaux professionnels ou commerciaux; (...)
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Article 18: Communication à l'autorité
La personne responsable d'une agence d'escorte est tenue de communiquer immédiatement aux autorités compétentes tout changement des personnes exerçant la prostitution par son intermédiaire et toute modification des conditions personnelles intervenues depuis l'annonce initiale.
Article 19: Obligations du responsable
La personne responsable de l'agence d'escorte a notamment pour obligations:
a) de tenir constamment à jour un registre mentionnant l'identité, le domicile, le type d'autorisation de séjour et/ou de travail et sa validité, et les dates d'arrivée et de départ des personnes exerçant la prostitution par l'intermédiaire de l'agence, ainsi que les prestations qui leur sont fournies et les montants demandés en contrepartie; (...)
c) d'empêcher toute atteinte à l'ordre public, notamment à la tranquillité, à la santé, à la salubrité et à la sécurité publiques. (...)
Article 20: Contrôles
Les autorités compétentes peuvent en tout temps, dans le cadre de leurs attributions respectives et au besoin par la contrainte, procéder au contrôle des agences d'escorte et de l'identité des personnes qui s'y trouvent. (...)
Article 21: Mesures et sanctions administratives
(Cette disposition instaure des mesures et sanctions administratives en cas de violation, notamment, des art. 16, 17, 18 et 19). (...)
Un règlement d'exécution de la loi sur la prostitution [RProst/GE; RSG I 2 49.01], adopté le 14 avril 2010 par le Conseil d'Etat genevois, complète la LProst/GE.
B. Dame X., qui dit également se prostituer, exploite le salon érotique "A." à Genève et fournit des services et conseils personnels érotiques. Son mari, X., exploite une agence d'escorte à Genève.
Le 16 mars 2010, Dame X. et X. ont déposé un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral à l'encontre de la loi genevoise sur la prostitution du 17 décembre 2009. Ils concluent, avec suite de frais et dépens, à l'annulation des art. 5, 9 al. 1, 10 let . c et d, 11, 12 let. a et c, 13, 16 al. 1, 17 let. c et d, 18, 19 let. a et c, et 20 LProst/GE. Ils se plaignent en particulier d'une violation des art. 8, 13, 27 et 49 Cst., ainsi que de l'art. 8 CEDH et des art. 13 et 39 de la Constitution de la République et canton de Genève du 24 mai 1847 (Cst./GE; RSG A 2 00). (...)
Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours en matière de droit public, dans la mesure où il était recevable, et a annulé les art. 10 let. d et 17 let. d de la loi querellée.
Extrait des considérants:
3. A l'appui de leur recours dirigé contre diverses dispositions de la LProst/GE, les recourants invoquent en particulier la liberté économique, la protection de la sphère privée, la primauté du droit fédéral et les principes de l'égalité de traitement et de non-discrimination.
3.1 Invocable tant par les personnes physiques que morales, la liberté économique (art. 27 Cst.) protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 135 I 130 consid. 4.2 p. 135; ATF 128 I 19 consid. 4c/aa p. 29). Elle protège les personnes exerçant la prostitution ainsi que l'exploitation d'établissements permettant son exercice (ATF 111 II 295 consid. 2d p. 300; ATF 101 Ia 473 consid. 2b p. 476; arrêts 4A_429/2010 du 6 octobre 2010 consid. 2.2; 2C_82/2010 du 6 mai 2010 consid. 4). Seuls peuvent être réprimés certains excès et manifestations secondaires de cette activité lucrative (en particulier: art. 199 CP; cf. art. 1 let. c LProst/GE); partant, une loi ne saurait poursuivre le but d'éradiquer ou de limiter la prostitution en tant que telle (cf. ATF 101 Ia 473 consid. 2a p. 475 s.; arrêt 2C_905/2008 du 10 février 2009 consid. 7.3; ANTONELLA CEREGHETTI ZWAHLEN, Prostitution: quelle réglementation, Plaidoyer 2002 4 p. 56 ss, 60).
3.2 Le droit au respect de la sphère privée au sens de l'art. 13 al. 1 Cst., dont le champ d'application matériel concorde largement avec celui de l'art. 8 CEDH, garantit notamment le droit de toute personne au respect de sa vie privée et familiale; il protège l'identité, les relations sociales et les comportements intimes de chaque personne physique, l'honneur et la réputation (ATF 135 I 198 consid. 3.1 p. 207; ATF 126 II 377 consid. 7 p. 395). L'art. 13 al. 2 Cst. détaille l'une des composantes de ce droit (ATF 128 II 259 consid. 3.2 p. 268); il prémunit l'individu contre l'emploi abusif de données qui le concernent et qui ne sont pas accessibles au public, en particulier les informations relatives à des procédures judiciaires qui porteraient atteinte à sa considération sociale (ATF 135 I 198 consid. 3.1 p. 207).
La collecte, la conservation et le traitement de données signalétiques par la police affectent la sphère privée au sens de l'art. 13 al. 2 Cst. (ATF 136 I 87 consid. 5.1 p. 101; ATF 128 II 259 consid. 3.2 p. 268; arrêt 1D_17/2007 du 2 juillet 2008 consid. 4.1). En principe, l'atteinte persiste à tout le moins aussi longtemps que les données signalétiques demeurent accessibles aux agents de police ou qu'elles
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peuvent être prises en considération, voire transmises, dans le cadre de demandes de renseignements présentées par des autorités (ATF 126 I 7 consid. 2a p. 10). Une atteinte à l'art. 13 al. 2 Cst. existe a fortiori en cas d'établissement et de traitement de fichiers de police concernant des données personnelles des prostitué(e)s et des tenanciers de salons et d'agences (cf. ATF 128 II 259 consid. 3.2 p. 268; ATF 120 Ia 147 consid. 2a p. 149 s.; arrêt 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 7.2; arrêts de la CourEDH 30562/04 S. et Marper contre Royaume-Uni [GC] du 4 décembre 2008, destiné à la publication, §§ 67 et 84 ss; Amann contre Suisse [GC] du 16 février 2000, Recueil CourEDH 2000-II p. 201 § 69; cf. BRIGITTE HÜRLIMANN, Prostitution - ihre Regelung im schweizerischen Recht und die Frage der Sittenwidrigkeit, 2004, p. 45).Les garanties de l'art. 13 al. 2 Cst. sont concrétisées par la législation applicable en matière de protection des données (cf. ATF 131 II 413 consid. 2.6 p. 419; art. 1 de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données [LPD; RS 235.1]; FF 2002 1915, 1962), étant précisé que l'art. 37 al. 1 LPD établit un standard minimum de protection des données que les cantons et les communes doivent garantir lorsqu'ils exécutent le droit fédéral (cf. PHILIPPE MEIER, Protection des données, 2011, p. 145 n. 273). La législation fédérale et cantonale topique sauvegarde le respect des données dites "sensibles" avec un soin particulier. Il s'agit notamment des données personnelles sur la santé ou la sphère intime, tout comme les profils de personnalité (art. 3 let. c et d LPD; art. 4 let. b et c de la loi genevoise du 5 octobre 2001 sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles [LIPAD/GE; RSG A 2 08]; cf. ATF 129 I 232 consid. 4.3.1. p. 245 s.; FF 2002 1915, 1953). Les contours du traitement de telles données doivent être délimités clairement par une loi au sens formel (art. 17 al. 2 LPD et 35 al. 1 LIPAD/GE; Message du 23 mars 1988 concernant la protection des données, FF 1988 II 421, 474 ad art. 14).
L'exigence d'une base légale découle aussi de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme en relation avec l'art. 8 CEDH. Par rapport aux conditions et modalités de traitement des informations personnelles, la Cour a retenu qu'il était "essentiel de fixer des règles claires et détaillées régissant la portée et l'application des mesures et imposant un minimum d'exigences concernant, notamment, la durée, le stockage, l'utilisation, l'accès des tiers, les procédures destinées à préserver l'intégrité et la confidentialité des
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données et les procédures de destruction de celles-ci" (arrêt de la CourEDH S. et Marper contre Royaume-Uni [GC], précité, §§ 98 s.). Des garanties appropriées doivent ainsi empêcher les abus dans le traitement des données à caractère personnel, en particulier en cas de traitement automatique et a fortiori quand ces données sont utilisées à des fins policières (arrêt de la CourEDH 22115/06 M.B. contre France du 17 février 2009, § 53).
3.3 Le respect du domicile garanti par l'art. 13 al. 1 Cst. tend, entre autres aspects, à protéger les individus contre les ingérences arbitraires que peut commettre l'État lors de perquisitions ou de visites domiciliaires ou lors d'autres mesures de surveillance du domicile. Peuvent, dans certaines circonstances, bénéficier de la protection du domicile des locaux dédiés à un usage professionnel ou commercial, auquel cas l'intérêt public permet de justifier plus facilement une ingérence des autorités, par exemple pour contrôler le respect de certaines normes sanitaires ou de droit du travail. Enfin, la protection de l'art. 13 al. 1 Cst. ne dépend pas du rapport juridique qui fonde l'existence d'un domicile; il est indifférent de savoir si celui qui invoque le droit à la protection du domicile est propriétaire ou seulement locataire de l'espace qu'il occupe (arrêts 2P.272/2006 du 24 mai 2007 consid. 5.1; 1P.134/2000 du 29 septembre 2000 consid. 5a).
3.4 L'art. 49 al. 1 Cst. consacre le principe de la primauté du droit fédéral. Celui-ci fait obstacle à l'adoption ou à l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive (ATF 135 I 106 consid. 2.1 p. 108). Cependant, même si la législation fédérale est considérée comme exhaustive dans un domaine donné, une loi cantonale peut subsister dans le même domaine si elle poursuit un autre but que celui recherché par le droit fédéral. Par ailleurs, dans la mesure où une loi cantonale renforce l'efficacité de la réglementation fédérale, le principe de la force dérogatoire n'est pas violé (ATF 133 I 110 consid. 4.1 p. 116). En outre, même si, en raison du caractère exhaustif de la législation fédérale, le canton ne peut plus légiférer dans une matière, il n'est pas toujours privé de toute possibilité d'action. Ce n'est que lorsque la législation fédérale exclut toute réglementation dans un domaine particulier que
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le canton perd toute compétence pour adopter des dispositions complétives, quand bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient même en accord avec celui-ci (ATF 133 I 110 consid. 4.1 p. 116, confirmé par les arrêts 2C_659/2009 du 24 juillet 2010 consid. 6.3 et 2C_312/2009 du 5 octobre 2009 consid. 4.1).
3.5 Un arrêté de portée générale viole le principe de l'égalité dans la loi garantie par l'art. 8 Cst. lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 136 II 120 consid. 3.3.2 p. 127; ATF 130 V 18 consid. 5.2 p. 31). La question de savoir s'il existe un motif raisonnable pour une distinction peut recevoir des réponses différentes suivant les époques et les idées dominantes. Le législateur dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de ces principes (ATF 136 I 1 consid. 4.1 p. 5 s.; ATF 127 I 185 consid. 5 p. 192).
3.6 Conformément à l'art. 36 Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit reposer sur une base légale qui doit être de rang législatif en cas de restriction grave (al. 1); elle doit en outre être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (al. 2) et, selon le principe de la proportionnalité, se limiter à ce qui est nécessaire et adéquat à la réalisation des buts d'intérêt public poursuivis (al. 3), sans violer l'essence du droit en question (al. 4).
Sous l'angle de l'intérêt public, et en rapport avec l'exercice de la prostitution, sont autorisées les mesures de police ou de politique sociale, de même que les mesures dictées par la réalisation d'autres intérêts publics, à l'exclusion notamment des mesures de politique économique (ATF 131 I 223 consid. 4.2 p. 231 s.; arrêts 2C_147/2009 du 4 mai 2009 consid. 6.2; 2C_357/2008 du 25 août 2008 consid. 4.1).
Pour être conforme au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.), une restriction d'un droit fondamental doit être apte à atteindre le but visé, lequel ne peut pas être obtenu par une mesure moins incisive; il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le
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résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 136 I 197 consid. 4.4.4 p. 205; ATF 134 I 214 consid. 5.7 p. 218).
3.7 Lorsqu'un état de fait appréhendé par un acte étatique tombe simultanément dans la sphère de protection de plusieurs droits fondamentaux, il y a concours ("echte Grundrechtskonkurrenz"), pour autant que les droits concernés ne se trouvent pas dans un rapport de subsidiarité ni de spécialité les uns envers les autres, auquel cas il y a concours improprement dit ("unechte Grundrechtskonkurrenz") (cf. notamment: KLEY/VOGT, Das Problem der Grundrechtskonkurrenzen, ius.full, 2008 p. 132 ss, 134 et 137 ss; JÖRG PAUL MÜLLER, Allgemeine Bemerkungen zu den Grundrechten, in Droit constitutionnel suisse, Thürer/Aubert/Müller [éd.], 2001, p. 630 s.).
En cas de concours des droits fondamentaux au sens propre, doctrine et jurisprudence récentes admettent un examen cumulatif des différents griefs portant sur un même état de fait, ce qui n'empêche toutefois pas cet examen de se dérouler autour de la liberté considérée comme la plus centrale pour la solution du cas. Ce cumul s'explique notamment en raison de l'absence de hiérarchie entre les droits fondamentaux ancrés dans la Constitution fédérale, ainsi que de leurs champs de protection distincts ou complémentaires (cf. AUER/MALINVERNI/HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, 2e éd. 2006, p. 123 s.; MICHEL HOTTELIER, Grundrechtskonkurrenzen und Grundrechtskollisionen, in Handbuch der Grundrechte, Merten/Papier [éd.], vol. VII/2, Heidelberg 2007/09, p. 121 ss, 132 s. n. 27 s.; cf., par exemple: ATF 132 I 256; ATF 128 I 295). Devant le Tribunal fédéral, la possibilité de procéder à un examen cumulatif des griefs demeure toutefois conditionnée à l'exigence que, à peine d'irrecevabilité, le recourant motive suffisamment en quoi les droits fondamentaux dont il se prévaut sont applicables et seraient violés (cf. art. 106 al. 2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.2 p. 254).
4. Les art. 10 let. d et 17 let. d LProst/GE soumettent le droit du responsable d'exploiter un salon ou une agence d'escorte à la preuve qu'il se trouve au bénéfice de l'accord écrit du propriétaire de l'immeuble destiné à abriter ce commerce. D'après les recourants, cette obligation représente une atteinte à la liberté économique qui ne se justifie par aucun intérêt public et est disproportionnée; en outre, elle viole la primauté du droit fédéral.
4.1 En tant qu'elles font dépendre l'autorisation d'exploiter un établissement de l'accord des propriétaires d'immeubles et que le
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non-respect de cette obligation peut être suivi de mesures et de sanctions administratives, y compris d'amendes (art. 14, 21 et 25 LProst/GE), les dispositions querellées portent atteinte à la liberté économique (art. 27 Cst.) des tenanciers de salons et d'agences.
4.2 Sous l'angle du principe de la proportionnalité, force est de constater que les autorités administratives cantonales disposent d'un arsenal législatif suffisant, en particulier la loi genevoise du 25 janvier 1996 sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (...) (cf. art. 7 et 44 LDTR/GE; RSG L 5 20), pour sanctionner les réaffectations commerciales de logements d'habitation. Il n'est donc pas nécessaire de confier indirectement à des particuliers la tâche (d'ordre public) d'empêcher de telles réaffectations à travers leur refus, notamment par conviction morale, de louer des locaux à des personnes désireuses d'y ouvrir un salon ou une agence d'escorte. La possibilité pour l'autorité compétente de renoncer à l'accord du propriétaire concernant certaines agences d'escorte (art. 17 let. d LProst/GE) ne modifie en rien ce constat de principe. En tant que l'obligation d'accord écrit cherche à protéger les propriétaires contre les sanctions et mesures administratives susceptibles de découler d'une réaffectation d'un local loué, la LDTR/GE offre assez de moyens de défense et d'intervention.
Le propriétaire dispose pour sa part de moyens de droit privé. Ainsi, l'art. 257f CO autorise le bailleur à notifier un congé extraordinaire du bail à loyer dans tous les cas où le locataire use de la chose en violation des stipulations du contrat, y compris s'il la transforme en salon de prostitution (ATF 132 III 109 consid. 5 p. 113 s.; arrêt 4A_429/2010 du 6 octobre 2010 consid. 2.2). Il peut, en outre, notifier un congé ordinaire, pour autant que celui-ci ne contrevienne pas aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 CO; cf. arrêt 4A_631/2010 du 4 février 2011 consid. 2.6).
Par ailleurs, cette obligation d'accord peut, tel que cela avait été débattu durant les travaux préparatoires, conduire à des effets inverses à ceux visés par la loi. Certaines personnes se prostituant risquent en effet, pour ne pas se retrouver à la rue et pour continuer à exercer leur profession, de faire appel à un proxénète afin qu'il mette des locaux à leur disposition (cf. mutatis mutandis, VALENTIN LANDMANN, Halbwelt als Markt und Quartierverträglichkeit - wie beeinflusst man das Rotlichtmilieu sinnvoll-, in Rotlichtmilieu und Quartierverträglichkeit, 2008, p. 31 ss, 35). Il pourrait aussi arriver qu'un
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propriétaire-bailleur peu scrupuleux conditionne son accord écrit au paiement de loyers usuriers.En outre, il ne se justifie pas de transposer au domaine de la prostitution l'obligation d'obtenir l'accord du propriétaire, comme le prévoit l'art. 5 al. 1 let. g de la loi genevoise du 17 décembre 1987 sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement (LRDBH/GE; RSG I 2 21). De façon générale et tout en laissant ouverte la question de savoir si l'obligation instaurée par la LRDBH/GE est elle-même conforme à la liberté économique, la différence notable de nature qui existe entre les locaux utilisés à des fins de prostitution et les établissements publics débitant mets et boissons rend toute comparaison vide de sens (cf. arrêt 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 3.2). Etant donné, notamment, la perception souvent négative que le public entretient au sujet de la prostitution (cf. ATF 101 Ia 473 consid. 2b p. 476), ainsi que la vulnérabilité des prostitué(e)s, que la LProst/GE cherche précisément à atténuer, cette obligation risque d'empêcher, de facto, l'exploitation d'un salon ou d'une agence et de précariser la situation des prostitué(e)s en les renvoyant dans la rue ou, comme déjà indiqué, vers des proxénètes ou bailleurs usuriers.
4.3 Il découle de ce qui précède que l'application des art. 10 let. d et 17 let. d LProst/GE constitue une atteinte disproportionnée au libre exercice de la prostitution qui serait entravée en tant qu'activité commerciale particulière. De plus, ces dispositions ne se prêtent pas à une interprétation conforme à la Constitution, puisque l'accord écrit du propriétaire est obligatoire et que déjà la simple information préalable du propriétaire au sujet de l'activité envisagée est susceptible de conduire au refus de conclure un contrat de bail à loyer. Partant, ces deux dispositions doivent être annulées. Il est ainsi inutile de les examiner sous l'angle de la primauté du droit fédéral (art. 49 Cst.).
5. Les art. 12 let. a in fine et 19 let. a in fine LProst/GE obligent le responsable d'un salon ou d'une agence d'escorte de tenir à jour un registre mentionnant les prestations fournies aux personnes qui exercent la prostitution et les montants demandés en contrepartie. Selon les recourants, cette obligation contredit l'art. 19 CO sous l'angle de la primauté du droit fédéral (consid. 5.1) et porte atteinte à la liberté contractuelle (consid. 5.2).
5.1 S'agissant de l'autonomie contractuelle ancrée à l'art. 19 CO, ce grief doit être écarté puisqu'il est constant que les mesures
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cantonales poursuivent un intérêt public légitime, au sens de l'art. 6 CC, en particulier la protection des prostitué(e)s contre l'exploitation et l'usure, et que le contrôle postérieur des accords qui est effectué ne nuit pas à l'autonomie des cocontractants, laquelle doit, en droit privé également, s'exercer dans les limites de la loi (cf. art. 19 ss CO).
5.2 S'agissant du grief tiré de la violation de la liberté contractuelle, il est douteux qu'il satisfasse aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF; quoi qu'il en soit, il doit être déclaré mal fondé. En effet, l'obligation légale en cause ne revient à soumettre le contrat passé entre le salon ou l'agence d'escorte et la personne exerçant la prostitution ni à un contrôle préventif ni à un contrôle détaillé entravant de façon disproportionnée la liberté économique des cocontractants, qui englobe la liberté contractuelle (ATF 131 I 333 consid. 4 p. 339; ATF 102 Ia 533 consid. 10a p. 542).
5.3 Il faut ajouter que, face au risque d'un retour du proxénétisme au vu du nombre croissant de personnes se prostituant à Genève, et face au constat, exprimé dans les travaux préparatoires, d'une inflation des loyers journaliers pour certains locaux de prostitution, les art. 12 let. a in fine et 19 let. a in fine LProst/GE poursuivent le but d'intérêt public d'améliorer les possibilités de contrôle par les autorités des conditions d'exploitation des salons et des agences d'escorte. L'objectif est ainsi de décourager et de sanctionner les cas d'exploitation ou d'usure aux dépens des prostitué(e)s (cf. art. 1 let. a et c LProst/GE). Il sied de rappeler qu'une clause contractuelle qui serait susceptible d'être interprétée comme un rapport de travail entre une personne se prostituant et un responsable de salon ou d'agence d'escorte serait punissable en application de l'art. 195 al. 3 CP (cf. ATF 129 IV 71 consid. 1.4 p. 77; arrêt 6S.17/2004 du 22 juillet 2004 consid. 3.3.1, in RtiD 2005 I 147). De plus, l'obligation prévue aux art. 12 let. a et 19 let. a LProst/GE est non seulement apte à contribuer à la réalisation des objectifs précités, dès lors que le registre des prestations peut fournir des indices d'usure ou d'exploitation des prostitué(e)s. En outre, on ne voit pas quelle mesure moins incisive permettrait aux autorités de vérifier les conditions contractuelles essentielles à la prostitution dans ces établissements. En tant qu'il concerne les art. 12 let. a et 19 let. a LProst/GE, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
6. Aux termes des art. 12 let. c et 19 let. c LProst/GE, le responsable d'un salon ou d'une agence est tenu "d'y empêcher toute atteinte à l'ordre public, notamment à la tranquillité, à la santé, à la salubrité
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et à la sécurité publiques". Les recourants font valoir que cette obligation empiète sur le droit privé du voisinage et viole ainsi la primauté du droit fédéral (consid. 6.1). En outre, cette obligation serait irréalisable et constituerait une entrave disproportionnée à leur liberté économique (consid. 6.2).
6.1 Le grief selon lequel l'obligation faite aux tenanciers des établissements de prostitution d'empêcher toute atteinte à l'ordre public, en particulier à la tranquillité publique (art. 12 let. c et 19 let. c LProst/GE), empièterait sur le droit du voisinage découlant du Code civil suisse (cf. art. 684 CC), est infondé. Ayant fait usage de la réserve de droit public cantonal prévue à l'art. 6 al. 1 CC, la LProst/GE entend en effet protéger la tranquillité et l'ordre publics en général, soit un intérêt différent (cf. arrêt 1P.137/2003 du 20 juin 2003 consid. 3.2) de celui constitué par les intérêts particuliers des voisins, lesquels disposent, en vertu du droit privé fédéral, de moyens de défense propres à faire cesser les désagréments excessifs. Au demeurant, on comprend mal que des dispositions de droit public cantonal visant à maintenir la sécurité et la tranquillité publiques puissent empiéter sur le droit fédéral en matière de voisinage.
6.2 Pour ce qui est du grief de la violation de la liberté économique, il ressort des travaux préparatoires que l'obligation en cause vise, d'une part, à mieux protéger la santé des personnes exerçant la prostitution et de leurs clients et, d'autre part, à limiter au maximum les nuisances dues à l'exploitation des salons. A teneur de son libellé même, elle répond à un intérêt public prépondérant, à savoir le maintien de l'ordre public.
S'agissant de la proportionnalité, il convient d'interpréter le terme "empêcher" des art. 12 let. c et 19 let. c LProst/GE à l'aune de la maxime qu'à l'impossible nul n'est ni ne peut être tenu (cf. ATF 130 IV 121 consid. 1.8.2 p. 127 s.; ATF 99 IV 36 consid. 2c p. 40). Les dispositions susnommées doivent s'appliquer de manière à ne pas pénaliser le tenancier d'un salon ou d'une agence d'escorte pour des faits échappant à tout contrôle de sa part. Les mémoires des intimés et les travaux préparatoires démontrent du reste que le législateur cantonal n'a, en adoptant la LProst/GE, pas voulu imposer d'obligations inexécutables aux tenanciers. Dans sa réponse, le Grand Conseil a ainsi concédé que l'obligation "s'appliquera rarement aux agences d'escorte", du fait que l'activité érotique a lieu hors de leurs locaux, et a précisé que les exploitants de salons devront prévenir les atteintes "dans la mesure où cela dépend d'eux". En cas d'impossibilité
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d'exercer un contrôle décisif sur une situation à risque, l'obligation mise à charge des tenanciers se transformera ainsi en une obligation de moyens exigeant d'eux qu'ils déploient des efforts soutenus et sérieux. Il leur appartiendra de choisir les mesures adéquates visant à prévenir ou à faire cesser toute atteinte à l'ordre public, de même que de sensibiliser, d'aider ou d'obliger contractuellement une personne se prostituant et ses clients à prendre les dispositions de sécurité idoines, notamment pour éviter la diffusion d'infections sexuellement transmissibles (cf. arrêts 2C_627/2009 du 23 février 2010 consid. 2.4.2 s.; 2C_42/2009 du 27 mars 2009 consid. 4.3.3).Les articles querellés étant partant accessibles à une interprétation conforme à la Constitution, ils ne violent pas la liberté économique dans la mesure où ils exigent que les responsables d'un salon ou d'une agence d'escorte s'organisent de manière à ce que la législation et l'ordre public soient respectés (cf. arrêts 2C_905/2008 du 10 février 2009 consid. 5.3.2; 2C_357/2008 du 25 août 2008 consid. 3.2). Par conséquent, le grief doit être écarté.
7. En vertu des art. 13 et 20 LProst/GE, "(l)es autorités compétentes peuvent en tout temps, dans le cadre de leurs attributions respectives et au besoin par la contrainte, procéder au contrôle des salons [respectivement des agences d'escorte] et de l'identité des personnes qui s'y trouvent". Les art. 2 al. 1 let. a, 4 al. 1 let. a et al. 3, 11 et 14 RProst/GE précisent que ces contrôles peuvent être effectués par la police cantonale, par les services en charge de l'hygiène, notamment la direction générale de la santé, ainsi que par le médecin cantonal.
7.1 Les recourants estiment que le droit des autorités d'effectuer des contrôles inopinés dans les locaux des salons et agences d'escorte porte atteinte à l'inviolabilité du domicile garantie par les art. 13 al. 1 Cst., 13 et 30 à 33 Cst./GE (consid. 7.2). Pouvant, contrairement à ce qu'affirme le Conseil d'Etat, virtuellement se trouver dans la situation de clients d'un établissement érotique et donc se prévaloir d'un tel argument, les recourants se plaignent en outre d'une violation de la sphère intime des clients à la recherche d'anonymat (art. 13 al. 1 Cst.), compte tenu de la possibilité qui est donnée à la police de pénétrer dans les salons et agences pour y contrôler à tout moment l'identité des personnes qui s'y trouvent (consid. 7.3). Par ailleurs, les recourants invoquent une "atteinte, par ricochet, et indirectement à la liberté économique de la personne qui exploite le salon et l'agence d'escorte", dès lors que le risque d'être soumise à
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des contrôles d'identité inciterait la clientèle à déserter ces établissements et conduirait à une perte du chiffre d'affaires (consid. 7.4). Enfin, ils soutiennent que les contrôles entrent en collision, de sorte à violer l'art. 49 Cst., avec ceux qui sont autorisés par la législation fédérale exhaustive sur les étrangers et le travail au noir (consid. 7.5).
7.2.1 Contrairement à ce qu'affirment les recourants, l'art. 13 Cst./GE garantissant l'inviolabilité du domicile n'offre pas, dans la situation envisagée, une protection plus étendue que l'art. 13 al. 1 Cst. s'agissant du droit des autorités de pénétrer dans des domiciles privés pour y effectuer des contrôles d'identité ou autres. L'art. 39 Cst./GE confie au législateur cantonal le soin de réglementer ce qui est relatif aux visites domiciliaires nécessaires à la sauvegarde de la santé et de la salubrité publiques (let. a) et au contrôle d'identité (let. d). C'est ce que régissent la LProst/GE et son règlement d'application. Quant aux art. 30 à 33 Cst./GE, qui relevaient du domaine pénal et prescrivaient des conditions de temps et de forme non pertinentes pour le cas d'espèce, ils ont été abrogés avec effet au 1er janvier 2011 dans la perspective de l'entrée en vigueur du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP; RS 312.0; cf. la loi constitutionnelle du 23 janvier 2009 modifiant la Constitution de la République et canton de Genève[Adaptation au code de procédure pénale suisse; n° 10327], adoptée lors des votations cantonales du 17 mai 2009).
Il est par ailleurs spécieux de soutenir, comme le font les recourants, que seule la loi genevoise du 26 octobre 1957 sur la police (LPol/GE; RSG F 1 05) serait à même de contenir des normes relatives aux contrôles d'identité, sachant que l'art. 39 Cst./GE se contente de désigner "la loi" au sens formel et que le législateur cantonal demeure souverain quant à l'ancrage des clauses autorisant des contrôles domiciliaires à des fins d'identification ou autres, en fonction de la nature et des spécificités du domaine réglementé (ATF 99 Ia 504 consid. 4b p. 512) et dans les limites des compétences cantonales. L'inviolabilité du domicile sera donc examinée au regard du seul droit fédéral (art. 13 Cst.).
7.2.2 Le contrôle inopiné dans les salons ou les agences d'escorte constitue une atteinte à la garantie du domicile. Le but de ces contrôles est circonscrit par les intérêts publics légitimes prévus à l'art. 1er LProst/GE, en particulier - s'agissant des contrôles policiers - par la vérification que les conditions d'exercice de la
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prostitution se déroulent conformément à la loi et à la liberté d'action des personnes qui se prostituent (let. a).
7.2.3 Telles que prévues dans la législation, ces mesures ne paraissent pas disproportionnées, compte tenu de l'importance des buts poursuivis et de la possibilité de les exercer conformément à la Constitution. La faculté qui est donnée aux autorités compétentes d'effectuer des visites domiciliaires à des fins de contrôle dans ces établissements accessibles au public ne peut être d'emblée considérée comme inutile ni inadéquate; lesdites mesures de police (cf. ATF 125 I 322 consid. 3a p. 326; arrêts 2C_268/2010 du 18 juin 2010 consid. 3.2; 2C_82/2010 du 6 mai 2010 consid. 6.2) doivent en effet permettre aux autorités d'intervenir rapidement pour protéger efficacement les employés, les prostitué(e)s et les clients, ainsi qu'endiguer les manifestations secondaires de la prostitution. Elles peuvent aussi porter sur la vérification des registres internes que les tenanciers des salons et agences doivent constituer au sujet des prostitué(e)s, conformément aux art. 12 let. a et 19 let. a LProst/GE (cf., s'agissant de la conformité de tels registres internes avec la Cst.: arrêt 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 7). Nonobstant les affirmations des recourants, des contrôles à titre préventif ne sont en outre pas prohibés en tant que tels (cf. arrêt 2C_1/2009 du 11 septembre 2009 consid. 4.4.1). Aussi, des visites non annoncées se justifient dans le but d'assurer une certaine efficacité à ces contrôles (cf. arrêt 2P.272/2006 du 24 mai 2007 consid. 5.5). Pour autant que, dans les circonstances d'espèce, les visites policières s'exercent dans un but concret et délimité, et respectent les exigences requises à l'accomplissement des tâches policières (cf. aussi consid. 7.3.3), les art. 13 et 20 LProst/GE constituent une atteinte admissible à la protection du domicile privé.
7.3 Les recourants font encore valoir que les contrôles d'identité que sont en droit d'effectuer les autorités compétentes violent la sphère privée (art. 13 al. 1 Cst.) des clients d'établissements érotiques.
7.3.1 Force est d'admettre que la formulation large des art. 13 al. 1 et 20 al. 1 LProst/GE permet d'étendre de tels contrôles aux clients d'établissements. Cela ressort également des travaux préparatoires.
7.3.2 A priori, ces vérifications se justifient en vue de garantir l'effectivité du travail d'encadrement et de surveillance des autorités sanitaires et de la police. De plus, lorsqu'elle contrôle les prostitué(e)s ou les responsables d'un salon ou d'une agence d'escorte, l'autorité
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compétente ne pourra pas toujours facilement distinguer les clients des prostitué(e)s et autres prestataires (par exemple les employés de bar) et aura parfois aussi intérêt à vérifier l'identité de certains "clients" afin de prévenir que les prostitué(e)s ne soient exploitées par des proxénètes ou que l'établissement en question ne soit la scène d'autres actes contraires au droit, notamment la consommation ou le trafic de stupéfiants, ainsi que l'hébergement de personnes sans titre de séjour.
7.3.3 La formulation vague et permissive des clauses de la LProst/GE, qui autorise de tels contrôles d'identité, peut toutefois laisser penser que des vérifications injustifiées ou disproportionnées puissent être cautionnées par la loi. Dans le cadre du présent contrôle normatif abstrait, l'on peut néanmoins limiter ce risque à la faveur d'une interprétation conforme à la Constitution. A cet égard, il sied de lire les dispositions querellées de la LProst/GE à l'aune de la jurisprudence que le Tribunal fédéral a rendue en matière de contrôles de police (cf. ATF 136 I 87; ATF 109 Ia 146). Celle-ci prévoit que les autorités compétentes doivent s'assurer que les contrôles d'identité que chacune d'entre elles peut devoir effectuer dans des établissements érotiques, et en particulier sur les clients s'y trouvant, soient nécessaires à l'accomplissement des tâches policières. Si tel n'est pas le cas, il est d'emblée exclu qu'une mesure de contrôle puisse être considérée comme justifiée et proportionnée. Des circonstances spécifiques doivent déterminer les organes de la police à procéder aux contrôles d'identité, et ces contrôles ne peuvent pas survenir sans motif ou du seul fait qu'une personne fréquente un établissement érotique. Des contrôles peuvent se révéler nécessaires lorsque des personnes, lieux ou événements présentent des singularités, de sorte à commander une intervention de la police. Ils doivent être motivés ou justifiés par des raisons objectives, des circonstances particulières ou des soupçons spécifiques, notamment en cas de situation confuse, d'une infraction commise à proximité d'un établissement, de ressemblance avec une personne recherchée, ou de soupçons en rapport avec la commission d'une infraction; en revanche, il est exclu que les contrôles soient effectués sous couvert de simples prétextes, sans justification suffisante. En raison de la diversité des situations susceptibles de se présenter, une formulation plus précise composée d'exemples ne serait guère utile et ne conduirait pas à davantage de précision. En substance, le critère déterminant est celui de la nécessité du contrôle (cf. ATF 136 I 87 consid. 5.2 p. 101 s.).
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Pour le surplus, les fonctionnaires de police doivent faire preuve d'égards à l'endroit des personnes contrôlées, en provoquant chez elles le moins de gêne possible vis-à-vis du public environnant et en ne leur posant pas des questions indiscrètes superflues. Les mesures de contrôle ne doivent en aucun cas aller au-delà de ce qui est indispensable à la vérification d'identité; des indications verbales, dont il est aisé de confirmer sur place la véracité, suffisent lorsqu'une personne a omis de se munir d'un document de légitimation (ATF 109 Ia 146 consid. 4b p. 151). Enfin, les données des simples clients ne sauraient être conservées sans motif spécifique prévu par la loi.
7.3.4 Dans ces limites, les art. 13 et 20 LProst/GE se prêtent à une interprétation conforme à la Constitution. Le grief soulevé par les recourants au titre du droit à la protection de la sphère intime des clients des établissements érotiques doit donc être écarté.
7.4 Les recourants se plaignent aussi d'une violation de la liberté économique des tenanciers d'établissements érotiques du fait des contrôles d'identité qui peuvent être opérés sur leurs clients. Pour autant que ce grief succinctement motivé soit recevable (art. 106 al. 2 LTF), la Cour de céans relève que le siège de la matière se situe davantage au niveau du droit à la protection de la sphère privée des clients ainsi contrôlés qu'à celui de la liberté économique des tenanciers que la mesure de contrôle relative aux clients n'affecte, du propre aveu des recourants, que de manière indirecte. L'on peut donc se dispenser d'examiner ce grief tiré de l'art. 27 Cst.
7.5 Contrairement à ce qu'affirment les recourants, il n'existe pas d'incompatibilité de principe des contrôles effectués dans les salons et agences (art. 13 et 20 LProst/GE) avec le droit fédéral des étrangers ni avec les art. 6 ss de la loi fédérale du 17 juin 2005 concernant des mesures en matière de lutte contre le travail au noir (Loi sur le travail au noir, LTN; RS 822.41), lesquels prévoient également des contrôles en vue du respect du droit des assurances sociales, des étrangers et de l'imposition à la source (cf. art. 6 LTN). En effet, les buts d'intérêt public poursuivis par la LProst/GE (cf. art. 1) s'étendent au contrôle du respect de l'ensemble de la législation, des mesures d'hygiène et des modalités d'exercice de la prostitution; ils ne se limitent donc pas au champ des lois fédérales topiques, et ils élargissent les possibilités de contrôle en vue de faire respecter de plus amples objectifs. Si certaines mesures de contrôle se recoupent avec celles prévues par le droit fédéral, les recourants ne démontrent pas qu'elles en contrediraient le sens ou la lettre ou que le législateur fédéral aurait voulu
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exclure toute réglementation cantonale. Au contraire, ces dispositions cantonales renforcent l'efficacité du droit fédéral dans le domaine particulier de la prostitution de salon et d'escorte dans la mesure, notamment, où elles permettent aux autorités de police de jouer un rôle actif dans la lutte contre le travail au noir. Si la LProst/GE leur confère ainsi, dans ce domaine particulier, des compétences de contrôle similaires à celles de l'office de contrôle du travail cantonal, elle n'entrave pas la mise en oeuvre de l'obligation de coordination ni la communication des informations voulues par le droit fédéral (cf. art. 11 LTN).Certes, les modalités d'exécution que l'art. 7 LTN impose aux contrôles entrant dans son champ d'action, réglementent plus étroitement que ne le fait la LProst/GE les possibilités et l'exécution de ces derniers, notamment par rapport aux heures des inspections et aux exigences de tenue d'un procès-verbal. Ceci ne conduit cependant pas à rendre inconstitutionnels les art. 13 et 20 LProst/GE. En effet, une interprétation conforme au droit supérieur est possible, pour autant que, à chaque fois qu'ils sont effectués en application tant de la LProst/GE que de la LTN, lesdits contrôles respectent les modalités prévues par le droit fédéral. Au vu de ce qui précède, les dispositions querellées de la LProst/GE ne violent pas le principe de la primauté du droit fédéral.
8. A teneur de l'art. 5 LProst/GE, la personne qui cesse toute activité liée à la prostitution est tenue d'en informer les autorités compétentes (al. 1). Elle est alors soit considérée comme étant en fin d'activité, soit, en fonction de sa demande, radiée de tous les fichiers de police mentionnant son activité de prostitution, y compris celui des personnes se prostituant (al. 2). Selon l'art. 9 al. 1 LProst/GE, toute personne physique qui, en tant que locataire, sous-locataire, usufruitière, propriétaire ou copropriétaire, exploite un salon et met à disposition de tiers des locaux affectés à l'exercice de la prostitution doit s'annoncer, préalablement et par écrit, aux autorités compétentes en indiquant le nombre et l'identité des personnes qui y exercent la prostitution. Une obligation d'annonce aux termes similaires est mise à la charge des exploitants d'une agence d'escorte (art. 16 LProst/GE). En outre, les responsables de salon et d'agence d'escorte sont tenus de communiquer immédiatement aux autorités compétentes tout changement des personnes exerçant la prostitution et toute modification des conditions personnelles intervenues depuis l'annonce
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initiale (art. 11 et 18 LProst/GE). Enfin, lesdites personnes responsables ont pour obligation "de tenir constamment à jour un registre mentionnant l'identité, le domicile, le type d'autorisation de séjour et/ou de travail et sa validité, les dates d'arrivée et de départ des personnes exerçant la prostitution dans le salon (...)" (art. 12 let. a et 19 let. a LProst/GE).Les recourants perçoivent une violation du principe de la primauté du droit fédéral (art. 49 Cst.) dans l'obligation faite aux exploitants d'un salon ou d'une agence d'escorte de communiquer le nom des prostitué(e)s aux autorités, et par rapport au recensement de ces personnes dans un fichier de police (consid. 8.1). De surcroît, l'obligation d'annonce à charge des prostitué(e)s, au sens de l'art. 5 LProst/GE, serait dénuée d'intérêt public et disproportionnée, de sorte à violer le droit au respect de la sphère privée. Il en irait de même pour les art. 11 et 18 LProst/GE, qui obligent les responsables d'un salon ou d'une agence de communiquer tout changement des prostitué(e)s exerçant dans ou par l'intermédiaire de leur établissement (consid. 8.2). Ils affirment par ailleurs que ces dispositions violent la liberté économique (consid. 8.3). Se prévalant de l' art. 8 al. 1 et 2 Cst. , les recourants estiment aussi que l'obligation d'annonce et le recensement des personnes se prostituant viseraient de manière discriminatoire le métier de prostitué(e) au motif que d'autres métiers "proches" comme ceux des masseurs non érotiques ou des esthéticiens ne subiraient pas une telle contrainte. Les recourants paraissent également contester l'obligation faite aux responsables d'une agence d'escorte ou d'un salon érotique d'annoncer les prostitué(e)s aux autorités compétentes au motif que ces dispositions fonderaient une discrimination à raison de la situation sociale ou du mode de vie de ces personnes (consid. 8.4).
8.1 Par rapport à l'obligation de communiquer le nom des prostitué(e)s aux autorités et au recensement des prostitué(e)s, une motivation sur le terrain de l'art. 49 al. 1 Cst. fait entièrement défaut dans le recours. Il n'y a donc pas lieu d'entrer en matière (art. 106 al. 2 LTF).
8.2 Pour ce qui est du droit au respect de la sphère privée, les art. 5, 11 et 18 LProst/GE fondent l'obligation de divulguer l'identité des personnes se prostituant, ainsi que celle des tenanciers de salons ou d'agences d'escorte vis-à-vis de la brigade des moeurs de la police genevoise (cf. aussi l'art. 2 al. 2 RProst/GE).
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La mise en rapport de l'identité d'une personne avec des activités liées à la prostitution est constitutive d'une ingérence dans la sphère intime des personnes concernées (cf. arrêt 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 7.2). A teneur des travaux préparatoires, l'obligation querellée qui, s'agissant de l'annonce des personnes exerçant la prostitution, existait déjà sous l'empire de l'ancien Règlement du 14 juillet 1994 relatif à l'exercice de la prostitution (art. 3 al. 1 aRProst/GE; RSG I 2 49.04), poursuit des buts d'intérêt public qui coïncident avec les trois objectifs affichés à l'art. 1 LProst/GE: la lutte contre l'exploitation des personnes se prostituant (let. a), les mesures de prévention et de réorientation en leur faveur (let. b), de même qu'un contrôle et une réglementation efficaces de la prostitution (let. c). L'annonce effectuée par les salons et les agences d'escorte doit permettre aux autorités de connaître et d'enregistrer les établissements ainsi que leurs usagers, de sorte à en faciliter les contrôles et à en prévenir une expansion non surveillée (cf. arrêt 2P.333/2001 du 2 juillet 2002 consid. 4.3). L'obligation d'annonce des personnes se prostituant vise à mettre celles-ci en contact avec la brigade des moeurs qui les conseillera et les orientera si nécessaire vers des structures de soutien, et qui pourra prévenir et détecter plus facilement toute forme de proxénétisme et d'exploitation.
En tant que telle, l'obligation d'annonce imposée aux prostitué(e)s et aux tenanciers d'établissements n'est pas disproportionnée; ce d'autant que le législateur cantonal s'est abstenu de soumettre l'activité de ces entreprises au régime plus strict de l'autorisation préalable. La diversité des établissements de prostitution dont certains sont discrets ou dissimulés, justifie en tout état que les tenanciers s'annoncent spontanément pour que les autorités puissent les localiser ainsi que vérifier que l'exploitation de leurs établissements demeure conforme au droit.
Il en va de même s'agissant de l'annonce des prostitué(e)s. Seule l'existence d'un contact direct entre la police cantonale et les prostitué(e)s est susceptible de garantir que ces personnes aient connaissance des services de conseil prodigués par la police et qu'elles puissent en bénéficier librement. Compte tenu de la forte mobilité des prostitué(e)s et du risque de manipulation des registres tenus par les salons ou agences d'escorte (art. 12 let. a et 19 let. a LProst/GE), un contact direct est en outre indispensable pour que la police puisse s'assurer efficacement de la liberté d'action des prostitué(e)s, vérifier les conditions d'exercice du métier, et intervenir rapidement
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en cas de besoin. L'annonce des personnes qui s'adonnent occasionnellement à la prostitution est, quant à elle, nécessaire en raison de leur vulnérabilité souvent accrue due à leur inexpérience et à la possible absence d'affiliation aux associations d'entraide. Au vu de ce qui précède, les obligations d'annonce précitées ne violent donc pas l'art. 13 Cst.
8.3 Le recours mentionne la liberté économique de manière très sommaire. A supposer qu'une ingérence dans la liberté économique en sus d'une atteinte à la sphère privée puisse être admise, encore faut-il que les recourants expliquent en quoi les dispositions en cause y seraient contraires. Or, ceux-ci développent la (quasi-)totalité de leur argumentation sur le terrain de l'art. 13 Cst. sans préciser en quoi la liberté économique serait spécifiquement entravée. Ce grief est donc irrecevable (art. 106 al. 2 LTF).
8.4.1 S'agissant du grief selon lequel les obligations d'annonce et le recensement des prostituées violeraient l'art. 8 al. 1 Cst., il est important de souligner que l'activité de prostitution se distingue des autres métiers - notamment les masseurs non érotiques, les restaurateurs ou les chauffeurs de taxis - par le fait que, par définition, son exercice suppose la pratique d'actes d'ordre sexuel qui relèvent de la vie intime des intéressés (cf. MEIER, op. cit., p. 221 n. 491). Il s'agit de plus d'une activité dont l'exercice comporte des risques tangibles pour la santé et la sécurité ou pour une exploitation criminelle du travail et de la vulnérabilité des prostitué(e)s, ceci étant exacerbé par la perception sociale souvent négative de ce métier. A l'instar des distinctions que la jurisprudence opère entre les établissements de prostitution et les autres établissements publics (cf. arrêts 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 3.2; 2P.127/1998 du 22 septembre 1998 consid. 3b), on doit admettre que ces facteurs rendent cette activité dissemblable des métiers précités; il se justifie partant de la traiter différemment au regard de l'art. 8 al. 1 Cst., par l'instauration de mesures de protection et de surveillance renforcées ou spécifiques. Le grief relatif à l'existence d'une inégalité de traitement entre le métier de prostitué(e) et d'autres professions est donc mal fondé.
8.4.2 Quant à la prétendue discrimination des prostitué(e)s (art. 8 al. 2 Cst.) au travers des contraintes réglementaires imposées, notamment l'obligation d'annonce, il est vrai que des distinctions fondées sur le statut professionnel d'une personne sont susceptibles de
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se rapporter à sa situation sociale ou à son mode de vie (BERNHARD PULVER, L'interdiction de la discrimination, 2003, p. 261 n. 340; VINCENT MARTENET, Géométrie de l'égalité, 2003, p. 388 s.; BERNHARD WALDMANN, Das Diskriminierungsverbot von Art. 8 Abs. 2 BV als besonderer Gleichheitssatz, 2003, p. 759) et, partant, d'entraîner une présomption de différenciation inadmissible au sens de l'art. 8 al. 2 Cst. (ATF 136 I 121 consid. 5.2 p. 127; ATF 126 II 377 consid. 6a p. 393). Cependant, l'interdiction de toute discrimination ne s'oppose à la réglementation de l'accès ou de l'exercice de certaines professions que dans la mesure où de telles règles imposent des conditions injustifiées ayant pour but ou pour effet d'exclure une certaine catégorie de personnes, du fait de leurs qualités personnelles qui n'ont aucun lien avec les exigences objectives de la profession (WALDMANN, ibidem). Dès lors que l'activité professionnelle en cause se distingue de la plupart des autres métiers en raison des risques inhérents qu'elle comporte pour les prostitué(e)s, leur clientèle et l'ordre public, les mesures tendant à la réglementer, dont rien n'indique qu'elles seraient prises aux fins de marginaliser les prostitué(e)s, reposent sur des motifs sérieux et objectifs et ne violent pas l'art. 8 al. 2 Cst. Les griefs fondés sur l'art. 8 Cst. doivent par conséquent être écartés.
9. Selon l'art. 5 al. 1 et 2 LProst/GE, la personne qui cesse toute activité liée à la prostitution peut, à sa demande, être "radiée de tous les fichiers de police mentionnant son activité de prostitution, y compris celui des personnes se prostituant". D'après les recourants, le recensement et la conservation des données relatives aux prostitué(e)s dans un fichier de police centralisé violeraient les art. 13 al. 2 Cst. et 8 CEDH.
9.1 Les recourants soutiennent, dans un premier moyen, que le traitement des données relatives aux prostitué(e)s ne s'appuie sur aucune base légale suffisante.
Le recensement et la conservation dont se plaignent les recourants consistent par définition en un ou plusieurs fichier(s) regroupant des données personnelles dont la structure permet de rechercher les données par personne concernée (art. 3 let. g LPD, applicable par le biais de l'art. 37 LPD et de la réserve en faveur du droit fédéral figurant aux art. 3 al. 5 et 4 let . d LIPAD/GE; cf., pour un exemple de fichier, l'arrêt 5C.15/2001 du 16 août 2001 consid. 3b). Après avoir circonscrit les exigences posées en matière de base légale (consid. 9.1.1 ss), la Cour de céans examinera si le traitement des
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données relatives aux prostitué(e)s repose, au vu des différents aspects qu'il implique, sur une base légale (consid. 9.2).
9.1.1 Les informations de police recensées au sujet des prostitué(e)s constituent des données sensibles (art. 3 let. c ch. 2 LPD et 4 let. b ch. 2 LIPAD/GE), car l'activité d'ordre sexuel qui caractérise ce métier relève de la sphère intime (cf. consid. 8.4). Or, les art. 17 al. 2 LPD et 35 al. 2 LIPAD/GE prescrivent qu'il n'est possible de traiter des données personnelles sensibles que si une loi au sens formel le prévoit expressément. L'art. 35 al. 2 LIPAD/GE ajoute que les données sensibles ne peuvent être traitées que si une loi définit clairement la tâche considérée et si le traitement en question est absolument indispensable à l'accomplissement de cette tâche ou s'il est nécessaire et intervient avec le consentement de la personne concernée. Le traitement des données en cause ne peut donc être admis que dans la mesure où il serait réglementé dans une loi au sens formel qui soit suffisamment dense pour préserver la confidentialité des données et empêcher les abus (cf. ATF 122 I 360 consid. 5b p. 363 ss).
Pour pouvoir exercer un contrôle sur les données sensibles récoltées et prévenir tout abus, imprévisibilité ou disproportion dans leur traitement, il est de plus impératif que leur contenu soit lui aussi défini par la loi (cf. DAVID ROSENTHAL, in Handkommentar zum Datenschutzgesetz, 2008, n° 26 ad art. 4 al. 2 LPD p. 86; YVONNE JÖHRI, in ibidem, n° 16 ad art. 17 LPD p. 471; JÖHRI/STUDER, in Basler Kommentar zum Datenschutzgesetz, 2e éd. 2006, n° 35 ad art. 17 LPD p. 244).
Une identification au moins schématique des finalités du traitement des diverses données sensibles, qui doivent être reconnaissables pour la personne concernée (art. 4 al. 3 LPD et 38 LIPAD/GE), fait aussi partie des éléments devant être régis par la loi (YVONNE JÖHRI, op. cit., n° 17 ad art. 17 LPD p. 471; HANSPETER USTER, Datenschutz und Polizeiarbeit: fünf Thesen zur föderalen Zusammenarbeit aus der Sicht eines Kantons, Jusletter du 3 octobre 2005, n° 6).
9.1.2 En l'occurrence, la tenue de fichiers de police concernant le domaine de la prostitution est explicitement mentionnée à l'art. 5 al. 2 LProst/GE. L'existence de tels fichiers peut en outre être inférée de l'obligation d'annonce au sens des art. 4, 5 al. 1, 11 et 18 LProst/GE et y dispose ainsi d'une assise légale suffisante.
9.1.3 S'agissant du nombre des fichiers de police dont la création est requise par la LProst/GE ou en est la conséquence, de leur
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stockage, de la protection des données et de l'usage qui en sera fait, il est vrai que la loi querellée n'aborde pas ces questions. Compte tenu, cependant, du cadre précis fixé par la LPD et la LIPAD/GE dans ces domaines (notamment: art. 5 al. 2, 7, 8 et 11a LPD; art. 24, 37, 40, 43 et 47 LIPAD/GE), le renvoi global à la législation en matière de protection de la personnalité et des données figurant à l'art. 4 al. 3 LProst/GE en matière d'obligation d'annonce satisfait, dans le cadre du présent recours abstrait, à l'exigence d'une base légale formelle s'agissant du stockage, de l'accès, des protection et rectification des données, ainsi que des caractéristiques techniques des registres de police visant la prostitution. Ces bases légales formelles traitent en effet avec suffisamment de précision de la sécurité des données, autorisent la personne intéressée à consulter celles qui sont récoltées à son sujet ainsi que d'en exiger la rectification, et énumèrent les droits qu'elle peut faire valoir afin de sauvegarder sa sphère privée.
9.1.4 En revanche, le contenu des données qui sont traitées dans ces fichiers de police n'est pas spécifiquement réglementé. Pourtant, ces données sont susceptibles d'être utilisées dans des domaines aussi variés que la sauvegarde de la santé publique et de la liberté d'action des prostitué(e)s, ou la lutte contre les effets indésirables de l'exercice de la prostitution (cf. art. 1er LProst/GE). La loi genevoise du 29 septembre 1977 sur les renseignements et les dossiers de police et la délivrance des certificats de bonne vie et moeurs (LCBVM/GE; RSG F 1 25), à laquelle se réfère le Conseil d'Etat, n'est d'aucun secours en vue de préciser le contenu des données relatives aux prostitué(e)s. Le traitement par la police des données personnelles sensibles se confine en effet aux cas dans lesquels la prévention des crimes et délits ou la répression des infractions l'imposent (art. 1 al. 2 et 3 LCBVM/GE), tandis que le champ d'application de la LProst/GE déborde le cadre pénal. Du reste, la LCBVM/GE n'inclut aucun catalogue des données répertoriées en matière de prostitution. Il résulte de ce qui précède que, dans la mesure où le contenu exact des données ne peut être a priori déduit de la LProst/GE ou d'une autre loi au sens formel, leur traitement devrait être déclaré inconstitutionnel.
Ce nonobstant, il demeure possible d'interpréter les dispositions de la LProst/GE servant de fondement au traitement des données de façon conforme aux art. 13 al. 2 Cst. et 8 CEDH. En effet, l'art. 5 al. 2 LProst/GE implique que les fichiers de police incluent
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l'activité de prostitution, ainsi que l'identité des personnes qui s'y adonnent. Cette disposition fournit ainsi une base légale formelle s'agissant du traitement des nom, prénom, adresse et date de naissance d'une personne, ainsi que de son activité professionnelle.Partant, et dans la mesure où les renseignements que la police est en droit de récolter et de répertorier selon la LProst/GE se limitent uniquement à l'inscription des nom et prénom, date de naissance, adresses privée et professionnelle, métier et date du recensement de la personne se prostituant, à l'exclusion de toute autre mention et de tout autre élément conservé au dossier, on peut considérer lesdites indications comme étant couvertes par l'obligation d'annonce et le principe de la tenue des fichiers mentionnant l'activité de prostitué(e), tels que prévus notamment aux art. 4 al. 1 et 5 de cette loi cantonale au sens formel.
Une conception plus restrictive de l'exigence de la base légale viderait de son sens l'institution de l'obligation d'annonce qui, s'agissant d'une activité commerciale soumise à un contrôle renforcé de la part des autorités, a précisément pour but de permettre à celles-ci de recueillir les données de base et de tenir à jour un registre relatif aux personnes exerçant cette activité (cf. arrêt 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 5.3). D'ailleurs, l'existence d'une telle base légale peut être d'autant plus facilement admise que, en dehors de l'indication de l'activité exercée, ces données afférentes à l'identité d'une personne sont en général publiquement accessibles et font partie de ses "données de base", que l'art. 19 al. 2 LPD permet aux organes fédéraux de communiquer même en l'absence de base légale ou d'autres motifs justificatifs (cf. MEIER, op. cit., p. 147 n. 282). Par conséquent, la tenue d'un ou de plusieurs fichiers de police au sujet des prostitué(e)s repose, dans les limites du présent considérant, sur une base légale suffisante.
9.2 Les recourants soutiennent de surcroît que le recensement et le traitement des données relatives aux prostitué(e)s constitueraient une atteinte disproportionnée à la sphère privée de ces personnes.
Tel n'est pas le cas au vu de l'interprétation du contenu des données récoltées qui résulte du considérant 9.1 ci-dessus. En effet, le nombre restreint et le contenu des données que la police cantonale est en droit de collecter et d'enregistrer en vertu de la LProst/GE, permettent de délimiter avec clarté les finalités du traitement des données et minimisent les risques d'abus. Le traitement doit
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ainsi avoir pour seules fins de faciliter l'identification, la prise de contact et la localisation des personnes et établissements qui sont actifs dans le domaine de la prostitution, ce qui permettra aux autorités de police et sanitaires de contrôler le respect de la liberté d'action des personnes qui se prostituent, de garantir la mise en oeuvre des mesures de prévention sanitaires et sociales et de réglementer les lieux, heures et modalités de l'exercice de la prostitution, ainsi que de lutter contre ses manifestations secondaires. Par ailleurs, - et sous réserve de la possibilité de collaborer avec les associations d'aide aux prostitué(e)s (cf. art. 23 LProst/GE) -, la consultation de ces données est destinée à demeurer interne à l'administration (art. 22 LProst/GE). En outre, une pratique excessive dans un cas particulier pourra être sanctionnée dans le cadre d'un contrôle concret ultérieur de la loi, ce qui offre des garanties suffisantes notamment aux recourants (cf. arrêt 2P.165/2004 du 31 mars 2005 consid. 5.3).