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Regeste

SUISSE: Art. 6 par. 1 CEDH. Droit d'accès à un tribunal lors de la mise en oeuvre des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU liées à l'embargo contre l'Irak.


Les autorités suisses ont prononcé la confiscation des avoirs de l'intéressé et de son entreprise en vue de leur transfert à l'Irak.
La Grande Chambre confirme l'importance du droit d'accès à un tribunal dans les affaires relevant du droit civil.
Lorsqu'une résolution de l'ONU ne contient pas de formule explicite excluant la possibilité d'un contrôle judiciaire des sanctions prises, elle doit être comprise comme autorisant les juridictions de l'Etat à effectuer un contrôle approprié. Ce contrôle peut se limiter à l'arbitraire, ce qui garantit le juste équilibre entre le respect des droits de l'homme et les impératifs de la protection de la paix et de la sécurité.
En l'espèce, les mesures prises par les autorités suisses pour améliorer la situation des requérants n'étaient pas suffisantes (ch. 126-155).
Conclusion: violation de l'art. 6 par. 1 CEDH.

N.B. Cet arrêt de la Grande Chambre fait suite à celui du 26.11.2013 d'une chambre.

Affaire phare.

Synthèse de l'OFJ


(2ème rapport trimestriel 2016)

Droit à un procès équitable (article 6 § 1 CEDH); confiscation d'avoirs en application de sanctions de l'ONU.

Le premier requérant (le requérant) était responsable des finances des services secrets irakiens sous le régime de Saddam Hussein; il est le directeur de la seconde requérante (la requérante), une société de droit panaméen. Les avoirs des requérants en Suisse furent gelés en 1990 dans le cadre des sanctions économiques adoptées après l'invasion du Koweït par l'Irak. En 2003, le Conseil de sécurité de l'ONU adopta la Résolution 1483 (2003), qui prévoit notamment que les avoirs de Saddam Hussein, des hauts responsables de l'ancien régime irakien et des entités qui leur appartiennent doivent être gelés et transférés au Fond de développement pour l'Irak. Le Comité des sanctions créé par le Conseil de sécurité dans ce contexte inscrivit les requérants sur la liste des personnes et entités visées par ces mesures en avril 2004. Les mesures du Conseil de sécurité furent transposées en Suisse dans des ordonnances du Conseil fédéral. En novembre 2006, le Département fédéral de l'économie prononça la confiscation des avoirs gelés des requérants. Les recours de ceux-ci au Tribunal fédéral furent rejetés. Le Tribunal fédéral releva notamment que l'article 103 de la Charte des Nations Unies prévoit une primauté absolue des obligations en vertu de la Charte - dont celle de respecter les résolutions du Conseil de sécurité - en cas de conflit avec un autre accord international. Par conséquent, la mise en ?uvre des mesures contestées, clairement définies dans les résolutions applicables, ne laisserait ainsi aucune place à un examen de la procédure d'inscription ou du bien-fondé de l'inscription. Devant la Cour, les requérants firent notamment valoir que la confiscation de leurs avoirs avait été ordonnée en l'absence de toute procédure conforme à l'article 6 § 1 CEDH.

Relevant que les Parties contractantes sont responsables, au titre de l'article 1 CEDH, de tous les actes et omissions de leurs organes, qu'ils découlent du droit interne ou d'obligations juridiques internationales, la Cour estima qu'elle était compétente ratione personae pour examiner la requête.

Selon la Cour, vu la gravité de l'enjeu pour les personnes concernées, lorsqu'une résolution du Conseil de sécurité ne contient pas une formule claire et explicite excluant la possibilité d'un contrôle judiciaire des mesures prises pour son exécution, elle doit toujours être comprise comme autorisant les juridictions nationales à effectuer un contrôle suffisant pour permettre d'éviter l'arbitraire. Pour effectuer ce contrôle, les juridictions nationales devraient pouvoir obtenir des éléments suffisamment précis justifiant l'inscription, l'impossibilité d'accéder à de telles informations étant susceptible de constituer un indice du caractère arbitraire de la mesure. En l'espèce, l'examen par le Tribunal fédéral de la question de savoir si les noms des requérants figuraient effectivement sur les listes établies par le Comité des sanctions et si les avoirs confisqués leur appartenaient aurait été insuffisant pour s'assurer que l'inscription des requérants était exempte d'arbitraire. Violation de l'article 6 § 1 CEDH (quinze voix contre deux).

contenu

Arrêt CourEDH entier
résumé (français)

références

Article: Art. 6 par. 1 CEDH