Urteilskopf
150 IV 161
13. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit pénal dans la cause A. contre Ministère public central du canton de Vaud (recours en matière pénale)
6B_1143/2023 du 21 mars 2024
Regeste
Art. 49 Abs. 1, Art. 82 Abs. 1 und Art. 123 Abs. 1 BV;
Art. 335 Abs. 1 StGB;
Art. 42 Abs. 1, Art. 90 Abs. 1 und Art. 106 Abs. 3 SVG; Gemeindereglement; Verletzung von Strassenverkehrsregeln; Vorrang des Bundesrechts.
Die Kantone können ergänzende Vorschriften über den Strassenverkehr auf dem Weg der Gesetzgebung über das Übertretungsstrafrecht nur erlassen, soweit sich diese Vorschriften nicht auf Motorfahrzeuge und Fahrräder sowie Eisenbahnfahrzeuge beziehen, welche durch das Bundesrecht abschliessend geregelt werden.
Das Verursachen vermeidbaren Lärms beim Führen eines Motorfahrzeugs wird nach Art. 90 Abs. 1 i.V.m. Art. 42 Abs. 1 SVG mit Busse sanktioniert. Eine Bestimmung in einem Gemeindereglement, die das gleiche Ziel verfolgt und ein solches Verhalten ebenfalls unter Strafe stellt, verstösst gegen Art. 106 Abs. 3 SVG und den Vorrang des Bundesrechts (E. 3).
A. Par jugement du 25 novembre 2022, le Tribunal de police de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a reçu l'opposition formée par A. à l'encontre de l'ordonnance pénale rendue le 25 mai 2021 par la Préfecture du district du Jura-Nord vaudois, a constaté que A. s'était rendu coupable de violation simple des règles de la circulation routière, de conduite d'un véhicule sans être porteur du permis de conduire ou des autorisations requis et de contravention au règlement général de police de la commune de U., a condamné A. à une amende de 400 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant de quatre jours, et a dit que les frais de justice, par 760 fr., étaient mis à la charge de A.
B. Par jugement du 10 juillet 2023, la Cour d'appel pénale du Tribunal du canton de Vaud a rejeté l'appel formé par A. et a confirmé le jugement du 25 novembre 2022.
Il ressort du jugement cantonal les faits suivants:
B.a A., de nationalité suisse, est né en 1988 à U. Il est titulaire d'un CFC d'employé de commerce. Il a deux enfants de 4 et 7 ans, qui vivent chez son ex-compagne et pour lesquels il ne verse aucune contribution d'entretien. Il gagne environ 4'000 fr. par mois en travaillant comme gérant d'une société active dans l'esthétique et comme courtier immobilier. Il partage avec son père un appartement à U., dont il paie la moitié du loyer, soit 650 fr. par mois. Il n'a pas d'économies mais il a environ 50'000 fr. de dettes relatives à des affaires judiciaires.
B.b Le 21 février 2021, à 18h00, à la rue de V., au guidon du motocycle immatriculé VD, A. a circulé à un régime élevé en petite vitesse, sur la roue arrière, sans être porteur du permis de conduire. Sa
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conduite a provoqué du bruit, respectivement a troublé l'ordre et la tranquillité publics.
B.c Pour réprimer le comportement de A., le jugement querellé lui a infligé une amende de 400 fr. qui est composée comme suit: 280 fr. pour les violations simples des règles de la circulation routière (soit pour avoir circulé sur la roue arrière, à un régime élevé en petite vitesse), 20 fr. pour avoir conduit un véhicule sans être porteur du permis de conduire et 100 fr. pour avoir porté atteinte à l'ordre, à la tranquillité, à la sécurité et au repos publics en violation du règlement général de police de la commune de U. (RGP).
B.d Son casier judiciaire suisse révèle quatre condamnations pour neuf infractions à la LCR. Par ailleurs, de nombreuses mesures administratives ont été prises à son encontre.
C. A. forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 10 juillet 2023. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est libéré des accusations de violation des règles de la circulation routière et de contravention au règlement général de police de la commune de U. Subsidiairement, il conclut à sa libération du chef d'accusation de contravention au règlement général de police de la commune de U. et à ce que le montant de l'amende soit réduit de 100 francs. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire.
D. Invités à se déterminer, la cour cantonale s'est référée à la décision rendue et le Ministère public a renoncé à déposer des déterminations.
Le recours est partiellement admis. Le jugement attaqué est réformé en ce sens que le recourant est libéré de la prévention de contravention au règlement général de police de la commune de U. et que l'amende de 400 fr. est réduite de 100 francs. La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision concernant les frais et dépens. Pour le surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est irrecevable.
Extrait des considérants:
3. Le recourant reproche aux différentes autorités d'avoir sanctionné son comportement sur la base de deux dispositions distinctes (de niveau fédéral et communal), soit, d'une part, les
art. 42 al. 1 LCR, 33 let. b de l'ordonnance du 13 novembre 1962 sur les règles de la
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circulation routière (OCR; RS 741.11) et, d'autre part, l'art. 59 al. 1 du règlement général de police de la commune de U. (RGP), visant à réprimer un même comportement, soit le bruit excessif causé par la conduite d'un véhicule, et d'avoir ainsi violé le principe de la primauté du droit fédéral prévu par l'
art. 49 Cst.
3.1
En vertu du principe de la primauté du droit fédéral ancré à l'
art. 49 al. 1 Cst., les cantons ne sont pas autorisés à légiférer dans les matières exhaustivement réglementées par le droit fédéral. Dans les autres domaines, ils peuvent édicter des règles de droit pour autant qu'elles ne violent ni le sens ni l'esprit du droit fédéral, et qu'elles n'en compromettent pas la réalisation. Cependant, même si la législation fédérale est considérée comme exhaustive dans un domaine donné, une loi cantonale peut subsister dans le même domaine en particulier si elle poursuit un autre but que celui recherché par le droit fédéral. Ce n'est que lorsque la législation fédérale exclut toute réglementation dans un domaine particulier que le canton perd toute compétence pour adopter des dispositions complétives, quand bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient même en accord avec celui-ci (
ATF 145 IV 10 consid. 2.1;
ATF 143 I 403 consid. 7.1,
ATF 143 I 109 consid. 4.2.2;
ATF 140 I 218 consid. 5.1;
ATF 138 I 435 consid. 3.1).
3.2
Selon l'
art. 123 al. 1 Cst., la législation en matière de droit pénal et de procédure pénale relève de la compétence de la Confédération.
L'art. 335 al. 1 CP prévoit une réserve au sens propre à cette disposition constitutionnelle (arrêt 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 2.2.1) et énonce que les cantons conservent le pouvoir de légiférer sur les contraventions de police qui ne sont pas l'objet de la législation fédérale.
Les cantons peuvent prévoir dans leur législation de punir d'une amende des contraventions (
art. 103 CP), tant que le droit fédéral ne protège pas le bien juridique concerné par un ensemble complet de prescriptions (
ATF 138 IV 13 consid. 3.3.1;
ATF 129 IV 276 consid. 2.1;
89 IV 94 consid. 4a). En revanche, si le droit pénal fédéral laisse de côté tout un domaine du droit pénal, ou s'il ne sanctionne que certains comportements, abandonnant à chaque canton la liberté de réprimer ou de laisser impuni tel ou tel acte, pour tenir compte des différences régionales, alors il y a place pour des prescriptions cantonales relatives aux contraventions (
ATF 129 IV 276 consid. 2.1;
ATF 116 IV 19 consid. 3;
ATF 104 IV 288 consid. 3;
ATF 89 IV 94 consid. 4a).
3.3 Selon l'
art. 82 al. 1 Cst., la Confédération légifère sur la circulation routière. Cet article donne une compétence globale et concurrente à la Confédération pour légiférer dans le domaine de la circulation routière (arrêt 2P.83/2005 du 26 janvier 2006 consid. 6.1; STEFAN VOGEL, in Die schweizerische Bundesverfassung, St. Galler Kommentar, 4
e éd. 2023, n° 3 ad
art. 82 Cst.; BEYELER/DIEBOLD, in Commentaire romand, Constitution fédérale, 2021, n° 22 ad
art. 82 Cst.; JEAN-FRANÇOIS AUBERT, in Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse [...], Aubert/Mahon [éd.], 2003, n° 4 ad
art. 82 Cst.; Message du 20 novembre 1996 relatif à unenouvelle constitution fédérale, FF 1997 I 1, 263). Cette compétence est globale en ce sens qu'elle s'étend à toutes les matières pertinentes pour la circulation routière. Elle est concurrente par rapport au droit cantonal, qui garde sa place dans la mesure où la Confédération n'a pas légiféré de manière exhaustive dans un domaine déterminé (BEYELER/DIEBOLD, op. cit., n° 22 ad
art. 82 Cst.). La loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière (LCR), complétée par un grand nombre d'ordonnances, concrétise l'exercice de la compétence législative fondée sur l'
art. 82 al. 1 Cst. (arrêt 2P.83/2005 du 26 janvier 2006 consid. 6.1; AUBERT, op. cit., n° 6 ad
art. 82 Cst.). Par tous ces actes, la Confédération a très largement fait usage de sa compétence législative en matière de circulation routière et a dans la même mesure évincé les compétences cantonales (BEYELER/DIEBOLD, op. cit., n° 17 ad
art. 82 Cst.). Cela étant, même dans les domaines où il existe une compétence fédérale et où celle-ci a été mise en oeuvre par la législation fédérale, les cantons peuvent se voir confier des tâches spécifiques, soit des compétences déléguées (MALINVERNI ET AL., Droit constitutionnel suisse, vol. I, 4
e éd. 2021, p. 400 n. 1090). Les délégations de compétences figurent dans les lois fédérales (MALINVERNI ET AL., op. cit., p. 401 n. 1091).
3.4
En matière de bruit causé par un véhicule, l'
art. 42 al. 1 LCR prévoit que le conducteur doit veiller à ne pas incommoder les usagers de la route et les riverains, notamment en provoquant du bruit, de la poussière, de la fumée ou des odeurs qu'il peut éviter; il devra veiller le plus possible à ne pas effrayer les animaux. La violation de cette disposition est sanctionnée par une amende en application de l'
art 90 al. 1 LCR.
3.5
En tant que
lex specialis
par rapport à l'
art. 335 al. 1 CP, l'
art. 106 al. 3 LCR prévoit que les cantons restent compétents pour édicter
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des prescriptions complémentaires sur la circulation routière, sauf en
ce qui concerne les véhicules automobiles et les cycles, les tramways et chemins de fer routiers
ATF 104 IV 288 consid. 3).
3.6 Il découle de ce qui précède que les cantons ne peuvent édicter des prescriptions complémentaires instituant des contraventions de droit cantonal dans le domaine de la circulation routière pour autant qu'elles ne concernent pas les véhicules automobiles et les cycles, les tramways et chemins de fer routiers (cf.
art. 106 al. 3 LCR;
ATF 104 IV 288), celles-ci étant réglées de manière exhaustive par le droit fédéral (cf. WALDMANN/KRAEMER, in Basler Kommentar, Strassenverkehrsgesetz, 2014, n° 13 ad
art. 106 LCR).
3.7 L'art. 59 al. 1 du règlement général de police de la commune de U. (RGP), adopté par le conseil communal, dispose que tout acte sur le domaine public de nature à porter atteinte à l'ordre, à la tranquillité, à la sécurité et au repos publics est interdit. Sont notamment compris dans cette interdiction: les querelles, les bagarres, les chants bruyants, les cris, les attroupements tumultueux ou gênant la circulation ou les usagers, les pétards, les coups de feu, les jeux bruyants ou tous autres bruits excessifs, tels ceux produits par une conduite de véhicule motorisé inappropriée et dérangeante. L'art. 12 de ce même règlement prévoit que toute infraction aux dispositions du présent règlement est passible d'une amende dans les limites fixées par la loi cantonale sur les contraventions.
3.8 Au vu de ce qui précède, le bruit excessif causé par la conduite d'un véhicule à moteur est spécifiquement sanctionné par une amende en vertu des art. 90 al. 1 et 42 al. 1 LCR. L'art. 59 al. 1 RGP dernière phrase poursuit le même but en sanctionnant également ce comportement.
Ainsi, la limite de compétence n'apparaît pas être respectée et l'art. 59 al. 1 dernière phrase RGP qui sanctionne les bruits excessifs produits par la conduite d'un véhicule motorisé inappropriée et dérangeante viole l'art. 106 al. 3 LCR ainsi que la primauté du droit fédéral.
3.9 En définitive, l'amende fixée sur la base de l'art. 59 al. 1 RGP doit être annulée.