Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2D_19/2022  
 
 
Arrêt du 16 novembre 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Beusch et Ryter. 
Greffier : M. Rastorfer. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jennifer Tapia, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, 
Les Portes-de-Fribourg, route d'Englisberg 9-11, 1763 Granges-Paccot, 
intimé. 
 
Objet 
Renvoi de Suisse; début d'une maladie invalidante, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat 
de Fribourg, Ie Cour administrative, du 18 mars 2022 (601 2020 140 / 601 2020 141). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, ressortissant turc né en 1960, est entré illégalement en Suisse en janvier 1991 et y a déposé une demande d'asile, laquelle a été rejetée en novembre 1993. Il a toutefois été mis au bénéfice d'une admission provisoire en qualité de réfugié, en raison de la vraisemblance des persécutions (emprisonnements) qu'il avait subies en Turquie du fait des liens qu'il entretenait avec des militants du Parti communiste de Turquie/marxiste-léniniste (ci-après: TKP/ML). Le 21 février 2005, il s'est vu octroyer une autorisation de séjour pour raisons humanitaires, renouvelée jusqu'au 21 février 2018.  
En 2004, l'intéressé a épousé une compatriote domiciliée en France, avec laquelle il a eu une fille, née en juillet 2005. La famille n'a pas mis en oeuvre le regroupement familial, malgré que celui-ci lui eût été accordé par l'autorité cantonale compétente. 
Le 30 avril 2014, le Secrétariat d'Etat aux migrations a retiré la qualité de réfugié à A.________, après avoir constaté que ce dernier avait repris contact avec les autorités turques et avait obtenu un passeport national, régulièrement renouvelé et valable jusqu'en 2025. Il s'était en outre rendu à plusieurs reprises en Turquie sans problème connu, alors même que le TKP/ML restait considéré par ce pays comme une organisation terroriste. 
 
A.b. Le 19 décembre 2017, A.________ a été condamné à une peine privative de liberté de 36 mois pour fabrication de fausse monnaie, imitation de billets de banque, faux dans les certificats et faux dans les titres. Parallèlement à son activité de faussaire, exercée entre 2012 et 2016 (art. 105 al. 2 LTF), l'intéressé a bénéficié d'une rente d'invalidité complète depuis 2013, ainsi que de prestations complémentaires en raison de troubles dépressifs. En mars 2017, la rente d'invalidité a été suspendue, avant d'être supprimée en juillet 2018, après qu'il avait été constaté, par expertise psychiatrique du 28 juin 2018, que le recourant avait recouvré une pleine capacité de travail. Depuis la suspension de sa rente, l'intéressé émarge à l'aide sociale. Sa dette sociale s'élevait à 43'715 fr. en novembre 2019 et il présentait des actes de défaut de biens pour 56'407 fr. en avril 2018 (art. 105 al. 2 LTF).  
 
A.c. Par décision du 27 juillet 2018, le Service de la population et des migrants du canton de Fribourg (ci-après: le Service cantonal) a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de A.________ et a prononcé son renvoi de Suisse. Cette décision a été confirmée par arrêt définitif du 10 janvier 2020 du Tribunal cantonal du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal cantonal). Cet arrêt ne s'est pas définitivement prononcé sur le renvoi de l'intéressé en Turquie, considérant qu'un tel renvoi pourrait s'effectuer vers la France, où résidait l'épouse de l'intéressé. Il a toutefois précisé que, si celui-ci ne devait pas pouvoir être réalisé comme prévu, l'autorité d'exécution devrait alors examiner à nouveau l'exigibilité d'un renvoi vers la Turquie à la lumière de la situation concrète du moment. Cet arrêt est entré en force.  
 
B.  
Le 27 mars 2020, A.________ a demandé au Service cantonal qu'il reconsidère la situation s'agissant de son renvoi de Suisse. Il s'était en effet séparé de son épouse en septembre 2018, fait dont il n'avait pas informé le Tribunal cantonal lorsque ce dernier avait rendu son arrêt du 10 janvier 2020, de sorte qu'un renvoi vers la France était exclu. De plus, selon un rapport médical du 14 janvier 2020, il présentait des symptômes d'un processus neurodégénératif de type Alzheimer. 
Le 11 mai 2020, une curatelle de représentation a été instaurée en faveur de l'intéressé, afin de le représenter dans le cadre du règlement de ses affaires administratives. 
Par décision du 9 juin 2020, le Service cantonal est entré en matière sur la demande de reconsidération de A.________ et a rejeté celle-ci. L'intéressé a contesté cette décision auprès du Tribunal cantonal et a, à cette occasion, produit un nouveau rapport médical du 10 juin 2020 (art. 105 al. 2 LTF). P ar arrêt du 18 mars 2022, le Tribunal cantonal a rejeté le recours, considérant en substance que l'intéressé ne pouvait pas se prévaloir d'un droit à résider en Suisse et que sa situation personnelle ne faisait pas obstacle à son renvoi en Turquie. 
 
C.  
A l'encontre de l'arrêt du Tribunal cantonal du 18 mars 2022, A.________ dépose un "recours constitutionnel" auprès du Tribunal fédéral. Il conclut, sous suite de frais et dépens, outre à l'effet suspensif, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au Service cantonal pour qu'il renonce à son renvoi et lui octroie une autorisation de séjour pour motifs humanitaires; subsidiairement, au renvoi de la cause au Service précité pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Par ordonnance du 17 mai 2022, la Présidente de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la demande d'effet suspensif. 
Le Tribunal cantonal renvoie aux considérants de son arrêt et conclut au rejet du recours. Le Service cantonal formule des observations et se réfère pour le surplus aux considérants de l'arrêt attaqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 89 consid. 1). 
 
1.1. Selon l'art. 83 let. c LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de droit des étrangers à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit (ch. 2), ainsi que contre celles qui concernent le renvoi (ch. 4) et les dérogations aux conditions d'admission (ch. 5), parmi lesquelles figurent celles qui concernent les cas individuels d'une extrême gravité au sens de l'art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20).  
 
1.2. Tout en considérant que les conditions de l'art. 83 let. c LTF ne sont pas réalisées, le recourant invoque notamment une violation du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH. Or, si un tel droit est invoqué de manière défendable, un recours en matière de droit public est ouvert (cf. ATF 139 I 330 consid. 1.1), ce qu'il convient d'examiner.  
 
1.2.1. Il sied d'emblée de relever que tel n'est pas le cas s'agissant du droit à la protection de la vie familiale, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'aucun membre de la famille du recourant ne réside en Suisse, de sorte que ce dernier ne peut déduire aucun droit à demeurer en Suisse de l'art. 8 CEDH sous cet angle (ATF 146 I 185 consid. 6.1; 139 I 330 consid. 2.1). La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme qu'il cite (arrêt CourEDH M.P.E.V. et autres c. Suisse du 8 juillet 2014, n° 3910/13) ne lui est au demeurant d'aucun secours, puisque cette affaire concernait l'expulsion d'un étranger dont la fille et l'épouse étaient autorisées à rester en Suisse, et portait ainsi sur une situation qui n'est nullement comparable à celle de l'intéressé.  
 
 
1.2.2. Sous l'angle du droit au respect de la vie privée, la jurisprudence retient que, lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée qu'il y est bien intégré, avec pour conséquence qu'il dispose alors, en principe, d'un droit de séjour durable en Suisse sur la base de l'art. 8 CEDH (cf. ATF 146 I 185 consid. 5.2; 144 I 266 consid. 3.9). Une présence légale consécutive à une admission provisoire ou fondée sur un cas personnel d'extrême gravité peut également, dans certaines circonstances, conférer un tel droit durable (cf. ATF 146 I 185 consid. 5.2, renvoyant à l'arrêt 2C_360/2016 du 31 janvier 2017 consid. 5.1 et 5.2). Tel est en particulier le cas lorsqu'il apparaît d'emblée que l'autorisation de séjour pour cas de rigueur sera renouvelée pendant une longue période ou lorsque la situation de l'étranger admis provisoirement apparaît comme suffisamment stable et durable compte tenu du nombre d'années passées en Suisse (cf. arrêt 2C_360/2016 précité consid. 5.1 et 5.2). Dans un ATF 146 I 185, la Cour de céans a ainsi retenu qu'un étranger qui séjournait légalement en Suisse depuis 18 ans, dont 9 au bénéfice d'une autorisation de séjour provisoire et 9 au bénéfice d'une autorisation de séjour, devait, au regard de ce nombre d'années important, se voir reconnaître un droit de séjour durable en Suisse découlant du respect de la vie privée au sens de l'art. 8 CEDH (ce qui permettait à son épouse de se prévaloir d'un droit au regroupement familial avec lui; cf. ATF 146 I 185 consid. 5.3). L'étranger qui, sans déclarer son départ, quitte la Suisse pendant une durée telle que son titre de séjour s'éteint de plein droit conformément à l'art. 61 al. 2 LEI, ne peut plus, une fois de retour dans ce pays, se prévaloir de la durée de son séjour légal préalable en Suisse pour prétendre à l'octroi d'une autorisation de séjour fondé sur le droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 CEDH (cf. arrêt 2C_528/2021 du 23 juin 2022 consid. 4.8, destiné à la publication, retenant qu'un tel cas de figure reviendrait à vider de sa substance l'art. 61 al. 2 LEI).  
 
1.2.3. Dans le présent cas d'espèce, le recourant a été admis provisoirement en Suisse en 1993 et s'est vu accorder en 2005 une autorisation de séjour à titre humanitaire en application de l'art. 13 let. f de l'ancienne ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (aOLE; RO 1986 1791; correspondant actuellement à l'art. 30 al. 1 let. b LEI, cf. MARC SPESCHA, Migrationsrecht, Spescha et al. [éd.], 5e éd. 2019, n° 5 ad art. 30 LEI; art. 105 al. 2 LTF), qui a été régulièrement renouvelée jusqu'en 2018, nonobstant la perte du statut de réfugié en 2014. Dans ces conditions, quand bien même le séjour légal de l'intéressé en Suisse depuis 1993 - soit plus de 24 ans au moment de la décision de refus de renouvellement de l'autorisation du Service cantonal - ne s'est déroulé qu'au bénéfice d'une autorisation de séjour provisoire respectivement pour cas de rigueur, toujours est-il que ces titres de séjour ont, pendant plus d'une décennie chacun, été régulièrement renouvelés. Dans ces conditions, et au vu du nombre d'années légalement passées en Suisse, on peut admettre de facto l'existence d'un droit de présence durable du recourant dans ce pays (cf. supra consid. 1.2.2). Par ailleurs si, durant son séjour en Suisse, le recourant s'est rendu à plusieurs reprises en Turquie, aucune constatation de fait ne permet d'en conclure que son autorisation de séjour se soit éteinte en application de l'art. 61 al. 2 LEI. Les autorités ne l'ont du reste jamais envisagé. Ainsi, même s'il n'est plus au bénéfice d'aucun titre de séjour en Suisse depuis l'arrêt définitif du Tribunal cantonal du 10 janvier 2020, l'intéressé ne se trouve pas dans la même situation que celle de l'arrêt 2C_528/2021 précité (cf. supra consid. 1.2.2 in fine) et peut donc valablement se prévaloir de la longue durée de son séjour en Suisse pour prétendre à l'octroi d'une autorisation de séjour sous l'angle du droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 CEDH. Il s'ensuit que le recours échappe au motif d'irrecevabilité de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF.  
La voie du recours en matière de droit public est par conséquent ouverte, sous réserve de ce qui suit. 
 
1.3. En tant que le recourant se prévaut d'une violation de l'art. 3 CEDH pour s'opposer à la décision de renvoi, le recours en matière de droit public est irrecevable (art. 83 let. c ch. 4 LTF). En revanche, cette décision peut être contestée par le biais du recours constitutionnel subsidiaire, dans la mesure où le droit fondamental à ne pas être soumis à la torture et aux autres peines ou traitements inhumains ou dégradants, tel que garanti par l'art. 3 CEDH, confère à l'intéressé un intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 115 let. b LTF (cf. ATF 137 II 305 consid. 3.3; arrêts 2C_528/2021 précité consid. 5.3 et 5.4, destiné à la publication; 2C_483/2021 du 14 décembre 2021 consid. 10; 2D_3/2021 du 14 avril 2021 consid. 1.2). Le recours doit alors respecter des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF par renvoi de l'art. 117 LTF; cf. ATF 137 II 305 consid. 3.3; arrêts 2C_200/2021 du 17 août 2021 consid. 1.3; 2C_221/2021 du 11 juin 2021 consid. 1.3).  
 
1.4. On relèvera enfin que c'est à juste titre que l'intéressé ne se prévaut pas de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Cette disposition ne confère en effet aucun droit et relève en outre des dérogations aux conditions d'admission, exclues de la voie du recours en matière de droit public (art. 83 let. c ch. 5 LTF). Un recours sur ce point serait du reste également irrecevable en tant que recours constitutionnel subsidiaire, puisque, comme on vient de le dire, l'art. 30 al. 1 let. b LEI ne confère aucun droit au recourant, de sorte que le recourant n'aurait pas, sous cet angle, une position juridique protégée lui conférant la qualité pour agir au fond (cf. art. 115 LTF; arrêt 2D_48/2019 du 10 janvier 2020 consid. 4.4).  
 
1.5. Au surplus, le recours, qui a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) par le recourant ayant qualité pour agir (art. 89 al. 1 LTF), est recevable comme un recours en matière de droit public, étant précisé que, dès lors qu'il répond aux exigences de la voie de droit à disposition, l'intitulé erroné de l'acte ne porte pas préjudice au recourant (cf. ATF 138 I 367 consid. 1.1).  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (cf. art. 95 let. a et b et 106 al. 1 LTF). Il n'examine toutefois les griefs de violation de droits fondamentaux que si ceux-ci ont été invoqués et motivés par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée, en précisant en quoi consiste la violation (cf. ATF 146 I 62 consid. 3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de façon circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Les faits invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 145 I 26 consid. 1.3). En outre, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF).  
 
En l'espèce, dès lors que le recourant présente une argumentation partiellement appellatoire, en complétant librement l'état de fait retenu dans l'arrêt attaqué, sans invoquer ni a fortiori démontrer l'arbitraire en lien avec l'établissement des faits, il n'en sera pas tenu compte. Quant au courriel du 11 mai 2022 de son (ex-) épouse que le recourant produit en annexe à son recours (vrai nova), il ne saurait également être pris en compte. Au demeurant, il n'aurait pas été pertinent, puisqu'il porte sur le lien entre l'intéressé et sa fille résidant en France, duquel il ne peut de toute façon déduire aucun droit à demeurer en Suisse (cf. supra consid. 1.2.1). La Cour de céans statuera donc sur la base des faits tels qu'ils ressortent de l'arrêt attaqué. 
 
3.  
Le Tribunal cantonal, en suivant l'approche du Service cantonal, a examiné la cause sous l'angle de la reconsidération de la décision du Service précité du 27 juillet 2018 refusant de renouveler l'autorisation de séjour pour cas de rigueur du recourant et prononçant son renvoi de Suisse, confirmée en dernier lieu le 10 janvier 2020 par le Tribunal cantonal et qui a donc acquis force de chose jugée. Or, le recourant ne saurait contester, par la voie de la reconsidération, un tel prononcé (cf. arrêts 2C_1048/2020 du 4 mars 2021 consid. 3.1 et l'arrêt cité; 2C_578/2020 du 9 juillet 2020 consid. 3). Ainsi, quel que soit le nom donné à la demande du recourant, il s'agit en l'espèce de se demander si une nouvelle autorisation de séjour, fondée sur des faits nouveaux postérieurs à l'arrêt cantonal précité (en l'occurrence la mise en évidence de troubles cognitifs de type Alzheimer notamment), se justifie. 
 
4.  
Le recourant se plaint en substance que le refus de l'autoriser à demeurer en Suisse constitue une atteinte disproportionnée à son droit au respect à la vie privée garanti par l'art. 8 CEDH
 
4.1. Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH est possible aux conditions de l'art. 8 par. 2 CEDH. L'examen de la proportionnalité imposé par cette disposition, qui se confond avec celui de l'art. 5 al. 2 Cst. cité par le recourant (cf. arrêt 2C_146/2020 du 24 avril 2020 consid. 11.1), commande une pesée des intérêts qui suppose de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce et de mettre en balance l'intérêt privé à l'obtention d'un titre de séjour et l'intérêt public à son refus (cf. ATF 144 I 91 consid. 4.2). Dans ce cadre, il y a lieu de prendre en considération la gravité de l'éventuelle faute commise par l'étranger, son degré d'intégration, la durée de son séjour en Suisse et les conséquences d'un renvoi (cf. ATF 139 I 145 consid. 2.4).  
 
4.2. En l'espèce, l'autorité précédente a procédé à une pesée correcte des intérêts en présence.  
S'agissant de l'intégration sociale et professionnelle du recourant en Suisse, il ressort des faits retenus sans arbitraire par l'arrêt attaqué et qui lient par conséquent le Tribunal fédéral (cf. supra consid. 2.2; art. 105 al. 1 LTF) que, malgré un séjour en Suisse de près de 30 ans, l'intégration de l'intéressé est demeurée très superficielle, pour ne pas dire inexistante. Au-delà de l'absence de relations familiales dans ce pays, l'intéressé ne s'est pas constitué de relations sociales hors de la communauté turque, ce qu'il admet au demeurant dans son recours. Il n'a exercé une activité lucrative que de 2004 à 2010. Dès 2013, il a bénéficié d'une rente pour une invalidité complète. Cette dernière a toutefois été supprimée en juillet 2018, une expertise psychiatrique du 28 juin 2018 ayant retenu que la capacité de travail du recourant était "entière depuis bien longtemps, en tout cas depuis les faits pénaux qui lui [étaient] reprochés", à savoir son activité de faussaire déployée depuis 2012 (art. 105 al. 2 LTF). Le fait que le recourant émarge à l'aide sociale depuis la suspension de sa rente n'est pas excusable, dans la mesure où il est censé avoir recouvré une pleine capacité de travail. Sa dette sociale s'élevait ainsi à 43'715 fr. au 14 novembre 2019 et il présentait des actes de défaut de biens pour 56'407 fr. au 19 avril 2018. Enfin, et surtout, l'intéressé a été condamné en 2017 à une longue peine privative de liberté de 36 mois, sanction qui reflète la gravité des actes commis. Au surplus, les condamnations du recourant en 1992 et en 2000 à des peines totalisant 12 mois d'emprisonnement - tel que cela ressort des faits définitivement établis dans l'arrêt du Tribunal cantonal du 10 janvier 2020 (art. 105 al. 1 LTF) - même si elles doivent être fortement relativisées compte tenu de l'écoulement du temps, ne sauraient devoir être totalement ignorées lors de l'appréciation globale de l'intégration de l'intéressé, ce d'autant lorsque celui-ci a commis de nouvelles infractions pénales, et ce nonobstant leur radiation du casier judiciaire (cf. arrêt 2C_276/2021 du 28 juin 2021 consid. 4.4 et l'arrêt cité). 
Il s'ensuit que, si le recourant a vécu presque la moitié de sa vie en Suisse, il n'a jamais su s'y intégrer ni y tisser des liens forts, mais a au contraire adopté à plusieurs reprises un comportement délictueux. La longue durée de son séjour ne peut ainsi contrebalancer les éléments susmentionnés, qui plaident en faveur de son éloignement. Quant à sa réintégration en Turquie, s'il n'est pas douteux que celle-ci ne se fera pas sans difficultés en raison de son état de santé (élément qui est examiné ci-après [consid. 5]), elle n'apparaît pas insurmontable. En effet, le recourant a vécu jusqu'à ses 33 ans en Turquie, de sorte qu'il connaît bien ce pays et en maîtrise la langue. On peut ainsi présumer qu'il y a conservé des attaches culturelles et sociales, ce d'autant plus qu'il y est retourné à plusieurs reprises durant son séjour en Suisse. Il pourra par ailleurs compter sur le soutien de sa mère et de ses trois soeurs et deux frères, qui y résident encore. On rappellera enfin que le simple fait que la personne étrangère doive retrouver des conditions de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne saurait suffire à maintenir son titre de séjour, même si ces conditions de vie sont moins avantageuses que celles dont cette personne bénéficie en Suisse (cf. arrêt 2D_49/2021 du 29 mars 2022 consid. 5.6 et les arrêts cités). 
 
4.3. Dans ces circonstances, la Cour de justice n'a pas méconnu le principe de proportionnalité, ni violé l'art. 8 CEDH, en confirmant le refus d'octroi d'une autorisation de séjour en faveur du recourant.  
 
5.  
Le recourant fait encore valoir qu'un renvoi en Turquie violerait l'art. 3 CEDH. S'il ne conteste pas que sa ville d'origine en Turquie dispose d'une infrastructure médicale importante, il affirme que, compte tenu de sa vulnérabilité liée à son état de santé, ses liens actifs avec le parti TKP/ML et son origine kurde, il serait fortement douteux qu'il puisse accéder "rapidement et convenablement à un traitement digne" en Turquie. Ce grief, qui porte sur la décision de renvoi, peut être traité sous l'angle du recours constitutionnel subsidiaire (cf. supra consid. 1.3). 
 
5.1. Selon la jurisprudence de la CourEDH, l'exécution du renvoi d'une personne malade peut, dans des cas très exceptionnels, conduire à une violation de l'art. 3 CEDH lorsqu'il existe des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou du défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie (cf. arrêt CourEDH Paposhvili c. Belgique du 13 décembre 2016, n° 41738/10 § 183; arrêt 2C_671/2021 du 15 février 2022 consid. 8.1 et les arrêts cités).  
 
5.1.1. En l'occurrence, il ressort des faits de l'arrêt attaqué que le recourant souffre d'un début de processus neurodégénératif (en plus d'un trouble dépressif récurrent déjà détecté), dont la nature exacte est toutefois incertaine. Le rapport médical le plus récent du 10 juin 2020 expose à cet égard que "le tableau clinique actuel ne correspond pas à une démence mais est compatible avec un affaiblissement cognitif, consécutif à la symptomatologie dépressive chronique et avec, également, un trouble cognitif léger (...) d'origine probablement mixte (psychiatrique, neurologique) " tout en admettant "que la dépression chronique et récurrente [du recourant] présente un risque d'évolution vers une démence neurodégénérative" (art. 105 al. 2 LTF). Au moment de l'arrêt attaqué, si l'intéressé présentait des troubles cognitifs (difficultés d'attention et de concentration, troubles de la mémoire antérograde), son autonomie dans ses activités quotidiennes était toutefois préservée.  
 
5.1.2. Sans minimiser les troubles dépressifs et cognitifs dont souffre le recourant, son état de santé ne remplit pas les conditions exceptionnelles permettant de retenir une violation de l'art. 3 CEDH.  
S'agissant de la dépression récurrente de l'intéressé, il n'est pas contesté que des structures médicales existent en Turquie, et en particulier dans sa ville d'origine, de sorte que l'on ne voit pas pourquoi ses troubles ne pourraient pas être pris en charge en cas de retour dans son pays. 
Quant au processus neurodégénératif dont il souffre, il ressort des constatations cantonales qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) que celui-ci ne se trouve qu'à son début et qu'il ne s'agit que d'un "affaiblissement cognitif". Sous cet angle, et compte tenu des infrastructures médicales précitées, on ne voit pas - et le recourant ne le démontre pas non plus - en quoi il serait confronté à un rapide déclin de son état de santé en cas de renvoi en Turquie. Certes, selon le rapport médical du 10 juin 2020, un risque d'évolution dudit processus vers une démence n'est pas écarté et il n'existe à l'heure actuelle, selon l'Organisation mondiale de la santé, aucun traitement qui permette de guérir ou même de modifier l'évolution progressive de la démence (cf. OMS, Dementia: A Public Health Priority, 2012, p. 7 [disponible sur https://www.who.int]; fait notoire pouvant être pris en compte; cf. ATF 143 IV 380 consid. 1.2). L'absence de traitement contre la démence ne saurait toutefois justifier la poursuite du séjour du recourant en Suisse en tant que seule issue humainement envisageable, ce d'autant que, comme indiqué, seul un début de processus neurodégénératif a été constaté. Le fait qu'une telle maladie ne soit actuellement pas guérissable ne constitue en effet pas une situation qui soit propre à la Turquie, mais à l'ensemble des nations, de sorte que, sous cet angle, la santé du recourant n'est pas exposée à un danger de déclin plus important en Turquie qu'en Suisse et que l'intéressé ne peut donc pas se prévaloir valablement de l'art. 3 CEDH. Quant aux soins et au soutien pouvant être apportés en cas de dégradation des fonctions cognitives du recourant, il ressort de l'arrêt attaqué qu'il existe une association Alzheimer dans sa ville d'origine qui serait apte à lui prodiguer soins et assistance gratuite, ce qu'il ne conteste pas sous l'angle de l'arbitraire (cf. supra consid. 2.2). Enfin, comme on l'a vu (cf. supra consid. 4.2), la mère, les trois soeurs et les deux frères du recourant résident encore en Turquie, si bien que l'on peut partir du principe qu'il pourra également compter sur leur soutien, du moins il ne prétend ni a fortiori ne démontre le contraire.  
 
5.2. S'agissant de son origine kurde, le fait que celle-ci soit, selon l'arrêt attaqué, susceptible de l'exposer à d'"éventuelles tracasseries administratives et discriminations mineures" ne permet pas, à lui seul, de conclure, comme l'affirme le recourant, à l'impossibilité pour lui d'accéder rapidement et convenablement aux soins nécessaires. Une telle affirmation ne répond au demeurant pas au degré de preuve requis par la jurisprudence en lien avec l'art. 3 CEDH, selon laquelle il incombe à la personne qui invoque cette disposition de démontrer l'existence d'un risque réel d'être soumis à des mauvais traitements par des éléments de preuve appropriés, ce que le recourant ne fait pas (cf. arrêt CourEDH, J.K et autres c. Suède du 23 août 2016, n° 59166/12, § 91; arrêt 2C_268/2021 du 27 avril 2021 consid. 3).  
 
5.3. Il n'en va pas autrement sous l'angle des prétendus obstacles liés aux relations qu'il entretiendrait toujours avec le parti TKP/ML. Au demeurant, force est de constater que, selon les constatations factuelles liant le Tribunal fédéral, le recourant a dans l'intervalle repris contact avec les autorités turques et a obtenu un passeport national, régulièrement renouvelé jusqu'en 2025. Il s'est en outre - avec ce passeport et donc sous son nom véritable - rendu à plusieurs reprises en Turquie durant son séjour en Suisse, sans aucun problème connu, alors que le TKP/ML restait considéré par ce pays comme un mouvement terroriste. Sur la base de ce qui précède, il faut admettre, avec l'autorité précédente, que le recourant n'intéresse pas, ou à tout le moins plus, les autorités de ce pays du fait de ses liens - au demeurant qualifiés de très flous - avec le parti TKP/ML. C'était d'ailleurs pour ce motif que son statut de réfugié lui avait été retiré en 2014 (cf. supra consid. A.a).  
Pour le reste, il n'est pas contesté que la Turquie ne connaît pas une situation de violence généralisée qui permettrait de retenir, indépendamment du cas d'espèce, un risque concret de violences prohibées par l'art. 3 CEDH (cf. arrêt 2C_225/2020 du 18 septembre 2020 consid. 3.2). Le fait d'affirmer, sans apporter le moindre élément concret le démontrant, que depuis la tentative de coup d'état militaire en 2016 les autorités turques procéderaient "très régulièrement" à des arrestations de kurdes qui pénètrent le territoire ne permet pas de retenir le contraire. 
 
5.4. Le grief de violation de l'art. 3 CEDH est partant infondé.  
 
6.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours en matière de droit public et, concernant le renvoi, du recours constitutionnel subsidiaire (cf. arrêt 2C_671/2021 du 15 février 2022 consid. 9). Succombant, le recourant supportera les frais judiciaires, qui seront toutefois fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public est rejeté. 
 
2.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, au Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Ie Cour administrative, et au Secrétariat d'Etat aux migrations. 
 
 
Lausanne, le 16 novembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : H. Rastorfer