Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.472/2002 /col 
 
Arrêt du 18 décembre 2002 
Ire Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président du Tribunal fédéral, 
Aeschlimann, Fonjallaz, 
greffier Thélin. 
 
les époux L.________, 
les époux H.________, 
S.________, 
les époux C.________, 
1762 Givisiez, recourants, 
représentés par L.________ et C.________, 
 
contre 
 
Centre commercial Moncor SA, 
intimée, représentée par Me Albert Nussbaumer, avocat, 
rue de Lausanne 91, case postale 111, 1701 Fribourg, 
Préfet du district de la Sarine, Grand'Rue 51, case postale 96, 1702 Fribourg, 
Direction des travaux publics du canton de Fribourg, 
rue des Chanoines 17, 1700 Fribourg, 
Tribunal administratif du canton de Fribourg, 
IIème Cour administrative, route André-Piller 21, 
case postale, 1762 Givisiez. 
 
construction d'un centre commercial 
 
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du 24 juillet 2002. 
 
Faits: 
A. 
Par décisions du 28 août et du 14 septembre 2001, le Préfet du district de la Sarine a accordé à la société Moncor SA l'autorisation de construire un centre commercial de 10'960 m2, avec 300 places de stationnement, sur les parcelles n° 411, 412, 414 et 543 de la commune de Givisiez. Le Préfet a rejeté les oppositions élevées contre le projet, qui portaient essentiellement sur les accès, l'implantation et les nuisances sonores. 
 
L.________ et d'autres opposants ont recouru au Tribunal administratif du canton de Fribourg. Statuant par un arrêt unique le 24 juillet 2002, cette juridiction a rejeté leurs conclusions et alloué à la société intimée une indemnité de partie fixée à 8'877 fr., à la charge des recourants. 
B. 
Agissant conjointement par la voie du recours de droit public, L.________ et les autres recourants déboutés requièrent le Tribunal fédéral d'annuler ce prononcé. A leur avis, l'emplacement du centre commercial est dépourvu d'accès suffisant. Ils reprochent au Tribunal administratif d'avoir constaté les faits et appliqué le droit cantonal de façon arbitraire, en tant que celui-ci exclut l'octroi d'un permis de construire si le terrain concerné n'est pas équipé. Les recourants ne soulèvent pas d'autres griefs contre l'autorisation de construire, mais ils tiennent l'indemnité de partie allouée à Moncor SA pour arbitrairement élevée. Ils se plaignent aussi, sur ce point, d'une motivation insuffisante de l'arrêt attaqué. 
 
Invitée à répondre, cette société conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable; les autorités intimées ont renoncé à déposer des observations ou proposé, elles aussi, l'irrecevabilité ou le rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
En vertu de l'art. 84 al. 2 OJ, le recours de droit public n'est recevable que dans la mesure où les griefs soulevés ne peuvent pas être présentés au Tribunal fédéral par un autre moyen de droit, tel que le recours de droit administratif. 
 
Celui-ci est ouvert contre les décisions cantonales de dernière instance fondées sur le droit public fédéral (art. 97, 98 let. g OJ), ou qui auraient dû être fondées sur ce droit, à condition qu'aucune des exceptions légales ne soit réalisée. Le recours de droit administratif est également recevable contre des décisions fondées à la fois sur le droit cantonal ou communal et sur le droit fédéral, dans la mesure où la violation de dispositions de droit fédéral directement applicables est en jeu. Le Tribunal fédéral examine aussi, dans le cadre de cette procédure, les mesures prises en vertu de dispositions cantonales d'exécution du droit fédéral dépourvues de portée indépendante; il examine en outre les mesures prises sur la base d'autres dispositions cantonales, lorsque celles-ci présentent un rapport de connexité suffisamment étroit avec les questions de droit fédéral à élucider. Pour le surplus, en tant que l'acte attaqué est fondé sur des dispositions cantonales qui n'ont pas ce rapport de connexité avec le droit fédéral, la voie du recours de droit public est seule ouverte (ATF 124 II 409 consid. 1d/dd p. 414; voir aussi ATF 126 V 252 consid. 1a p. 253/254; 125 II 10 consid. 2a p. 13, 123 II 231 consid. 2 p. 233, 122 II 274 consid. 1a p. 277). 
1.1 Selon l'art. 22 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT), une autorisation de l'autorité compétente est nécessaire pour toute construction ou installation, et elle ne peut être délivrée, entre autres conditions, que si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Cela suppose, notamment, des voies d'accès adaptées à l'utilisation prévue (art. 19 al. 1 LAT). Toutefois, même lorsque le litige porte sur l'application de ces dispositions de droit fédéral, le recours de droit administratif n'est pas recevable contre les autorisations de construire autres que celles délivrées à titre exceptionnel hors de la zone à bâtir (art. 34 al. 3 LAT; arrêt du 5 août 1994 in ZBl 1995 p. 231, consid. 1a). 
1.2 D'après le plan d'aménagement de détail adopté pour les parcelles de l'intimée, celles-ci doivent être desservies par une route communale nouvelle, à construire jusqu'à la route cantonale B 031. Celle-ci relie Givisiez, la jonction Fribourg-sud de la route nationale A12 et Villars-sur-Glâne. Les recourants soutiennent qu'elle constitue un tronçon de raccordement soumis à la législation fédérale sur les routes nationales, et que la possibilité d'y créer une intersection nouvelle pour la route communale précitée, de façon conforme à cette législation, n'est pas assurée. 
 
Le Tribunal administratif retient que le statut du tronçon concerné a varié et que, actuellement, il n'est plus considéré comme une dépendance de la route nationale A12. Il n'apparaît cependant pas que cette question ait fait l'objet d'une constatation formelle de l'autorité fédérale compétente; on ne saurait donc exclure qu'une décision de ladite autorité doive intervenir, afin d'éliminer toute équivoque, en coordination avec la procédure cantonale d'approbation des plans afférente aux nouveaux ouvrages routiers. Cette procédure, actuellement en cours, est toutefois indépendante de celle du permis de construire accordé à la société intimée. Les décisions du 28 août et du 14 septembre 2001 n'ont pas pour objet d'autoriser la réalisation de la route communale nouvelle et de sa jonction avec la route cantonale B 031. La législation sur les routes nationales n'est donc pas en cause, de sorte que le recours de droit administratif n'entre pas en considération. 
2. 
Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, le recours de droit public est ouvert seulement à celui qui est atteint par l'acte attaqué dans ses intérêts personnels et juridiquement protégés; le recours formé pour sauvegarder l'intérêt général, ou visant à préserver de simples intérêts de fait, est en revanche irrecevable. Un intérêt est juridiquement protégé lorsqu'il est l'objet d'une garantie constitutionnelle spécifique ou qu'une règle de droit fédéral ou cantonal tend, au moins accessoirement, à sa protection (ATF 126 I 81 consid. 3a p. 95; 122 I 44 consid. 2b p. 43; 118 Ia 44 consid. 3 p. 51); à elle seule, l'interdiction générale de l'arbitraire, consacrée par l'art. 9 Cst., n'est pas une norme qui suffise à conférer la qualité pour agir (ATF 126 I 81; voir aussi ATF 126 II 377 consid. 4 p. 388). La qualité de partie en procédure cantonale n'est pas non plus déterminante (ATF 126 I 43 consid. 1a p. 44; 123 I 279 consid. 3b p. 280). Enfin, il incombe au recourant d'alléguer les faits qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir, lorsqu'ils ne ressortent pas de façon évidente de la décision attaquée ou du dossier (ATF 120 Ia 227 consid. 1 p. 229; 115 Ib 505 in fine p. 508). 
2.1 En matière d'autorisation de construire, le Tribunal fédéral reconnaît la qualité pour recourir au propriétaire voisin lorsque celui-ci se plaint de violation de dispositions du droit de la construction tendant non seulement à la sauvegarde des intérêts de la collectivité, mais aussi, voire principalement, à la protection de ses propres intérêts de voisin. Il faut en outre que le recourant se trouve dans le champ de protection des dispositions dont il allègue la violation et qu'il soit touché par les effets prétendument illicites de la construction litigieuse (ATF 118 Ia 112 consid. 2a p. 116; 118 Ia 232 consid. 1a p. 234; 113 Ia 468 consid. 1a p. 470; voir aussi ATF 125 II 440 consid. 1c p. 442, 119 Ia 362 consid. 1b p. 364). Le grief tiré d'une application arbitraire des règles relatives aux voies d'accès est ainsi recevable si le propriétaire recourant est menacé d'une gêne dans l'accès à son propre bien-fonds (ATF 115 Ib 347 consid. 1c/bb p. 353; arrêt 1P.123/2000 in ZBl 2001 p. 444, consid. 2b). 
 
En l'occurrence, l'un des plans du dossier d'enquête publique indique l'emplacement de la parcelle n° 383 appartenant aux époux L.________, mais l'accès de cet immeuble semble indépendant des voies de desserte actuelles et futures des parcelles destinées à recevoir le centre commercial. On ignore la situation des immeubles appartenant aux autres recourants. Dans le mémoire de recours, aucun des recourants n'allègue que le trafic du centre commercial, sur les voies de desserte précitées, puisse gêner de façon concrète leurs propres allées et venues ou celles de leurs ayants droit. Ils affirment simplement qu'ils "n'accepteront la construction d'un centre commercial en bordure immédiate de leur quartier d'habitation que dans la mesure où les dispositions légales fédérales et cantonales seront strictement respectées". Dans ces conditions, leurs critiques relatives à une desserte prétendument insuffisante des parcelles en cause ne sont élevées que dans l'intérêt général; elles sont irrecevables au regard de l'art. 88 OJ
2.2 Les recourants sont atteints dans leur situation patrimoniale par le prononcé allouant une indemnité de partie à la société intimée; ils ont donc qualité pour en contester le montant. 
3. 
Les critiques portant sur une évaluation arbitrairement élevée de l'indemnité de partie, d'une part, et sur une motivation insuffisante de cette évaluation, d'autre part, sont étroitement liées. 
3.1 Selon la jurisprudence relative à la garantie constitutionnelle du droit d'être entendu, actuellement consacrée par l'art. 29 al. 2 Cst., la décision fixant le montant des dépens (ou indemnité de partie) alloués à une partie obtenant totalement ou partiellement gain de cause, dans un procès, n'a en principe pas besoin d'être motivée. Lorsqu'il existe un tarif ou une règle légale fixant des minima et maxima, le juge ne doit motiver sa décision que s'il sort de ces limites, ou si des éléments extraordinaires sont invoqués par la partie créancière (ATF 111 Ia 1 consid. 2a). 
 
Une décision est arbitraire, donc contraire à l'art. 9 Cst., lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si sa décision apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision soient insoutenables; encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. A cet égard, il ne suffit pas non plus qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable (ATF 128 II 259 consid. 5 p. 280/281; 127 I 54 consid. 2b p. 56; voir aussi ATF 128 I 177 consid. 2.1 p. 182; 126 I 168 consid. 3a p. 170). 
3.2 Devant le Tribunal administratif du canton de Fribourg, les honoraires à allouer pour la représentation ou l'assistance d'une partie doivent être fixés, en règle générale, entre 200 et 5'000 fr.; dans les affaires d'une ampleur ou complexité particulière, le maximum s'élève à 20'000 fr. (art. 8 du Tarif des frais de procédure et des indemnités en matière de juridiction administrative, du 17 décembre 1991). Le montant des honoraires est fixé compte tenu du temps et du travail consacrés à l'affaire, et de son importance. La partie créancière doit déposer un récapitulatif des opérations effectuées; à défaut, le tribunal fixe l'indemnité d'office et selon sa libre appréciation (art. 11 du tarif précité). Les débours, en particulier les frais de photocopies et les indemnités de déplacement, sont remboursés à part (art. 9). 
 
En l'espèce, le 12 juillet 2002, le conseil de l'intimée a remis une liste détaillée de ses vacations et frais; il élevait ainsi des prétentions de 8'144 fr. pour les honoraires, 106 fr. pour les débours et 627 fr. pour la TVA, soit 8'877 fr. en tout. L'indemnité litigieuse correspond à ce total, qui a donc été intégralement admis. 
 
On constate que les honoraires de 8'144 fr. excèdent notablement le maximum ordinaire qui est fixé, selon le tarif, à 5'000 fr. Or, le conseil précité n'a pas assisté sa cliente dans une instruction particulièrement longue ou complexe et, à la lecture de l'arrêt attaqué, il ne semble pas qu'il ait dû se confronter à des questions de fait ou de droit spécialement ardues. Le dossier des pièces relatives au centre commercial projeté n'est pas non plus exceptionnellement volumineux. Dans ces conditions, le Tribunal administratif devait procéder à une évaluation des honoraires dans le cadre du tarif. Si, en considération d'éléments que l'on ne discerne pas d'emblée, il estimait justifié de retenir un montant supérieur au maximum de 5'000 fr., il devait en faire état dans son prononcé. En l'absence de toute indication à ce sujet, l'arrêt attaqué est insuffisamment motivé, ou alors le Tribunal administratif est tombé dans l'arbitraire en homologuant sans plus de discussion un décompte non conforme au tarif. Le recours de droit public se révèle donc fondé en ce qui concerne l'indemnité de partie, ce qui entraîne l'annulation partielle de l'arrêt attaqué. 
4. 
Les recourants succombent sur l'objet principal du litige et obtiennent gain de cause sur l'accessoire. L'émolument judiciaire doit ainsi être réparti dans la proportion de 2/3 à leur charge et 1/3 à celle de l'intimée. Des dépens réduits seront alloués à cette partie. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est partiellement admis et l'arrêt attaqué est annulé dans le chiffre 3 de son dispositif; le recours est irrecevable pour le surplus. 
2. 
Les parties acquitteront un émolument judiciaire de 3'000 fr., à raison de 2'000 fr. à la charge des recourants et de 1'000 fr. à celle de l'intimée. 
3. 
Les recourants acquitteront, solidairement entre eux, une indemnité de 500 fr. à l'intimée à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties, au Préfet du district de la Sarine, à la Direction des travaux publics et au Tribunal administratif du canton de Fribourg. 
Lausanne, le 18 décembre 2002 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: Le greffier: