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Chapeau

97 II 209


29. Arrêt de la IIe Cour civile du 28 octobre 1971 dans la cause Schuricht contre Weisbach.

Regeste

Art. 626 CC.
L'argent qu'un père verse à la femme divorcée et aux enfants de son fils, pour subvenir à leur entretien, n'est pas assujetti au rapport.

Faits à partir de page 209

BGE 97 II 209 S. 209

A.- Karl Schuricht, de nationalité allemande, a épousé Frederike Heinemann le 11 juillet 1908. Un enfant, Johannes, est issu de leur union le 6 avril 1916. Karl Schuricht a prétendu à deux personnes au moins qu'il n'était pas le père de cet enfant. Il n'a toutefois pas intenté une action en désaveu. Les époux Schuricht-Heinemann ont divorcé en 1922. Après son divorce, Frederike Heinemann a épousé Hans Weisbach, qui a adopté
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l'enfant Johannes. Depuis lors, celui-ci a porté le nom de Weisbach et le prénom d'Helmut.
Le 7 novembre 1939, Helmut Weisbach a épousé Bertha Linder. Ils ont eu deux fils: Wolfgang né le 1er mai 1941 et Michael né le 20 mars 1943. De 1939 à 1945, Helmut Weisbach a été mobilisé. Il fut détenu comme prisonnier de guerre de 1945 à 1947. Puis il a suivi des cours dans une école de commerce jusqu'en 1949.
Dès 1939, Hans Weisbach a subvenu à l'entretien de la femme puis des enfants d'Helmut Weisbach. Ce dernier a divorcé en 1950. Quelques jours avant le divorce, il a obtenu de sa femme et de Hans Weisbach une attestation dans laquelle ceux-ci déclarent "renoncer volontairement à une contribution financière pour l'entretien de la famille, aussi longtemps que cela est rendu possible à M. Hans Weisbach par l'exercice de sa profession et par le déclassement de sa carte fiscale dans le groupe III".
En 1944, Karl Schuricht a épousé Martha Banz. Il a également versé après la guerre des subsides à Bertha Weisbach et à ses enfants, ce qui leur a permis de faire des études. Le total de ses prestations s'élève à un montant de l'ordre de 30 000 fr.
Dès l'automne 1955 et jusqu'en novembre 1965, Helmut Weisbach a versé à sa femme divorcée 400 marks par mois.
Le 26 janvier 1955, Karl Schuricht a rédigé un testament qui prévoit ce qui suit:
"Je soussigné, Karl Schuricht, institue comme ma seule héritière ma chère femme Martha Maria Schuricht, née Banz. Je lui laisse le soin de donner quelque chose à mes amis ou parents en souvenir de moi. Elle n'a cependant aucune obligation de le faire et peut disposer selon que bon lui semble.
Pour le cas où Helmut Weisbach ou les enfants de celui-ci devraient revendiquer des droits quelconques sur ma succession, je dispose que les montants que, par compassion, j'ai payés à lui-même, respectivement à sa femme Bertha ou à ses enfants Wolfgang et Michael soient imputés sur la réserve d'héritage." (traduction)
Karl Schuricht est décédé à Corseaux le 7 janvier 1967.

B.- Helmut Weisbach a intenté deux actions à Martha Schuricht, l'une devant le Tribunal civil du district de Vevey, l'autre devant la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois. Par décision du 1er juillet 1969, le président de cette cour a ordonné d'office la jonction des deux procès. Le demandeur
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a conclu en substance à ce qu'il soit déclaré héritier réservataire de Karl Schuricht et à ce que l'obligation de rapporter ordonnée dans le testament soit annulée.
La défenderesse a conclu au rejet des deux actions. Reconventionnellement, elle a demandé que le testament de Karl Schuricht soit déclaré valable et qu'elle soit reconnue comme héritière unique du défunt. Subsidiairement, pour le cas où le droit du demandeur à la réserve serait admis, elle a conclu à ce que ce dernier rapporte à la succession tout montant attribué par le défunt à Helmut Weisbach, à Bertha Weisbach et aux enfants Wolfgang et Michael.
Le 7 mai 1971, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a rendu le jugement suivant:
"1. Le demandeur, Helmut Weisbach, a droit à sa réserve légale dans la succession de feu Karl Schuricht, décédé le 7 janvier 1967 à Corseaux.
2. Les dispositions du testament de feu Karl Schuricht, fait à Corseaux le 26 janvier 1955, sont annulées et de nul effet dans la mesure où elles ordonnent l'imputation, sur la part héréditaire du demandeur, des libéralités faites par le défunt en faveur de l'épouse divorcée et des enfants du demandeur."

C.- Contre ce jugement, Martha Schuricht recourt en réforme au Tribunal fédéral. Elle maintient uniquement ses conclusions subsidiaires.

Considérants

Considérant en droit:

1. Ressortissant allemand, Karl Schuricht était domicilié à Corseaux-sur-Vevey lorsqu'il est décédé. Sa succession est ainsi soumise au droit suisse (art. 22 et 32 LRDC).

2. L'art. 626 CC dispose:
"Les héritiers légaux sont tenus l'un envers l'autre au rapport de toutes les libéralités entre vifs reçues à titre d'avancement d'hoirie.
Sont assujettis au rapport, faute par le défunt d'avoir expressément disposé le contraire, les constitutions de dot, frais d'établissement, abandons de biens, remises de dettes et autres avantages semblables faits en faveur de descendants."
En l'espèce, Karl Schuricht n'a pas fait de libéralités à son fils Helmut Weisbach. C'est uniquement la femme de celui-ci et ses enfants qui ont été les destinataires des subsides versés par le de cujus. La seule question qui puisse se poser est de
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savoir si, par les versements de ces prestations, l'intimé a bénéficié d'un "avantage semblable" au sens de l'art. 626 al. 2 CC. Elle doit être tranchée par la négative. Il n'est en effet même pas établi que l'intimé se soit abstenu de fournir des aliments à Bertha Weisbach et à ses enfants parce que ceux-ci recevaient des subsides de Karl Schuricht. Il ressort au contraire du jugement déféré que l'intimé n'était pas en mesure jusqu'en 1955 d'entretenir sa femme divorcée et ses enfants. On ne saurait considérer dans ces conditions que les prestations du de cujus aient eu en quelque sorte pour effet d'éteindre une dette d'entretien de l'intimé. C'est dire que les subsides versés par le de cujus n'ont procuré aucun avantage à Helmut Weisbach. Celui-ci ne saurait dès lors être tenu de rapporter à la succession des libéralités faites à des tiers et qui n'ont constitué pour lui aucun avantage patrimonial.

Dispositif

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours et confirme le jugement rendu le 7 mai 1971 par la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois.

contenu

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Etat de fait

Considérants 1 2

Dispositif

références

Article: Art. 626 CC