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Ecriture agrandie
 

Regeste

  SUISSE: Art. 2 CEDH. Manquement de l'État à son obligation de protéger la vie du fils de la requérante, qui s'est suicidé dans une cellule de police, ainsi qu'à son devoir de mener une enquête effective sur les circonstances du décès.

  Selon la Cour, les autorités auraient dû avoir connaissance du risque de suicide du fils de la requérante. Elles disposaient de suffisamment d'éléments pour tenir compte de la vulnérabilité particulière de celui-ci et pour conclure qu'il avait besoin d'une surveillance étroite. La responsabilité des autorités réside dans le fait d'avoir traité l'intéressé comme une personne capable de résister au stress et aux pressions, sans prêter suffisamment attention à sa situation personnelle (ch. 73-99).
  Conclusion: violation du volet matériel de l'art. 2 CEDH.
  Le refus des juridictions nationales d'ouvrir une enquête pénale n'apparaît ni adéquat ni raisonnable à la lumière du droit et de la pratique internes pertinents (ch. 116-140).
  Conclusion: violation du volet procédural de l'art. 2 CEDH.

Synthèse de l'OFJ


(2ème rapport trimestriel 2020)

Droit à la vie (art. 2 CEDH) ; suicide d'un détenu vulnérable dans une cellule de police.

L'affaire concernait le suicide commis de façon inhabituelle par un détenu vulnérable, le fils de la requérante (D.F.), laissé dans une cellule de police sans surveillance durant quarante minutes, ainsi que le devoir de mener une enquête effective sur les circonstances du décès.

Invoquant l'article 2 CEDH (droit à la vie), la requérante soutenait que les autorités n'avaient pas répondu à l'obligation positive de prendre préventivement des mesures pour protéger son fils contre lui-même. Elle estimait également que les investigations effectuées par les autorités n'avaient pas satisfait aux exigences de l'article 2 CEDH. La Cour a constaté que le fils de la requérante a exprimé des menaces de suicide clairement et de manière répétée. Elle en a conclu que les autorités avaient ou auraient dû avoir connaissance, sur le moment, qu'il risquait de commettre un suicide et qu'il s'agissait d'un risque certain et immédiat pour sa vie. La Cour parvient à ce constat nonobstant le fait que la requérante elle-même, qui avait connaissance des problèmes psychiques de son fils, n'a pas jugé le risque de suicide réel et imminent puisqu'elle avait nié, peu avant le suicide, l'existence d'une mise en danger de son fils vis-à-vis du médecin urgentiste. La Cour est également d'avis que les autorités disposaient de suffisamment d'éléments pour avoir connaissance de la vulnérabilité particulière du fils de la requérante. Par conséquent, les autorités auraient dû conclure que D.F. avait indéniablement besoin d'une surveillance étroite. Elle a retenu que, eu égard à ces éléments, les autorités n'ont pas pu laisser celui-ci seul dans une cellule sans surveillance pendant quarante minutes sans méconnaître le droit à la vie au sens de l'article 2 CEDH. La Cour a estimé également que les autorités auraient, avec un effort raisonnable et non exorbitant, pu pallier le risque de suicide de D.F. Selon la Cour, la responsabilité des autorités réside, dans le cas d'espèce, dans le fait d'avoir traité D.F. comme une personne capable de résister au stress et aux pressions subis, sans prêter suffisamment d'attention à sa situation personnelle. Indépendamment de la question de savoir si les agents de police ont agi ou non selon les règles applicables dans une telle situation, en ne reconnaissant pas D.F. comme personne appelant un traitement particulier, elles ont engagé la responsabilité de leur État en vertu de la Convention. Par conséquent, elle a conclu à la violation du volet matériel de l'article 2 de la Convention. Sous l'angle procédural, la Cour a estimé qu'elle n'était pas convaincue qu'il n'existait pas d'« indices minimaux » d'un comportement punissable de la part des agents impliqués dans les événements ayant mené à la mort de D.F. Le refus des juridictions nationales d'autoriser le déclenchement d'une procédure pénale n'apparaissait dès lors ni adéquat ni raisonnable à la lumière du droit et de la pratique internes pertinents. Il s'ensuit qu'il y a eu également violation du volet procédural de l'article 2 de la Convention. Violation de l'art. 2 CEDH (unanimité).

contenu

Arrêt CourEDH entier
résumé (français)

références

Article: Art. 2 CEDH