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Urteilskopf

148 II 121


8. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause A. SA contre Direction des finances du canton de Fribourg (recours en matière de droit public)
2C_624/2021 du 28 mars 2022

Regeste

Art. 9, 27, 49, 94 Abs. 1, 127 BV; Art. 34 KAG; Art. 39 FINIG; Art. 103 FusG; Handänderungsabgabe, die anlässlich des Wechsels der Leitung eines Immobilien-Anlagefonds erhoben wird; Wirtschaftsfreiheit und Wettbewerbsneutralität; Vorrang des Bundesrechts.
Wenn die Leitung eines Anlagefonds im Grundbuch als Eigentümerin von Immobilien eingetragen wird, handelt es sich um treuhänderisches Eigentum (E. 4).
Es ist nicht willkürlich, anlässlich des Wechsels der Leitung eines Immobilien-Anlagefonds eine Handänderungsabgabe zu erheben. Auch ist im konkreten Fall die Beurteilung vertretbar, dass einer solchen Eigentumsübertragung eine Gegenleistung gegenübersteht (E. 6.5 und 6.6).
Eine Handänderungsabgabe ist keine Spezialsteuer, so dass die Wirtschaftsfreiheit gemäss Art. 27 BV dagegen keinen Schutz gewährt (E. 7).
Wenn anlässlich des Wechsels der Leitung eines Immobilien-Anlagefonds eine Handänderungsabgabe von 3 % erhoben wird, so verstösst das nicht gegen die ratio legis des früheren Art. 34 KAG oder von Art. 39 FINIG; ebenso wenig verletzt es den Vorrang des Bundesrechts (E. 8).

Sachverhalt ab Seite 123

BGE 148 II 121 S. 123
C. SA était jusqu'au 30 avril 2019 la direction du fonds de placement contractuel immobilier E., réservé aux investisseurs qualifiés. Ce fonds de placement comprenait plusieurs biens immobiliers, que C. SA gérait pour le compte d'investisseurs qualifiés, dont quatre immeubles situés dans le canton de Fribourg, répartis dans trois communes. Cette dernière était inscrite au registre foncier avec la mention indiquant l'appartenance des immeubles au fonds E.
Par contrat du 10 décembre 2018, C. SA a transféré à A. SA la direction du fonds E., avec effet au 1er mai 2019. En exécution de ce contrat, par acte authentique du 19 juin 2019, C. SA a transféré les quatre immeubles précités à A. SA, qui a été inscrite au registre foncier comme propriétaire le 26 juin 2019. Selon les termes de ce contrat, "ce transfert de propriété fiduciaire a lieu à titre gratuit aux conditions du présent acte, [A. SA] se substituant à C. SA dans ses fonctions de direction de fonds dans le cadre du contrat de placements collectifs, aucun changement n'intervenant au niveau du propriétaire économique". Il est notamment ajouté que "[A. SA] sesubstitue à C. SA dans sa qualité d'unique débitrice des dettes cédulaires pour le compte du fonds E., incorporées dans des cédules hypothécaires de registre totalisant 15'090'000 fr.".
Le 16 octobre 2019, le Registre foncier de la Gruyère a adressé à A. SA une facture de droits de mutation de 741'150 fr. calculée sur une valeur vénale totale de 24'705'000 fr. pour les quatre immeubles concernés, confirmée par décision sur réclamation du 20 janvier 2020. Par arrêt du 14 juin 2021, le Tribunal cantonal du canton de Fribourg a confirmé la décision sur réclamation du 20 janvier 2020.
A. SA a déposé un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt rendu le 14 juin 2021 par le Tribunal cantonal du canton de Fribourg. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
(résumé)

Erwägungen

Extrait des considérants:

4.

4.1 Aux termes de l'art. 7 al. 1 de la loi fédérale du 23 juin 2006 sur les placements collectifs de capitaux (LPCC; RS 951.31), les placements collectifs sont des apports constitués par des investisseurs pour être administrés en commun pour le compte de ces derniers, les besoins des investisseurs étant satisfaits à des conditions égales.
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L'art. 8 al. 1 et 2 LPCC prévoit que les placements collectifs ouverts peuvent revêtir, comme en l'espèce, la forme d'un fonds de placement contractuel et donnent à l'investisseur un droit direct ou indirect au remboursement de ses parts à la valeur nette d'inventaire à la charge de la fortune collective. Les parts sont des créances à l'encontre de la direction au titre de la participation à la fortune et au revenu du fonds de placement ou des participations à la société (art. 11 LPCC).
Le fonds de placement contractuel (fonds de placement) est fondé sur un contrat de placement collectif (contrat de fonds de placement) par lequel la direction s'engage à faire participer les investisseurs à un fonds de placement proportionnellement aux parts qu'ils ont acquises et à gérer la fortune collective de façon indépendante et en son propre nom, conformément aux dispositions du contrat de fonds de placement (art. 25 al. 1 LPCC). Le contrat de fonds de placement, qui est soumis à l'approbation de la FINMA, établit les droits et obligations des investisseurs, de la direction et de la banque dépositaire (art. 26 al. 1 et 2 LPCC). L'art. 58 LPCC définit les fonds de placement contractuels immobiliers comme des placements collectifs ouverts qui investissent leurs avoirs dans des valeurs immobilières. Ils peuvent ainsi investir dans des immeubles.
La direction de fonds était réglée aux art. 28 à 35 LPCC (RO 2006 5379; ces articles ont été remplacés depuis le 1er janvier 2020 [cf.RO 2018 5247] par les art. 32 à 40 de la loi fédérale du 15 juin 2018sur les établissements financiers [LEFin; RS 954.1]). Au sens de cesdispositions, la direction de fonds est une société anonyme dont le siège et l'administration principale sont en Suisse et dont le but principal est la gestion de fonds de placement pour le compte d'investisseurs, de façon indépendante et en son propre nom (voir les anciens art. 28 à 30 LPCC et l'art. 32 s. LEFin). Les droits et obligations de la direction de fonds peuvent être transférés à une autre direction de fonds, selon des modalités spécifiques (ancien art. 34 LPCC et art. 39 LEFin).

4.2 La LPCC ne détermine pas de façon explicite qui est propriétaire des immeubles du fonds contractuel. A cet égard force est de constater que le fonds de placement contractuel est fondé sur un contrat de placement, de sorte qu'il ne dispose pas de la personnalité juridique (arrêt 2C_684/2010 du 24 mai 2011 consid. 2.5.1) et qu'il ne peut par voie de conséquence pas être titulaire de droits
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réels. Quant aux investisseurs, ils n'ont envers la direction de fonds qu'une créance sous la forme d'une participation à la fortune et au revenu du fonds (art. 78 al. 1 let. a LPCC), cela signifie qu'ils n'ont pas la maîtrise sur les immeubles placés dans le fonds. C'est par conséquent à la direction que revient la tâche d'exercer les droits relevant du fonds de placement contractuel (ancien art. 30 let. d LPCC), en plus de gérer la fortune collective en son propre nom (art. 25 al. 1 LPCC). Comme la direction du fonds de placement doit agir dans l'intérêt du fonds, elle ne peut pas disposer librement de son droit de propriété. Pour cette raison, sa propriété est qualifiée de fiduciaire (ATF 101 II 154 consid. 1; ATF 99 Ib 438 consid. 2 et la doctrine majoritaire, cf. SIERRO, Loi sur les placements collectifs [LPCC], 2012, p. 74 s. n. 63 et les références citées; BIFFIGER, dans le même ouvrage, p. 523 n. 27; SCHÖNFELD, Kollektive Kapitalanlagen in Krisensituationen, 2016, p. 56 n. 142; arrêt 2C_684/2010 du 24 mai 2011 consid. 2.5.1, qui considère néanmoins que les immeubles doivent être attribués au fonds au sens de la législation en matière d'acquisition d'immeuble par les étrangers; d'un autre avis en matière de LFAIE (loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger [LFAIE; RS 211.412.41]: KLUNGE, LPCC et LFAIE, deux mondes qui peinent à se comprendre, in L'éclectique juridique, Recueil d'articles en l'honneur de Jacques Python, 2011, p. 84). Certains auteurs considèrent qu'il s'agit plutôt d'une quasi-fiducie (SIERRO, op. cit., p. 75 n. 64 et la référence citée).
Il convient de suivre la position de l' ATF 101 II 154 et de la doctrine majoritaire: en cas d'investissement dans des immeubles, c'est la direction du fonds de placement contractuel qui en devient la propriétaire au sens de ce qui a été vu ci-dessus et qui du reste est formellement inscrite comme telle au registre foncier avec la mention indiquant que les immeubles font partie du fonds immobilier (art. 86 al. 2bis, 1re phrase, de l'ordonnance du 22 novembre 2006 sur les placements collectifs de capitaux [OPCC; RS 951.311]). Cette mention n'a pour but que de préserver le droit de distraction des investisseurs en cas de faillite de la direction de fonds (ancien art. 35 LPCC et art. 40 al. 1 LEFin).

4.3 Il résulte de ce qui précède que la recourante en sa qualité de direction du fonds de placement E., est formellement inscrite au registre foncier. Elle est propriétaire fiduciaire au sens décrit
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ci-dessus des immeubles en cause, ce qui n'est contesté ni par l'instance précédente ni par la recourante.

5. Invoquant les art. 9 et 127 Cst., la recourante se plaint de l'interprétation et de l'application arbitraire et contraire au principe de la légalité de la loi fribourgeoise du 1er mai 1996 sur les droits de mutation et les droits de gages immobiliers (LDMG; RSF 635.1.1) par l'instance précédente.

5.1 Le principe de la légalité en droit fiscal, érigé en droit constitutionnel indépendant à l'art. 127 al. 1 Cst. et qui s'applique à toutes les contributions publiques, tant fédérales que cantonales ou communales, prévoit que les principes généraux régissant le régime fiscal, notamment la qualité de contribuable, l'objet de l'impôt et son mode de calcul, doivent être définis par la loi (cf. aussi art. 164 al. 1 let. d Cst.; ATF 143 I 227 consid. 4.2; ATF 136 I 142 consid. 3.1).

5.2 Appelé à revoir l'application d'une norme cantonale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 140 III 167 consid. 2.1 p. 168; ATF 138 I 305 consid. 4.3 p. 319; ATF 138 III 378 consid. 6.1 p. 379).
Enfin, une décision ne peut être qualifiée d'arbitraire (art. 9 Cst.) que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 142 II 369 consid. 4.3; ATF 141 III 564 consid. 4.1; ATF 138 I 49 consid. 7.1).

5.3 Avant d'examiner le grief de violation du principe de la légalité formulé par la recourante à l'encontre de l'application de la LDMG par l'instance précédente, il convient de s'assurer que cette dernière
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n'a pas violé l'interdiction de l'arbitraire dans l'interprétation et l'application de la LDMG. En effet ce n'est que si l'interprétation et l'application du droit cantonal par l'instance précédente résistent au grief de l'interdiction de l'arbitraire qu'il s'impose de vérifier si la perception des droits de mutation telle qu'elle résulte de l'interprétation et de l'application de l'instance précédente respecte également le principe de la légalité en droit fiscal.

6.

6.1 Dans un sens large, le droit de mutation est un impôt perçu par les cantons frappant les transferts juridiques et économiques, à titre onéreux ou gracieux, entre vifs ou pour cause de mort, d'immeubles ou de parts d'immeubles. Il a pour objet le transfert en tant que tel; de manière générale, il est calculé sur la base du prix d'acquisition. Il est par conséquent qualifié d'impôt indirect. Il s'agit d'un impôt à caractère formel qui relève exclusivement du droit cantonal (ATF 138 II 557 consid. 4.1; ATF 131 I 394 consid. 3.4; arrêts 2C_730/2019 du 10 janvier 2020 consid. 3.1; 2C_469/2017 du 1er décembre 2017 consid. 2.1 et les références). A la différence de l'impôt sur les gains immobiliers, il n'est pas nécessaire pour percevoir les droits de mutation qu'un gain soit réalisé (GRIESSHAMMER, Zürcher Kommentar zum Fusionsgesetz, 2e éd. 2012, n° 1 ad art. 103 LFus). En ce sens, il n'est pas soumis au respect du principe de l'imposition selon la capacité contributive.

6.2 Il ressort de l'arrêt attaqué qu'en application de la LDMG, le canton de Fribourg prélève des droits de mutation, au taux de 1,5 %, sur les transferts immobiliers à titre onéreux ayant pour objet des immeubles au sens l'art. 655 CC situés dans le canton (art. 1, 6 et 21 LDMG). La commune de situation de l'immeuble peut percevoir des centimes additionnels aux droits perçus par le canton (art. 2 et 22 LDMG). Est notamment considérée comme transfert immobilier toute acquisition de la propriété juridique d'un immeuble (art. 3 al. 1 let. a LDMG). Sous la note marginale "Transferts immobiliers - Cas particuliers", l'art. 4 LDMG (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020) énumère d'autres situations qui sont assimilées à des transferts immobiliers. L'art. 9 al. 1 let. e LDMG (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020) prévoit que les transferts immobiliers en cas de restructuration au sens des art. 8 al. 3 et 24 al. 3 et 3quater de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS 642.14) sont exonérés.
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6.3 Selon la jurisprudence cantonale publiée (arrêt TA FR 4F 03 144 du 14 avril 2005 consid. 3a, in RFJ 2005 p. 164), que cite l'instance précédente dans l'arrêt attaqué, il ressort clairement des dispositions cantonales que tous les actes translatifs de la propriété juridique d'un immeuble effectués à titre onéreux sont soumis à l'impôt, indépendamment du pouvoir concret de disposer économiquement de cet immeuble, à moins d'un motif légal d'exonération. A l'inverse, lorsque la transaction n'opère pas un changement formel de propriétaire mais transfère la maîtrise économique de l'immeuble, la taxation n'a lieu que dans les cas expressément prévus par l'art. 4 LDMG.

6.4 La recourante, qui confond le moyen tiré de la violation du principe de la légalité avec celui d'interdiction de l'arbitraire, ne formule aucun grief dirigé directement contre l'interprétation par l'instance précédente des dispositions de droit cantonal fiscal telle qu'exposée ci-dessus. Elle y oppose des jurisprudences du Tribunal fédéral qui concernent l'impôt sur les gains immobiliers, afin d'en tirer en vain un parallèle avec la perception de droit de mutation. Or ces deux impôts ne sont pas comparables. C'est également en vain qu'elle objecte que des jurisprudences cantonales aboutissent à d'autres résultats. Elles sont fondées sur des législations sur les droits de mutation différentes.
Elle se borne par ailleurs à affirmer, sans démonstration conforme aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, que la propriété fiduciaire n'est aucunement comprise dans le texte légal de l'art. 1 LDMG.
Elle fait finalement valoir en vain que la perception des droits de mutation en cas de changement de direction d'un fonds de placement immobilier serait contraire à la ratio legis de la loi fribourgeoise en ce qu'elle vient taxer une opération sans flux financier, totalement neutre du point de vue des porteurs de parts. En effet, les droits de mutation sont un impôt indirect à caractère formel sur les transferts juridiques qui est perçu même en l'absence de bénéfice de réalisation et n'est pas soumis au principe de l'imposition selon la capacité contributive (cf. consid. 5.1 et 5.3 ci-dessus).
Par conséquent à défaut de griefs recevables ou fondés sous l'angle de l'arbitraire dirigés contre l'interprétation de la LDMG du canton de Fribourg, il convient de s'en tenir à celle qui a été établie par l'instance précédente.

6.5 La recourante soutient que l'instance précédente a appliqué de manière insoutenable la LDMG au changement de direction d'un
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fonds de placement immobilier. Elle perd de vue que le changement de direction résultant du contrat du 10 décembre 2018 a été suivi d'un transfert par acte authentique des quatre immeubles en cause en l'espèce, ayant pour effet de radier l'inscription de l'ancienne direction au profit de la nouvelle dans le registre foncier, ce qui ne pouvait être le fait ni du fonds, qui n'a pas la personnalité juridique, ni des investisseurs, qui ne peuvent faire valoir qu'une créance à l'encontre de la direction du fonds (cf. supra consid. 4.2). Au vu de l'interprétation retenue ci-dessus, qui soumet tout acte translatif de propriété (opérant un changement formel de propriétaire) à la perception de droits de mutation, l'application par l'instance précédente de la LMDG au cas d'espèce n'est pas insoutenable. Elle l'est d'autant moins qu'une partie de la doctrine considère que le transfert de la propriété quasi-fiduciaire des immeubles du fonds - qui revient à la direction du fonds, comme l'admettent à juste titre l'instance précédente et la recourante (cf. ci-dessus consid. 4.3) - constitue un acte translatif de propriété sur les immeubles soumis à la perception des droits de mutation (SEILER, Immobiliensteuern, Zweifel/Beusch/Oesterhelt [éd.], 2021, § 4 n. 120; ABT, Loi sur les placements collectifs [LPCC], 2012, p. 343 n. 68; KLUNGE, op. cit., p. 75 et 84). L'instance précédente n'a par conséquent violé l'interdiction de l'arbitraire ni dans la définition des actes translatifs de propriété ni dans l'application du droit cantonal.

6.6 La recourante reproche ensuite à l'instance précédente d'avoir violé l'interdiction de l'arbitraire en jugeant que le transfert d'immeubles dû au changement de direction du fonds avait eu lieu à titre onéreux.
Dans l'arrêt attaqué, l'instance précédente a jugé que les termes du contrat du 10 décembre 2018, qui prévoyait le transfert de propriété à titre fiduciaire "à titre gratuit, aux conditions du présent acte", démontraient que, malgré les termes "à titre gratuit", la recourante avait notamment repris de l'ancienne direction tant ses dettes hypothécaires contractées auprès des tiers créanciers que ses obligations envers les investisseurs, correspondant à la valeur des parts détenues par ceux-ci. Une telle reprise de dette constituait une charge dont la recourante s'était acquittée en échange du transfert des actifs dont l'ancienne direction du fonds était avant elle propriétaire (quasi-)fiduciaire pour le compte du fonds. Le transfert à la recourante de la propriété juridique des immeubles avait en conséquence eu lieu à titre onéreux.
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En se bornant à évoquer des précisions relatives à la comptabilisation des immeubles dans le compte de la fortune du fonds, sans tenir compte du fait que le fonds n'a pas de personnalité juridique à laquelle pourraient se rattacher les obligations qui ont été transférées par contrat du 10 décembre 2018 à la nouvelle direction du fonds (cf. ci-dessus consid. 4.2), la recourante se limite à opposer son opinion à celle de l'instance précédente d'une manière qui ne répond pas aux exigences de motivation accrue de l'art. 106 al. 2 LTF en lien avec l'arbitraire.

6.7 Les griefs de violation de l'interdiction de l'arbitraire dans l'interprétation et l'application de la LDMG du canton de Fribourg sont par conséquent rejetés dans la mesure où ils peuvent être examinés. Reste à contrôler le respect du principe de la légalité.

6.8 Bien qu'elle ait dûment rappelé le fondement constitutionnel et la définition du principe de la légalité en droit fiscal, la recourante ne démontre pas et le Tribunal fédéral ne voit pas que les dispositions légales que l'instance précédente a interprétées et appliquées dans le cas d'espèce sans tomber dans l'arbitraire ne ressortent pas d'une loi au sens formel, ni que ces dernières ne précisent pas de manière suffisamment dense la qualité de contribuable, l'objet de l'impôt et son mode de calcul. Le grief de violation du principe de la légalité est par conséquent rejeté.

7. Invoquant les art. 27 et 94 al. 1 Cst., la recourante se plaint de la violation de la liberté économique.

7.1 La liberté économique garantie par l'art. 27 Cst. protège le libre exercice de l'activité économique lucrative privée (art. 27 al. 2 Cst.). Toute mesure ayant une incidence sur cette liberté ne constitue toutefois pas une limitation de celle-ci et il y a lieu de se montrer restrictif pour admettre l'existence d'une telle limitation (ATF 125 I 182 consid. 5b). Selon le principe de l'égalité de traitement entre personnes appartenant à la même branche économique découlant de l'art. 27 Cst., sont interdites les mesures étatiques qui causent une distorsion de la compétition entre concurrents directs, c'est-à-dire celles qui ne sont pas neutres sur le plan de la concurrence. On entend par concurrents directs les membres de la même branche qui s'adressent avec les mêmes offres au même public pour satisfaire les mêmes besoins. L'art. 27 Cst. garantit aux concurrents directs une meilleure protection que celle de l'art. 8 Cst.: une mesure reposant sur des motifs sérieux et objectifs et donc conforme à l'art. 8 Cst. peut provoquer
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une distorsion entre concurrents directs prohibée par l'art. 27 Cst. (ATF 130 I 26 consid. 6.3.3.1; ATF 121 I 129 consid. 3d, ATF 121 I 279 consid. 4a; ATF 124 II 193 consid. 8b). Des mesures fiscales peuvent avoir un tel effet. A la différence de l'interdiction d'exercer une activité économique ou du fait de la soumettre à autorisation, le prélèvement de contributions ne constitue pas une restriction juridique, mais il peut de fait influer sur l'exercice de la liberté économique. De telles restrictions de fait ne sont que rarement qualifiées de mesures étatiques restreignant la liberté garantie par l'art. 27 Cst. (ATF 131 II 271 consid. 9.2.2; ATF 125 I 182 consid. 5b. et la jurisprudence citée). Selon la jurisprudence, la liberté économique n'assure aucune protection contre les impôts généraux ni même contre les impôts auxquels sont soumis toutes les professions. Elle ne permet de s'en prendre qu'aux impôts spéciaux frappant une activité économique donnée et pour autant qu'ils soient prohibitifs ("Sondergewerbesteuern"; arrêt 2C_763/2009 du 28 avril 2010 consid. 6.1; ATF 73 I 47 consid. 7 et les références citées). Les impôts spéciaux sont ainsi admissibles au regard de la liberté économique tant qu'ils ne sont pas prohibitifs, soit tant que leur montant n'empêche pas la réalisation d'un bénéfice convenable dans le commerce ou la branche en question, en rendant impossible ou excessivement difficile l'exercice de la profession (ATF 135 I 130 consid. 4.2; ATF 87 I 29 consid. 3; ATF 128 I 102 consid. 6b; arrêt 2C_677/2020 du 9 juin 2021 consid. 4.4.3).

7.2 Alors que l'article 27 Cst. garantit la liberté économique dans sa dimension individuelle, l'article 94 Cst. protège celle-ci dans sa dimension systémique ou institutionnelle, en tant que principe fondamental du système économique suisse fondé sur une économie de marché. Ces deux aspects sont étroitement liés et ne peuvent être considérés isolément (ATF 143 II 425 consid. 4.2; cf. sur le sujet cf. MARTENET, in Commentaire romand, Constitution fédérale, 2021, nos 25 ss ad art. 94 Cst.).

7.3 La recourante soutient que le recours en matière de droit public permet de dénoncer la violation des règles de droit objectif et de faire valoir, indépendamment d'une violation de la liberté économique (art. 27 Cst.), que l'activité économique de l'Etat contrevient à l'art. 94 Cst. Elle n'explique pas précisément en quoi l'art. 94 Cst. lui conférerait des droits non couverts par l'art. 27 Cst. en l'occurrence. Elle ne peut par conséquent tirer aucun bénéfice du grief spécifique de violation de l'art. 94 Cst. Quoi qu'il en soit les critiques de la recourante peuvent être examinées en l'espèce à la seule lumière de l'art. 27 Cst.
BGE 148 II 121 S. 132
(arrêts 2C_763/2009 du 28 avril 2010 consid. 6.1; 2P.83/2005 du 26 janvier 2006 consid. 2.3).

7.4 En l'espèce, quoiqu'en pense la recourante, dans le canton de Fribourg, les droits de mutation sont perçus sur tous les transferts juridiques et, cas échéant, économiques, à titre onéreux ou gracieux, d'immeubles ou de parts d'immeubles (cf. consid. 6.1 ci-dessus). Comme ils ont pour objet le transfert en tant que tel et non pas un flux économique, comme l'affirme à tort la recourante, ils ne visent pas une profession ou une activité économique en particulier et n'ont de ce fait pas d'effet protectionniste. Par conséquent comme l'a jugé à bon droit l'instance précédente, les droits de mutation ne sont pas des impôts spéciaux, de sorte que la liberté économique garantie par l'art. 27 Cst. ne confère à la recourante aucune protection à leur encontre. Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner les griefs de la recourante tirés de la violation de l'art. 36 Cst.
A cela s'ajoute enfin que la recourante n'a fourni aucun élément factuel laissant penser que les droits de mutation qui lui sont réclamés revêtiraient un caractère prohibitif ou même seulement disproportionné, empêchant ou rendant excessivement difficile la poursuite de son activité. Elle se contente de qualifier la contribution litigieuse d'"excessivement onéreuse" voire d'"exorbitante", sans exposer, notamment par des pièces comptables, en quoi elle menacerait ou entraverait fortement l'exercice de son activité économique.

7.5 La recourante soutient encore que la perception des droits de mutation lors du changement de direction du fonds viole la neutralité concurrentielle. Selon elle, les SICAV (société d'investissement à capital variable) qui changent de direction externe ne sont pas soumises à la perception d'un droit de mutation puisque celles-ci ont la personnalité juridique et sont propriétaires des immeubles de placement. Une telle différence de traitement irait à l'encontre de la volonté du législateur telle qu'elle ressort du Message du Conseil fédéral qui rappelait que "le traitement fiscal des placements collectifs est de première importance pour le développement du marché suisse en la matière. L'égalité fiscale pour tous les placements collectifs, à l'exception de la SICAF, constitue donc la condition sine qua non pour la réussite de ce projet législatif. Si ce principe fondamental était remis en question, les nouvelles formes de placements collectifs courraient le risque de ne pas être utilisées et le projet de loi serait voué à l'échec" (Message du 23 septembre 2005
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concernant la loi fédérale sur les placements collectifs de capitaux - Loi sur les placements collectifs, FF 2005 5993, 6026).
Ce grief doit être écarté. En effet, le postulat de l'égalité de traitement fiscal des formes de placement voulu par le législateur avait pour objet, non pas les droits de mutation, qui ne relèvent du reste pas de la compétence du législateur fédéral (cf. ci-dessus consid. 6.1), mais bien les impôts directs comme cela ressort précisément de la phrase qui suit la citation de la recourante: "La SICAV doit aussi être exonéré (sic!) d'impôts directs, car sans changement des lois fiscales correspondantes, elle serait imposée comme une société anonyme. Il en résulterait que l'émission de parts d'une SICAV suisse serait soumise au droit de timbre d'émission. De plus, les fortunes et bénéfices de la SICAV seraient imposés comme ceux d'une société de capitaux" (FF 2005 5993, 6026).
Le grief de violation de la liberté économique est par conséquent rejeté.

8. Invoquant l'art. 49 Cst., la recourante soutient que l'art. 34 al. 1 LPCC dans sa version jusqu'au 31 décembre 2019, qui constitue du droit fédéral, prévoit expressément la possibilité de changer la direction d'un fonds de placement. Or, de l'avis de la recourante, la perception des droits de mutation en l'espèce revient à entraver voire à rendre impossible en raison de son coût fiscal le changement de direction des fonds de placement immobilier.

8.1 Selon l'art. 49 al. 1 Cst., le droit fédéral prime le droit cantonal qui lui est contraire. Ce principe constitutionnel de la primauté du droit fédéral fait obstacle à l'adoption ou à l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive (ATF 145 I 183 consid. 5.1.1 et les références citées).

8.2 L'ancien art. 34 al. 1 LPCC dans sa version jusqu'au 31 décembre 2019, applicable en l'espèce, prévoit sous le titre "Changement de direction" que les droits et obligations d'une direction peuvent être repris par une autre direction (de fonds). Le contrat de reprise entre l'ancienne et la nouvelle direction est passé en la forme écrite; il doit être approuvé par la banque dépositaire et autorisé par la FINMA (al. 2). La direction en place publie, avant l'approbation par la FINMA, le changement projeté dans les organes de publication
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du fonds (al. 3). Les investisseurs doivent être informés de la possibilité de faire valoir des objections auprès de la FINMA dans les 30 jours qui suivent la publication. La procédure est réglée par la loi du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (al. 4). La FINMA approuve le changement de direction lorsque les prescriptions légales sont remplies et que le maintien du fonds de placement est dans l'intérêt des investisseurs (al. 5). Elle publie la décision dans les organes de publication prévus (al. 6).

8.3 A l'appui de son grief de violation de la primauté du droit fédéral, la recourante cite deux auteurs, dont elle reprend les arguments. Le premier est d'avis que la perception des droits de mutation dissuade bien souvent le fonds d'opérer un changement de direction (ABT, op. cit., p. 343 n. 68). Le deuxième soutient que la question se pose de savoir si la perception des droits de mutation rendrait à ce point difficile le changement de direction d'un fonds de placement immobilier, qui n'aurait par hypothèse pas lieu ensuite d'une restructuration au sens de l'art. 103 de la loi fédérale du 3 octobre 2003 sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine (loi sur la fusion, LFus; RS 221.301; cf. art. 9 al. 1 let. e LDMG et consid. 5.2 ci-dessus), qu'elle porterait atteinte au droit civil fédéral de manière contraire à la Constitution de sorte que l'imposition devrait être exclue en raison du droit fédéral (SEILER, op. cit., § 4 n. 120).

8.4 Sur le plan historique, l'ancien art. 34 LPCC, qui trouve son équivalent à ce jour dans l'art. 39 al. 1 LEFin, a été repris de l'art. 15 de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur les fonds de placement (LFP; RO 1994 2523; cf. ABEGGLEN, in Basler Kommentar, Kollektivanlagengesetz, 2e éd. 2016, n° 1 ad art. 34 LPCC).
Comme cela ressort du Message concernant la révision de la loi fédérale sur les fonds de placement (Loi sur les fonds de placement; LFP) du 14 décembre 1992 (FF 1993 I 189), "l'article 19 de l'aLFP ne réglait que le changement de banque dépositaire. Cette disposition avait été insérée par les Chambres lors de l'examen de la loi pour éviter que la défection de la banque dépositaire n'entraîne la dénonciation du contrat de placement collectif et la liquidation du fonds. Bien que les intérêts en jeu étaient identiques, la loi ne contenait pas de disposition autorisant le changement de direction, ce qui entraînait la dénonciation du contrat collectif et donc la dissolution du fonds. Le changement de direction n'avait jamais fait l'objet de décision judiciaire, mais il ressortait de la doctrine que l'absence de
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disposition formelle devait être interprétée comme un silence qualifié du législateur, signifiant qu'un changement de direction n'était pas possible. Une telle éventualité ne pouvait être envisagée que si l'autorité de surveillance instituait, compte tenu des intérêts fondamentaux des investisseurs, une nouvelle direction reprenant les droits et les devoirs du contrat de placement collectif. Cela a été jugé contraire aux intérêts de l'investisseur, qui ne pouvaient être efficacement protégés si la défection de la direction entraînait automatiquement la liquidation du fonds. C'est la raison pour laquelle le projet de loi de 1992 prévoyait aussi la possibilité de remplacer la direction en son art. 15 aLFP" (FF 1993 I 212).
Il résulte clairement du Message - et du reste expressément de l'art. 1 LPCC, selon lequel la LPCC a pour but de protéger les investisseurs - qu'en introduisant dans l'aLFP, puis dans la LPCC, et enfin dans la LEFin, la possibilité pour un fonds de placement de changer de direction sans devoir dissoudre le fonds de placement, le législateur fédéral entendait protéger les investisseurs et non pas les sociétés anonymes chargées de la direction des fonds. A noter qu'en l'espèce, précisément, le montant de droits de mutation litigieux ne peut pas être mis à charge du fonds de placement ni par conséquent des investisseurs. En effet, il ressort du contrat de transfert de l'activité de direction de fonds du 10 décembre 2018, approuvé par décision de la FINMA du 16 avril 2019 (art. 105 al. 2 LTF), que les coûts relatifs au changement de direction, y compris les frais relatifs à la mise à jour du Registre foncier pour tous les immeubles du fonds (changement de propriétaire) ne pourront pas être mis à la charge des investisseurs ou de la fortune du fonds et seront supportés par elle-même (clauses 7.3 et 7.4). Sous cet angle, la perception d'un droit de mutation par le canton sur les immeubles transférés lors d'un changement de direction de fonds ne met pas en péril le but poursuivi par le législateur fédéral en la matière.

8.5 Autre est la question - si tant est qu'elle puisse être examinée pour elle-même, c'est-à-dire indépendamment de l'absence de contrariété au but exprimé dans l'art. 1 LPCC (cf. consid. 8.4 ci-dessus) - de savoir si le montant de 3 % de la valeur des immeubles perçu au titre de droits de mutation est à ce point élevé qu'il empêche voire rend impossible le changement de direction prévu par l'art. 34 al. 1 LPCC et viole ainsi la primauté du droit fédéral, comme le suggère la doctrine citée par la recourante. Cette question peut être examinée à la lumière de ce que le législateur fédéral a entrepris dans la loi
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fédérale sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine, tout en gardant à l'esprit que l'adoption de l'art. 103 LFus tendait véritablement à faciliter le but premier de la loi qui est d'améliorer les restructurations en droit suisse, tandis que l'ajout de l'ancien art. 34 LPCC avait pour but de protéger les investisseurs comme le prévoit l'art. 1 LPCC et non pas les sociétés de direction de fonds de placement.

8.6 En examinant l'effet de la perception des droits de mutations en matière de restructuration à l'occasion des travaux préparatoires de la loi sur la fusion, l'Office fédéral de la justice est arrivé à la conclusion qu'un droit de mutation de 1 à 2 % ne rendait pas plus difficile ni n'empêchait les restructurations (Office fédéral de la Justice, Avis de droit du 16 juin 1999, chap. B.6.c in VPB 63.83). Après avoir interprété l'art. 129 Cst., le groupe de travail Stockar est en outre arrivé à la conclusion que la compétence fédérale en matière d'harmonisation fiscale ne permettait pas de contraindre les cantons à adopter des dispositions en matière de droits de mutation qui faciliteraient les restructurations, du moment que les droits de mutation ne constituaient pas des impôts directs (cité par BÖCKLI, Fusions- und Spaltungssteuerrecht: Gelöste und ungelöste Probleme, Archives 67 p. 30). Dans ce contexte, tant MARKUS REICH que PETER BÖCKLI avaient émis l'avis que la perception de droits de mutation en cas de restructuration conduirait néanmoins "à une limitation hautement dommageable de l'institution de droit fédéral qu'est la fusion" (BÖCKLI, op. cit., p. 30) et serait un impôt "problématique sous l'angle constitutionnel" (REICH, Umstrukturierungen im Steuerrecht, Der Schweizer Treuhänder 4/98 263 270). Ces diverses positions ressortent du Message du 13 juin 2000 concernant la loi fédérale sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine (Loi sur la fusion; LFus) (FF 2000 3995, 4035 s.) dont on cite l'extrait suivant.
"L'interprétation de l'art. 129 Cst. (art. 42 quinquies aCst.) mène à la conclusion que la Confédération ne peut ordonner une harmonisation des droits de mutation. En effet, d'après l'opinion dominante, les droits de mutation font partie des impôts indirects. Cette opinion n'a pas été contestée pendant la consultation. Quelques avis prétendent que la compétence de la Confédération d'intervenir sur ce point précis dans la législation des cantons peut se déduire de l'art. 122 Cst. (art. 64 aCst.), s'il faut empêcher certains cantons de supprimer le libre choix de la forme juridique par un 'impôt constitutionnellement contestable'.
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Traditionnellement, beaucoup de cantons prélèvent, sous forme d'impôt sur les transactions, des impôts indirects s'appuyant sur les opérations de droit privé. Ce sont notamment les impôts sur les successions et sur les donations et les droits de mutation. L'interprétation historique de l'art. 122 Cst. montre déjà que la Confédération ne peut supprimer ni l'un, ni l'ensemble de ces impôts. Par contre, on peut déduire de l'art. 122 Cst. la compétence de la Confédération d'intervenir dans la législation cantonale lorsque celle-ci restreint excessivement ou vide une norme du droit civil fédéral de son sens. Un conflit général d'objectifs n'est cependant pas suffisant pour admettre l'existence d'une violation du droit fédéral. Pour limiter ou supprimer un tel impôt, il faudrait cependant fixer des exigences élevées.
En cas de restructuration, les droits de mutation sont dus sur la totalité de la propriété immobilière qui est transférée à un autre titulaire dans le cadre de la restructuration. Le dégrèvement important du présent projet de loi en cas de restructuration consiste à renoncer à décompter - dans le cadre de l'impôt sur les gains immobiliers - les réserves latentes parfois importantes sur les immeubles. Vu les taux compris entre 1 et 3 %, le Conseil fédéral considère que les droits de mutation ne sont pas suffisamment restrictifs pour influencer massivement ou pour vider de son sens la réalisation des objectifs de la loi sur la fusion.
En résumé, la Confédération ne saurait interdire aux cantons de prélever des droits de mutation en cas de restructuration, ni en se fondant sur l'art. 129 Cst., ni sur l'art. 122 Cst. (cf. JAAC 63.83, www.vpb.admin.ch/deutsch/doc/63/63.83.html). Les cantons devraient cependant bien voir que l'octroi d'un différé d'imposition faciliterait l'exécution des restructurations."

8.7 Durant les débats parlementaires, se fondant sur l'art. 122 Cst., les Chambres ont finalement adopté l'art. 103 LFus et interdit aux cantons de prélever des droits de mutations en cas de restructuration au sens des art. 8 al. 3 et 24 al. 3 et 3quater de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes.

8.8 S'agissant, en l'espèce, des droits de mutation prélevés par les cantons, notamment Fribourg, en cas de changement de direction d'un fonds de placement immobilier, les art. 122 et 129 Cst. entrent en conflit: sous l'angle du droit privé, le changement de direction doit être possible sans liquidation du fonds de placement et, sous l'angle fiscal, les cantons conservent des compétences historiques de prélever des impôts au sens de l'art. 1 al. 3 LHID. Ce conflit ne peut être résolu que par le législateur fédéral. Ce dernier doit notamment prendre en considération le but de la LPCC qui ne vise qu'à protéger les investisseurs et non pas la direction du fonds de placement (art. 1 LPCC) et le fait que les droits de mutation sont des impôts sur les transactions qui frappent le transfert à titre onéreux de la
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propriété immobilière non seulement lorsqu'a lieu un changement de direction de fonds de placement immobilier, mais également lors de tout transfert de propriété immobilière. Ce dernier point est crucial: en effet, admettre sans décision mûrement réfléchie du législateur fédéral, à l'instar du reste de ce qui a eu lieu pour l'adoption de l'art. 103 LFus, que la perception de droits de mutation de 3 % sur le prix d'acquisition des immeubles en cas de changement de direction de fonds de placement constitue une violation de la force dérogatoire du droit fédéral reviendrait à admettre que la compétence des cantons en matière de perception de droits de mutation porte atteinte, de manière contraire à l'art. 49 Cst., à l'ensemble des situations dans lesquelles le législateur fédéral de droit privé autorise ou aménage le transfert de la propriété immobilière, y compris entre simples privés. En effet, ces derniers se trouvent également dans l'obligation de payer des droits de mutation de 3 % sur l'achat de la maison familiale, achat qui n'en est pas moins prévu et autorisé par le droit privé (art. 216 ss CO). En d'autres termes, cela reviendrait de facto à retirer aux cantons toute compétence de percevoir des droits de mutation quel que soit le contexte du transfert. Un tel retrait de la compétence fiscale des cantons au profit du droit privé de la Confédération ne saurait avoir lieu par voie de décision judiciaire sans arbitrage du législateur fédéral, comme l'a mis en lumière l'adoption de l'art. 103 LFus.
Il s'ensuit qu'aussi longtemps que le législateur fédéral n'en a pas décidé autrement, la perception de 3 % des droits de mutation en cas de changement de direction d'un fonds de placement immobilier ne porte pas atteinte à la ratio legis de l'ancien art. 34 LPCC ou de l'art. 39 LEFin ni au demeurant au but de la LPCC tel qu'il ressort de son art. 1 selon lequel "la présente loi a pour but de protéger les investisseurs" (SCHÖNFELD, op. cit., p. 21 n. 50 ss).
Le grief de violation de la force dérogatoire du droit fédéral est rejeté.

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Erwägungen 4 5 6 7 8

Referenzen

BGE: 101 II 154, 125 I 182, 99 IB 438, 143 I 227 mehr...

Artikel: Art. 27 BV, Art. 34 KAG, Art. 103 FusG, art. 122 Cst. mehr...