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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1395/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 27 octobre 2017  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer. 
Greffière : Mme Klinke. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représenté par Me Guillaume Fauconnet, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Conditions de détention illicites, réduction de la peine, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 11 novembre 2016 (AARP/451/2016 (P/11204/2011)). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 14 janvier 2015, le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève a reconnu X.________ coupable d'infraction grave à la LStup et de blanchiment d'argent. Il l'a condamné à une peine privative de liberté de sept ans, sous déduction de 1'022 jours de détention avant jugement. 
 
B.   
Par arrêt du 3 août 2015, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté l'appel formé par X.________ contre la décision de première instance. 
 
La cour cantonale a notamment rejeté les conclusions en réduction de peine prises par X.________ en raison de ses conditions de détention illicites. 
 
C.   
Par arrêt 6B_946/2015 du 13 septembre 2016, la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis partiellement le recours formé par X.________ contre l'arrêt cantonal. Elle a constaté qu'il avait subi 534 jours de détention dans des conditions illicites entre le 25 mars 2013 et le 15 juin 2015 et a renvoyé la cause à la cour cantonale afin qu'elle détermine les conséquences de cette violation. 
 
D.   
Par arrêt du 11 novembre 2016, statuant sur renvoi du Tribunal fédéral, la cour cantonale a réduit de six mois la peine de sept ans infligée à X.________, portant cette peine à six ans et six mois, sous déduction de 1'689 jours de détention avant jugement. 
 
E.   
X.________ forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt du 11 novembre 2016 dont il requiert la réforme en ce sens qu'une peine privative de liberté de quatre ans est prononcée. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision. 
 
Invités à se déterminer sur le mémoire de recours, tant le Ministère public que la cour cantonale se sont rapportés à l'arrêt entrepris. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recourant estime que la réduction de peine de six mois, accordée en réparation du tort moral causé par ses conditions de détention illicites, est excessivement courte et la qualifie d'arbitraire. 
 
1.1. Selon la jurisprudence, lorsqu'une irrégularité constitutive d'une violation d'une garantie conventionnelle ou constitutionnelle a entaché la procédure relative à la détention provisoire, celle-ci peut être réparée par une décision de constatation. Une telle décision vaut notamment lorsque les conditions de détention provisoire illicites sont invoquées devant le juge de la détention. A un tel stade de la procédure, seul un constat peut donc en principe intervenir et celui-ci n'a pas pour conséquence la remise en liberté du prévenu. Il appartient ensuite à l'autorité de jugement d'examiner les possibles conséquences des violations constatées, par exemple par le biais d'une indemnisation fondée sur l'art. 431 CPP ou, cas échéant, par une réduction de la peine (ATF 142 IV 245 consid. 4.1 p. 248 et les arrêts cités).  
 
S'agissant du mode et de l'étendue de l'indemnisation fondée sur les art. 429 ss CPP, il n'est pas exclu de s'inspirer des règles générales des art. 41 ss CO. Ces dispositions accordent au juge un large pouvoir d'appréciation, que le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec retenue. En vertu de l'art. 43 CO, une réparation en nature n'est pas exclue (ATF 142 IV 245 consid. 4.1 p. 248 et les arrêts cités; arrêts 6B_976/2016 du 12 octobre 2017 consid. 3.4.2; 6B_137/2016 du 1er décembre 2016 consid. 2.2). L'ampleur de la réparation dépend avant tout de l'appréciation concrète des circonstances particulières de l'espèce, en particulier de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie (arrêts 6B_976/2016 du 12 octobre 2017 consid. 3.4.2; 6B_137/2016 du 1er décembre 2016 consid. 2.2; cf. sur la réparation financière, ATF 137 III 303 consid. 2.2.2 p. 309 s.). 
 
En matière de réparation du tort moral subi en raison d'une détention injustifiée, il appartient au demandeur d'invoquer et de prouver les atteintes subies (ATF 135 IV 43 consid. 4.1 p. 47; arrêt 6B_909/2015 du 22 juin 2016 consid. 2.2.1). 
 
1.2. D'après la jurisprudence de la CourEDH, une réduction de peine en proportion des jours passés dans des conditions inhumaines ou dégradantes peut, sous certaines conditions, constituer un redressement satisfaisant en cas de violation de l'art. 3 CEDH (Arrêts CourEDH  Stella et autres contre Italie du 16 septembre 2014, § 58-60;  Shishanov contre République de Moldova du 15 septembre 2015, § 136;  Neshkov et autres contre Bulgarie du 27 janvier 2015, § 287). Selon elle, le nombre de jours passés dans des conditions illicites constitue le facteur le plus important pour apprécier l'étendue du dommage (Arrêts CourEDH  Neshkov et autres contre Bulgarie précité, § 299;  Ananyev et autres contre Russie du 10 janvier 2012, § 172).  
 
La réduction de peine doit être explicitement octroyée pour réparer la violation de l'art. 3 CEDH et son impact sur le quantum de la peine de la personne intéressée doit être mesurable (Arrêts CourEDH  Stella et autres contre Italie précité, § 60;  Shishanov contre République de Moldova précité, § 137). En ce sens, la CourEDH a jugé qu'une réduction de peine égale à un jour pour chaque période de dix jours de détention incompatible avec l'art. 3 CEDH, tel que le prévoit la loi italienne dans le cas d'un recours compensatoire, constitue un redressement adéquat lors de mauvaises conditions matérielles de détention. La CourEDH a constaté dans ce cas de figure, d'une part, que la réduction est explicitement octroyée pour réparer la violation de l'art. 3 de la CEDH et, d'autre part, que son impact sur le quantum de la peine de la personne intéressée est mesurable (Arrêt CourEDH  Stella et autres contre Italie précité, § 58 ss en référence à l'art. 35ter de la loi sur l'administration pénitentiaire italienne).  
 
1.3. En matière de réparation, le Tribunal fédéral a admis des réductions de peine correspondant à un tiers, voire à la moitié du nombre de jours passés dans des conditions de détention illicites (cf. arrêts 6B_1243/2016 du 13 décembre 2016; 6B_137/2016 du 1er décembre 2016; ATF 142 IV 245).  
 
1.4. A teneur de l'arrêt cantonal, entre le 25 mars 2013 et le 15 juin 2015, le recourant était détenu durant 534 jours consécutivement dans une cellule ne lui offrant qu'une surface individuelle nette de 3,39 m2. Dès le 27 mars 2013, il avait la possibilité de sortir de sa cellule 4h30 par jour, dans le cadre de son travail de nettoyeur d'étage.  
 
La cour cantonale retient expressément que la réduction de peine est octroyée pour réparer la violation de l'art. 3 CEDH constatée. Quant à l'étendue de la réduction, la cour présente deux approches. L'une consistant à fixer une réparation d'ordre général et global, sans se référer au nombre de jours de détention illicite, par analogie avec la méthode utilisée en cas de violation du principe de célérité; la seconde consistant à quantifier la réparation en tenant compte de cette durée, en référence à l'indemnisation en cas de détention injustifiée (art. 429 al. 1 let. c CPP). Elle fait état de plusieurs affaires cantonales dans lesquelles des réductions de peine de deux, respectivement sept mois ont été accordées en réparation de conditions de détention illicites ayant duré six à sept mois, respectivement 591 jours. Certes le raisonnement cantonal apparaît ambivalent voire contradictoire. L'on comprend toutefois, au regard de la jurisprudence cantonale citée, que la réduction de peine de 6 mois accordée en l'espèce correspond globalement à un jour pour chaque période de trois jours de détention dans des conditions illicites (534 jours / 3 = 178 jours, à savoir 5 mois et 26 jours). L'impact de la réduction sur la quotité de la peine du recourant est mesurable. 
 
Le recourant ne prétend pas avoir subi de souffrances particulières résultant de l'espace individuel à disposition (3,39 m2), lequel a expressément été pris en considération pour la réparation du tort moral. Il n'expose pas dans quelle mesure ce seul critère justifierait une réduction supplémentaire de sa peine, étant rappelé qu'il n'était pas confiné 23h/24h dans sa cellule. La pratique cantonale consistant à réduire la peine d'un tiers de la période passée dans des conditions de détention contraires à l'art. 3 CEDH, dont les autorités n'ont pas de raison de s'écarter en l'espèce, est conforme à la jurisprudence précitée. 
 
Dans ces circonstances, l'on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que la réduction de six mois de la peine privative de liberté réparait suffisamment le tort moral subi en raison des conditions dans lesquelles l'incarcération du recourant s'est déroulée. 
 
Pour le surplus, la motivation cantonale permet de comprendre les raisons qui ont amené les juges à réduire la peine dans cette proportion et le recourant a pu attaquer ce point devant le Tribunal fédéral en toute connaissance de cause. 
 
2.   
Le recours doit être rejeté. Dès lors que le recourant est dans le besoin et que ses conclusions ne paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec, sa requête d'assistance judiciaire doit être admise. Il y a lieu de le dispenser des frais et d'allouer une indemnité à son mandataire, désigné comme avocat d'office (art. 64 al. 1 et 2 LTF). 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : 
 
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Guillaume Fauconnet est désigné comme conseil d'office et une indemnité de 3'000 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 27 octobre 2017 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Klinke