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Chapeau

110 III 1


1. Extrait de l'arrêt de la Chambre des poursuites et des faillites du 30 avril 1984 dans la cause B. (recours LP)

Regeste

Poursuite en constitution de sûretés (art. 38 LP).
Dans une telle poursuite, en l'absence d'accord du créancier avec les sûretés en nature fournies par le débiteur, l'Office n'a pas à examiner si ces dernières sont suffisantes pour justifier l'arrêt de la poursuite; cette question relève du juge dans le cadre de l'art. 85 LP.

Faits à partir de page 1

BGE 110 III 1 S. 1

A.- Le 24 décembre 1982, la Direction des douanes de Lausanne (ci-après: la Direction des douanes) a émis contre dame B. une réquisition de sûretés en application de l'art. 123 de la loi sur les douanes (LD) qui dispose: "Si une créance douanière paraît compromise ... la direction d'arrondissement peut exiger en tout temps des sûretés de toute personne assujettie au paiement des droits ... La décision de la direction d'arrondissement est immédiatement exécutoire; elle est assimilée à un jugement dans le sens de l'art. 80 LP. - La sûreté peut être fournie sous forme de consignation d'espèces ou de papiers-valeurs ou sous forme de cautionnement. - La réquisition peut être attaquée par la voie du recours." La décision du 24 décembre 1982 astreint dame B. à fournir des sûretés pour un montant de 100'000.-- francs. Le 7 juillet
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1983, la Direction des douanes a requis l'autorité de séquestre de Neuchâtel d'ordonner le séquestre, auprès du Crédit suisse à Neuchâtel, du dépôt de titres No 7637 de la poursuivie, d'un montant de 83'009.-- francs, et du compte privé No 7637-00 d'un montant de 2'227.-- francs, avec les intérêts et les versements ultérieurs sur ces comptes. Ce séquestre a été accordé et exécuté. Le 13 juillet 1983, la Direction des douanes a validé ledit séquestre en intentant contre dame B. une poursuite en constitution de sûretés. Le second commandement de payer, établi à la suite d'une erreur de l'Office des poursuites de Neuchâtel, a été frappé d'opposition totale, lors de sa notification le 12 septembre 1983; cependant, la poursuivie a par la suite retiré son opposition, de sorte que la poursuivante a pu requérir la continuation de la poursuite le 27 octobre 1983. L'Office a exécuté la saisie le 8 novembre 1983, la faisant porter sur les objets séquestrés. La poursuivante ayant requis la vente, l'Office a informé les parties, le 24 janvier 1984, qu'il allait donner ordre au Crédit suisse de lui adresser le montant disponible du compte privé, et de procéder, jusqu'à due concurrence, à la réalisation des titres dont le produit serait déposé à la Banque cantonale neuchâteloise.

B.- La poursuivie a porté plainte contre cette décision.
Par arrêt du 9 mars 1984, l'Autorité de surveillance du canton de Neuchâtel a rejeté la plainte.
En temps utile, la poursuivie recourt contre cette décision auprès de la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral, concluant avec suite de frais et dépens principalement à la cassation de la décision critiquée, à ce qu'il lui soit donné acte qu'elle a satisfait aux conditions de la poursuite en constitution de sûretés et qu'il n'y a pas lieu de réaliser le dossier de titres pour en consigner le produit, subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue dans le sens des considérants.
L'Office des poursuites de Neuchâtel et la Confédération suisse, intimée, concluent tous deux au rejet du recours.

Considérants

Considérant en droit:

2. Se référant à la doctrine, l'autorité cantonale considère que, dans une poursuite en constitution de sûretés, l'Office ne peut renoncer à la réalisation des biens saisis et à la consignation de leur produit, et qu'il ne peut accepter des sûretés en nature en lieu et
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place du produit de la réalisation des biens saisis qu'avec l'accord du poursuivant, accord qui en l'espèce n'a pas été donné. La recourante s'oppose à cette manière de voir. Elle soutient que le poursuivi, dans une poursuite en constitution de sûretés, doit pouvoir conserver son patrimoine et que le poursuivant n'a pas le droit d'exiger une consignation d'espèces plutôt que le dépôt de papiers-valeurs.
a) En l'espèce, le titre exécutoire sur la base duquel les sûretés sont requises ne précise pas la nature de ces dernières. Il rappelle seulement - ce qui ressort également de l'art. 123 al. 2 LD - que ces sûretés peuvent être fournies sous forme de consignation d'espèces ou de papiers-valeurs ou sous forme de cautionnement. Etant donné que lesdites sûretés peuvent notamment être fournies sous forme de consignation d'espèces, la décision exécutoire invoquée peut en tout cas donner lieu à la notification d'un commandement de payer en constitution de sûretés au sens de l'art. 38 LP; il n'y a dès lors pas lieu de se demander si, d'une manière générale, l'obligation de fournir des sûretés non pécuniaires, à savoir des sûretés en nature ou des sûretés personnelles, peut donner ouverture à la poursuite en prestation de sûretés au sens de l'art. 38 LP, ou si elle ne doit pas plutôt faire l'objet d'une procédure d'exécution forcée régie par le droit cantonal de procédure (cf. au sujet de cette controverse KRAUSKOPF, Système et signification de la poursuite en prestation de sûretés dans la doctrine, la pratique et la jurisprudence, in BlSchK 1979, pp. 7-9, No 5.2; GILLIÉRON, Cours de LP, Ire partie, pp. 31-34).
b) Une telle poursuite tendant à la fourniture de sûretés - pécuniaires en tout cas - s'exerce selon les mêmes formes que la poursuite tendant au paiement d'une somme d'argent. La seule différence réside en ce que les espèces obtenues par la réalisation des biens saisis ne peuvent être distribuées au poursuivant, mais doivent être consignées à l'office de consignation, au sens de l'art. 24 LP, de telle façon qu'elles se trouvent à la disposition du créancier si celui-ci établit au fond son droit à la créance elle-même en garantie de laquelle les sûretés ont été fournies (KRAUSKOPF, loc.cit., pp. 9/10 No 6; GILLIÉRON, op.cit., p. 35; JOSS, Handbuch für die Betreibungsbeamten der Schweiz, p. 48; JAEGER, rem. 3 ad art. 38 p. 78; AMONN, 3e éd. 1983, par. 7 n. 9 et 10, p. 73; FRITZSCHE, I p. 73 ch. VI par. 3; FAVRE, p. 90 2e par.). C'est donc à bon droit que l'Office a ordonné la réalisation des biens saisis en
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vue de la consignation de leur produit à la caisse des dépôts et de consignation cantonale.
c) La recourante fait toutefois valoir qu'elle a fourni des sûretés en nature, à savoir les titres figurant à son dépôt auprès du Crédit suisse, et qu'elles sont suffisantes pour justifier l'arrêt de la poursuite. L'Office est incompétent pour statuer sur la question de savoir si de telles sûretés sont suffisantes. Lorsque le créancier se déclare d'accord avec les sûretés réelles fournies par le poursuivi, l'Office peut simplement prendre acte de cet accord d'où il découle que la poursuite n'a plus d'objet (JAEGER, n. 3 ad art. 38 p. 78; FAVRE, p. 90, par. 1; FRITZSCHE, I p. 73, VI 2e par. in fine). En l'absence d'accord du créancier, l'Office n'a pas davantage à statuer sur les droits des parties, et à dire si les sûretés fournies sont suffisantes au regard de l'acte juridique sur lequel se fonde le poursuivant. Cette question ne peut être tranchée que par le juge dans le cadre de l'art. 85 LP (AMONN, par. 7 n. 9 par. 2; JAEGER, loc.cit.; FAVRE, p. 90 par. 1; GILLIÉRON, op.cit., pp. 34/34). L'arrêt publié aux ATF 62 III 121 ne dit rien d'autre lorsqu'il pose que la poursuite aux fins de sûretés peut s'effectuer autrement que par la consignation d'espèces ou par la réalisation de biens saisis, à savoir par le dépôt de papiers-valeurs par exemple, précisant aussitôt que dans ce cas la poursuite pourra être annulée conformément à l'art. 85 LP. Il ne reconnaît ainsi nullement à l'Office la compétence de statuer sur la valeur des sûretés autres que pécuniaires.
d) Dans la mesure où la recourante soutient que les titres en dépôt au Crédit suisse constituent une sûreté suffisante, et où elle ajoute que la poursuivante est tenue de se contenter de ces titres, en vertu notamment des règles édictées par l'Instruction de l'Administration fédérale des finances du 5 juillet 1957, elle invoque des moyens qui relèvent du juge dans le cadre de l'art. 85 LP, voire du droit administratif, mais en tout cas pas de la connaissance de l'Office. Ce dernier, lorsqu'il est requis d'exercer sa compétence - à savoir la réalisation des biens saisis - dans le cadre d'une poursuite en force, ne peut que donner suite à la réquisition du créancier. La recourante ne saurait dès lors reprocher à l'Office, respectivement à l'autorité cantonale de surveillance (cf. ATF 107 III 39 /40), d'avoir abusivement restreint son pouvoir d'examen sur une question ne relevant pas de sa compétence.
e) Il s'ensuit que l'allusion de la recourante à de prétendues inadvertances que l'autorité cantonale aurait commises en ne
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tenant pas compte de faits - soi-disant établis - concernant le préjudice matériel découlant pour la recourante de la réalisation de ses titres, à savoir une perte d'intérêts, est dénuée de pertinence. Il découle en effet de ce qui précède qu'il s'agit là de questions qui échappent à la connaissance de l'Office. De même, les considérations de la recourante sur le montant de la créance en garantie de laquelle les sûretés doivent être fournies sont hors de propos. L'Office n'est en effet pas compétent pour examiner la réalité de la créance ni même le montant des garanties requises. Ces questions relèvent de la connaissance du juge de la mainlevée, l'Office devant s'en tenir, pour sa part, aux indications résultant du commandement de payer en force.
C'est donc à bon droit que l'autorité cantonale a rejeté la plainte dirigée contre la réalisation des biens saisis.

contenu

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regeste: allemand français italien

Etat de fait

Considérants 2

références

ATF: 107 III 39

Article: art. 85 LP, art. 38 LP, art. 80 LP, art. 123 al. 2 LD suite...