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Urteilskopf

149 III 379


46. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause A. contre B. SA (recours en matière civile)
4A_310/2022 du 12 juillet 2023

Regeste

Vorrang des vereinbarten Gerichtsstands (Art. 23 Abs. 1 LugÜ) vor dem Gerichtsstand der Streitgenossenschaft (Art. 8a Abs. 1 IPRG).
Internationaler Charakter der Sache im Sinne von Art. 1 Abs. 1 IPRG (E. 4).
Unterschiedliche Anknüpfungskriterien für die Zuständigkeitsbestimmungen des LugÜ und Anwendung des IPRG bei Fehlen einer in der Sache anwendbaren Norm (E. 5).
Gerichtsstand der Streitgenossenschaft gemäss Art. 6 Abs. 1 LugÜ regelt nur die internationale Zuständigkeit, weshalb Art. 8a Abs. 1 IPRG unter Vorbehalt einer Gerichtsstandsklausel zur Anwendung gelangt (E. 6).
Gültigkeit einer Gerichtsstandsklausel nach Art. 23 Abs. 1 LugÜ in Allgemeinen Geschäftsbedingungen. Es besteht nach der lex fori eine tatsächliche Vermutung dafür, dass die allgemeinen Geschäftsbedingungen, auf die im Vertrag verwiesen wird, in dem sie als Anhang aufgeführt sind, dem Empfänger ausgehändigt worden sind. Vorrang des vereinbarten Gerichtsstands vor dem Gerichtsstand der Streitgenossenschaft nach Art. 8a Abs. 1 IPRG (E. 7).

Sachverhalt ab Seite 380

BGE 149 III 379 S. 380

A.

A.a A., trader en matières premières pétrolières, a mandaté un architecte en vue de la création, dans sa villa sise à U. dans le canton de Vaud, d'un "musée" et d'une réserve au sous-sol devant accueillir ses objets archéologiques. Selon lui, il avait prévu de mettre en place, dans ces locaux, un important système de régulation de l'humidité et de la température, ainsi que de mesure, de contrôle et d'alarme, avec un service de maintenance, de surveillance et d'intervention; il avait fait appel dans ce but à quatre entreprises et à un expert en matière de conservation d'oeuvres d'art, à savoir B. SA (dont le siège est à Zurich), C. SA (dont le siège est à Zurich), D. S.A. (dont le siège est à Lausanne), E. SA (dont le siège est à Genève) et l'expert F. (domicilié à Genève).
BGE 149 III 379 S. 381

A.b Par contrat, sur papier à en-tête de B. SA, signé à une date indéterminée et devant entrer en vigueur le 25 mai 2005, A. (ci-après: le client, le demandeur ou le recourant) et B. SA (ci-après: B., la défenderesse n° 1 ou l'intimée) ont conclu un contrat de prestations. Les adresses figurant sur ledit contrat sont, pour B., celle de sa succursale de Lausanne et, pour A., celle de la villa de U., l'objet protégé étant cette villa à la même adresse.
Le contrat, qui tient sur une page, stipule:
"Nos conditions générales [de B.] font foi pour autant qu'aucune stipulation contraire ne soit mentionnée sur le présent contrat. Par sa signature le client accepte ces termes et conditions".
Au bas du contrat, à gauche, figure la mention: "Conditions générales [...] Edition 01/2004".
Lesdites conditions générales, d'une page également, contiennent, partiellement en caractères gras, sous ch. 8 "For juridique / droit applicable", en bas de page à droite, la clause suivante:
"Le for juridique est à Zurich ou au domicile suisse du donneur d'ordre.
Le droit suisse est applicable."
Le 8 juillet 2005, la secrétaire du client a retourné le contrat signé par celui-ci à B., lui indiquant les employés à aviser en cas de problèmes, et un autre courrier daté du même jour qui précisait quelles étaient les personnes à avertir, en cas de besoin, pendant les vacances des employés normalement désignés.
Le client et B. étaient déjà liés par des rapports contractuels, à tout le moins depuis 1992. Un précédent contrat de 1995 prévoyait, selon ses conditions générales, un for de juridiction au siège de B.

A.c Le client allègue avoir subi, entre juillet et août 2006, un "incident climatique" dans le sous-sol de sa villa, lequel aurait causé des dégâts aux oeuvres d'art qui y étaient exposées.

B. Par requête de conciliation du 10 décembre 2013, le client, alors domicilié à Londres, a ouvert action en paiement devant les juridictions genevoises contre les quatre entreprises et l'expert ayant participé à l'installation du système. B., la défenderesse n° 1, avait son siège à Zurich. Seuls les défendeurs nos 4 et 5 avaient leur siège ou leur domicile à Genève. Les défenderesses nos 2 et 3 avaient leurs sièges, respectivement, à Zurich et à Lausanne.
La conciliation ayant échoué, le client, alors domicilié à Malte, a déposé sa demande en paiement devant le Tribunal de première
BGE 149 III 379 S. 382
instance du canton de Genève le 13 juin 2014. Il y a conclu à ce que les cinq défendeurs fussent condamnés solidairement à lui payer le montant de 1'327'916 fr. 40, avec intérêts à 5 % l'an dès le 1er octobre 2009. Il a notamment allégué que, lors de "l'incident climatique" qui aurait entraîné une forte augmentation de l'humidité et de la température dans les locaux, les oeuvres d'art qu'il aurait entreposées dans le musée de sa villa et dans la réserve attenante auraient subi d'importants dégâts. Il attribuait cet incident et les dégâts qui en auraient résulté à une erreur de manipulation, à des dysfonctionnements de l'installation de climatisation, ventilation et chauffage, à un cahier des charges insuffisant et au fait que les alarmes n'auraient pas fonctionné. (...)
Dans sa détermination du 26 novembre 2014 sur la requête de suspension de la procédure, la défenderesse n° 1 a indiqué que, si la procédure genevoise allait de l'avant, elle entendait contester la compétence ratione loci des tribunaux genevois. Dans sa réponse à la demande du 23 mai 2017, qui était limitée à la question de la compétence à raison du lieu, la défenderesse n° 1 a conclu à l'irrecevabilité de la demande en ce qui la concerne, faisant valoir que la clause d'élection de for contenue dans les conditions générales du contrat prévoyait la compétence des tribunaux zurichois, le demandeur n'ayant de son côté pas de domicile en Suisse. Dans sa détermination du 22 juin 2017, le demandeur a exposé qu'il n'avait jamais accepté ni signé lesdites conditions générales et que, en tant que consommateur, il ne pouvait renoncer, ni à l'avance, ni par acceptation tacite, aux fors applicables aux contrats conclus avec des consommateurs, ce qui avait pour conséquence que la clause d'élection de for n'était pas valable. Par la suite, la défenderesse n° 1 a encore invoqué que le for prévu par la clause d'élection de for primait le for de la consorité de l'art. 15 CPC et que le contrat ne pouvait être qualifié de contrat conclu avec un consommateur. (...)
Par jugement du 29 juin 2021, le Tribunal de première instance a admis l'exception d'incompétence formée par la défenderesse n° 1, se déclarant incompétent à raison du lieu pour connaître de la demande en paiement à l'encontre de dite défenderesse. (...)
Statuant le 31 mai 2022, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté l'appel du demandeur et a confirmé le jugement entrepris. (...)
BGE 149 III 379 S. 383

C. Contre cet arrêt, qui lui avait été notifié le 9 juin 2022, le demandeur a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 11 juillet 2022. (...)
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours, dans la mesure de sa recevabilité.
(extrait)

Erwägungen

Extrait des considérants:

3. Le demandeur recourant invoque, en substance, que la clause d'élection de for en faveur des tribunaux zurichois, qui n'aurait pas été valablement intégrée au contrat et qui ne serait pas exclusive, ne pourrait pas prévaloir sur le for de la consorité désignant les tribunaux genevois. L'intimée se prévaut de la clause d'élection de for, soutient qu'elle prévaudrait sur le for de la consorité et conclut à l'incompétence des tribunaux genevois.
Le demandeur recourant ne conteste en revanche plus, devant le Tribunal fédéral, qu'il n'avait pas de résidence habituelle à Genève et il ne se prévaut plus des règles de compétence en matière de contrats conclus par des consommateurs (art. 15-17 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale [CL; RS 0.275.12]).
Dans l'ordre, il y a donc lieu d'examiner tout d'abord la question de la nature internationale de la cause (consid. 4 ci-dessous), puis, le demandeur ayant eu son domicile dans un pays de l'Union européenne au moment de l'ouverture de l'action, la question de l'application de la Convention de Lugano (consid. 5), celle de la compétence ratione loci fondée sur la consorité telle qu'invoquée par le demandeur (consid. 6) et, enfin, celle de la compétence ratione loci fondée sur la clause d'élection de for et de son rapport avec le for de la consorité (consid. 7).

4. Comme le demandeur avait son domicile à l'étranger et la défenderesse n° 1 son siège en Suisse au moment de l'ouverture de l'action, se pose tout d'abord la question de la nature internationale de la cause.

4.1 En matière internationale, la compétence des autorités judiciaires suisses est régie par la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP; RS 291), sous réserve des traités internationaux (art. 1 al. 1 let. a et al. 2 LDIP).
BGE 149 III 379 S. 384
Selon la jurisprudence, une cause est de nature internationale (art. 1 al. 1 LDIP) lorsqu'elle a une connexité suffisante avec l'étranger, ce qui est toujours le cas lorsque l'une des parties possède son domicile ou son siège à l'étranger, peu importe que ce soit le demandeur ou le défendeur, et indépendamment de la nature de la cause (ATF 141 III 294 consid. 4; ATF 135 III 185 consid. 3.1; ATF 131 III 76 consid. 2.3; arrêt 4A_133/2021 / 4A_135/2021 du 26 octobre 2021 consid. 4).

4.2 Devant le Tribunal fédéral, il n'est plus contesté que le demandeur était domicilié à Londres au moment de la requête de conciliation, puis à Malte au moment du dépôt de sa demande, ni qu'il n'était déjà plus domicilié en Suisse (depuis 1999) au moment de la conclusion du contrat de prestations avec la défenderesse n° 1 en 2005. Il n'est pas contesté non plus que le siège de celle-ci se trouvait à Zurich.
Le demandeur étant domicilié à l'étranger, la cause est donc de nature internationale.

5. Dans les rapports entre la Suisse et, notamment, les Etats membres de l'Union européenne, la Convention de Lugano est applicable (art. 63 par. 1 CL; ATF 140 III 115 consid. 3).

5.1 Les normes de compétence de cette Convention reposent sur différents critères d'extranéité. Pour chaque norme de compétence, il faut donc rechercher quel est le point de rattachement avec l'étranger (cf. arrêt 4C.440/1995 du 6 mai 1997 consid. 2b; ALEXANDER R. MARKUS, Internationales Zivilprozessrecht, 2e éd. 2020, p. 186 n. 694).
Lorsque la cause n'entre pas dans le champ d'application territorial et personnel( räumlich-persönlicher Anwendungsbereich ) de cette Convention ou que la norme de compétence de celle-ci ne régit que la compétence internationale, et non la compétence locale (interne) (MARKUS, op. cit., p. 186 n. 695), les dispositions de la LDIP, en tant que loi nationale de la Suisse applicable en matière civile internationale, s'appliquent. Les règles de compétence du CPC ne sont pas applicables aux causes de nature internationale (art. 2 CPC).

5.2 Selon les constatations de fait, au moment de la création de la litispendance le 10 décembre 2013, le demandeur était domicilié à Londres, soit dans un Etat alors membre de l'Union Européenne (sur l'influence du Brexit, cf. ATF 147 III 491 consid. 6.1; arrêt 4A_560/ 2021 du 3 février 2022 consid. 2) et la défenderesse n° 1 avait son siège en Suisse, à Zurich.
Il faut donc examiner, en premier lieu, si le demandeur, qui a ouvert action devant les juridictions genevoises compétentes à l'égard des
BGE 149 III 379 S. 385
défendeurs nos 4 et 5, puisque ceux-ci avaient, respectivement, leur siège et leur domicile à Genève, pouvait attraire la défenderesse n° 1 à ce for de la consorité en se fondant sur l'art. 6 par. 1 CL (consid. 6 ci-dessous).
Il s'agira, en second lieu, d'examiner si la défenderesse n° 1 peut y opposer la clause d'élection de for, qui est contenue dans les conditions générales annexées au contrat de 2005, en se basant sur l'art. 23 par. 1 CL et si ce for convenu prime le for de la consorité (consid. 7 ci-dessous).

6. La Convention de Lugano prévoit un for de la consorité à l'art. 6 par. 1 CL.

6.1 Selon cette disposition, la personne qui peut être attraite en vertu de l'art. 5 CL peut aussi l'être, s'il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l'un d'eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.
Ce for de la consorité de l'art. 6 par. 1 CL ne détermine que la compétence internationale, et non en sus la compétence locale interne des tribunaux. En effet, il découle de la relation de cette disposition avec la phrase introductive de l'art. 5 CL que cette disposition ne peut s'appliquer à un défendeur que si les autres défendeurs sont domiciliés dans un autre Etat partie à la Convention de Lugano, mais pas si tous les défendeurs ont leur siège ou leur domicile dans le même Etat (une "personne domiciliée sur le territoire d'un Etat lié [...] peut être attraite [...] dans un autre Etat lié par la [CL]"; cf. MARKUS, op. cit., p. 279 n. 1034; FLORENCE GUILLAUME, Droit international privé, 4e éd. 2018, p. 106 n. 50; ANDREAS BUCHER, in Commentaire romand, Loi sur le droit international privé, Convention de Lugano, 2011, n° 5 ad art. 6 CL; cf. également ATF 134 III 27 consid. 5.1, antérieur à l'entrée en vigueur de l'art. 8a LDIP).
En l'espèce, comme tous les défendeurs ont leur siège ou leur domicile en Suisse, l'art. 6 par. 1 CL ne s'applique pas, ce que le recourant ne conteste d'ailleurs pas.

6.2 Puisque la norme de compétence de la Convention de Lugano fondée sur la consorité ne règle pas la compétence locale interne du tribunal genevois saisi, la question est régie par la LDIP (cf. consid. 5.1. ci-dessus).
BGE 149 III 379 S. 386

6.2.1 Les art. 8a à 8c LDIP, adoptés lors de la révision de la Convention de Lugano du 11 décembre 2009 et entrés en vigueur le 1er janvier 2011, en même temps que le Code de procédure civile suisse, visent à harmoniser les fors prévus par la LDIP, le CPC et la CL. En cas de consorité et, donc, lorsqu'il y a plusieurs fors en Suisse, l'art. 8a al. 1 LDIP vise à concentrer territorialement la procédure devant un seul tribunal en Suisse. Selon le législateur, lorsque, notamment en cas de cumul subjectif d'actions, il existe différents fors en Suisse et que le CPC permet pour ces cas une concentration territoriale, auprès d'un seul tribunal suisse, cette concentration procédurale doit également être possible dans le champ d'application de la LDIP (Message du 18 février 2009 relatif à l'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la CL révisée, FF 2009 1543 s. ch. 5.1 et 5.2). Autrement dit, l'art. 8a LDIP ne crée pas un for en Suisse en tant que tel, mais permet d'attraire les consorts devant le tribunal compétent, selon la LDIP, pour l'un d'eux.
Selon l'art. 8a al. 1 LDIP, lorsque l'action est intentée contre des consorts pouvant être poursuivis en Suisse en vertu de la LDIP, le tribunal suisse compétent à l'égard d'un défendeur l'est à l'égard des autres. Il découle de cette disposition qu'il doit exister à l'égard de chaque consort une compétence internationale en Suisse ("contre des consorts pouvant être poursuivis en Suisse") en vertu de la LDIP ("en vertu de la présente loi", et non de la LP par exemple), soit sur une autre base que l'art. 8a LDIP (que ce soit le for du domicile du défendeur ou un autre for prévu par la LDIP).

6.2.2 En l'espèce, il existe, pour chacun des défendeurs, un for international en Suisse en vertu de l'art. 2 LDIP, puisque chacun avait son siège, respectivement son domicile en Suisse. La condition du rapport de consorité entre les défendeurs, qui est régie par la lex fori et, partant par les art. 71 et 90 CPC (MARKUS, op. cit., p. 116 n. 458 et p. 117 n. 461), n'est pas contestée par les parties.
Il s'ensuit qu'en vertu de l'art. 8a al. 1 LDIP, le tribunal genevois, qui est compétent à l'égard des défendeurs nos 4 et 5, est également compétent à l'égard de la défenderesse n° 1. Est réservé l'examen de l'exception d'incompétence soulevée par celle-ci (consid. 7 ci-dessous).
La violation de l'art. 15 CPC invoquée par le recourant est sans fondement puisque la cause est de nature internationale (art. 2 CPC).

7. Se pose donc désormais la question de savoir si la défenderesse n° 1 peut se prévaloir de la clause d'élection de for en faveur des
BGE 149 III 379 S. 387
tribunaux zurichois, contenue dans les conditions générales annexées au contrat de 2005, au regard de l'art. 23 par. 1 CL (cf. consid. 5.1 ci-dessus), puis si ce for convenu prime le for de la consorité de l'art. 8a al. 1 LDIP.

7.1 Sous ch. 8 "For juridique / droit applicable", en bas de page à droite, les conditions générales de la défenderesse n° 1, annexées au contrat, contiennent la clause suivante:
"Le for juridique est à Zurich ou au domicile suisse du donneur d'ordre.
Le droit suisse est applicable."

7.2 En vertu de l'art. 23 par. 1 CL, si les parties, dont l'une au moins a son domicile dans un Etat contractant, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat contractant pour connaître, notamment, des différends à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou ces tribunaux sont compétents; cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties.

7.2.1 L'art. 23 CL s'applique donc déjà lorsqu'une seule des parties a son domicile dans un Etat contractant et que les parties ont convenu de la compétence d'un tribunal d'un Etat contractant (MARKUS, op. cit., p. 338 n. 1280 et 1284).

7.2.2 En l'occurrence, puisque le demandeur était domicilié à Londres et que la défenderesse n° 1 avait son siège à Zurich lors de l'ouverture de l'action et que les parties ont désigné deux tribunaux alternatifs en Suisse, la clause d'élection de for est régie par l'art. 23 par. 1 CL, ce que le recourant ne conteste d'ailleurs pas.
Dès lors qu'il est établi que le demandeur n'avait déjà plus son domicile en Suisse au moment de la conclusion du contrat de 2005, il n'y a pas lieu d'examiner la question controversée de savoir si l'élément d'extranéité doit exister non seulement au moment de l'ouverture de l'action mais aussi au moment de la conclusion de la clause d'élection de for (GUILLAUME, op. cit., p. 71 n. 36 et p. 80 n. 39; BUCHER, op. cit., n os 3-5 ad art. 23 CL).

7.3 Il faut donc examiner, en se limitant aux griefs soulevés par le recourant, la validité de la clause d'élection de for au regard de l'art. 23 par. 1 CL.

7.3.1 La notion d'élection de for de l'art. 23 CL est autonome: elle doit être interprétée uniquement en relation avec les exigences posées par cette disposition (GUILLAUME, op. cit., p. 70 n. 36 et les arrêts de la CJCE cités; BUCHER, op. cit., n° 30 ad art. 23 CL). Selon
BGE 149 III 379 S. 388
la jurisprudence de la Cour de justice européenne (rendue à propos de l'art. 17 CL-1968, remplacé par l'art. 23 CL), il faut examiner si la clause qui attribue la compétence a fait effectivement l'objet d'un consentement entre parties et si celui-ci se manifeste d'une manière claire et précise, les exigences de forme de l'art. 23 CL ayant pour fonction d'assurer que le consentement entre parties soit effectivement établi. Si la prorogation de compétence déroge au principe général du domicile du défendeur de l'art. 2 CL ou aux autres compétences spéciales de la CL, les conditions de validité des clauses d'élection de for doivent être interprétées strictement (arrêt de la CJCE du 14 décembre 1976 24/76 Estasis Salotti contre Rüwa, Rec. 1976 p. 1832 point 7).
Selon les cas, l'élection de for désignera les tribunaux d'un Etat contractant (autrement dit, fixera la seule compétence internationale) ou aussi le tribunal compétent à raison du lieu dans l'Etat contractant (c'est-à-dire fixera aussi le for interne local) (GUILLAUME, op. cit., p. 72 s. n. 36; MARKUS, op. cit., p. 340 n. 1296).
En ce qui concerne les clauses d'élection de for contenues dans des conditions générales, elles sont valables lorsque, dans le texte même du contrat signé par les deux parties, un renvoi exprès est fait à ces conditions générales. En revanche, il a été jugé que la simple impression, au verso du contrat établi sur le papier d'affaires de l'une des parties, de conditions générales comprenant une clause attributive de juridiction ne satisfait pas aux exigences de forme, aucune garantie n'étant donnée par ce procédé que l'autre partie a consenti effectivement à la clause dérogatoire au droit commun en matière de compétence judiciaire (arrêt Estasis Salotti contre Rüwa, point 9). Au regard de l'art. 23 par. 1 CL, il n'est pas nécessaire que les parties aient effectivement pris connaissance des conditions générales intégrées au contrat (ATF 139 III 345 consid. 4.4 et les références citées).
Il n'y a pas lieu de trancher en l'espèce la question de savoir si la forme prévue par l'art. 23 par. 1 CL vise seulement la volonté réelle (ou subjective) des parties ou également la volonté objective, selon le principe de la confiance (cf. MARKUS, op. cit., p. 98-100 n. 395-400; sur le principe de la confiance, cf. ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; arrêt 4A_643/2020 du 22 octobre 2021 consid. 4.2.5).

7.3.2 L'appréciation des preuves est régie par la lex fori. Les présomptions de fait qui permettent au juge de déduire d'un fait un
BGE 149 III 379 S. 389
autre fait sur la base de son expérience générale de la vie en font partie (arrêt 5P.8/2000 du 8 mai 2000 consid. 4b; STAEHELIN/STAEHELIN/ GROLIMUND, Zivilprozessrecht, 3e éd. 2019, p. 344 n. 150; KNOEPFLER/ SCHWEIZER/OTHENIN-GIRARD, Droit international privé suisse, 3e éd. 2004, p. 387 n. 665 s.). Les constatations de fait qui en découlent lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles ne soient manifestement inexactes (art. 97 al. 1 et art. 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2).

7.3.3 La cour cantonale a considéré, par appréciation des preuves, que les parties avaient eu la volonté réelle de conclure une élection de for et que cette volonté était revêtue de la forme écrite.
Selon elle, le client demandeur a signé le contrat de 2005 le liant à la société défenderesse n° 1. Celui-ci ne compte qu'une seule page et peu de texte et il comporte un renvoi clair et sans équivoque aux conditions générales. La version applicable, de janvier 2004, est précisée en bas de page. Ces conditions générales sont énoncées sur une seule page et comprennent huit clauses. La clause d'élection de for se situe, de manière habituelle, à la fin et son titre indique sans équivoque qu'il s'agit du for juridique. Le texte de cette clause est imprimé en caractères gras, de sorte que la clause est suffisamment visible et se distingue du reste du texte.
La cour cantonale a ajouté que le client pouvait s'attendre à la présence d'une telle clause, la société ayant son siège dans un autre canton que celui dans lequel se trouve l'objet protégé, à savoir la maison de U. située dans le canton de Vaud. La clause n'est pas insolite puisqu'elle prévoit deux fors exclusifs et alternatifs au domicile et au siège des parties, soit des fors ordinaires, et qu'il n'était pas insolite non plus de limiter ces fors au territoire suisse, puisque le droit suisse est applicable au contrat. Le client était rompu aux affaires et n'a pas contesté avoir fait des études de droit.
Il n'était pas nécessaire pour la société d'attirer spécialement l'attention du client sur cette clause. Il n'était pas nécessaire non plus qu'il apposât sa signature sur le texte des conditions générales, pour que celle-ci fussent intégrées au contrat.
La cour cantonale a ensuite réfuté l'objection du demandeur, qui contestait avoir effectivement reçu les conditions générales, et tenu pour établi que celles-ci lui avaient bien été remises en même temps que le contrat: elle a considéré que la société avait produit le contrat et les conditions générales. Celle-ci avait également produit deux
BGE 149 III 379 S. 390
courriers du 8 juillet 2005 du client et de la secrétaire de celui-ci, au sujet des personnes à contacter en cas de problèmes, et aucun de ces courriers ne formulait de réserves quant aux termes du contrat ou à la réception des conditions générales.

7.3.4 Le recourant ne conteste pas qu'il a signé le contrat, qui fait expressément référence aux conditions générales et qui mentionne que celles-ci sont annexées au contrat. Il ne soutient pas qu'il eût été nécessaire qu'il signât également le texte même de celles-ci.
Lorsqu'il prétend qu'il n'a ni reçu, ni pris connaissance, ni signé, ni accepté les conditions générales, faisant valoir qu'il ne lui appartiendrait pas de prouver ce fait négatif, le recourant s'en prend à l'appréciation des preuves de la cour cantonale. Il ne démontre toutefois pas en quoi cette appréciation serait arbitraire. La cour cantonale a retenu que le texte même du contrat précisait que les conditions générales étaient déclarées acceptées lorsque le client apposait sa signature, que le contrat mentionnait que ces conditions générales étaient annexées et que, dans ses deux courriers du 8 juillet 2005, le client ne s'était pas plaint de ne pas avoir reçu ces conditions générales, ce qui l'a conduite à admettre que les conditions générales avaient bien été envoyées au client. Les critiques du recourant sont pour l'essentiel de pures affirmations, sans aucune démonstration d'un arbitraire. Il ne démontre notamment pas qu'il serait contraire à l'expérience générale de la vie de retenir que l'homme d'affaires expérimenté qu'il est aurait réagi et aurait réclamé ces conditions générales avant de signer le contrat, si celles-ci n'avaient pas été jointes au contrat qui lui avait été envoyé. La Cour de céans ne décèle aucun arbitraire dans l'appréciation de la cour cantonale.
La remise des conditions générales ayant été retenue sans arbitraire, le grief de violation de l'art. 8 CC est infondé (cf. ATF 141 III 241 consid. 3.2 et les arrêts cités). En tant que le recourant soutient qu'il a toujours traité avec la succursale de Lausanne en ignorant que le siège de la société défenderesse était à Zurich, il ne peut s'en prendre qu'à lui-même s'il n'a pas lu ces conditions générales.
Au vu des faits constatés, la cour cantonale n'a pas violé l'art. 23 par. 1 CL.
(...)

7.4 Les parties étant convenues d'un for choisi au siège de la défenderesse n° 1, à Zurich, il faut encore examiner si ce for élu prime
BGE 149 III 379 S. 391
ou non le for de la consorité de l'art. 8a al. 1 LDIP (cf. consid. 6.2.2 ci-dessus).

7.4.1 La résolution de cette question dépend de savoir si les parties ont choisi un for exclusif ou non.
Le texte même de l'art. 23 par. 1 CL présume que l'élection de for est exclusive. Selon la doctrine, le for élu (exclusif) prime ainsi toute autre compétence, notamment celle de la consorité (en relation avec l'art. 8a al. 1 LDIP, cf. GUILLAUME, op cit., p. 108 s. n. 50 et BUCHER, op. cit., n° 7 ad art. 8a LDIP; en relation avec l'art. 6 par. 1 CL, cf. MARKUS, op. cit., p. 280 s. n. 1040). Il appartient donc à la partie qui conteste l'exclusivité du for élu d'alléguer et de prouver l'existence d'une disposition conventionnelle contraire des parties.

7.4.2 En l'espèce, la cour cantonale a constaté que les parties avaient conclu une clause d'élection de for prévoyant deux fors exclusifs et alternatifs au domicile (suisse) du demandeur et au siège de la défenderesse n° 1, à Zurich. Le recourant se limite à nier que le for élu - du siège de la défenderesse n° 1 - serait exclusif. Il n'indique toutefois pas avoir allégué, ni offert de prouver une convention contraire des parties, de laquelle il ressortirait que le for élu serait exclu en cas de consorité. Il s'ensuit que l'exception d'incompétence soulevée par la défenderesse n° 1 a été valablement admise et que le tribunal est incompétent ratione loci à l'égard de celle-ci.
Les considérations que le recourant consacre à l'art. 15 al. 1 CPC, qui ne s'applique pas en matière internationale (art. 2 CPC), à l'art. 8a LDIP et à la consorité en général, relevant l'intérêt qu'il y a à éviter que des décisions contradictoires ne soient rendues et à favoriser une liquidation efficace et économique des litiges, ne peuvent rien changer au choix qui a ainsi été effectué par les parties. Contrairement à ce que semble croire le recourant, ce n'est pas le for ordinaire de l'art. 2 LDIP qui l'emporte, mais le for élu conformément à l'art. 23 par. 1 CL, qui prime le for de la consorité de l'art. 8a LDIP. En signant le contrat et en acceptant les conditions générales prévoyant la clause d'élection de for, le client a accepté le risque de devoir procéder à Zurich contre la défenderesse n° 1 et devant un autre tribunal, en un lieu différent, contre les autres défendeurs. On ne décèle aucune violation des art. 29 Cst. et 6 par. 1 CEDH.

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Regeste: deutsch französisch italienisch

Sachverhalt

Erwägungen 3 4 5 6 7

Referenzen

BGE: 144 III 93, 141 III 294, 135 III 185, 131 III 76 mehr...

Artikel: Art. 23 Abs. 1 LugÜ, Art. 8a Abs. 1 IPRG, Art. 6 Abs. 1 LugÜ, art. 8a LDIP mehr...