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Urteilskopf

142 III 116


16. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause A. Corp. et X. contre B. SA (recours en matière civile)
4A_340/2015 du 21 décembre 2015

Regeste

Internationale Rechtshilfe in Zivilsachen; Rechtshilfeersuchen nach Haager Übereinkommen vom 18. März 1970 über die Beweisaufnahme im Ausland in Zivil- oder Handelssachen (HBewUe 70) (Art. 11 Abs. 1 lit. a und Art. 12 Abs. 1 lit. b HBewUe 70; Art. 166 Abs. 2 ZPO).
Anwendbares Recht (E. 2).
Ablehnungsgründe: insb. Verletzung des Bankgeheimnisses (E. 3.1) und der grundlegenden Prinzipien des schweizerischen Verfahrensrechts (Anspruch auf rechtliches Gehör; E. 3.2).
Verfahren der Vollstreckung nach Art. 335 ff. ZPO (E. 3.3), Beschwerde nach Art. 319 lit. a ZPO und Beschwerdelegitimation (E. 3.4).

Sachverhalt ab Seite 117

BGE 142 III 116 S. 117

A.

A.a Le 13 février 2014, le Tribunal de première instance n° 7 de Donostia (Espagne) a adressé au Tribunal de première instance de Genève une requête d'entraide judiciaire internationale en matière civile, soit une commission rogatoire au sens de la Convention de La Haye du 18 mars 1970 sur l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale (CLaH 70; RS 0.274.132), tendant à la production par B. SA (ci-après: la banque) de documents concernant les comptes bancaires ouverts en ses livres au nom de C. Inc. (ci-après: C.) et de A. Corp. (ci-après: A.), ainsi que d'une attestation de l'identité du bénéficiaire économique des avoirs déposés sur le compte de A.
Le litige pendant devant le tribunal espagnol concerne une vente commerciale. Les demanderesses D. et E. agissent contre les défendeurs F. et la société G. SA en paiement des montants de 339'000 euros et 985'689 euros, au titre de solde du prix de vente des stocks de cette société.
Les demanderesses sont les bénéficiaires économiques du compte n° z ouvert au nom de C. auprès de la banque, à Genève; des virements ont été effectués du compte de A. sur ce compte de C. Les demanderesses ont requis l'administration de la preuve qui est l'objet de la présente procédure d'entraide judiciaire. Les défendeurs ont renoncé
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à leur droit à la protection de leur sphère privée pour le cas où ils seraient titulaires ou bénéficiaires économiques des comptes de A. Il ne résulte ni de la demande d'entraide, ni des constatations de l'arrêt attaqué que A. aurait participé à la procédure pendante en Espagne.

A.b Invitée à faire valoir ses observations sur la requête d'entraide, la banque a fourni le 8 août 2014 les documents et informations requis en ce qui concerne les comptes ouverts au nom de C.
Interpellée à nouveau, la banque a indiqué le 20 octobre 2014 ne pas être en mesure de fournir les renseignements s'agissant des comptes ouverts au nom de A., celle-ci ayant refusé de la délier du secret professionnel.

A.c Par ordonnance du 5 décembre 2014, le Tribunal de première instance de Genève a ordonné l'exécution de la commission rogatoire en tant qu'elle concerne les comptes ouverts au nom de A. et a ordonné à la banque de produire l'attestation certifiant l'identité du bénéficiaire économique ou des bénéficiaires économiques du compte ouvert, dans le bureau genevois de l'établissement, au nom de A., qui a effectué des paiements par virements sur le compte n° z au nom de C. auprès du même établissement, lui fixant un délai au 20 janvier 2015 pour s'exécuter. (...)

B. A., titulaire du compte bancaire visé par la mesure, et X., ayant droit économique dudit compte, ont recouru à la Cour de justice du canton de Genève contre cette ordonnance, concluant à son annulation et à ce qu'il soit fait interdiction à la banque et au Tribunal de première instance de transmettre aux autorités espagnoles une quelconque information en lien avec A., consentant seulement à ce qu'il soit confirmé à celles-ci que ni les demanderesses, ni les défendeurs n'en sont les ayants droit économiques. (...)
La banque n'a pas recouru à la Cour de justice, considérant qu'elle n'avait pas qualité pour contester cette ordonnance puisque seuls les arguments du client - maître du secret - étaient susceptibles d'apporter la preuve d'un lien insuffisant entre la demande d'entraide et le procès au fond; elle estimait également ne pas pouvoir valablement représenter des intérêts autres que les siens propres. (...)
Statuant au fond par arrêt du 22 mai 2015, la Cour de justice a rejeté le recours de A. et de l'ayant droit économique X. (...)

C. A. et X., qui requiert l'anonymat, exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité. Ils concluent à l'annulation dudit arrêt et de l'ordonnance du 5 décembre 2014. (...)
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Ils invoquent un déni de justice, la violation de leur droit d'être entendus (art. 29 al. 2 Cst.) et la transgression des art. 1 al. 2 et 11 CLaH 70, ainsi que de l'art. 166 al. 2 CPC.
La banque s'est déterminée, sans prendre de conclusions formelles, s'en rapportant à justice et précisant n'avoir pas recouru contre l'arrêt de la Cour de justice. (...)
Le Tribunal fédéral a admis le recours et réformé l'arrêt attaqué en ce sens que la demande d'entraide judiciaire internationale du Tribunal de première instance n° 7 de Donostia (Espagne) du 13 février 2014 est rejetée.
(extrait)

Erwägungen

Extrait des considérants:

2.

2.1 Lorsqu'aucun traité international n'existe, entre l'Etat requérant et la Suisse (Etat requis), en matière d'entraide judiciaire internationale en matière civile (art. 1 al. 2 LDIP [RS 291]), l'art. 11a LDIP détermine le droit applicable aux actes d'entraide - notamment auxnotifications et à l'administration de moyens de preuve - qui doivent être exécutés en Suisse (BERTI/DROESE, in Basler Kommentar, Internationales Privatrecht, 3e éd. 2013, n° 3 ad art. 11a LDIP). Le droit suisse est en principe applicable (art. 11a al. 1 LDIP), mais des formes de procédure étrangères peuvent aussi être suivies (art. 11a al. 2 LDIP). Les demandes d'entraide sont traitées conformément aux dispositions (art. 8-16) de la Convention de La Haye du 1er mars 1954 relative à la procédure civile (CLaH 54; RS 0.274.12), à laquelle est attribué un effet erga omnes (BERTI/DROESE, op. cit., n° 52 ad art. 11a LDIP; GAUTHEY/MARKUS, L'entraide judiciaire internationale en matière civile, 2014, ch. 532 p. 168).

2.2 Lorsqu'il existe un traité international, les actes d'entraide sont exécutés conformément aux dispositions de ce traité. Il s'agit, en particulier, en matière de commissions rogatoires, des dispositions de la CLaH 54 et de la CLaH 70. Lorsque les Etats requérant et requis sont tous deux parties à la CLaH 70, c'est cette dernière qui est applicable (art. 29 CLaH 70, sous réserve des art. 30 et 31 CLaH 70). Selon la déclaration que la Suisse a faite à l'art. 1 CLaH 70, cette convention s'applique de manière exclusive entre les Etats contractants et priorité doit être donnée en tout état de cause aux procédures prévues par celle-ci pour les demandes d'obtention de preuves à l'étranger (Réserves et déclarations, Suisse, ad art. 1 CLaH 70; cf. GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 546 p. 174).
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3. L'Etat requis - en l'occurrence la Suisse - peut refuser d'exécuter la commission rogatoire, notamment s'il existe un motif de refus admis par la CLaH 70.

3.1 Aux termes de l'art. 11 al. 1 CLaH 70, la commission rogatoire (Rechtshilfeersuchen) n'est pas exécutée pour autant que la personne qu'elle vise invoque une dispense ou une interdiction de déposer, établies soit par la loi de l'Etat requis (let. a), soit par la loi de l'Etat requérant et spécifiées dans la commission rogatoire ou, le cas échéant, attestées par l'autorité requérante à la demande de l'autorité requise (let. b).

3.1.1 Selon la jurisprudence, les dispenses visées par le droit de l'Etat requis (art. 11 al. 1 let. a CLaH 70), en l'occurrence le droit suisse, comprennent non seulement les dispenses découlant du droit de procédure civile - depuis le 1er janvier 2011, l'art. 166 CPC -, mais également celles du droit matériel (arrêts 5A_284/2013 du 20 août 2013 consid. 4.1, in SJ 2014 I p. 13; 5P.423/2006 du 12 février 2007 consid. 5.1; 5P.152/2002 du 26 août 2002 consid. 3.1).
En vertu de l'art. 166 al. 1 let. b CPC, ont notamment le droit (restreint) de refuser de collaborer en raison du secret professionnel auquel ils sont soumis, les ecclésiastiques, avocats, défenseurs en justice, notaires, contrôleurs astreints au secret professionnel en vertu du CO, médecins, dentistes, chiropraticiens, pharmaciens, sages-femmes, ainsi que leurs auxiliaires (art. 321 CP). Les banquiers qui sont astreints au secret bancaire (cf. art. 47 de la loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les banques et les caisses d'épargne [LB; RS 952.0], dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2009 [selon la loi du 22 juin 2007 sur la surveillance des marchés financiers; LFINMA, RS 956.1]) ne font pas partie de cette catégorie de personnes.
Les banquiers font partie des tiers titulaires de droits de garder le secret protégés par la loi, visés par l'art. 166 al. 2 CPC (Message du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse [ci-après:Message CPC], FF 2006 6929 ch. 5.10.2). Selon cette disposition, ils ne peuvent refuser de collaborer que s'ils rendent vraisemblable que l'intérêt à garder le secret l'emporte sur l'intérêt à la manifestation de la vérité (Message CPC, ibidem; LEUENBERGER/UFFER-TOBLER, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 2010, n. 9.74; GASSER/RICKLI, Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], 2e éd. 2014, n° 10 ad art. 166 CPC; NICOLAS JEANDIN, in CPC, Code de procédure civile commenté, 2011, n° 25 ad art. 166 et n° 20 ad art. 163 CPC; ERNST
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F. SCHMID, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2e éd. 2013, nos 8a et 8b ad art. 163 CPC; FRANZ HASENBÖHLER, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], Sutter-Somm/Hasenböhler/Leuenberger [éd.], 2e éd. 2013, n° 58 ad art. 166 CPC). L'art. 47 al. 5 LB réserve expressément les dispositions de la législation fédérale - désormais notamment l'art. 166 al. 2 CPC - et cantonale sur l'obligation de renseigner l'autorité et de témoigner en justice (à propos de l'ancien art. 47 LB, cf. arrêt 5A_171/2009 du 15 octobre 2009 consid. 1.6).

3.1.2 Le droit du client de la banque au secret de ses affaires découle du contrat, soit du droit civil, ainsi que de son droit à la protection de sa sphère privée. L'obligation corollaire de la banque de garder le secret découle aussi du contrat, mais cette obligation de respecter le secret professionnel est renforcée par les sanctions pénales prévues par l'art. 47 LB (JÖRG SCHWARZ, Das Bankgeheimnis bei Rechtshilfeverfahren gemäss dem Haager Übereinkommen vom 18. März 1970 über die Beweisaufnahme im Ausland in Zivil- oder Handelssachen, RSJ 91/1995 p. 281 ss, 282). Cette disposition ne règle en effet pas le secret bancaire en tant que tel, mais prévoit la sanction (pénale) en cas de violation de ce secret (sur l'ensemble de la question: ATF 137 II 431 consid. 2.1.1 p. 436 s.).
L'art. 166 al. 2 CPC - réservé par l'art. 47 al. 5 LB - constitue donc une limite au secret professionnel (bancaire) que la banque peut invoquer à l'égard des autorités judiciaires. Lorsqu'il est requis de collaborer par celles-ci, le banquier doit fournir les renseignements et les pièces demandées, à moins qu'il ne rende vraisemblable que l'intérêt à garder le secret l'emporte sur l'intérêt à la manifestation de la vérité (art. 166 al. 2 CPC; KREN KOSTKIEWICZ/RODRIGUEZ, Internationale Rechtshilfe in Zivilsachen, 2013, ch. 469 p. 114).

3.1.3 Selon la jurisprudence, dans les litiges entre époux, le droit suisse ne permet pas à la banque d'opposer le secret bancaire à l'époux dont son client est le conjoint (cf. art. 170 al. 3 CC). En effet, le droit d'un époux à obtenir des renseignements et pièces de la part de son conjoint prime le secret bancaire. Le juge peut astreindre, soit le conjoint de l'époux requérant, soit des tiers à fournir les renseignements utiles et à produire les pièces nécessaires (art. 170 al. 2 CC). La jurisprudence a aussi précisé que le droit aux renseignements et aux pièces - et partant à l'entraide judiciaire civile internationale selon l'art. 11 al. 1 let. a CLaH 70 - n'est pas limité aux biens dont le conjoint est propriétaire, mais doit s'étendre à toutes les valeurs
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patrimoniales dont celui-ci dispose en fait, mais pas nécessairement en droit, c'est-à-dire à celles dont il est l'ayant droit économique. Il importe peu que le conjoint, ayant droit économique, ne soit pas partie à la relation contractuelle avec la banque puisque le droit aux renseignements et pièces découle de l'art. 170 al. 1 et 2 CC; il est également sans importance que le conjoint, ayant droit économique, ne puisse pas, en vertu du mandat particulier donné à la banque, obtenir lui-même des renseignements de celle-ci, puisqu'il suffit qu'il s'agisse de biens dont il dispose en fait. Il appartient au tribunal étranger requérant de fixer l'étendue des renseignements que doit fournir la banque dans le cas particulier et, le cas échéant, de prendre, à réception, les mesures nécessaires à la sauvegarde d'éventuels secrets d'affaires (arrêts 5P.423/2006 du 12 février 2007 consid. 5.1. et 5.3.2, in FamPra.ch 2007 p. 654 ss; 5A_416/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4.1.2).
Il en va de même dans les litiges entre héritiers. En effet, en vertu des art. 607 al. 3 et 610 al. 2 CC, l'héritier doit fournir tous renseignements à ses cohéritiers et cette obligation s'étend à toutes les valeurs dont celui-ci dispose en fait, donc également à celles dont il est l'ayant droit économique. Il s'ensuit en particulier que, lorsque la société recourante, titulaire formelle du compte visé par la commission rogatoire, invoque les droits de l'ayant droit économique, avec lequel elle forme une unité économique, et que cet ayant droit économique est un héritier, qui est partie à la procédure au fond devant le tribunal étranger et qui a pu faire valoir ses droits dans le cadre de cette procédure au fond, son refus de collaborer ne peut reposer ni sur l'art. 11 al. 1 let. a CLaH 70, ni sur l'art. 166 al. 2 CPC, ni sur aucune autre disposition du droit suisse. En effet, en tant que le titulaire formel et l'ayant droit économique forment une unité économique, le titulaire formel ne dispose d'aucun droit d'intervenir au stade de l'exécution de la commission rogatoire, puisque ses droits ont été examinés dans le procès au fond. Cas échéant, il appartient au tribunal étranger de fixer l'étendue des renseignements que doit fournir la banque dans le cas particulier et, à réception, de prendre les mesures nécessaires à la sauvegarde d'éventuels secrets d'affaires (arrêt 5A_284/2013 du 20 août 2013 consid. 4.2). Tous les biens de quelque pertinence pour la succession, à savoir tous les biens qui étaient formellement au nom du défunt ou dont il était l'ayant droit économique au moment du décès, peuvent même faire l'objet de mesures conservatoires; tel est le cas des biens que le défunt a
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transférés de son vivant à une fondation, tout en en demeurant l'ayant droit (arrêt 5A_416/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4.1.2; à propos de l'ancien art. 598 al. 2 CC, cf. arrêt 5C.194/1996 du 5 décembre 1996 consid. 4, in Rep. 1996 5 p. 7 s.).
Le secret bancaire n'est pas non plus opposable dans d'autres domaines du droit, et cela même lorsque le compte n'appartient pas à son titulaire formel, mais à un ayant droit économique. Tel est le cas en matière de poursuites pour dettes (art. 91 al. 4 LP), notamment de séquestre (art. 275 LP en relation avec l'art. 91 al. 4 LP; ATF 129 III 239 consid. 1 et 3.2; ATF 125 III 391 consid. 2d/bb; arrêt 5A_25/2014 du 28 novembre 2014 consid. 4.2.2 in fine; CHARLES JAQUES, La saisie et le séquestre des droits patrimoniaux dont le débiteur est l'ayant droit économique, Revue suisse de droit de procédure civile et d'exécution forcée [PCEF], 2005, p. 307 ss, p. 313).

3.2 Aux termes de l'art. 12 al. 1 let. b CLaH 70, l'exécution de la commission rogatoire peut être refusée dans la mesure où l'Etat requis - en l'occurrence la Suisse - la juge de nature à porter atteinte à sa souveraineté ou à sa sécurité.
Les notions d'atteinte à la souveraineté ou à la sécurité doivent être interprétées de manière étroite. On détermine s'il y a une telle atteinte en se basant sur les principes fondamentaux de l'ordre juridique de l'Etat requis (à propos de la notification, cf. PETER F. SCHLOSSER, EU-Zivilprozessrecht, Kommentar, 4e éd., Munich 2015, n° 4 ad art. 13 CLaH 65, p. 508). Il y a atteinte à la souveraineté ou à la sécurité de la Suisse lorsque l'exécution de la requête porte atteinte aux droits fondamentaux des personnes concernées, respectivement aux principes fondamentaux du droit de procédure civile suisse (GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 570 et 571 p. 183, avec renvoi aux ch. 298 ss p. 99 ss).
En droit suisse, le droit d'être entendu est un droit garanti par la Constitution, soit l'art. 29 al. 2 Cst. Il a été repris en procédure civile, notamment à l'art. 53 al. 1 CPC, qui le garantit aux parties. Il est également garanti à toutes les personnes concernées, c'est-à-dire à tous les tiers dont les droits sont atteints, de façon qu'ils puissent faire valoir à temps leurs objections avant qu'une décision ne soit prise à leur détriment (ATF 137 I 120 consid. 5.7 p. 127).
Il s'ensuit que le client de la banque, titulaire du compte, qui est un tiers touché par la mesure d'entraide, doit avoir eu l'occasion de s'exprimer dans le procès au fond à l'étranger, puisqu'il ne peut pas l'être
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au stade de l'exécution devant le tribunal de première instance, à défaut de quoi la requête d'entraide doit être refusée.
Lorsque le demandeur au procès au fond pendant à l'étranger veut obtenir le nom de l'ayant droit économique du compte, le tribunal étranger doit permettre au titulaire formel du compte de se déterminer à ce sujet, à défaut de quoi il ne peut être donné suite à la demande d'entraide visant à ce qu'une attestation dévoilant l'identité du bénéficiaire économique soit fournie par la banque.

3.3 La procédure à suivre pour l'exécution de la demande d'entraide judiciaire internationale est régie par le droit de procédure de l'Etat requis (lex loci executionis), en l'occurrence la Suisse. En effet, le tribunal qui procède à l'exécution de la commission rogatoire applique les lois de son pays en ce qui concerne les formes à suivre (art. 9 al. 1 CLaH 70; cf. GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 639 p. 200), par quoi il faut entendre aussi bien les règles formelles que les règles matérielles de son droit de procédure civile (GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 640 p. 200). Depuis le 1er janvier 2011, la procédure à suivre est ainsi régie par le CPC (KREN KOSTKIEWICZ/RODRIGUEZ, op. cit., ch. 450 p. 108). Quelle que soit la qualification de la demande d'entraide judiciaire (droit public ou droit civil [formel]), elle doitentrer dans le champ d'application du CPC, dès lors qu'il existe un lien indissociable entre la procédure d'entraide internationale et le procès civil dans le cadre duquel elle est requise (GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 711 et 712 p. 219 s.).

3.3.1 En vertu de l'art. 335 al. 3 CPC, la reconnaissance, la déclaration de force exécutoire et l'exécution des décisions étrangères sont régies par le présent chapitre (art. 335-346), à moins qu'un traité international ou la LDIP n'en dispose autrement. Bien que cette disposition ne mentionne pas l'entraide judiciaire en matière civile, il y a lieu d'admettre, vu la disposition correspondante de l'art. 72 al. 2 let. b ch. 1 LTF, qui est applicable pour le recours en matière civile au Tribunal fédéral et qui mentionne cette matière, que celle-ci est également soumise à la procédure d'exécution des art. 335 ss CPC.
Les prescriptions spéciales de la CLaH 70 ont toutefois la priorité. Ainsi, il doit être déféré à la demande de l'autorité requérante tendant à ce qu'il soit procédé suivant une forme spéciale, à moins que celle-ci ne soit incompatible avec la loi de l'Etat requis, ou que son application ne soit pas possible, soit en raison des usages judiciaires de l'Etat requis, soit de difficultés pratiques (art. 9 al. 2 CLaH 70;
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cf. à ce sujet, GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 644 p. 200 s.); la commission rogatoire doit être exécutée d'urgence (art. 9 al. 3 CLaH 70); en exécutant la commission rogatoire, l'autorité requise applique les moyens de contrainte appropriés et prévus par sa loi interne dans les cas et dans la même mesure où elle y serait obligée pour l'exécution d'une commission des autorités de l'Etat requis ou d'une demande formulée à cet effet par une partie intéressée (art. 10 CLaH 70; cf. GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 657 p. 204).

3.3.2 Le tribunal suisse compétent applique donc la procédure sommaire des art. 248 ss CPC, conformément à l'art. 339 al. 2 CPC. Il s'agit toutefois d'une procédure sommaire atypique, la décision qui sera rendue étant définitive.

3.4

3.4.1 La décision admettant ou rejetant la demande d'entraide judiciaire internationale n'est pas une ordonnance de preuves au sens de l'art. 154 CPC, qui ne pourrait faire l'objet d'un recours limité au droit qu'en cas de préjudice difficilement réparable tel que l'entend l'art. 319 let. b ch. 2 CPC (cf. à ce propos, arrêt du Tribunal supérieur du canton de Zurich du 18 juillet 2011, in ZR 110/2011 p. 225, commenté par KREN KOSTKIEWICZ/RODRIGUEZ, op. cit., ch. 110 ss p. 25 ss) -, mais une décision d'exécution au sens des art. 335 ss CPC.
Cette décision d'exécution peut faire l'objet d'un recours limité au droit sans autre condition en vertu de l'art. 319 let. a CPC (en relation avec l'art. 309 let. a CPC; contra: GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 727 p. 225). Il s'agit de fait d'une décision finale au sens de l'art. 319 let. a CPC, car elle met fin à la procédure suisse d'entraide judiciaire (cf., pour le recours en matière civile au Tribunal fédéral, arrêts 4A_399/2007 du 4 décembre 2007 consid. 1; 5A_284/2013 du 20 août 2013 consid. 1, in SJ 2014 I p. 13).

3.4.2 Les parties au procès au fond pendant à l'étranger ont la qualité pour recourir, dans le délai de 10 jours (art. 321 al. 2 CPC). Elles ne peuvent toutefois pas faire valoir des droits qu'elles devaient invoquer dans le procès au fond à l'étranger (arrêt 5A_284/2013 déjà cité, consid. 4.2 in fine et 4.4, in SJ 2014 I p. 13).

3.4.3 La personne visée par la commission rogatoire, en l'occurrence la banque, peut également recourir pour violation des dispositions de la CLaH 70, en particulier de son droit de refuser de collaborer protégé par l'art. 11 al. 1 let. a CLaH 70 en relation avec l'art. 166 al. 2 CPC, mais non pour faire valoir les droits propres des parties au
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procès au fond à l'étranger (arrêts 5P.423/2006 déjà cité, consid. 3; 5A_171/2009 du 15 octobre 2009 consid. 1.4).

3.4.4 Des tiers, s'ils sont atteints dans leurs droits, peuvent aussi former un tel recours limité au droit (cf. art. 346 CPC). En effet, toute personne qui est touchée par la demande d'entraide judiciaire internationale en matière civile est en droit d'interjeter recours, notamment pour faire valoir le respect des dispositions pertinentes de la CLaH 70, à tout le moins lorsque celles-ci tendent à protéger ses intérêts légitimes (GAUTHEY/MARKUS, op. cit., ch. 64 p. 22).
Le client de la banque, tiers titulaire (formel) du compte, qui n'est pas visé par la commission rogatoire et qui n'est pas partie au procès au fond à l'étranger, doit pouvoir recourir pour faire valoir ses droits, notamment que son droit d'être entendu a été violé.
L'ayant droit économique d'un compte doit également se voir reconnaître la qualité pour recourir, si ses intérêts sont touchés, ce qui est le cas lorsque la mesure d'entraide vise à la production d'une attestation indiquant son identité.

3.5 En l'espèce, dans le cadre d'un litige portant sur une vente commerciale, l'autorité judiciaire espagnole a requis des mesures d'entraide à l'encontre de la banque, qui touchent, au travers du ou des comptes visés par la commission rogatoire, aux intérêts d'un tiers, la société titulaire formelle du compte - A. - et, au travers de l'information concernant l'identité du bénéficiaire économique de ce compte, encore aux intérêts d'un autre tiers, l'ayant droit économique X.

3.5.1 Dans sa réponse au recours, la banque à l'encontre de laquelle la requête d'entraide est dirigée, qui a invoqué devant le Tribunal de première instance la dispense de collaborer fondée sur l'art. 11 CLaH 70 et à qui ordre a été donné de fournir les renseignements et pièces concernant les comptes de A. et le nom de l'ayant droit économique, déclare être liée par le secret professionnel, sa cliente ayant refusé de la délier de son secret. Or, si elle est contractuellement astreinte au secret bancaire, son droit de refuser de collaborer en raison de ce secret est limité à l'égard des autorités judiciaires: elle ne peut refuser de collaborer que si elle rend vraisemblable que l'intérêt à garder le secret l'emporte sur l'intérêt à la manifestation de la vérité (art. 166 al. 2 CPC). Comme elle n'a pas recouru à la Cour de justice contre l'ordonnance de première instance lui ordonnant de produire des renseignements et pièces, il n'y a pas lieu d'examiner si ces conditions sont remplies.
BGE 142 III 116 S. 127

3.5.2 Le titulaire formel du compte A. avait la qualité pour recourir en instance cantonale dans la mesure où la demande d'entraide porte atteinte à ses droits. Il doit être admis à faire valoir, dans le présent recours en matière civile, que ses droits fondamentaux ont été violés. Or, tel est le cas puisqu'il invoque qu'il n'a pas été entendu dans la procédure au fond pendante à l'étranger et que le contraire ne résulte pas de la demande d'entraide. La seule constatation effectuée par le tribunal étranger est que des virements ont été effectués du compte de A. sur le compte de C., dont les demanderesses sont les ayants droit économiques. Le titulaire formel du compte n'a pas non plus, par la force des choses, été entendu au cours de la procédure d'exécution suisse. Partant, le recours de A. doit être admis et la demande d'entraide internationale doit être refusée pour violation de l'art. 12 al. 1 let. b CLaH 70.

3.5.3 L'ayant droit économique X. avait la qualité pour recourir en instance cantonale dès lors que la décision ordonnant à la banque de produire une attestation dévoilant son identité porte atteinte à ses droits. Il ne saurait toutefois être admis à invoquer qu'il n'a pas été entendu dans la procédure étrangère au fond, puisque, précisément, il ne voulait pas l'être et tient à demeurer inconnu. Dans un tel cas, c'est le titulaire du compte qui doit être entendu sur la question du dévoilement de son identité. Le titulaire formel du compte n'ayant pas été entendu, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant quels éventuels droits l'ayant droit économique pourrait invoquer si le titulaire avait été entendu à propos de son identité.

3.5.4 Le recours devant être admis pour violation du droit d'être entendu du tiers titulaire du compte, il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs des recourants (mauvaise pesée des intérêts et du principe de la proportionnalité, violation des art. 1 al. 2 et 11 CLaH 70). (...)

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Sachverhalt

Erwägungen 2 3

Referenzen

BGE: 137 II 431, 129 III 239, 125 III 391, 137 I 120

Artikel: Art. 166 Abs. 2 ZPO, Art. 335 ff. ZPO, Art. 319 lit. a ZPO, art. 11a LDIP mehr...