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Intestazione

119 Ia 88


14. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 24 février 1993 dans la cause La Genevoise, compagnie d'assurances sur la vie, contre Conseil d'Etat du canton de Vaud (recours de droit public)

Regesto

Art. 6 n. 1 CEDU, art. 4 e 22ter Cost.; art. 33 LPT; attribuzione di una sala di cinema e teatro.
1. Art. 86 OG; ammissibilità di nuove censure (consid. 1).
2. Portata della nozione di "diritti e doveri di carattere civile" giusta l'art. 6 n. 1 CEDU; riepilogo della giurisprudenza (consid. 3).
3. La decisione con cui il Consiglio di Stato vodese ha proceduto, in applicazione dell'art. 52 della Legge cantonale sulla protezione della natura, dei monumenti e dei paesaggi, all'attribuzione di una sala di cinema e teatro, dei suoi annessi e del suo ridotto, riguarda, nella fattispecie, i diritti di carattere civile soggetti all'art. 6 n. 1 CEDU (consid. 4).
4. La ricorrente che contesta lo stato di fatto e la fondatezza di questa misura, non ha avuto la possibilità di sottoporre il litigio ad un tribunale indipendente e imparziale ai sensi dell'art. 6 n. 1 CEDU (consid. 5).
5. La procedura cantonale non adempie inoltre i requisiti posti dall'art. 33 LAT (consid. 6). Effetti dell'ammissione del ricorso (consid. 7).

Fatti da pagina 89

BGE 119 Ia 88 S. 89
La Genevoise, compagnie d'assurances sur la vie, est propriétaire de la parcelle no 549 du Registre foncier de Lausanne, sur laquelle s'élève le bâtiment Bel-Air Métropole (ci-après: le Métropole).
Ce bâtiment, construit de 1929 à 1931, est une maison-tour, dont la conception s'inspirait de celle des grands immeubles urbains aux fonctions multiples, édifiés dans les métropoles américaines dès la fin du XIXe siècle selon les principes architecturaux de l'école de Chicago. Dans la partie inférieure de la tour avait été aménagée à l'origine une salle de spectacle de mille six cents places avec une fosse d'orchestre pour la sonorisation des films muets qui y étaient alors projetés. Cette salle - connue sous le nom de "Cinéma-théâtre Métropole" - a accueilli par la suite notamment des spectacles de variétés et des concerts. En 1985, la Genevoise l'a remise à bail à la société Métrociné S.A.
Le 13 novembre 1989, la Genevoise et Métrociné S.A. ont déposé auprès de la Direction des travaux de la Commune de Lausanne un projet de réaménagement du Métropole prévoyant notamment la suppression de la salle du cinéma-théâtre Métropole et son réaménagement en un "complexe multi-salles, comprenant quatre salles de cinéma distinctes d'une capacité totale de mille deux cent vingt-cinq places".
Le 23 mars 1990, le Département des travaux publics, de l'aménagement et des transports du canton de Vaud (ci-après: le Département) a décidé de s'opposer au projet en lui appliquant l'art. 47 de la loi cantonale du 10 décembre 1969 sur la protection de la nature, des monuments et des sites (LPNMS), en vertu duquel il appartient à cette autorité de prendre les mesures nécessaires à la sauvegarde des monuments historiques protégés lorsqu'un danger imminent les menace. Il soulignait que le projet litigieux impliquait "la destruction de la salle de spectacle et de l'essentiel de son foyer", qui présenteraient selon lui un intérêt historique et artistique indéniable. Le 8 juin 1990, le Conseil d'Etat a prolongé de six mois cette mesure conservatoire, conformément à l'art. 48 LPNMS.
BGE 119 Ia 88 S. 90
Se fondant sur les art. 24 et 25 LPNMS, le Département a mis à l'enquête publique du 17 décembre 1990 au 25 janvier 1991 un projet d'arrêté de classement concernant la sauvegarde du Métropole. Selon ce projet, la mesure de classement devait s'étendre à la salle du cinéma-théâtre, à ses annexes, au foyer du théâtre, aux circulations au niveau de la rue des Terreaux, aux façades et à l'entrée de l'immeuble; ces éléments devaient être pris dans leur ensemble.
Le 24 janvier 1991, la Genevoise et Métrociné S.A. se sont opposées au projet d'arrêté de classement.
Par "avis motivé" du 8 juillet 1991, le Département a proposé au Conseil d'Etat de lever l'opposition en partie, et de ne classer que la salle de cinéma-théâtre, son foyer et leurs espaces annexes. La Genevoise et Métrociné S.A. ont formé auprès du Conseil d'Etat une requête tendant au réexamen de leur opposition.
Le 21 août 1992, le Conseil d'Etat a rejeté la requête. Il a pris le même jour un arrêté classant la salle de cinéma-théâtre, ses annexes et son foyer et inscrivant le Métropole dans son ensemble à l'inventaire des monuments non classés mais protégés.
Cet arrêté a été publié dans la Feuille des Avis Officiels du canton de Vaud du 11 septembre 1992.
Agissant par la voie du recours de droit public, la Genevoise demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêté pris par le Conseil d'Etat du canton de Vaud le 21 août 1992 ainsi que la décision du même jour par laquelle cette autorité a rejeté sa requête. Elle se plaint d'une violation des art. 6 par. 1 CEDH, 4, 22ter et 31 Cst.
Le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours.
Le Tribunal fédéral a admis le recours dans la mesure où il était recevable.

Considerandi

Extrait des considérants:

1. La recourante soulève pour la première fois dans le recours de droit public le grief tiré de la violation de l'art. 6 par. 1 CEDH.
a) La novelle du 4 octobre 1991 modifiant la loi d'organisation judiciaire a généralisé l'exigence de l'épuisement des instances pour tous les recours, sous réserve d'une seule exception qui n'entre pas en ligne de compte en l'espèce (art. 86 OJ). La jurisprudence admet cependant la recevabilité de moyens de droit nouveaux lorsque l'autorité cantonale de dernière instance disposait d'un pouvoir d'examen libre et devait appliquer le droit d'office. Cette exception
BGE 119 Ia 88 S. 91
vaut pour tous les griefs qui ne se confondent pas avec l'arbitraire, et notamment pour celui tiré de la violation du droit à un procès équitable, à la condition que le comportement du recourant ne soit pas contraire à la règle de la bonne foi, en vertu de laquelle celui qui ne soulève pas devant l'autorité de dernière instance cantonale un grief lié à la conduite de la procédure ne peut plus en principe le soulever devant le Tribunal fédéral; une solution contraire favoriserait les manoeuvres dilatoires (ATF 117 Ia 495 consid. 2a, 525/526 consid. 3a, ATF 116 Ia 439 /440 consid. 4b et les arrêts cités).
b) Le Conseil d'Etat a statué en instance cantonale unique sur la requête de la recourante dirigée contre l'arrêté de classement, en application des art. 26 LPNMS et 73 al. 2 à 4 de la loi vaudoise sur l'aménagement du territoire et les constructions, du 4 décembre 1985 - LATC, auxquels renvoie l'art. 5 du règlement d'application de la LPNMS, du 22 mars 1989 - RPNMS. Le Conseil d'Etat disposait d'une pleine cognition (art. 36 et 59 de la loi vaudoise sur la juridiction et la procédure administratives, du 18 décembre 1989, LJPA) et n'était pas limité par les moyens invoqués par les parties. Le recours est formé essentiellement pour une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH, grief qui, tel qu'il a été invoqué dans le recours, ne se confond pas avec celui d'arbitraire (cf. ATF 115 Ia 185 consid. 2). Les conditions d'une dérogation à la règle de l'épuisement des instances cantonales selon l'art. 86 OJ sont donc remplies en l'espèce. On ne saurait par ailleurs imposer à l'administré agissant devant le Conseil d'Etat qu'il se plaigne d'emblée de l'impossibilité dans laquelle il va se trouver de déférer sa décision à une autorité judiciaire, si elle lui est défavorable; cette question ne se pose à lui, le cas échéant, qu'au moment de la notification de la décision.
Le grief nouveau de nature formelle soulevé par la recourante est donc recevable.

3. Sous l'angle de l'art. 6 par. 1 CEDH, la recourante soutient que la décision attaquée devrait pouvoir être déférée à une juridiction ordinaire jouissant d'une cognition illimitée en fait et en droit.
a) L'art. 6 par. 1 CEDH donne à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Cette disposition est applicable sans réserve en Suisse, le Tribunal fédéral ayant constaté l'invalidité de la nouvelle déclaration interprétative qu'en a donnée le Conseil fédéral
BGE 119 Ia 88 S. 92
le 16 mai 1988 (ATF 118 Ia 478 consid. 5 à 7), dont le canton de Vaud avait au demeurant renoncé à se prévaloir (ATF 117 Ia 527 consid. 3b, ATF 115 Ia 71).
b) Dans sa jurisprudence, désormais bien établie, le Tribunal fédéral interprète la notion de "droits et obligations de caractère civil" visée à l'art. 6 par. 1 CEDH aussi largement que le font la Cour et la Commission européennes des droits de l'homme. Cette disposition conventionnelle ne concerne donc pas seulement les contestations de droit privé au sens étroit, c'est-à-dire celles qui surgissent entre des particuliers, ou entre un particulier et l'Etat agissant au même titre qu'une personne privée, mais aussi les actes administratifs adoptés par une autorité dans l'exercice de la puissance publique pour autant que cet acte a un effet déterminant sur des droits et obligations de caractère privé (ATF 117 Ia 527 /528 consid. 3c/aa, 115 Ia 68; ACEDH Ringeisen, du 16 juillet 1971, Série A/vol. 13 par. 94, König, du 28 juin 1978, Série A/vol. 27, par. 90 et 94, Benthem, du 23 octobre 1985, Série A/vol. 97 par. 32 et Skärby, du 28 juin 1990, Série A/no 180-B par. 27; cf. aussi OLIVIER DUGRIP, L'applicabilité de l'art. 6 par. 1 CEDH aux juridictions administratives, RUDH 1991 p. 342 ss). Sont ainsi des contestations "sur des droits et obligations de caractère civil" les procédures d'expropriation fédérale et cantonales (ATF 118 Ia 227 consid. 1c, 331 ss; 115 Ia 69 consid. 2c; cf. aussi ATF 112 Ib 177 /178 consid. 3a, ATF 111 Ib 232 /233), l'exercice par l'Etat d'un droit de préemption légal (ATF 114 Ia 19), la décision de réaliser un remaniement parcellaire et d'en délimiter le périmètre (ATF 118 Ia 355 /356 consid. 2a, ATF 117 Ia 378), le refus d'autoriser une construction sur une parcelle située dans la zone à bâtir (ATF 117 Ia 522) ou l'adoption d'un plan d'affectation spécial qui désigne les surfaces nécessaires à l'aménagement d'un stand de tir et dont l'approbation confère à l'autorité compétente le droit d'exproprier les parcelles concernées (ATF 114 Ia 427 consid. 4c).
Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, entrent dans la catégorie des contestations portant sur des droits et obligations de caractère civil les différends, relatifs à l'octroi d'un permis d'exproprier ou à la constatation de l'utilité publique d'une mesure expropriative (ACEDH Sporrong et Lönnroth du 23 septembre 1982, Série A/vol. 52, par. 79-83, Zimmermann et Steiner du 13 juillet 1983, Série A/vol. 66 par. 22 et Bodèn du 27 octobre 1987, Série A/vol. 125-B, par. 29 et 32), ainsi qu'à l'octroi ou au refus d'une autorisation d'acquérir un immeuble, ordonnés par exemple à titre conservatoire pour les besoins d'une procédure de remaniement
BGE 119 Ia 88 S. 93
parcellaire (ACEDH Ringeisen, cité, Sramek du 22 octobre 1984, Série A/vol. 84 par. 34, Erkner et Hofauer du 23 avril 1987, Série A/vol. 117 par. 62, Hakansson et Sturesson du 21 février 1990, Série A/vol. 171-A par. 60/61), au refus d'une autorisation exceptionnelle de construire et à l'interdiction de construire pour une période relativement longue ou à la prolongation d'une telle interdiction (ACEDH Allan Jacobsson du 25 octobre 1989, Série A/vol. 163 par. 73 et Skärby, cité, par. 29), de même qu'à la modification, par une autorité administrative, d'un plan de zones dont l'effet est de restreindre le droit de bâtir ou le droit d'exploitation dont sont titulaires les propriétaires des biens-fonds pris dans le périmètre de ce plan (ACEDH Mats Jacobsson du 28 juin 1990, Série A/vol. 180-A par. 33 et 34). Les droits à bâtir, tel celui de construire une maison d'habitation sur son bien-fonds classé dans la zone à bâtir, ou la révocation d'un permis d'exploiter une gravière sur son terrain revêtent en effet, en principe, un caractère civil (ACEDH Fredin, du 18 février 1991, Série A/vol. 192, par. 63). Il importe peu que les restrictions en cause soient générales, qu'elles relèvent du droit public ou qu'elles représentent un élément nécessaire de l'aménagement urbain (ACEDH cités Allan Jacobsson, Skärby et Mats Jacobsson). Enfin, le classement par une autorité administrative d'un site pittoresque pour des motifs d'intérêt général porte atteinte aux droits du propriétaire qui doit être en mesure d'attaquer cette décision devant un tribunal répondant aux exigences de l'art. 6 par. 1 CEDH (ACEDH de Geouffre de la Pradelle du 16 décembre 1992, Série A/vol. 253-B, par. 34).

4. a) La LPNMS a notamment pour but, "dans l'intérêt de la communauté ou de la science", de protéger et de conserver les monuments de la préhistoire, de l'histoire, de l'art ou de l'architecture (art. 1 let. c LPNMS). Dans la mesure où ils présentent un intérêt archéologique, historique, artistique, scientifique ou éducatif, ces monuments bénéficient d'une protection générale (art. 46 al. 1 LPNMS), dont la portée est faible, car les objets protégés ne sont pas définis avec précision (PHILIPPE GARDAZ, La protection du patrimoine bâti en droit vaudois, RDAF 48/1992 p. 1 ss, 6). La protection spéciale des monuments historiques est garantie, le cas échéant, par l'inscription à l'inventaire (art. 49 ss LPNMS) ou par le classement (art. 52 ss LPNMS). Le classement intervient par la voie d'un arrêté de classement, assorti au besoin d'un plan de classement (art. 52 al. 2 LPNMS). Cet arrêté définit l'objet classé, le cas échéant ses abords et l'intérêt qu'il présente, ainsi que les mesures de protection déjà prises et les mesures de conservation ou de restauration
BGE 119 Ia 88 S. 94
nécessaires (art. 53 LPNMS). Selon les art. 22 à 28 de la loi, applicables par analogie en vertu de l'art. 54 LPNMS, aucune atteinte ne peut être portée à un objet classé sans autorisation préalable du Département (art. 23 LPNMS). L'arrêté de classement est soumis à une enquête publique (art. 24 et 25 LPNMS). Le Conseil d'Etat statue sur les oppositions (art. 26 LPNMS), selon la procédure fixée par l'art. 73 al. 2 à 4 LATC, applicable par analogie en vertu de l'art. 5 RPNMS. Le monument classé doit être entretenu par son propriétaire (art. 55 et 29 al. 1 LPNMS). Au besoin, le Département peut lui fixer un délai pour procéder à des travaux d'entretien nécessaires, voire effectuer ces travaux aux frais du propriétaire, si celui-ci ne se plie pas aux injonctions de l'autorité (art. 29 al. 2 et 3 LPNMS). Lorsque le propriétaire d'un objet classé lui a porté atteinte sans autorisation en violation de l'art. 23 LPNMS, il est tenu de le rétablir dans son état antérieur; le Département peut faire effectuer les travaux nécessaires aux frais du propriétaire récalcitrant (art. 30 LPNMS). L'Etat peut participer aux frais d'entretien et de restauration des monuments classés (art. 56 et 57 LPNMS), par le biais d'un "Fonds cantonal des monuments historiques" (art. 60 et 61 LPNMS). L'Etat peut procéder par voie contractuelle ou par voie d'expropriation à l'acquisition d'un monument historique ou d'une antiquité (art. 64 LPNMS). L'Etat a également un droit de préemption légal sur les monuments historiques et les antiquités classés (art. 65 LPNMS).
b) Selon l'art. 2 de l'arrêté du 21 août 1992, la mesure de classement vise la salle de cinéma-théâtre et ses annexes, ainsi que le foyer du théâtre, ces éléments étant "pris dans leur ensemble"; aucune atteinte ne peut leur être portée qui en altère le caractère; toute intervention sur les parties classées du Métropole est soumise à une autorisation préalable du Département, conformément à l'art. 4 de l'arrêté. Celui-ci exclut de manière définitive la réalisation du projet de la recourante et de sa locataire Métrociné S.A., portant sur la démolition de la salle de cinéma-théâtre et la construction à sa place de quatre salles de dimensions plus petites. Cette conséquence sourd, avec évidence, si l'on se réfère à l'origine de la procédure de classement qui se situe dans l'opposition faite par le Département à la transformation projetée par la recourante et Métrociné S.A., opposition assortie des mesures conservatoires qui, adoptées en vertu de l'art. 47 LPNMS, étaient le préalable à la mesure critiquée. Eu égard à son effet concret, cumulé avec les obligations découlant des art. 29 et 30 LPNMS, en relation avec l'art. 55 de la même loi, l'arrêté de classement présente un caractère quasi expropriatif pour la recourante.
BGE 119 Ia 88 S. 95
Sur le vu de la jurisprudence qui vient d'être rappelée (consid. 3 ci-dessus), la mesure litigieuse a porté atteinte aux droits de caractère civil de la recourante qui, partant, doit pouvoir la soumettre à un tribunal indépendant et impartial au sens de l'art. 6 par. 1 CEDH.

5. Il reste à examiner si cette exigence a été respectée en l'espèce.
a) La décision attaquée émane non d'un tribunal mais d'un gouvernement cantonal statuant en instance unique et qui n'a pas la qualité d'une juridiction indépendante et impartiale (ATF 117 Ia 385 /386 consid. 5c, ATF 115 Ia 69 consid. 2c, 187).
b) A teneur de l'art. 4 LJPA, le Tribunal administratif connaît en dernière instance cantonale de tous les recours contre les décisions administratives cantonales et communales lorsque aucune autre autorité n'est expressément désignée pour en connaître (al. 1). Le recours au Tribunal administratif est cependant exclu contre les décisions du Grand Conseil, du Conseil d'Etat, du Tribunal cantonal ou des commissions de recours spéciales, ou lorsque la loi précise que l'autorité statue définitivement (al. 2). En matière de permis de bâtir, les compétences juridictionnelles du Conseil d'Etat et de la Commission cantonale de recours ont été supprimées par une modification de la LATC du 18 décembre 1989, parallèlement à l'adoption de la LJPA (cf. Recueil annuel de la législation vaudoise 186/1989 p. 596 ss). Cette nouvelle a abrogé notamment l'art. 9 let. d LATC, relatif à la compétence du Conseil d'Etat, et les art. 20 ss LATC, régissant la Commission cantonale de recours. Depuis l'entrée en vigueur, le 1er juillet 1991 (RALV 188/1991 p. 162) de la LJPA et des modifications de la LATC, le Tribunal administratif est l'autorité de recours pour toutes les décisions relatives aux autorisations de construire. En revanche, le Conseil d'Etat a conservé la compétence de statuer définitivement sur les oppositions formées contre un arrêté de classement selon l'art. 26 LPNMS. Au regard de l'art. 4 al. 2 LJPA, le Tribunal administratif ne peut procéder au contrôle préjudiciel de l'arrêté de classement dans le cadre de l'examen d'un recours dirigé, par hypothèse, contre le refus d'un permis de bâtir portant sur la démolition de la salle de cinéma-théâtre du Métropole.
c) De même, la procédure du recours de droit public pour violation des droits constitutionnels des citoyens au sens des art. 84 ss OJ ne suffit pas pour réparer les défauts de la procédure cantonale.
aa) Le contrôle judiciaire exigé par l'art. 6 par. 1 CEDH n'a pas à porter sur l'opportunité de la mesure critiquée. Il faut en revanche que ce contrôle soit libre sur toutes les questions décisives de fait et
BGE 119 Ia 88 S. 96
de droit. Tel n'est pas le cas lorsque sont en cause des questions de fait que le Tribunal fédéral ne revoit que sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 117 Ia 502/503 consid. 2e, 115 Ia 187, 191, 410 consid. 3b/bb; arrêt du 3 avril 1992, S. et consorts, reproduit in: ZBl 94/1993 p. 39 ss; cf. ACEDH du 29 avril 1988, Belilos, Série A/vol. 132 par. 68 à 73).
bb) Saisi d'un recours de droit public pour violation de l'art. 22ter Cst., le Tribunal fédéral examine sous l'angle restreint de l'art. 4 Cst. si l'exigence d'une base légale suffisante est respectée dans tous les cas où la restriction contestée n'est pas particulièrement grave; si tel est le cas, comme en l'espèce (ATF 118 Ia 387 consid. 4a), il revoit en revanche cette question avec une cognition pleine. Il examine en outre toujours librement - mais non sans réserves - si cette restriction répond à un intérêt public et respecte le principe de la proportionnalité (ATF 117 Ia 419 consid. 4b). Les réserves qu'il s'impose ont trait aux circonstances techniques et locales que les autorités cantonales sont censées mieux connaître ou aux questions de pure appréciation. Il fait preuve d'une retenue particulière dans le domaine de la protection des monuments, car il appartient en premier lieu aux autorités cantonales de désigner les monuments dignes de protection (ATF 115 Ia 30 consid. 4a, 372 consid. 3, 386 consid. 3, ATF 118 Ia 388 consid. 4b).
cc) La recourante critique l'état de fait qui fournit la base de la décision attaquée. Elle reproche au Conseil d'Etat d'avoir omis de tenir compte des transformations qui auraient modifié le bâtiment, de sorte que celui-ci n'aurait aucune valeur architecturale justifiant la mesure de classement. A cet égard, elle met en doute l'objectivité et l'exactitude de l'expertise sur laquelle les autorités cantonales se sont appuyées pour conclure à la nécessité de procéder au classement de la salle du Métropole. Le litige porte donc essentiellement sur des questions de fait, comme cela est corroboré par la teneur de la décision attaquée où le Conseil d'Etat reproche à la recourante et à Métrociné S.A. de ne pas avoir fait valoir un autre point de vue d'expert sur les questions de fait en jeu; elle a écarté "pour les mêmes raisons" les griefs relatifs à l'âge du bâtiment. Le Tribunal fédéral n'examinant dès lors que de manière restreinte le grief tiré de l'art. 22ter Cst., le recours formé auprès de lui ne pallie pas les carences de la procédure cantonale au regard de l'art. 6 par. 1 CEDH.
Le grief tiré de la violation de cette norme conventionnelle est donc bien fondé et le recours doit être admis dans la mesure où il est recevable.
BGE 119 Ia 88 S. 97

6. Cette solution s'impose aussi au regard de l'art. 33 LAT.
a) L'autorité compétente peut édicter des mesures de protection des monuments dans le cadre d'un plan d'affectation (cf. art. 17 al. 1 let. c LAT; art. 47 let. b LATC; GARDAZ, op.cit., p. 9 ss); elle peut aussi, comme en l'espèce, prendre dans ce but des décisions concrètes. Dans un cas comme dans l'autre, la procédure cantonale doit respecter les exigences minimales de l'art. 33 LAT en matière de protection juridique (ATF 116 Ia 47 consid. 4c/cb; ATF 118 Ia 386 cité, consid. 3). En vertu de cette disposition, les mesures fondées sur la LAT et sur des dispositions cantonales et fédérales d'exécution doivent être mises à l'enquête publique et le droit cantonal doit aménager contre elles au moins une voie de recours auprès d'une autorité ayant un libre pouvoir d'examen et à laquelle puissent s'adresser tous ceux qui ont la qualité pour agir par la voie d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral. Selon la jurisprudence, les exigences du droit fédéral sont satisfaites par l'institution en faveur des intéressés d'une simple voie d'opposition auprès de l'autorité qui approuve le plan litigieux (ATF 116 Ia 45 consid. 4b, 440 consid. 4b, ATF 114 Ia 119 consid. 4c/ca, 235-237 consid. 2b, 247/248 consid. 2a et b, ATF 114 Ib 88, ATF 112 Ib 169, ATF 109 Ib 123 consid. 5b, ATF 109 Ia 2 et arrêts cités); cette autorité doit toutefois être indépendante de celle qui a établi le plan et avoir la compétence de réexaminer l'opportunité des mesures contestées (ATF 114 Ia 247 /248 consid. 2a et b, ATF 114 Ib 88, ATF 109 Ia 2, ATF 109 Ib 124 /125 consid. 5b et c).
b) En l'espèce, le Département a mis à l'enquête publique, conformément aux art. 24 et 35 LPNMS, un projet d'arrêté portant sur le classement de diverses parties du Métropole. La recourante et Métrociné S.A. ont formé une opposition, dont le Département a partiellement tenu compte, dans son "avis motivé" du 8 juillet 1991, en proposant au Conseil d'Etat de limiter la mesure de classement à la salle de cinéma-théâtre et au foyer. Les opposantes ont requis le Conseil d'Etat de réexaminer la décision du Département. Le 21 août 1992, le Conseil d'Etat, statuant sur la base des art. 26 LPNMS et 73 al. 2 à 4 LATC, a rejeté cette requête et adopté simultanément l'arrêté de classement, conformément à l'art. 52 LPNMS. La recourante n'a donc pas été en mesure de soumettre ses arguments à une autorité de recours indépendante, en violation de l'art. 33 LAT. La situation est ici différente de celle de l' ATF 108 Ib 479 ss où le Grand Conseil genevois avait statué sur les oppositions en même temps qu'il approuvait un plan d'affectation, à l'issue d'une procédure comportant une inspection des lieux et une audition des opposants par une commission
BGE 119 Ia 88 S. 98
parlementaire. Outre le fait que cette jurisprudence, visant l'adoption d'un plan d'affectation par une autorité législative, n'est pas applicable au cas de l'adoption d'une mesure concrète de classement par une autorité administrative, il convient de souligner que la recourante n'a pas eu l'occasion de faire valoir ses objections dans une procédure contradictoire incluant une vision locale, ni de s'adresser à une autorité juridictionnelle disposant d'un plein pouvoir d'examen, comme l'exige l'art. 33 LAT.

7. En conclusion, le propriétaire touché par une mesure de classement au sens de la LPNMS doit pouvoir porter ce litige devant un tribunal indépendant et impartial ayant une cognition illimitée, sous réserve des questions d'opportunité. Il doit pouvoir aussi, en vertu de l'art. 33 LAT, contester la mesure de classement devant une autorité de recours compétente pour connaître de l'ensemble de l'affaire, y compris des questions d'opportunité qu'elle soulève. Pour satisfaire à toutes ces exigences, il incombe au législateur cantonal d'adapter la LPNMS. L'art. 6 par. 1 CEDH étant directement applicable (ATF 118 Ia 227 consid. 1c; cf. consid. 2d non publié de l' ATF 118 Ia 331 ss et la note de YVO HANGARTNER, in: PJA 2/1993 p. 79-81), le canton de Vaud est invité à mettre à la disposition de la recourante une autorité judiciaire au sens de l'art. 6 par. 1 CEDH, pour connaître d'un recours contre la décision attaquée. Sous l'angle de l'art. 33 LAT, rien ne s'oppose au maintien de la voie de la requête au Conseil d'Etat contre le projet d'arrêté de classement mis à l'enquête par le Département, pourvu que le requérant puisse porter ce litige, le cas échéant, devant un tribunal indépendant disposant d'un pouvoir d'examen libre en fait et en droit.