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Chapeau

6830/08


Buechel Ciro gegen Schweiz
Nichtzulassungsentscheid no. 6830/08, 09 décembre 2014

Regeste

DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ de la CourEDH:
SUISSE: Art. 6 par. 1 CEDH. Accès à un tribunal. Absence de décision préalable sur l'assistance judiciaire devant le Tribunal fédéral.

En premier lieu, le requérant se plaint de ce que le Tribunal fédéral ne s'est pas préalablement prononcé sur sa demande d'assistance judiciaire avant de statuer sur l'irrecevabilité de son recours contre la décision du tribunal cantonal. En rédigeant son recours lui-même, le requérant a déclaré devoir demander la gratuité et ajouté qu'il ne pouvait se permettre le paiement des frais judiciaires, sans toutefois demander l'assistance d'un avocat. La Cour estime qu'il n'a pas fait usage d'une voie de droit effective et que ce grief est dès lors irrecevable pour non-épuisement des voies de droit internes (ch. 29 - 36).
Ensuite, l'intéressé se plaint de ce que son recours a été déclaré irrecevable faute de motivation suffisante. La Cour souligne que le Tribunal fédéral était mieux placé pour apprécier la recevabilité du recours, que son rejet se fondait sur une base légale et n'était pas entaché d'arbitraire. Il appartenait au requérant d'exposer lui-même les motifs permettant d'avoir droit à l'assistance judiciaire en soumettant un recours conforme aux exigences légales (ch. 39 - 41).
Enfin, quant à l'absence de motivation de la décision du Tribunal fédéral rejetant la demande du requérant, la Cour observe que le Tribunal fédéral n'est pas entré en matière sur la base de l'art. 108 al. 1 let. b LTF au motif que le recours n'était pas suffisamment motivé; il a renoncé à prélever des frais, raison pour laquelle la demande d'exemption des frais judiciaires devenait sans objet. L'intéressé a ainsi obtenu une décision lui indiquant le motif pour lequel sa demande d'assistance judiciaire était devenue sans objet (ch. 44 - 46).
Conclusion: requête déclarée irrecevable.



Synthèse de l'OFJ


(4ème rapport trimestriel 2014)

Droit à un procès équitable (art. 6 CEDH); assistance judiciaire.

Invoquant l'art. 6 CEDH, le requérant se plaint de ce que le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur sa demande d'assistance judiciaire avant de statuer sur l'irrecevabilité de son recours et qu'un avocat d'office ne lui était pas attribué. De plus, son recours aurait été déclaré irrecevable faute de motivation suffisante. Le requérant se plaint enfin de la motivation de la décision du Tribunal fédéral. Quant à l'assistance judiciaire et l'absence de représentation du requérant, la Cour a estimé que le requérant n'avait pas demandé l'assistance d'un avocat devant le Tribunal fédéral, qu'il s'est donc abstenu de faire usage d'une voie de recours effective (inépuisement des voies de recours internes). Quant au droit d'accès à un tribunal et les exigences formelles ainsi qu'à la motivation de l'arrêt du Tribunal fédéral, la Cour a qualifié les griefs tirés de l'art. 6 CEDH de manifestement mal fondés. Irrecevable (majorité).





Faits

 
DEUXIÈME SECTION
DÉCISION
Requête no 6830/08
Ciro BUECHEL
contre la Suisse
 
La Cour européenne des droits de l'homme (deuxième section), siégeant le 9 décembre 2014 en une chambre composée de :
Guido Raimondi, président,
    András Sajó,
    Nebojša Vučinić,
    Helen Keller,
    Paul Lemmens,
    Egidijus Kūris,
    Jon Fridrik Kjølbro, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 14 janvier 2008,
Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par le requérant,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
 
EN FAIT
1.  Le requérant, M. Ciro Buechel, est un ressortissant suisse né en 1982 et résidant à Horw. Sur demande, il a été admis au bénéfice de l'assistance judiciaire le 7 mars 2012 et est représenté devant la Cour par Mme L. Vetterli, avocate à Emmenbrücke.
2.  Le gouvernement suisse (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, F. Schürmann, de l'Office fédéral de la justice.
A.  Les circonstances de l'espèce
3.  Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.
1.  L'origine de la présente affaire
4.  À partir de décembre 2001, le requérant travailla en tant que salarié, payé à l'heure, dans une entreprise de construction dans la branche des toitures et des façades, ayant son siège à Neudorf (canton de Lucerne).
5.  Pendant la durée de validité de son contrat de travail, le requérant était assuré contre la maladie et les accidents selon les normes fixées par la convention collective de travail dans la branche suisse des toitures et des façades.
6.  Par lettre du 27 mars 2002, l'employeur résilia le contrat de travail à compter du 30 avril 2002.
7.  Un jour avant cette échéance, le requérant quitta, avec l'approbation de ses supérieurs, son poste de travail en raison de son état fébrile. Il fut déclaré par un médecin en incapacité de travail pour cause de maladie du 29 avril jusqu'au 31 décembre 2002. Le requérant n'annonça sa maladie ni à son employeur, ni à l'assurance pour indemnités journalières.
2.  L'action en paiement du salaire dû
8.  Estimant que, suite à sa maladie, son employeur fut obligé de repousser la résiliation au 31 mai 2002, le requérant esta en justice le 1er juillet 2002 et revendiqua devant le tribunal des prud'hommes (Arbeitsgericht) du canton de Lucerne le paiement de son salaire brut pour le mois de mai 2002, y inclus les intérêts moratoires, déduction faite des cotisations sociales correspondantes prises en charge de l'employeur.
9.  Par requêtes des 12 et 13 février 2004, le requérant demanda l'assistance judiciaire. Par jugement du 24 mai 2004, le tribunal des prud'hommes lui accorda l'assistance judiciaire complète (vollumfängliche unentgeltliche Rechtspflege) et un avocat lui fut attribué ; ce dernier fut remboursé par le canton de Lucerne pour le montant de 1 019,60 francs suisses (CHF), soit environ 838 euros (EUR).
Ensuite, déduction faite du montant versé à l'avance au requérant par la caisse de chômage du canton de Lucerne, le tribunal des prud'hommes obligea l'employeur à verser au requérant le salaire brut de 1 319 CHF, soit environ 1 084 EUR, y inclus 5 % d'intérêts moratoires à partir du 1er juillet 2002.
10.  Par jugement du 19 août 2004, le tribunal supérieur (Obergericht) du canton de Lucerne admit le recours contre le jugement du tribunal des prud'hommes et alloua au requérant - en tenant compte des indemnités de vacances pour le mois de mai 2002 - le salaire brut de 1 906,60 CHF (soit environ 1 567 EUR), y inclus 5 % d'intérêts moratoires à partir du 1er juillet 2002.
Le requérant demanda également l'assistance judiciaire complète, que le tribunal supérieur lui alloua. Partant, les honoraires de l'avocat furent remboursés par la caisse du tribunal supérieur.
Cette décision entra en force de chose jugée.
3.  L'action en responsabilité contractuelle contre l'employeur
(a)  La procédure devant la première instance
11.  Entre-temps, le 9 juin 2004, le requérant introduisit devant le tribunal des prud'hommes contre l'employeur une « demande modifiée » (Klageänderung) en dommages-intérêts de 85 430,40 CHF (soit environ 70 213 EUR), y inclus les intérêts moratoires de 5 % à partir du 1er juin 2002. En outre, le requérant réclama des indemnités de vacances pour le mois de mai 2002 et pour la période de décembre 2001 à avril 2002.
En résumé, le requérant allégua qu'il avait été incapable de travailler du 29 avril 2002 jusqu'à la fin de l'année, du 1er avril 2003 au 10 juillet 2003, ainsi que du 21 octobre 2003 au 4 novembre 2003. À partir du 1er mars 2004, il ne serait plus capable de travailler.
Le requérant allégua qu'en tant qu'assuré, durant son contrat de travail, contre la maladie et les accidents selon les normes fixées par la convention collective de travail dans la branche suisse des toitures et des façades, son employeur aurait dû l'informer au plus tard fin mai 2002 de la possibilité de passer d'une assurance collective d'indemnités journalières en cas de maladie à une assurance individuelle, ce qui lui aurait permis d'obtenir des indemnités durant son incapacité de travail.
Partant, n'ayant jamais été informé de son droit de passage (Übertrittsrecht), le requérant réclama la compensation du dommage subi causé par l'omission de l'employeur.
Enfin, le requérant demanda que l'assistance judiciaire complète lui soit accordée.
12.  Considérant la valeur litigieuse en jeu, le tribunal des prud'hommes, incompétent pour trancher des litiges dépassant 30 000 CHF (soit environ 24 656 EUR), transféra l'affaire au tribunal d'arrondissement (Amtsgericht) de Sursee.
13.  Le 2 septembre 2004, l'assistance judiciaire partielle (teilweise unentgeltliche Rechtspflege), lui fut accordée par le juge d'instruction du tribunal d'arrondissement. Elle devait permettre au requérant de faire valoir ses prétentions devant les instances cantonales, en ce sens qu'il était exonéré des frais judiciaires, des avances de frais pour l'administration des preuves (« von der Pflicht zur Leistung von Gerichts- und Beweiskostenvorschüssen befreit ») et que l'État prenait en charge certains frais d'avocat (« der Staat für die Anwaltskosten Gutstand leistet »).
14.  Par un arrêt du 26 août 2005, le tribunal d'arrondissement rejeta les prétentions en dommages-intérêts du requérant dans la mesure où il les déclara recevables. Le tribunal rejeta également les prétentions relatives aux indemnités de vacances.
Le tribunal mit, à titre provisoire, les frais judiciaires de 3 700 CHF (soit environ 3 041 EUR) à la charge de l'État. En outre, il condamna le requérant à payer à la partie défenderesse les honoraires d'avocat de 10 703,50 CHF (soit environ 8 797 EUR). Le tribunal alloua à l'avocat du requérant la somme - à titre d'avance - de 9 016,90 CHF (soit environ 7 411 EUR) en rappelant au requérant son devoir de restituer ce montant à la caisse du tribunal d'arrondissement en cas de retour à meilleure fortune.
(b)  La procédure devant l'instance d'appel
15.  Par un arrêt du 11 septembre 2007, le tribunal supérieur du canton de Lucerne rejeta le recours du requérant.
Certes, le tribunal raisonna-t-il, l'employeur avait violé le contrat de travail en omettant d'informer le requérant de la possibilité de passer d'une assurance collective d'indemnités journalières en cas de maladie à une assurance individuelle. Mais le tribunal établit de manière détaillée que le requérant n'avait pas subi un quelconque dommage résultant de cette omission, considérant :
- qu'entre le 1er juin et le 31 décembre 2002, l'assurance collective avait payé à celui-ci des indemnités journalières pour des maladies survenues pendant la durée du contrat de travail ;
- que dans la phase entre le 1er avril et le 10 juillet 2003, l'omission d'informer le requérant de son droit de passage n'avait pas causé de dommage au vu que les prestations de l'assurance collective auraient été identique à celles offertes dans le cadre de l'assurance individuelle ; et
- que, quant à la période du 21 octobre 2003 jusqu'au 4 novembre 2003, l'incapacité de travail en raison d'accident ne serait en tout état de cause pas couverte par l'assurance individuelle de maladie.
En vertu de l'assistance judiciaire partielle accordée, le tribunal supérieur ordonna au requérant de payer à la caisse du tribunal supérieur les frais judiciaires s'élevant à 6 200 CHF (soit environ 5 096 EUR ; 3 700 CHF pour le tribunal d'arrondissement et 2 500 CHF pour le tribunal supérieur). Les honoraires pour l'avocat du requérant devant toutes les instances cantonales furent fixés à 13 676 CHF (soit environ 11 240 EUR), payés par l'État à titre d'avance. En outre, le tribunal supérieur obligea le requérant à indemniser les honoraires d'avocat de la partie défenderesse, en totalité de 17 152,60 CHF (soit environ 14 097,10 EUR).
(c)  La procédure devant le Tribunal fédéral
16.  À l'issue du jugement du tribunal supérieur du canton de Lucerne, le requérant discuta avec son avocat de la possibilité d'interjeter un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Selon ses propres affirmations, le requérant était toutefois insatisfait de son avocat, à qui il reprocha passivité et incompétence dans la conduite de son affaire devant l'instance inférieure. Eu égard au temps limité dont il disposait pour respecter le délai de recours, il allègue n'avoir pas trouvé un autre avocat, ce qui le contraignit à interjeter le recours en matière civile au Tribunal fédéral sans représentation d'un avocat. Le requérant allègue qu'en tant que profane, il n'était pas en mesure de soulever les bons griefs, comme par exemple la mauvaise application du droit, la violation des droits constitutionnels, la violation de l'obligation de motiver ou l'appréciation arbitraire des faits.
17.  Dans son mémoire de recours du 1er octobre 2007 rédigé sur une page et demie, après avoir rappelé sa version des faits, le requérant mentionna uniquement en substance qu'il avait dû se battre contre les assurances de son ancien employeur jusqu'à ce qu'il obtienne satisfaction, ce qui lui aurait occasionné des coûts, des désagréments et surtout des dettes, notamment envers la commune, le requérant ayant bénéficié de l'assistance publique. Le requérant ajouta dans son mémoire de recours que, n'ayant pas eu connaissance des démarches à entreprendre, il s'était comporté de manière correcte. Il reprocha ensuite à son ancien supérieur de ne pas l'avoir informé, lors de la conclusion du contrat, des démarches à entreprendre. Par conséquent, il n'accepterait pas que les frais de la procédure devant les instances cantonales ainsi que les frais d'avocat soient mis à sa charge. Ce ne serait pas sa faute s'il avait dû vivre de l'assistance publique de juillet 2002 jusqu'en 2003. L'assurance chômage l'aurait renvoyé à son employeur, respectivement à l'assurance de celui-ci, or celle-ci n'aurait pas voulu admettre qu'elle était compétente, ce qui aurait occasionné des coûts sans qu'il puisse en être tenu responsable. Par conséquent, la prétention formulée devant les instances cantonales serait appropriée. Il ne serait de plus pas approprié que la procédure cantonale se soit étendue sur plusieurs années.
Ensuite, le requérant déclara qu'il se trouvait dans une situation telle qu'il devait - malheureusement - vraiment demander la gratuité (« ich leider um Unentgeltliches recht bitten muss ») puisque, ne recevant que 2 400 CHF (soit environ 1 973 EUR) par mois au titre d'une rente d'invalidité, il ne pouvait pas se permettre d'avancer des frais judiciaires (« mir keinen Gerichtsvorschuss leisten kann »).
18.  Par un arrêt du 9 octobre 2007, le Tribunal fédéral se prononça, en formation de juge unique, conformément à la procédure simplifiée (paragraphe 23 ci-dessous).
Il refusa de statuer sur le fond du recours du requérant au motif que la motivation de celui-ci était manifestement insuffisante (paragraphe 23 ci-dessous).
Pourtant, le Tribunal fédéral considéra « que, dans les circonstances données, il y avait lieu de renoncer à percevoir des frais judiciaires (...), suite à quoi la demande d'exemption des frais judiciaires devient sans objet ».
B.  Le droit interne pertinent
19.  L'assistance judiciaire gratuite et l'assistance gratuite d'un défenseur sont des droits fondamentaux garantis par la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. ; recueil systématique du droit fédéral - RS - n 101) :
Article 29 : Garanties générales de procédure
« (...)
3 Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. »
20.  Les dispositions pertinentes de la Loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110) sont libellées comme suit :
Art. 41 : Incapacité de procéder
« 1 Si une partie est manifestement incapable de procéder elle-même, le Tribunal fédéral peut l'inviter à commettre un mandataire. Si elle ne donne pas suite à cette invitation dans le délai imparti, il lui attribue un avocat.
2 L'avocat désigné par le Tribunal fédéral a droit à une indemnité appropriée versée par la caisse du tribunal pour autant que les dépens alloués ne couvrent pas ses honoraires et qu'il n'ait pas pu obtenir le paiement de ces derniers en raison de l'insolvabilité de la partie. Si celle-ci peut rembourser ultérieurement la caisse, elle est tenue de le faire. »
Article 42 : Mémoires
« 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2 Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou porte sur un cas particulièrement important au sens de l'art. 84, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.
(...) »
Article 64 : Assistance judiciaire
« 1 Si une partie ne dispose pas de ressources suffisantes et si ses conclusions ne paraissent pas vouées à l'échec, le Tribunal fédéral la dispense, à sa demande, de payer les frais judiciaires et de fournir des sûretés en garantie des dépens.
2 Il attribue un avocat à cette partie si la sauvegarde de ses droits le requiert. L'avocat a droit à une indemnité appropriée versée par la caisse du tribunal pour autant que les dépens alloués ne couvrent pas ses honoraires.
3 La cour statue à trois juges sur la demande d'assistance judiciaire. Les cas traités selon la procédure simplifiée prévue à l'art. 108 sont réservés. Le juge instructeur peut accorder lui-même l'assistance judiciaire si les conditions en sont indubitablement remplies.
4 Si la partie peut rembourser ultérieurement la caisse, elle est tenue de le faire. »
Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires
« 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
(...) »
Article 108 : Juge unique
« 1  Le président de la cour décide en procédure simplifiée de ne pas entrer en matière :
(...)
b. sur les recours dont la motivation est manifestement insuffisante (art. 42, al. 2) ;
(...)
3  L'arrêt est motivé par une brève indication de la cause de l'irrecevabilité. »
GRIEFS
21.  Invoquant le droit d'accès à un tribunal et le droit à un procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention, le requérant se plaint de ce que le Tribunal fédéral ne s'est pas préalablement prononcé sur sa demande d'assistance judiciaire avant de statuer sur l'irrecevabilité de son recours contre la décision du tribunal cantonal. Selon le requérant, s'il avait eu droit à l'assistance d'un avocat, il aurait été en mesure de présenter ses arguments de façon à satisfaire aux conditions de recevabilité et le Tribunal fédéral aurait examiné son recours sur le fond. Partant, le requérant allègue une violation de son droit d'accès à un tribunal et du droit à un procès équitable tels que prévus par l'article 6 de la Convention.
22.  Le requérant se plaint aussi, en substance du moins, des exigences formelles qui doivent être respectées pour déposer un recours devant le Tribunal fédéral. Selon lui, un profane ne peut se conformer aux exigences formelles qu'avec l'aide d'un avocat, ce qui limiterait le droit d'accès au Tribunal fédéral de façon non compatible avec l'article 6 de la Convention.
23.  Le requérant se plaint enfin de la motivation de la décision du Tribunal fédéral. Le requérant soutient ainsi que le Tribunal fédéral n'a pas expliqué pourquoi l'assistance judiciaire sous forme d'exemption des frais judiciaires et d'assistance gratuite d'un avocat n'avait pas été accordée. Partant, le requérant allègue une violation de l'article 6 de la Convention.
 


Considérants

EN DROIT
A.  Quant à l'assistance judicaire et l'absence de représentation du requérant
24.  Le requérant allègue que la déclaration d'irrecevabilité de son recours prononcée sans qu'un avocat d'office ne lui soit attribué viole l'article 6 de la Convention.
1.  Thèses des parties
25.  Le Gouvernement considère, à titre principal, que la requête est irrecevable pour non-épuisement des voies de recours internes. Le Gouvernement relève ainsi que l'article 64 de la LTF règle l'assistance judiciaire devant le Tribunal fédéral et cette dernière n'est accordée que sur demande de la partie concernée. Le Gouvernement souligne que le requérant peut demander une assistance judiciaire partielle, à savoir la seule assistance gratuite d'un avocat ou uniquement la libération des frais judiciaires. Le Gouvernement remarque ainsi que le requérant, dans son recours du 1er octobre 2007 au Tribunal fédéral, avait demandé uniquement « l'assistance judiciaire » puisque, à cause de sa rente mensuelle de 2 400 CHF (soit environ 1 973 EUR), il n'était pas dans la situation financière lui permettant d'avancer les frais judicaires (paragraphe 17 ci-dessus). Selon le Gouvernement, la demande du requérant ne portait dès lors que sur la question des frais judicaires, plus particulièrement de l'avance de frais. Le requérant n'a en particulier pas demandé qu'un avocat d'office lui soit attribué ou que des frais de représentation soient pris en charge par l'État.
26. Le Gouvernement est d'avis que le requérant n'a par conséquent pas épuisé les voies de recours internes pour le grief qu'il soulève devant la Cour.
27.  Le requérant rétorque qu'il est un profane et que le Tribunal fédéral aurait dès lors dû interpréter sa demande comme une demande de libération des frais judicaires et une demande d'assistance gratuite d'un avocat. Le requérant soutient aussi qu'en l'absence d'une telle demande, le Tribunal fédéral aurait de même pu lui attribuer un avocat d'office, dès lors qu'il était manifeste pour le Tribunal fédéral que le requérant n'était pas capable de gérer lui-même l'affaire, vu l'absence de capacités personnelles et juridiques de sa part. Le requérant soutient que cette dernière question concerne de tout façon le fond de l'affaire. Enfin, selon le requérant, il n'y a plus de voie de recours contre une décision d'irrecevabilité du Tribunal fédéral, finale selon le droit suisse.
28.  Partant, le requérant soutient que l'exception préliminaire du Gouvernement doit être écartée et qu'il convient de déclarer la requête recevable.
2.  Appréciation de la Cour
29.  La Cour rappelle que la finalité de l'article 35 de la Convention est de ménager aux États contractants l'occasion de prévenir ou de redresser les violations alléguées contre eux avant que ces allégations ne lui soient soumises (voir, parmi d'autres, Gäfgen c. Allemagne [GC], no 22978/05, § 142, CEDH 2010). La règle de l'épuisement des voies de recours internes énoncée à l'article 35 § 1 de la Convention impose aux requérants l'obligation d'utiliser en premier lieu les recours qu'offre le système juridique de leur pays. Cette règle se fonde sur l'hypothèse que l'ordre interne offre un recours effectif quant à la violation alléguée (voir, parmi d'autres, Maktouf et Damjanović c. Bosnie-Herzégovine [GC], nos 2312/08 et 34179/08, § 58, CEDH 2013 (extraits)). De la sorte, la règle de l'épuisement des voies de recours internes constitue un aspect important du principe voulant que le mécanisme de sauvegarde instauré par la Convention revête un caractère subsidiaire par rapport aux systèmes nationaux de garantie des droits de l'homme (voir, parmi d'autres, Vučković et autres c. Serbie [GC], no 17153/11, § 69, 25 mars 2014).
30.  Le grief dont on entend saisir la Cour doit ainsi d'abord être soulevé, au moins en substance, dans les formes et délais prescrits par le droit interne, devant les juridictions nationales appropriées (voir, parmi d'autres, Elçi et autres c. Turquie, nos 23145/93 et 25091/94, § 604, 13 novembre 2003 ; Gäfgen, précité, § 142). Cependant, l'obligation découlant de l'article 35 se limite à celle de faire un usage normal des recours vraisemblablement effectifs, suffisants et accessibles (voir, parmi d'autres, Sejdovic c. Italie [GC], no 56581/00, § 45, CEDH 2006-II).
31.  Enfin, l'article 35 § 1 de la Convention prévoit une répartition de la charge de la preuve. Pour ce qui concerne le Gouvernement, lorsqu'il excipe du non-épuisement, il doit convaincre la Cour que le recours était effectif et disponible tant en théorie qu'en pratique à l'époque des faits, c'est-à-dire qu'il était accessible, était susceptible d'offrir au requérant le redressement de ses griefs et présentait des perspectives raisonnables de succès (Scoppola c. Italie (no 2) [GC], no 10249/03, § 71, 17 septembre 2009). Une fois cela démontré, c'est au requérant qu'il revient d'établir que le recours évoqué par le Gouvernement a en fait été employé ou bien que, pour une raison quelconque, il n'était ni adéquat ni effectif compte tenu des faits de la cause, ou encore que certaines circonstances particulières dispensaient le requérant de l'exercer (Mirazović c. Bosnie-Herzégovine (déc.), no 13628/03, 16 mai 2006 ; Maktouf et Damjanović, précité, § 58).
32.  Se tournant vers les circonstances de l'espèce, la Cour observe d'abord que le système d'assistance judiciaire à disposition du requérant devant le Tribunal fédéral se compose de deux volets, à savoir la dispense de paiement des frais judiciaires (article 64 alinéa 1 de la LTF) d'une part, et l'attribution d'un avocat payé par la caisse du tribunal (article 64 alinéa 2 de la LTF) d'autre part (paragraphe 21 ci-dessus).
Par ailleurs, la Cour note qu'il existe une réserve prévue par l'article 41 de la LTF, qui s'inspire du devoir qu'a l'État de sauvegarder les intérêts de la justice dans les cas les plus extrêmes (sur les intérêts de la justice exigeant l'octroi de l'assistance judicaire à un accusé, voir Twalib c. Grèce, 9 juin 1998, §§ 52-54, Recueil des arrêts et décisions 1998-IV). Selon cet article, il existe en effet la possibilité d'attribuer d'office un avocat à la partie « manifestement incapable de procéder elle-même ».
La Cour rappelle au demeurant qu'elle a déjà jugé que le système mis en place par le législateur Suisse offrait des garanties substantielles aux individus, de nature à les préserver de l'arbitraire, en particulier lorsque le justiciable a bénéficié de l'assistance judiciaire au niveau cantonal (voir, dans ce sens, Pedro Ramos c. Suisse, no 10111/06, § 53, 14 octobre 2010), comme ce fut le cas pour le requérant (paragraphes 13 à 15 ci-dessus). Quant à la question de savoir si la LTF, notamment à son article 64, prévoit l'attribution d'un avocat sur demande expresse du recourant ou d'office, la Cour rappelle qu'elle n'est pas une juridiction de quatrième instance. Il ne lui appartient donc ni d'interpréter, ni d'appliquer le droit interne (voir, parmi beaucoup d'autres, Gsell c. Suisse, no 12675/05, § 51, 8 octobre 2009).
33.  La Cour observe ensuite que le requérant, rédigeant son recours lui-même, a non seulement déclaré qu'il se trouvait dans une situation telle qu'il devait - malheureusement - vraiment demander la gratuité. Il a en outre ajouté qu'il ne pouvait se permettre le paiement des frais judiciaires (paragraphe 17 ci-dessus). La Cour note en particulier que le requérant n'a pas demandé l'aide d'un avocat pour rédiger ou compléter son recours. À cet égard, la Cour a déjà jugé que les voies de recours internes n'ont pas été épuisées lorsqu'une demande judiciaire n'est pas admise à cause d'une erreur procédurale émanant du requérant (voir, dans ce sens, Gäfgen, précité, § 143, et Okul et Karaköse c. Turquie, no 37300/05, § 28, 15 février 2011).
34.  Ainsi, aux yeux de la Cour, la loi prévoyait un recours effectif et disponible pour demander l'assistance d'un avocat. Dans ces circonstances, la Cour est d'avis que considérer la demande du requérant, qui alléguait tout de même disposer d'un revenu mensuel de 2 400 CHF (soit environ 1 973 EUR), comme une demande d'exemption des frais judiciaires uniquement, comme l'a fait le Tribunal fédéral, n'apparaît pas entaché d'arbitraire, étant précisé que les autorités internes disposent d'un pouvoir d'appréciation pour règlementer l'accès à la justice (Tolstoy Miloslavsky c. Royaume-Uni, 13 juillet 1995, § 59, série A no 316-B ; Kreuz c. Pologne, no 28249/95, § 56, CEDH 2001-VI; Pedro Ramos, précité, § 38).
35.  À la lumière de ce qui précède, la Cour estime que le requérant, en omettant de demander l'assistance d'un avocat devant le Tribunal fédéral, s'est abstenu de faire usage d'une voie de recours effective.
36.  Partant, le grief tiré de l'article 6 de la Convention quant à l'assistance judicaire et à l'absence de représentation du requérant doit être déclaré irrecevable pour non-épuisement des voies de recours internes et doit ainsi être rejeté en application de l'article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.
B.  Quant au droit d'accès à un tribunal et les exigences formelles
37.  Ensuite, le requérant se plaint, en substance du moins, de ce que son recours a été déclaré irrecevable faute de motivation suffisante. Cela étant, il reconnaît que son recours n'était pas conforme aux exigences de l'article 42 de la LTF.
38.  Le Gouvernement estime de son côté que l'irrecevabilité du recours faute de motivation suffisante ne saurait constituer, en elle-même, une violation de l'article 6 § 1 de la Convention. Selon le Gouvernement, la question soumise au Tribunal fédéral doit en effet être clairement présentée, de sorte à ce que le Tribunal fédéral puisse exercer sa fonction d'autorité judiciaire suprême de la Suisse.
39.  La Cour rappelle que l'article 6 de la Convention n'astreint pas les États contractants à créer des cours d'appel ou de cassation (voir, parmi d'autres, Delcourt c. Belgique, 17 janvier 1970, §§ 25-26, série A no 11 et Kemp et autres c. Luxembourg, no 17140/05, § 48, 24 avril 2008). Cependant, si de telles juridictions existent, les garanties de l'article 6 de la Convention doivent être respectées, notamment en ce qu'il assure aux plaideurs un droit effectif d'accès aux tribunaux pour les décisions relatives à leurs « droits et obligations de caractère civil » (voir, parmi d'autres, Brualla Gómez de la Torre c. Espagne, 19 décembre 1997, § 37, Recueil 1997-VIII). En outre, la compatibilité des limitations prévues par le droit interne avec le droit d'accès à un tribunal reconnu par l'article 6 § 1 de la Convention dépend des particularités de la procédure en cause et il faut prendre en compte l'ensemble du procès mené dans l'ordre juridique interne et le rôle qu'y a joué la cour suprême, les conditions de recevabilité d'un pourvoi en cassation pouvant être plus rigoureuses que pour un appel (Khalfaoui c. France, no 34791/97, § 37, CEDH 1999-IX).
40. La Cour observe que le Tribunal fédéral intervenait comme troisième instance judicaire dans la présente procédure. À cet égard, la Cour a déjà jugé que la précision exigée dans la formulation des moyens de cassation a clairement pour objectif de permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle en droit (Kemp et autres, précité, § 53 ; Dattel c. Luxembourg (no 2), no 18522/06, § 38, 30 juillet 2009 ; Ewert c. Luxembourg, no 49375/07, § 84, 22 juillet 2010). La Cour constate par ailleurs que le Tribunal fédéral a jugé dans son arrêt que la motivation du recours était manifestement insuffisante à la lumière de l'article 42 alinéa 2 de la LTF, ce que le requérant admet.
À ce stade, la Cour rappelle que le Tribunal fédéral était mieux placé qu'elle pour apprécier la recevabilité du recours devant lui car il n'appartient en principe pas à la Cour d'interpréter le contenu des mémoires devant les instances nationales (voir, dans ce sens, Gsell, précité, § 51).
Ainsi, la Cour constate que le rejet du recours se fondait sur une base légale et n'apparaît pas entaché d'arbitraire. La Cour est par conséquent d'avis qu'il appartenait au requérant d'exposer lui-même les motifs permettant d'avoir droit à l'assistance judiciaire en soumettant un recours conforme aux exigences légales, d'autant plus que les allégations du requérant relatives à l'impossibilité de trouver un avocat pour déposer un recours devant le Tribunal fédéral ne sont pas étayées.
41.  Il s'ensuit que le grief tiré de l'article 6 de la Convention quant au droit d'accès à un tribunal et des exigences formelles doit être rejeté comme manifestement mal fondé, en application de l'article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.
C.  Quant à la motivation de l'arrêt du Tribunal fédéral
42.  Le requérant allègue enfin que l'absence de motivation de la décision du Tribunal fédéral rejetant sa demande d'assistance judiciaire viole l'article 6 de la Convention.
43.  Le Gouvernement relève pour sa part que la demande d'assistance judicaire était devenue sans objet, faute pour le requérant de devoir supporter les moindres frais en rapport avec la procédure. Partant, le Tribunal fédéral n'avait pas à prendre une décision à ce sujet et ne pouvait pas motiver une décision qui n'existait pas.
44.  La Cour a déjà jugé que si l'article 6 § 1 de la Convention oblige les tribunaux à motiver leurs décisions, il ne peut pas se comprendre comme exigeant une réponse détaillée à chaque argument (Van de Hurk c. Pays-Bas, série A no 288, § 61 ; Latournerie c. France (déc.), no 50321/99, 10 décembre 2002). Il en découle que l'article 6 de la Convention n'exige pas que soit motivée en détail une décision par laquelle une juridiction de recours, se fondant sur une disposition légale spécifique, écarte un recours comme dépourvu de chances de succès (Burg et autres c. France (déc.), no 34763/02, CEDH 2003-II ; Pedro Ramos, précité, § 39).
45.  En l'espèce, la Cour observe que le Tribunal fédéral a précisé ne pas entrer en matière sur la base de l'article 108 alinéa 1 lettre b de la LTF au motif que le recours n'était pas suffisamment motivé. La Cour note également que le Tribunal fédéral a renoncé à prélever des frais sur la base de l'article 66 alinéa 1 deuxième phrase de la LTF, raison pour laquelle la demande d'exemption des frais judiciaires devenait sans objet. La Cour est ainsi d'avis que le requérant a obtenu une décision lui indiquant le motif pour lequel sa demande d'assistance judiciaire était devenue sans objet.
46.  Il s'ensuit que le grief tiré de l'article 6 de la Convention quant à l'absence de motivation de la décision du Tribunal fédéral doit être rejeté comme manifestement mal fondé, en application de l'article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.
 


Disposition

Par ces motifs, la Cour, à la majorité,
 
Déclare la requête irrecevable.
  Stanley Naismith   Greffier
  Guido Raimondi   Président
 

contenu

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Etat de fait

Considérants

Dispositif

références

Article: Art. 6 par. 1 CEDH, art. 108 al. 1 let. b LTF