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Chapeau

126 III 404


70. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 14 septembre 2000 dans la cause A. contre dame A. (recours en réforme)

Regeste

Portée de l'art. 115 CC par rapport à l'art. 142 aCC; effets de l'art. 7b al. 1 tit. fin. CC sur le principe du divorce.
L'art. 7b al. 1 tit. fin. CC peut avoir pour conséquence que l'action en divorce admise en première instance sur la base de l'art. 142 aCC doive être rejetée en seconde instance au regard de l'art. 115 CC, cette disposition devant être interprétée plus restrictivement (consid. 3).
Un époux peut demander unilatéralement le divorce en application de l'art. 115 CC lorsque, pour des motifs sérieux qui ne lui sont pas imputables, on ne saurait raisonnablement lui imposer la continuation du mariage - à savoir le maintien du lien conjugal - durant les quatre années de séparation qui lui permettraient d'obtenir le divorce sur la base de l'art. 114 CC (consid. 4). Application de ces principes au cas d'espèce (consid. 5).

Faits à partir de page 404

BGE 126 III 404 S. 404
A., né en 1950, et dame A., née en 1960, se sont mariés en 1986. Ils ont eu une fille, S., née en 1989.
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Le 20 janvier 1998, le Tribunal de première instance de Genève a rendu une ordonnance de mesures protectrices de l'union conjugale par laquelle il a notamment autorisé l'épouse à se constituer un domicile séparé et a attribué à celle-ci la garde sur S., le droit de visite du père étant réservé; il a constaté que la vie commune avait cessé au début du mois de novembre 1997 en raison de grosses difficultés de communication entre les époux.
Par jugement du 31 mai 1999, ce même Tribunal, saisi par dame A. d'une action en divorce à laquelle A. s'est opposé, a prononcé le divorce des époux A. et en a reglé les effets accessoires.
Statuant par arrêt du 18 février 2000 sur appel du défendeur, qui persistait à s'opposer au divorce, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance. Appliquant le nouveau droit du divorce en vertu de l'art. 7b al. 1 tit. fin. CC, les juges cantonaux ont considéré que le divorce pouvait être prononcé en application du nouvel art. 115 CC, dont la formulation rejoignait pratiquement celle de l'ancien art. 142 CC et qui pouvait donc être interprété selon les principes développés à propos de cette ancienne disposition.
Le Tribunal fédéral a admis le recours en réforme interjeté par le défendeur contre cet arrêt et a débouté la demanderesse de l'ensemble des conclusions de sa demande.

Considérants

Extrait des considérants:

3. a) En vertu de l'art. 7b al. 1 tit. fin. CC, les procès en divorce pendants qui doivent être jugés par une instance cantonale sont soumis au nouveau droit dès l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 26 juin 1998. Il s'ensuit que dès le 1er janvier 2000, les juridictions cantonales supérieures qui sont saisies d'un recours portant sur le principe du divorce, même prononcé en première instance sous l'ancien droit, doivent statuer sur ce point en application des art. 111 à 116 nouveaux CC (THOMAS SUTTER/DIETER FREIBURGHAUS, Kommentar zum neuen Scheidungsrecht, 1999, n. 7 ad art. 7b tit. fin. CC).
Dès lors que la cause de divorce de l'art. 115 CC doit être interprétée de manière plus restrictive que la cause de divorce indéterminée de l'art. 142 aCC (cf. consid. 4 infra), cela peut avoir pour conséquence que l'action en divorce admise en première instance sur la base de l'art. 142 aCC doive être rejetée en seconde instance au regard de l'art. 115 CC (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 8 s. ad art. 7b tit. fin. CC). Cette conséquence, même si elle peut paraître
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insatisfaisante, est inhérente au système du droit révisé, lequel peut faciliter le divorce - notamment en instaurant un droit absolu au divorce après quatre ans de séparation (cf. consid. 4b et c infra) - tout comme le rendre plus difficile dans certains cas où le divorce pouvait auparavant être prononcé en application de l'art. 142 aCC malgré l'opposition du conjoint défendeur (cf. consid. 4d infra).
b) Pour éviter ce résultat ressenti comme choquant, une partie de la doctrine préconise d'appliquer l'art. 115 CC de manière plus souple dans les cas où le divorce a été prononcé, ou aurait pu l'être, en application d'un droit ancien plus favorable, mais que le jugement a été retardé par des manoeuvres dilatoires du défendeur ou par des causes objectives telles que la surcharge des tribunaux (DANIEL STECK, Scheidungsklagen, in Das neue Scheidungsrecht, 1999, p. 37/38; RUTH REUSSER, Die Scheidungsgründe und die Ehetrennung, in Heinz Hausheer (éd.), Vom alten zum neuen Scheidungsrecht, 1999, n. 1.111; PHILIPPE MEIER, Nouveau droit du divorce: Questions de droit transitoire, in JdT 2000 I 66 ss, p. 91/92; réservé BRUNO SUTER, Übergangsrecht, in Das neue Scheidungsrecht, 1999, p. 174).
c) Une telle voie ne saurait toutefois être suivie. En effet, l'art. 7b al. 1 tit. fin. CC dispose de manière univoque que tous les procès en divorce pendants qui doivent être jugés par une instance cantonale, sans distinction, sont soumis au nouveau droit dès l'entrée en vigueur de celui-ci. Le Tribunal fédéral est tenu d'appliquer (art. 191 Cst.) cette disposition transitoire, dont le texte clair ne souffre pas d'interprétation (cf. ATF 124 II 265 consid. 3a; ATF 121 III 460 consid. 4a/bb p. 465 et les arrêts cités). L'art. 7b al. 1 tit. fin. CC ne saurait être corrigé par le biais inédit d'une interprétation élastique du droit matériel réservée aux seules situations intertemporelles. Une telle interprétation reviendrait à appliquer de facto l'ancien droit contrairement à l'art. 7b al. 1 tit. fin. CC, respectivement à ne pas appliquer le nouveau droit; en effet, le "durcissement" intertemporel résultant du passage de l'art. 142 aCC à l'art. 115 CC n'entre manifestement pas dans la notion de motifs sérieux au sens de cette dernière disposition, lesquels doivent tenir à la personne du conjoint (cf. consid. 4h infra). Au surplus, une interprétation souple de l'art. 115 CC comporterait clairement le danger de voir s'instaurer une jurisprudence incompatible avec la volonté du législateur, de sorte qu'elle doit être rejetée pour cette raison également (RENATE PFISTER-LIECHTI, Le nouveau droit du divorce: Quelle procédure?, in SJ 2000 II 243 ss, p. 260; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 9 ad art. 7b tit. fin. CC;
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ROLAND FANKHAUSER, in INGEBORG SCHWENZER (éd.), Praxiskommentar Scheidungsrecht, 2000, n. 23 ad art. 115 CC; MARCEL LEUENBERGER, ibid., n. 4 ad art. 7a/b tit. fin. CC; cf. consid. 4d infra).

4. a) Le nouveau droit connaît trois causes de divorce, qui reposent toutes sur le constat de l'échec du mariage (Message du Conseil fédéral du 15 novembre 1995 concernant la révision du Code civil suisse, FF 1996 I 1ss, n. 231.1; cf. HEINZ HAUSHEER, Die Scheidungsgründe in der laufenden Ehescheidungsreform, in RDS 115/1996 I p. 343 ss, p. 354): le divorce sur requête commune des époux (art. 111 et 112 CC), le divorce sur demande unilatérale après suspension de la vie commune pendant quatre ans au moins (art. 114 CC) et le divorce sur demande unilatérale pour rupture du lien conjugal (art. 115 CC). Les deux premières causes, qui sont nouvelles par rapport à l'ancien droit, répondent à la volonté du législateur de "formaliser" les causes de divorce et de les "dépénaliser" en éliminant la notion de faute (Message, n. 144.3 et 231.1). Elles constituent - selon la terminologie utilisée sous l'ancien droit (cf. notamment ATF 108 II 25 consid. 2a) - des causes absolues de divorce, en ce sens que la rupture du lien conjugal est présumée de manière irréfragable (STECK, op. cit., p. 33; JEAN-FRANÇOIS PERRIN, Les causes du divorce selon le nouveau droit, in RENATE PFISTER-LIECHTI (éd.), De l'ancien au nouveau droit du divorce, 1999, p. 25).
b) Le divorce sur demande unilatérale est régi par les art. 114 et 115 CC. Un époux peut demander unilatéralement le divorce lorsque, au début de la litispendance de la demande ou au jour du remplacement de la requête par une demande unilatérale, les conjoints ont vécu séparés pendant quatre ans au moins (art. 114 CC); chaque époux peut toutefois demander le divorce avant l'expiration du délai de quatre ans lorsque des motifs sérieux qui ne lui sont pas imputables rendent la continuation du mariage insupportable (art. 115 CC).
Il résulte de la ratio legis (cf. consid. 4a supra) et du texte même de l'art. 115 CC que celui-ci instaure une cause de divorce subsidiaire par rapport à celle de l'art. 114 CC (Message, n. 231.1; STECK, op. cit., p. 33-35; REUSSER, op. cit., n. 1.78 s.; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 6 ad art. 115 CC; FANKHAUSER, op. cit., n. 2 ad art. 115 CC; ALEXANDRA RUMO-JUNGO, Die Scheidung auf Klage, in AJP 1999 p. 1530 ss, 1535; HEINZ HAUSHEER/THOMAS GEISER/ESTHER KOBEL, Das Eherecht des Schweizerischen Zivilgesetzbuches, 2000, n. 10.25; PERRIN, op. cit., p. 26; JACQUES MICHELI ET AL., Le nouveau droit du divorce, 1999, n. 191).
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c) Selon l'opinion dominante, l'art. 115 CC doit permettre de déroger à l'exigence d'une séparation d'au moins quatre ans dans des cas particuliers où il serait excessivement rigoureux d'imposer au demandeur de patienter durant les quatre années du délai de séparation prévu à l'art. 114 CC (REUSSER, op. cit., n. 1.78 s.; RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1535; STECK, op. cit., p. 35; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 6 ad art. 115 CC; HAUSHEER/GEISER/KOBEL, op. cit., n. 10.25; Message, n. 231.32). Quoique s'inspirant de l'art. 142 al. 1 aCC, l'art. 115 CC doit ainsi être interprété dans un contexte différent; il ne s'agit en effet plus de se demander, comme c'était le cas sous l'empire de l'art. 142 aCC, si l'on peut imposer à un époux le maintien de l'union conjugale pendant une durée indéterminée - étant rappelé que l'époux défendeur ne pouvait en principe plus s'opposer au divorce après une séparation de quinze ans (ATF 108 II 503; ATF 111 II 109 consid. 1d) -, mais si l'on peut raisonnablement exiger de lui qu'il attende la fin du délai de séparation de quatre ans pour obtenir le divorce (REUSSER, op. cit., n. 1.81; RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1535; HAUSHEER, op. cit., p. 364; STECK, op. cit., p. 35; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 9 ad art. 115 CC). Par ailleurs, l'art. 115 CC ne se fonde plus, comme l'art. 142 aCC, sur le caractère insupportable de la vie commune, mais sur le caractère insupportable du mariage en tant que tel, à savoir du lien conjugal (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 9 ad art. 115 CC; FANKHAUSER, op. cit., n. 6 ad art. 115 CC).
d) Dès lors, toujours selon la doctrine majoritaire, l'art. 115 CC doit être interprété de manière plus restrictive et selon des critères plus sévères que l'art. 142 aCC; à défaut, la cause de divorce subsidiaire (cf. consid. 4b supra) de l'art. 115 CC risque de devenir dans la pratique - comme cela a été le cas avec l'art. 142 aCC - la principale cause de divorce, au détriment des causes "formalisées" (cf. consid. 4a supra), ce qui compromettrait largement le principal objectif de la révision du droit du divorce (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 9 ad art. 115 CC; REUSSER, op. cit., n. 1.86; FANKHAUSER, op. cit., n. 2 ad art. 115 CC; RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1536; HAUSHEER/GEISER/KOBEL, op. cit., n. 10.27; Message, n. 231.32). Plusieurs auteurs expriment ainsi la crainte que certains tribunaux ne perpétuent sous l'empire de l'art. 115 CC, en contradiction avec l'esprit du nouveau droit, la pratique judiciaire issue de l'application de l'art. 142 aCC (FANKHAUSER, op. cit., n. 2 ad art. 115 CC; PERRIN, op. cit., p. 26, 27 et 29).
e) Selon une opinion minoritaire, l'interprétation restrictive préconisée par la doctrine dominante ne pourrait trouver appui ni sur le
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texte de l'art. 115 CC, ni sur la conception des causes de divorce dans le nouveau droit, ni même sur les travaux préparatoires; rien n'empêcherait le juge, dans son application de l'art. 115 CC, de s'inspirer de la jurisprudence éprouvée rendue au sujet de l'art. 142 aCC (ROGER WEBER, Kritische Punkte der Scheidungsrechtsrevision, in AJP 1999 p. 1633 ss, p. 1635/1636; cf. dans le même sens MICHELI ET AL., op. cit., n. 192 et 195). Il n'y aurait aucun motif de contraindre, par une interprétation restrictive de l'art. 115 CC destinée uniquement à décharger les tribunaux, un époux à maintenir pendant quatre ans une union conjugale absolument vidée de son contenu; adopter l'opinion contraire reviendrait à faire peu de cas des droits de la personnalité de la partie demanderesse et l'exposerait à ce que l'autre conjoint négocie son accord sur le principe du divorce pour obtenir des avantages indus dans le règlement des effets accessoires du divorce (WEBER, op. cit., p. 1636).
f) Cette opinion minoritaire ne saurait être partagée. Il résulte en effet clairement du texte de l'art. 115 CC, de la conception qui est à la base du nouveau droit ainsi que du Message du Conseil fédéral que cette disposition ne peut trouver application que dans des cas particuliers, où il serait excessivement rigoureux d'imposer au demandeur de patienter durant les quatre années du délai de séparation prévu à l'art. 114 CC (cf. consid. 4b et c supra). L'art. 115 CC doit ainsi nécessairement recevoir une interprétation plus restrictive que l'art. 142 al. 1 aCC, sous l'empire duquel l'enjeu, pour l'époux demandeur, était de savoir si l'on pouvait lui imposer le maintien de l'union conjugale pendant une durée indéterminée (cf. consid. 4c supra). Seule une telle interprétation permettra d'atteindre l'objectif majeur de la réforme qu'est le souci de "dépénaliser" le divorce en le prononçant autant que possible sur la base de critères formels (cf. consid. 4a supra), qui évitent le "déballage" de la vie conjugale devant le juge avec toutes les répercussions négatives qu'il implique (cf. Message, n. 144.3). Cet objectif serait à l'évidence gravement compromis si l'art. 115 CC devait recevoir la même portée et la même importance pratique que l'art. 142 aCC (cf. consid. 4d supra). Enfin, s'il est vrai que, comme sous l'ancien droit (cf. art. 158 ch. 5 et ATF 119 II 297 consid. 3b), le contrôle de la convention par le juge (art. 140 al. 2 CC) n'exclut pas tout risque quant au caractère équilibré de celle-ci, l'existence d'un droit absolu au divorce après quatre ans de séparation (cf. FANKHAUSER, op. cit., n. 1 ad art. 114 CC et les références citées) devrait également contribuer à limiter ce risque, qui ne saurait justifier une interprétation extensive de l'art. 115 CC.
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g) En définitive, il convient d'admettre avec la doctrine dominante qu'un époux peut demander unilatéralement le divorce sur la base de l'art. 115 CC lorsque, pour des motifs sérieux qui ne lui sont pas imputables, on ne saurait raisonnablement lui imposer la continuation du mariage - à savoir le maintien du lien conjugal - durant les quatre années de séparation qui lui permettraient d'obtenir le divorce sur la base de l'art. 114 CC (STECK, op. cit., p. 35; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 9 ad art. 115 CC; RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1535 s.; REUSSER, op. cit., n. 1.81; HAUSHEER, op. cit., p. 364; SUZETTE SANDOZ, Nouveau droit du divorce - Les conditions du divorce, in RDS 118/1999 I p. 103 ss, p. 109; HAUSHEER/GEISER/KOBEL, op. cit., n. 10.25; Message, n. 231.32). Savoir si tel est le cas dépend des circonstances particulières de chaque espèce (art. 4 CC; Message, n. 231.32; STECK, op. cit., p. 34; RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1536; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 9 ad art. 115 CC; SANDOZ, op. cit., p. 109).
h) Il n'est dès lors pas possible, ni souhaitable, d'établir des catégories fermes de motifs sérieux au sens de l'art. 115 CC (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 14 ad art. 115 CC). Tout au plus peut-on, sans qu'il y ait lieu ici de prendre position à ce sujet, rapporter les principaux exemples cités par la doctrine, laquelle propose d'admettre l'existence de motifs sérieux au sens de l'art. 115 CC en cas de: violences physiques (Message, n. 231.32; REUSSER, n. 1.85; SANDOZ, op. cit., p. 109) ou psychiques (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 10 ad art. 115 CC) propres à mettre en danger la santé physique ou psychique de l'époux demandeur ou de ses enfants (RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1536; FANKHAUSER, op. cit., n. 7 ad art. 115 CC; STECK, op. cit., p. 37); - infraction pénale grave contre le conjoint demandeur ou l'un de ses proches (STECK, op. cit., p. 37; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 10 ad art. 115 CC; cf. art. 125 al. 3 ch. 3 CC et art. 138 al. 1 aCC); - abus sexuels démontrés contre les enfants communs ou issus d'un premier lit (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 10 ad art. 115 CC; RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1536); - délit infamant (RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1536; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 10 ad art. 115 CC; STECK, op. cit., p. 37; cf. art. 139 aCC); - maladie mentale grave (RUMO-JUNGO, op. cit., p. 1536; STECK, op. cit., p. 36; SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 11 ad art. 115 CC; HAUSHEER/GEISER/KOBEL, op. cit., n. 10.27; cf. art. 141 aCC).

5. a) En l'occurrence, il résulte de l'arrêt attaqué que les épisodes de violence physique dont la demanderesse a allégué avoir été victime n'ont pas fait l'objet de témoignages directs, ni
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n'ont été confirmés par des éléments objectifs tels que des certificats médicaux. La demanderesse ne peut ainsi que supporter l'échec de la preuve sur ce point (SUTTER/FREIBURGHAUS, op. cit., n. 19 ad art. 115 CC). La cour cantonale ne pouvait dès lors fonder sa décision que sur la "profonde dissension" entre les époux, sur le fait que ceux-ci vivent séparés depuis plus de deux ans, et enfin sur la constatation que l'attitude du défendeur n'est pas allée dans le sens d'une réconciliation, dans la mesure où il ne s'est pas acquitté du loyer de l'ancien appartement conjugal, contraignant ainsi la demanderesse à s'acquitter des arriérés de loyer pour éviter une saisie. A la lumière de l'ensemble de ces éléments, les juges cantonaux ont estimé que la reprise de la vie commune n'apparaissait pas envisageable et ne pouvait être imposée. Ils ont dès lors confirmé le prononcé du divorce en application de l'art. 115 CC, en partant du principe que cette disposition pouvait être interprétée selon les principes développés à propos de l'art. 142 al. 1 aCC, dont elle rejoignait pratiquement la formulation.
b) Ce faisant, les juges cantonaux sont partis d'une fausse conception du nouveau droit. En effet, comme il a été exposé plus haut (consid. 4), l'art. 115 CC doit être interprété de manière plus restrictive que l'art. 142 al. 1 aCC. Il faut que, pour des motifs sérieux qui ne sont pas imputables à l'époux demandeur, on ne puisse raisonnablement imposer à celui-ci la continuation du mariage durant les quatre années de séparation qui lui permettraient d'obtenir le divorce sur la base de l'art. 114 CC (cf. consid. 4g supra). Ainsi, lorsque le conjoint défendeur s'oppose au divorce, la question n'est pas de savoir si l'on peut exiger de l'époux demandeur la reprise de la vie commune, mais si l'on peut lui imposer la continuation du mariage - en tant que lien légal - pendant les quatre ans de séparation prévus par l'art. 114 CC (cf. consid. 4c supra), auquel l'art. 115 CC doit rester subsidiaire (cf. consid. 4b et d supra). Or les éléments résultant de l'arrêt attaqué, tels que rappelés ci-dessus (consid. 5a), ne permettent pas d'admettre l'existence de motifs sérieux pour lesquels on ne saurait imposer à la demanderesse la continuation du mariage jusqu'à l'écoulement du délai de séparation de quatre ans qui fondera un droit absolu au divorce sur la base de l'art. 114 CC.

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Considérants 3 4 5

références

ATF: 124 II 265, 121 III 460, 108 II 25, 108 II 503 suite...

Article: art. 115 CC, art. 114 CC, art. 7b al. 1 tit. fin. CC, art. 7b tit. fin. CC suite...