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Urteilskopf

62369/00


Dorsaz Jean c. Suisse
Décision d'irrecevabilité no. 62369/00, 23 octobre 2001

Regeste

Diese Zusammenfassung existiert nur auf Französisch.

DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ de la CourEDH:
SUISSE: Art. 5 par. 1 let. a, b et c CEDH. Arrestation lors de l'audience devant la cour d'appel.

La personne condamnée en première instance, qu'elle ait ou non été détenue jusqu'à ce moment, se trouve dans le cas prévu à l'art. 5 par. 1 let. a CEDH. Ainsi, lors de son incarcération au cours de l'audience d'appel, le requérant ne se trouvait plus en détention préventive, mais en privation de liberté après condamnation; cette dernière ne peut être limitée à l'hypothèse d'une condamnation définitive, car cela exclurait l'arrestation à l'audience de personnes condamnées ayant comparu en liberté, quels que soient les recours encore ouverts.
Dès lors qu'aucun grief précis n'a été formulé contre le jugement précité, la détention était régulièrement couverte par l'art. 5 par. 1 let. a CEDH et l'intéressé ne peut plus invoquer les motifs tirés de l'art. 5 par. 1 let. b et c CEDH.
Conclusion: requête déclarée irrecevable.

DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ de la CourEDH:
SUISSE: Art. 6 par. 1 et 3 let. b et c CEDH combinés. Refus d'ajourner les débats privant le requérant du temps nécessaire à la préparation de l'audience d'appel. Droit à un défenseur lors de ces débats.

Malgré l'ampleur du dossier comportant 80'000 pages, il s'agissait d'une procédure d'appel et les faits avaient été clairement établis en première instance. L'avocat du requérant avait une connaissance détaillée du dossier et il n'apparaît pas que les sept mois octroyés pour préparer l'audience d'appel étaient insuffisants.
L'avocat a défendu son client pendant six ans, puis demandé à être relevé de son mandat d'avocat d'office. Le requérant a mandaté un second avocat mais l'assistance de celui-ci fut refusée par le président de la cour d'appel. C'est le requérant lui-même qui a demandé à son défenseur de ne pas intervenir lors des débats et ce n'est que dix-sept jours avant l'audience que l'avocat a déclaré qu'il n'assisterait pas à l'audience pour raisons de santé. Un mois plus tard, il a de nouveau assuré la défense de son client. Au surplus, la cour d'appel a tenu compte des arguments contenus dans le mémoire d'appel puisqu'elle a réduit la peine. En l'absence de carence manifeste, les autorités n'avaient pas à intervenir et les droits de la défense n'ont pas été violés.
Conclusion: requête déclarée irrecevable.

DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ de la CourEDH:
SUISSE: Art. 6 par. 2 CEDH. Arrestation lors de l'ouverture des débats devant la cour d'appel.

Les questions qu'un magistrat doit trancher avant les débats ne se confondent pas avec celles qui dicteront son jugement final. En se prononçant sur la détention provisoire et sur d'autres problèmes de ce genre avant le procès, il apprécie sommairement les données disponibles pour déterminer si de prime abord les soupçons de la police ont quelque consistance. On ne saurait assimiler des soupçons à un constat formel de culpabilité.
En l'espèce, la culpabilité du requérant a été légalement établie par le tribunal de première instance, puis confirmée en appel. Il n'apparaît pas que les autorités aient méconnu l'exigence du respect de la présomption d'innocence.
Conclusion: requête déclarée irrecevable.





Sachverhalt

La Cour européenne des Droits de l'Homme (quatrième section), siégeant le 23 octobre 2001 en une chambre composée de
MM. G.Ress, président,
A. Pastor Ridruejo,
L. Caflisch,
J. Makarczyk,
V. Butkevych,
J. Hedigan,
Mme S.Botoucharova, juges,
et de M. V. Berger, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 22 août 2000 et enregistrée le 30 octobre 2000,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
Le requérant, Jean Dorsaz, ressortissant suisse né en 1941, est incarcéré au centre pénitentiaire de Crêtelongue à Granges (Valais). Il est représenté devant la Cour par Me Farquet, avocat à Martigny.
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.
Le 14 septembre 1992, une procédure pénale fut ouverte contre le requérant, prévenu de divers délits patrimoniaux commis au détriment de la Banque cantonale du Valais. Ce dernier choisit comme défenseur Me Farquet, avocat, le 2 avril 1993.
Par un jugement du 27 avril 1998 rendu après des débats contradictoires, le tribunal du IIe arrondissement pour le district de Sion condamna le requérant à la peine de huit ans de réclusion, sous déduction de trois jours de détention préventive, pour abus de confiance, escroquerie, délit manqué d'escroquerie, faux dans les titres et obtention frauduleuse d'une constatation fausse.
Le 24 septembre 1998, il saisit d'un appel le tribunal cantonal du canton du Valais. Le mémoire d'appel, rédigé par Me Farquet, comprenait soixante-six pages et des annexes et contenait des conclusions tendant à l'acquittement de l'intéressé. L'avocat fit également une demande d'assistance judiciaire au nom du requérant. Il mit aussi en cause l'impartialité des juges formant le tribunal cantonal, si bien que deux procédures distinctes coexistèrent :
a) Le 22 octobre 1998, Me Farquet demanda la récusation de l'ensemble du tribunal cantonal, expliquant qu'aucun des juges du Valais ne pouvait statuer impartialement sur son affaire.
Le 28 octobre suivant, le Conseil d'Etat du canton du Valais, autorité exécutive, constitua un tribunal extraordinaire composé de trois juges appelés à statuer sur la demande de récusation.
Le 7 décembre 1998, le défenseur du requérant adressa au tribunal extraordinaire une demande de récusation visant l'intégralité de ce tribunal, pour le même motif que celui appuyant sa demande de récusation du tribunal cantonal valaisan.
Dans une décision du 6 janvier 1999, le tribunal extraordinaire se prononça sur les deux demandes de récusation. Il rejeta, d'une part, la demande de récusation en tant qu'elle était dirigée contre chacun de ses membres et contre l'ensemble du tribunal, d'autre part, la demande de
récusation de l'ensemble du tribunal cantonal et de certains juges en particulier. Il admit toutefois les propositions de récusation que douze juges (sept juges et cinq juges suppléants) composant le tribunal cantonal avaient personnellement faites.
Le 8 avril 1999, le Tribunal fédéral rejeta un recours que Me Farquet avait introduit au nom du requérant.
Me Farquet introduisit, pour le requérant, une requête auprès de la Cour européenne des Droits de l'Homme le 15 décembre 1998 afin de dénoncer la partialité des juges valaisans. Le requête fut déclarée irrecevable dans une décision du 7 septembre 2001.
b) Le 3 décembre 1998, Me P., avocat, informa le tribunal cantonal que le requérant lui avait demandé d'assurer sa défense lors de l'audience d'appel. L'avocat demanda le report de cette audience à « l'année judiciaire 1999/2000, si possible après Pâques ».
Le 28 janvier 1999, le tribunal cantonal cita les parties à comparaître à l'audience d'appel fixée au 26 avril 1999.
Par une ordonnance du même jour, le président de la cour d'appel du tribunal cantonal admit partiellement la demande d'assistance judiciaire présentée par le requérant et lui désigna Me Farquet comme avocat d'office. Il indiqua toutefois à Me P. que sa désignation comme second mandataire du requérant n'était « pas concevable » dans le cadre de l'assistance judiciaire.
Le 11 février 1999, Me Farquet requit le report de l'audience d'appel au début de l'an 2000. Il demanda que Me P. soit admis à l'assister dans ce cadre, en raison d'un surcroît de travail, de l'énorme complexité de la cause déférée en appel et du court laps de temps constaté entre le dépôt de l'appel, le date de fixation des débats et l'audience elle-même ; à défaut, il émit le désir d'être relevé de son mandat d'office.
Par une ordonnance du 19 février 1999, le président de la cour d'appel rejeta ces requêtes.
Le 11 mars 1999, Me P. informa le président de la cour d'appel que le requérant lui avait confié le mandat de sa défense. Il demanda l'autorisation de le défendre aux côtés de Me Farquet ainsi que le report de l'audience.
Le 22 mars 1999, le président de la cour d'appel rejeta ces deux requêtes. Il considéra que Me Farquet, défenseur du requérant depuis 1993, avocat d'office suite à la décision du 28 janvier 1999 et auteur du mémoire d'appel, était en mesure d'assurer la défense du requérant.
Le 9 avril 1999, Me Farquet informa la cour d'appel qu'il était dans l'impossibilité d'assister le requérant aux débats du 26 avril 1999. Il produisit une lettre du requérant du 8 avril 1999 dans laquelle celui-ci marquait son admiration pour le travail accompli, mais le priait de ne pas intervenir lors des débats d'appel. Cette lettre contenait notamment ces termes :
« (...) je dois me rendre à l'évidence, qu'il ne vous sera plus possible d'assumer ce mandat avec les garanties juridiques suffisantes (...)
Aujourd'hui, au vu de ces profondes réflexions, je ne vois pas d'autre solution que de vous demander de ne pas intervenir lors des débats du 26 avril 1999 pour éviter une présence de façade. (...) »
Dans un recours de droit public adressé au Tribunal fédéral, le requérant requit l'annulation de la décision du 22 mars 1999, requête qui fut rejetée le 22 avril suivant.
Le même jour, Me Farquet informa la cour d'appel qu'il ne se présenterait pas aux débats et réitéra sa requête d'être libéré de cette défense d'office. Il joignit à son courrier diverses pièces attestant d'une intense activité professionnelle et publique ainsi qu'un certificat médical daté du 17 avril 1999 qui mentionnait notamment les éléments suivants :
« (...) L'anamnèse médicale du patient a mis en évidence un état de stress évident. L'anamnèse par système a mis en évidence des symptômes végétatifs avec sudation, tremblement et sécheresse de la bouche ; des symptômes survenant au niveau du thorax et de l'abdomen avec sentiment d'oppression, des douleurs thoraciques et sensation de malaise ; des symptômes psychiques avec un sentiment de déréalisation et de dépersonnalisation ; des symptômes généraux avec des bouffées de chaleur et des frissons ; des symptômes dus à la contraction avec incapacité de se détendre, un état de nervosité et de tension psychique (...).
Mr Léo FARQUET a été mis au bénéfice d'un traitement anti-hypertenseur et anti-dépresseur. (...) »
Le 26 avril 1999, le requérant se présenta seul devant la cour d'appel. La cour décida, après une suspension d'audience, de poursuivre le procès et ordonna l'arrestation immédiate du requérant ainsi que son maintien en détention préventive durant les trois jours de débats.
Le défenseur de choix du requérant, Me P., fut présent tant à l'ouverture des débats que pendant ceux-ci ainsi qu'à leur clôture et était disposé à assurer sa défense, mais fut interdit de parole. La cour d'appel refusa à Me P. de déposer son projet de plaidoirie, car il n'était pas l'avocat d'office du requérant.
Par un jugement du 21 mai 1999, la cour d'appel pénale du tribunal cantonal valaisan admit partiellement l'appel du requérant, prononça l'acquittement sur un point et réduisit la peine de huit à six ans de réclusion, sous déduction de six jours de détention préventive.
Le 25 mai 1999, Me Farquet, agissant au nom du requérant, déposa un recours de droit public contre les décisions incidentes des 26 et 28 avril 1999 par lesquelles la cour d'appel avait rejeté la requête d'ajournement des débats, décidé de poursuivre les débats nonobstant l'absence du défenseur d'office, refusé que Me P. l'assiste et enfin, l'avait incarcéré pour la durée des débats. Il déposa également un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral invoquant diverses violations du droit fédéral.
Le 24 février 2000, le Tribunal fédéral rejeta le recours de droit public. Il se prononça notamment en ces termes :
« (...) 2. Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 4 aCst. dans la mesure où il n'a pas été assisté d'un avocat lors des débats devant la Cour d'appel. (...)
b) Dans son jugement du 21 mai 1999, la Cour d'appel a longuement motivé sa décision de procéder nonobstant l'absence de défenseur. En résumé, après avoir examiné le comportement du recourant et des avocats précités, elle a conclu qu'il ne ressortait pas des deux certificats médicaux établis par le Dr [P.] - celui remis lors de l'audience le 28 avril 1999 n'apportant rien à celui daté du 17 avril 1999 - que Me Farquet était incapable de comparaître, que cette absence n'était que l'ultime moyen employé par le recourant et ce mandataire pour reporter l'audience, qu'en invitant celui-ci à ne pas l'assister aux débats et en comparaissant seul, le recourant avait cherché à provoquer un ajournement des débats et, de la sorte, utilisé les droits de la défense afin de paralyser le procès et de le repousser à son gré. Elle a qualifié d'abusif et dilatoire le comportement du recourant qui, s'étant en toute connaissance de cause privé de l'assistance de son avocat, s'était ensuite prévalu du droit à un défenseur. (...)
d) En l'espèce, la Cour d'appel a retenu en fait que le recourant, d'entente avec son défenseur, avait délibérément invité celui-ci à ne pas comparaître devant la Cour d'appel afin de paralyser le procès par un ajournement des débats, en d'autres termes qu'il s'était privé d'avocat en pleine connaissance de cause dans le seul but d'obtenir le report des débats, qui lui avait d'ailleurs été précédemment refusé à plusieurs reprises. A l'encontre de cette constatation, le recourant ne soulève pas de moyen spécifique tiré de l'arbitraire ; à défaut d'être mise en cause, la constatation lie le Tribunal fédéral.
Certes, dans une remarque liminaire, le recourant évoque la dépression de Me Farquet ; il échafaude diverses explications possibles au comportement de son avocat et relève en particulier qu'il est « assez vraisemblable » que le refus de la Cour d'appel, le 22 mars 1999, d'ajourner les débats et d'admettre un second défenseur aient provoqué chez celui-ci une rupture grave de son état psychique sous forme de dépression. Emettre ces hypothèses ne démontre évidemment pas que la constatation précitée de la Cour d'appel serait insoutenable.
Par ailleurs, le certificat médical du Dr [P.] du 17 avril 1999 ne parle pas d'une grave rupture de l'état psychique, mais d'un état de stress évident, d'une tension artérielle excessive et d'une surcharge pondérale, d'un traitement antihypertenseur et antidépresseur, de recommandations formelles notamment pour une meilleure hygiène de vie, une diminution de l'activité professionnelle, une plus grande participation à la vie privée et familiale pour diminuer l'état de stress et d'anxiété. C'est sans arbitraire que la Cour d'appel a conclu que ce certificat ne démontrait pas l'incapacité de Me Farquet de comparaître aux débats. A noter d'ailleurs que le recourant lui-même relève le fait que, le jour des débats, Me Farquet était à son étude. (...)
e) L'abus de droit consiste notamment à utiliser une institution juridique à des fins étrangères à son but pour réaliser des intérêts que cette institution ne veut pas protéger, de telle sorte que l'écart entre le droit exercé et l'intérêt qu'il est censé protéger soit manifeste (...).
Outre la garantie découlant des art. 4 aCst et 6 CEDH (...), le recourant devait, en vertu du droit cantonal, obligatoirement être assisté d'un défenseur (...). En connaissance de cette règle, il a invité son défenseur d'office à ne pas comparaître, puis a invoqué son droit à un défenseur et pris argument du défaut de celui-ci pour requérir l'ajournement des débats et, en conséquence, retarder l'issue de la procédure. Il a ainsi tenté de détourner l'institution de défense obligatoire de son but, qui est de garantir à l'accusé un procès équitable et non de lui ouvrir la possibilité de manoeuvres dilatoires. Le comportement contradictoire du recourant apparaît constitutif d'un abus manifeste des droits de la défense. Dès lors que ce comportement lui était imputable, la Cour d'appel pouvait passer outre à l'absence de défenseur ; elle le pouvait d'autant plus que le recourant avait été assisté d'un avocat durant l'instruction et la procédure de première instance, que cet avocat avait déposé une déclaration d'appel détaillée, que le Ministère public n'avait pour sa part pas recouru, que la Cour d'appel ne pouvait revoir, en défaveur du recourant, des points non remis en cause dans sa déclaration de recours (...), et que le principe de l'interdiction de la reformatio in pejus s'appliquait en appel (...).
Dans ces circonstances, le recourant doit supporter les conséquences de son comportement abusif durant la procédure d'appel. Le grief soulevé est infondé dans la mesure où il est recevable (...)
4. Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 6 par. 3 let. b CEDH (...), dans la mesure où, à la suite du refus de reporter les débats à l'automne 1999, il n'aurait pas disposé du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. (...)
En l'espèce, le dossier de la cause et le jugement du Tribunal d'arrondissement ont certes une ampleur tout à fait exceptionnelle. Mais Me Farquet, mandaté le 2 avril 1993, a défendu le recourant durant l'instruction et la procédure de première instance ; il connaissait donc bien le dossier. Le 24 septembre 1998, il a déposé une déclaration d'appel motivée de 66 pages ; à défaut d'appel de la part du Ministère public, la procédure d'appel ne portait que sur les points soulevés par le recourant (...). Le 28 janvier 1999, le président de la Cour d'appel a fixé les débats au 26 avril 1999, soit trois mois plus tard et sept mois après le dépôt de la déclaration d'appel.
Dans son arrêt du 22 avril 1999 (....), le Tribunal fédéral a relevé mal comprendre comment Me Farquet pouvait prétendre ne pas avoir disposé de suffisamment de temps pour préparer la défense du recourant et a retenu que le comportement de celui-ci pouvait objectivement apparaître comme abusif et dilatoire. En l'espèce, le recourant se contente d'affirmer sans autre démonstration que le temps à disposition était insuffisant et de citer des passages de doctrine que personne ne conteste d'ailleurs. Mais il n'apporte aucun élément propre à réviser l'appréciation précitée, qui est convaincante. Au contraire, l'abus du droit qu'il a commis au début des débats en relation avec le droit à un défenseur la conforte. Le seul élément concret que le recourant articule est le soupçon qu'on ait à tout prix voulu, vu la « portée socio-politique » de la cause, « classer » le dossier au niveau cantonal avant les élections fédérales de l'automne. Cela n'a rien à voir avec la question de savoir s'il a suffisamment eu de temps à disposition pour préparer sa défense.
Pour l'essentiel, il s'agissait de préparer la plaidoirie. Vu la connaissance détaillée du dossier que possédait Me Farquet et eu égard à la déclaration d'appel circonstanciée déposée par celui-ci, un délai de trois mois dès réception de la citation à comparaître respectivement de sept mois dès le dépôt de la déclaration d'appel était suffisant pour ce faire. Le grief est infondé. (...)
10. Se plaignant d'une violation de la présomption d'innocence garantie à l'art. 6 § 2 CEDH, le recourant soutient que son incarcération pour la durée des débats, du 26 au 28 avril 1999, l'aurait désigné à l'opinion publique comme coupable (...)
La Cour d'appel a ordonné l'incarcération du recourant en raison du risque, existant selon elle, qu'il n'entrave le bon déroulement du procès en faisant défaut à l'entier des débats ainsi qu'en raison de l'importance de la peine « susceptible » d'être prononcée. Le recourant critique spécialement ce dernier terme. Mais la formulation est prudente et ne dit précisément pas qu'une peine est certaine ; elle est conforme au devoir de prudence du juge (...), à plus forte raison que la procédure se trouvait au stade de l'appel et que le recourant avait été condamné en première instance. Pour le surplus, incarcérer une personne dans le but de garantir le bon déroulement de la procédure pénale n'est pas la désigner comme certainement coupable ; sinon, toute détention préventive serait exclue. La présomption d'innocence n'a partant pas été violée. Le grief est infondé. »
Le 24 février 2000 également, le Tribunal fédéral admit toutefois partiellement le pourvoi en nullité. Il estima en effet que le requérant devait être libéré de la charge de certaines infractions pénales, car les éléments constitutifs de ces infractions n'étaient pas réalisés, et renvoya la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
Après des débats contradictoires au cours desquels le requérant et son avocat d'office, Me Farquet, ont pu exposer leurs points de vue, la cour d'appel cantonale réduisit, dans une décision du 26 mai 2000, la peine à quatre ans et demi de réclusion.
Suite à l'entrée en force de cette condamnation, le requérant se présenta le 27 mars 2001 au pénitencier cantonal pour purger sa peine. Il y est encore incarcéré.
GRIEFS
1. Invoquant l'article 5 § 1 a), b) et c) de la Convention, le requérant se plaint de ce qu'il a été incarcéré durant l'audience d'appel, soit du 26 au 28 avril 1999, sans qu'aucune des conditions de la détention préventive ne soit remplie. Il allègue également la violation de l'article 5 § 4 de la Convention, car lors de cette incarcération, il n'a pas eu la possibilité d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention. Il estime qu'une telle démarche devant le Tribunal fédéral aurait été improductive, car cette juridiction n'aurait pas pu statuer sur un tel recours dans un délai propre à remédier à la détention illégale déjà subie.
2. Le requérant allègue ne pas avoir bénéficié d'une procédure équitable en invoquant l'article 6 §§ 1 et 3 b) et c) de la Convention, du fait que son avocat d'office, Me Farquet, n'a pas disposé du temps et des facilités
nécessaires à la préparation de sa défense dans le cadre de la procédure d'appel, et que lui-même n'a pas bénéficié de la présence d'un défenseur lors des débats en appel devant la cour cantonale valaisanne.
3. Il allègue enfin une violation du principe de la présomption d'innocence garanti par l'article 6 § 2 de la Convention car, compte tenu de l'effet dévolutif de l'appel, il était encore présumé innocent à l'ouverture des débats devant la cour d'appel cantonale et c'est donc à tort qu'il a été incarcéré durant les débats.


Erwägungen

EN DROIT
1. Le requérant se plaint, sans plus de précision, du fait qu'il a été maintenu en détention préventive durant la phase de l'audience en appel et qu'il n'a pas eu accès à une voie de recours adéquate au cours de son incarcération. Il invoque l'article 5 §§ 1 a), b) et c) et 4 de la Convention selon lequel :
« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :
a) s'il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent ;
b) s'il a fait l'objet d'une arrestation ou d'une détention régulières pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue de garantir l'exécution d'une obligation prescrite par la loi ;
c) s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis une infraction ou qu'il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l'empêcher de commettre une infraction ou de s'enfuir après l'accomplissement de celle-ci ;
(...)
4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. (...) »
Selon l'article 35 § 1 de la Convention, « la Cour ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes (...) ». Or, il n'apparaît pas que le requérant ait, à cet égard, épuisé les voies de recours internes, puisqu'il n'a pas soulevé le grief tiré de l'article 5 § 4 de la Convention, expressément ou en substance, devant les juridictions nationales (arrêt Cardot c. France du 19 mars 1991, série A n° 200, p. 18, § 34).
Par ailleurs, selon la jurisprudence des organes de la Convention, la personne condamnée en première instance, qu'elle ait ou non été détenue jusqu'à ce moment, se trouve dans le cas prévu à l'article 5 § 1 a), lequel autorise la privation de liberté des personnes « après condamnation ». Ces derniers mots ne peuvent être interprétés comme se limitant à l'hypothèse d'une condamnation définitive, car ceci exclurait l'arrestation à l'audience de personnes condamnées ayant comparu en liberté, quels que soient les recours qui leur sont encore ouverts. Or, une telle pratique est courante dans de nombreux Etats contractants et on ne peut croire qu'ils aient entendu y renoncer. On ne peut perdre de vue, au surplus, le fait que la culpabilité d'une personne détenue pendant la procédure d'appel ou de cassation a été établie au cours d'un procès qui s'est déroulé conformément aux exigences de l'article 6 (arrêt Wemhoff c. Allemagne du 27 juin 1968, série A n° 7, p. 23, § 9).
En l'espèce, par un jugement du 27 avril 1998, le requérant a été condamné en première instance à une peine de huit ans de réclusion, sous déduction de trois jours de détention préventive. Lors de son incarcération au cours de l'audience d'appel, qui a duré du 26 au 28 avril 1999, il ne se trouvait plus dans la situation de la détention préventive, mais dans le cas d'une privation de liberté « après condamnation ».
Ainsi, le requérant ne saurait invoquer les motifs de la détention préventive tels qu'ils ressortent de l'article 5 § 1 b) et c). Dès lors qu'aucun grief précis n'a été formulé contre le jugement du 27 avril 1998, la détention apparaît également avoir été régulièrement couverte par l'article 5 § 1 a). Il s'ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée en application de l'article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
2. Le requérant invoque les paragraphes 1 et 3 b) et c) de l'article 6 de la Convention, ainsi libellés :
« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)
3. Tout accusé a droit notamment à :
(...)
b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;
c) se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent ;
(...) »
Les exigences du paragraphe 3 b) et c) de l'article 6 de la Convention s'analysant en éléments particuliers du droit à un procès équitable, garanti par le paragraphe 1 de l'article 6, la Cour étudiera l'ensemble des griefs
sous l'angle des trois textes combinés (voir notamment les arrêts Van Geyseghem c. Belgique [GC], n° 26103/95, CEDH 1999-I, § 27, Hadjianastassiou c. Grèce du 16 décembre 1992, série A n° 252, p. 16, § 31, et Melin c. France du 22 juin 1993, série A n° 261-A, p. 11, § 21).
a) Paragraphe 1 combiné avec le paragraphe 3 b)
Le requérant se plaint de ce que son mandataire d'office n'a pas disposé du temps nécessaire à la préparation de l'audience, car les autorités cantonales ont rejeté sa requête d'ajournement des débats. Son avocat avait requis de renvoyer l'audience d'appel à l'automne 1999, en raison du délai très court entre la date de fixation des débats et la date de l'audience et compte tenu de la complexité de l'affaire, du surcroît de travail et de son état de santé physique et psychique.
A la lumière des explications et des documents soumis par le requérant, la Cour relève en particulier que, malgré le fait que le requérant souligne l'ampleur du dossier comportant 80 000 pages, il s'agissait d'une procédure d'appel et les faits étaient déjà bien connus du mandataire puisqu'ils avaient été clairement établis au cours de la procédure de première instance. Par ailleurs, Me Farquet assistait le requérant depuis 1993, soit durant toute la phase de l'instruction et de la procédure de première instance et avait une connaissance détaillée du dossier. L'avocat d'office ayant déposé le mémoire d'appel le 24 septembre 1998, il n'apparaît pas que les sept mois qui lui avaient été octroyés pour préparer l'audience d'appel étaient insuffisants.
En conclusion, le requérant ne saurait prétendre que les autorités l'ont placé dans l'impossibilité de préparer l'audience d'appel. Il n'a dès lors subi aucune entrave à la jouissance effective des droits garantis par l'article 6 §§ 1 et 3 b) de la Convention.
b) Paragraphe 1 combiné avec le paragraphe 3 c)
Le requérant allègue qu'il n'a pas bénéficié de la présence d'un défenseur lors de l'audience qui s'est déroulée devant le tribunal cantonal. Son avocat d'office, Me Farquet, souffrant de stress, d'un état dépressif et occupé par une intense activité professionnelle et publique, n'a pas pu se présenter à l'audience devant la cour d'appel le 26 avril 1999. Son avocat de choix, Me P., bien que présent à l'audience et disposé à le défendre, s'est vu refuser le droit à la parole.
Le but de la Convention consiste à protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs. La nomination n'assure pas à elle seule l'effectivité de l'assistance car l'avocat d'office peut mourir, tomber gravement malade, avoir un empêchement durable ou se dérober à ses devoirs. Si on les en avertit, les autorités doivent le remplacer ou l'amener à s'acquitter de sa tâche. On ne saurait pour autant imputer à un Etat la responsabilité de toute défaillance d'un avocat d'office. De l'indépendance du barreau par rapport à l'Etat, il découle que la conduite de la défense appartient pour l'essentiel à l'accusé et à son avocat, commis au titre de l'aide judiciaire ou rétribué par son client. L'article 6 § 3 c) n'oblige les autorités nationales compétentes à intervenir que si la carence de l'avocat d'office apparaît manifeste ou si on les en informe suffisamment de quelque autre manière (arrêt Kamasinski c. Autriche du 19 décembre 1989, série A n° 168, p. 33, § 65).
En l'espèce, la Cour observe que, comme l'a relevé le Tribunal fédéral dans son arrêt du 24 février 2000, Me Farquet a défendu le requérant du mois d'avril 1993 jusqu'au mois d'avril 1999, d'abord comme avocat choisi, puis comme avocat d'office. Il a rédigé lui-même la déclaration d'appel de soixante-six pages et il avait personnellement eu connaissance des 80 000 pages qui formaient l'ensemble du dossier pénal, en partie durant la phase de l'instruction et complètement en première instance. Lorsque, le 28 janvier 1999, le président de la cour d'appel fixa la date des débats, le mandataire formula, le 11 février 1999, une requête de renvoi des débats d'appel et, subsidiairement, demanda à être relevé de son mandat.
Parallèlement, le 3 décembre 1998, Me P. informa la cour d'appel qu'il avait été mandaté par le requérant et sollicita le report des débats afin de pouvoir préparer la défense de celui-ci. Par une décision du 22 mars 1999, le président de la cour d'appel, qui avait accordé l'assistance judiciaire en désignant Me Farquet comme avocat d'office le 28 janvier 1999, dénia au requérant l'assistance d'un second avocat et refusa une nouvelle fois de renvoyer les débats.
La Cour relève que le requérant lui-même, par une lettre du 8 avril 1999, demanda à Me Farquet de ne pas intervenir lors des débats pour éviter une présence de façade. Elle observe également que ce n'est que le 9 avril 1999 que Me Farquet informa la cour d'appel qu'il était dans l'impossibilité d'assister aux débats du 26 avril en raison de problèmes de santé et présenta un certificat médical attestant un état de stress, de surmenage et de dépression. Ce dernier ne s'est finalement pas présenté à l'audience devant la cour cantonale. Toutefois, le jour des débats, il travaillait à son étude. La Cour note enfin que Me Farquet a de nouveau assuré la défense du requérant, tant devant les autorités internes que devant la Cour, à dater du 25 mai 1999.
Au surplus, la Cour relève que la cour d'appel a tenu compte des arguments du requérant développés dans son mémoire d'appel puisque, par un jugement du 21 mai 1999, elle admit partiellement le recours et la peine fut réduite de 8 ans à 6 ans de réclusion.
Au vu de ces éléments, la Cour constate que les droits de la défense n'ont pas été violés et que le requérant ne se s'est pas vu dénier le droit à un procès équitable garanti par les paragraphes 1 et 3 c) de l'article 6 de la Convention. Il n'y a donc eu violation d'aucun de ces textes.
Il s'ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée, au sens de l'article 35 § 3 de la Convention, et doit être rejetée en application de l'article 35 § 4 de la Convention.
3. Le requérant soutient que son arrestation le 26 avril 1999, lors de l'ouverture des débats devant la cour d'appel, a méconnu l'article 6 § 2 de la Convention. Selon lui, en effet, en raison de l'effet dévolutif de l'appel, il était à ces dates encore présumé innocent et ne pouvait en conséquence pas être incarcéré.
L'article 6 § 2 de la Convention est rédigé comme suit :
« Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. »
La Cour rappelle que les questions qu'un magistrat doit trancher de la sorte avant les débats ne se confondent pas avec celles qui dicteront son jugement final. En se prononçant sur la détention provisoire et sur d'autres problèmes de ce genre avant le procès, il apprécie sommairement les données disponibles pour déterminer si de prime abord les soupçons de la police ont quelque consistance ; lorsqu'il statue à l'issue du procès, il lui faut rechercher si les éléments produits et débattus en justice suffisent pour asseoir une condamnation. On ne saurait assimiler des soupçons à un constat formel de culpabilité (voir, par exemple, les arrêts Lutz c. Allemagne du 25 août 1987, série A n° 123-A, p. 25, § 62, et Hauschildt c. Danemark du 24 mai 1989, série A n° 154 p. 22, § 50).
En l'espèce, la Cour observe que la culpabilité du requérant a été légalement établie par le tribunal du IIe arrondissement pour le district de Sion, en date du 27 avril 1998, culpabilité qui a été confirmée ensuite en procédure d'appel, par une décision du 21 mai 1999. Il ne ressort pas du dossier que les autorités saisies de l'affaire auraient méconnu l'exigence du respect du principe de la présomption d'innocence.
Dès lors, ce grief est également manifestement mal fondé, au sens de l'article 35 § 3 de la Convention.


Entscheid

Par ces motifs, la Cour, à l'unanimité,
Déclare la requête irrecevable.
Vincent Berger Georg Ress
Greffier Président

Referenzen

Artikel: art. 5 par. 1 let. a CEDH, art. 4 aCst., Art. 6 par. 2 CEDH, art. 6 par. 3 let. b CEDH mehr...