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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
4A_294/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 11 décembre 2013  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux Klett, Présidente, Kolly, Hohl, Niquille et Berti, Juge suppléant. 
Greffière: Mme Godat Zimmermann. 
 
Participants à la procédure 
X.________ SA, représentée par Me Christian Lüscher, 
recourante, 
 
contre  
 
Z.________ SA, représentée par Me Michel Bosshard, 
intimée. 
 
Objet 
preuve illicite; règles professionnelles de l'avocat; confidentialité, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 26 avril 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
X.________ SA exploite une bijouterie-horlogerie à Genève. En mars 2005, elle a passé une commande à Z.________ SA, entreprise de vitrerie et d'installation de stores, portant sur la fourniture et la pose de quatre grilles roulantes constituées de tubes d'aluminium horizontaux assemblés avec des brides de serrages verticales, profilés sans serrure mais avec une protection de relevage contre le haut. Les grilles roulantes ont été posées entre le 13 mai et le 13 juin 2005. 
Le 21 décembre 2009, la bijouterie-horlogerie a été cambriolée. Selon la plainte pénale déposée alors, les malfaiteurs ont soulevé le grillage de protection pour pénétrer dans le magasin. 
Par lettre du 26 janvier 2010, X.________ SA a imputé à Z.________ SA la responsabilité du préjudice résultant du cambriolage, qui aurait été rendu possible par la mauvaise exécution du système de protection de la grille contre le relevage vers le haut. 
Le 14 juillet 2010, X.________ SA a requis une poursuite à l'encontre de Z.________ SA, portant sur un montant total de 281'904 fr.52. 
 
B.   
Par acte déposé le 22 mars 2011 en vue de conciliation, X.________ SA a assigné Z.________ SA en paiement de 245'759 fr.55, 10'369 fr.75 et 19'173 fr.25, plus intérêts. Elle concluait en outre à ce que la défenderesse soit condamnée à réparer le défaut, à ses frais, dans les trente jours à compter de l'entrée en force du jugement. Dans sa demande, X.________ SA faisait état d'un courriel du 30 juin 2010 dans lequel le conseil de Z.________ SA, sollicité le même jour par le conseil de la demanderesse, déclarait que sa cliente renonçait à exciper de la prescription pour autant que celle-ci ne soit pas déjà acquise. 
Z.________ SA a soulevé l'exception de prescription. Le Tribunal de première instance du canton de Genève a limité la procédure à cette question. 
Lors des débats d'instruction du 1 er février 2012, le conseil de X.________ SA a produit un courrier daté du 30 avril 2010, que le conseil de Z.________ SA lui avait adressé dans le cadre de pourparlers transactionnels; cette lettre portait la mention "SOUS LES PLUS EXPRESSES RÉSERVES D'USAGE" et son contenu était caviardé, sauf les formules de politesse et la phrase suivante: "Afin de vous éviter la rédaction d'une réquisition de poursuite, ma mandante est prête à renoncer, envers X.________, à invoquer l'exception de prescription, pourvu que celle-ci ne soit pas déjà acquise." Le conseil de X.________ SA a précisé que la production de ce courrier en partie caviardé était autorisée par le Bâtonnier de l'Ordre des avocats genevois.  
Lors des débats principaux du 15 juin 2012, le conseil de X.________ SA a produit la lettre du Bâtonnier du 15 décembre 2011. A cette occasion, le conseil de Z.________ SA a demandé que ledit courrier ainsi que celui du 30 avril 2010 soient écartés des débats. 
Par jugement du 21 septembre 2012, le Tribunal de première instance a rejeté l'exception de prescription. 
Statuant le 26 avril 2013 sur appel de Z.________ SA, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a annulé le jugement de première instance et débouté X.________ SA de toutes ses conclusions. 
 
C.   
X.________ SA interjette un recours en matière civile. Elle demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal, de confirmer le jugement de première instance ou de constater que Z.________ SA a renoncé à soulever l'exception de prescription pour toute créance de X.________ SA fondée sur les travaux réalisés dans la bijouterie-horlogerie, puis de renvoyer la cause au Tribunal de première instance pour qu'il rende un jugement sur le fond. 
A titre préalable, la recourante a conclu à l'octroi de l'effet suspensif. Par ordonnance du 4 juillet 2013, la Présidente de la cour de céans a rejeté cette demande. 
Z.________ SA propose principalement le rejet du recours. 
Pour sa part, la Cour de justice se réfère aux considérants de son arrêt. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.  
 
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance statuant sur recours (art. 75 LTF). Il s'agit au surplus d'une décision finale (art. 90 LTF). La valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recours est interjeté par la partie qui n'a pas obtenu gain de cause en instance cantonale (art. 76 al. 1 LTF). Enfin, il a été déposé dans le délai (art. 45 al. 1 et art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.  
 
1.2. Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 138 II 331 consid. 1.3 p. 336; 137 II 313 consid. 4 p. 317 s.; 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 137 III 580 consid. 1.3 p. 584; 135 II 384 consid. 2.2.1 p. 389; 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, le Tribunal fédéral ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 in fine).  
 
1.3. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137 II 353 consid. 5.1 p. 356) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).  
 
2.  
 
2.1. La cour cantonale n'a pas tranché la question de savoir si la prétention de la recourante se fondait sur la garantie pour les défauts de la chose vendue ou de l'ouvrage et se prescrivait ainsi par un an (cf. art. 210 al. 1 ou art. 371 al. 1 CO dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2012) ou si elle résultait de la garantie pour les défauts d'une construction immobilière et se prescrivait alors par cinq ans (cf. art. 371 al. 2 CO dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2012). En effet, les juges genevois sont arrivés à la conclusion que, même si le délai le plus long s'applique, la prescription était acquise le 13 juin 2010, soit avant le dépôt de la demande. La Cour de justice n'a retenu aucun acte interruptif de prescription. Elle a écarté du dossier la lettre du 30 avril 2010 adressée au conseil de la recourante par le conseil de l'intimée sous le sceau de la confidentialité et contenant une renonciation à la prescription selon la recourante. Elle a jugé que le pli litigieux ne comporte qu'une offre de renoncer à la prescription, dépendante des autres propositions transactionnelles formulées à cette occasion, et qu'à défaut d'accord complet sur tous les éléments de la transaction, la production du courrier confidentiel, même caviardé, contrevient à l'art. 12 let. a de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (LLCA; RS 935.61). Selon la cour cantonale, la lettre du 30 avril 2010 constitue ainsi un moyen de preuve obtenu de manière illicite au sens de l'art. 152 al. 2 CPC et la pesée des intérêts en cause ne justifie pas d'admettre exceptionnellement un tel moyen. Dans une motivation apparemment subsidiaire, la Chambre d'appel ajoute que, en tout état de cause, aucun accord sur la renonciation à la prescription n'est vraisemblablement venu à chef, même tacitement, dès lors que le conseil de la recourante elle-même a demandé une nouvelle fois le 30 juin 2010 que l'intimée renonce à la prescription.  
 
2.2. La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 152 al. 2 CPC et l'art. 12 LLCA en qualifiant le courrier du 30 avril 2010 de moyen de preuve illicite. Elle fait valoir que la partie non caviardée de cette lettre ne comporte pas de proposition transactionnelle couverte par la confidentialité et que la renonciation à la prescription contenue dans ce passage n'est pas conditionnelle. Elle ajoute que l'autorisation du Bâtonnier a rendu licite la production du courrier frappé des réserves d'usage. Invoquant l'art. 9 Cst., la recourante soutient qu'il était arbitraire de la part de la Cour de justice de retenir que la clause de renonciation à la prescription était dépendante des autres clauses contenues dans le courrier du 30 avril 2010; elle est d'avis que c'est précisément lorsque les pourparlers transactionnels échouent que la clause de renonciation à la prescription prend tout son sens. Enfin, la recourante se plaint d'une violation de l'art. 2 CC; l'intimée commettrait un abus de droit en invoquant l'exception de prescription, car sa déclaration du 30 avril 2010 aurait incité la recourante à ne pas entreprendre à temps les démarches pour sauvegarder ses droits.  
 
3.  
 
3.1. Aux termes de l'art. 152 al. 2 CPC, le tribunal ne prend en considération les moyens de preuve obtenus de manière illicite que si l'intérêt à la manifestation de la vérité est prépondérant. Contrairement à la preuve irrégulière, recueillie en violation d'une règle de procédure, la preuve illicite est obtenue en violation d'une norme de droit matériel, laquelle doit protéger le bien juridique lésé contre l'atteinte en cause (Jürgen Brönnimann, Berner Kommentar, tome II, 2012, n° 43 ss ad art. 152 CPC; Yves Rüedi, Materiell rechtswidrig beschaffte Beweismittel im Zivilprozess, 2009, n° 234 p. 116, n° 248 p. 121, n° 252 p. 122, n° 260 p. 126; Louis Gaillard, Le sort des preuves illicites dans le procès civil, in SJ 1998 p. 652). Conformément à l'art. 152 al. 2 CPC, la preuve obtenue illicitement n'est utilisable que d'une manière restrictive. Le juge doit en particulier procéder à une pesée de l'intérêt à la protection du bien lésé par l'obtention illicite et de l'intérêt à la manifestation de la vérité (Franz Hasenböhler, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], 2e éd. 2013, n° 40 ad art. 152 CPC p. 1058; Message du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse [CPC], in FF 2006 6922 ch. 5.10.1).  
Les règles professionnelles (  Berufsregeln ) énumérées à l'art. 12 LLCA constituent des normes dont la violation peut rendre une preuve illicite au sens de l'art. 152 al. 2 CPC (Rüedi, op. cit., n° 256 p. 125). Édictées par une autorité afin de réglementer, dans l'intérêt public, l'exercice d'une profession, elles se distinguent des règles déontologiques (ou us et coutumes;  Standesregeln ), qui sont adoptées par les organisations professionnelles (ATF 136 III 296 consid. 2.1 p. 300). La LLCA définit de manière exhaustive les règles professionnelles auxquelles les avocats sont soumis. Les règles déontologiques conservent toutefois une portée juridique en permettant de préciser ou d'interpréter les règles professionnelles, mais uniquement dans la mesure où elles expriment une opinion largement répandue au plan national (cf. ATF 136 III 296 consid. 2.1 p. 300; 131 I 223 consid. 3.4 p. 228; 130 II 270 consid. 3.1.1 p. 275). Dans le but d'unifier les règles déontologiques sur tout le territoire de la Confédération, la Fédération Suisse des Avocats (FSA) a précisément édicté le Code suisse de déontologie (ci-après: CSD), entré en vigueur le 1er juillet 2005.  
Selon l'art. 6 CSD, l'avocat ne porte pas à la connaissance du tribunal des propositions transactionnelles, sauf accord exprès de la partie adverse. Après avoir posé que le caractère confidentiel d'une communication adressée à un confrère doit être clairement exprimé, l'art. 26 CSD répète qu'il ne peut être fait état en procédure "de documents ou du contenu de propositions transactionnelles ou de discussions confidentielles." Ces dispositions servent à préciser la portée de l'art. 12 let. a LLCA, qui prescrit à l'avocat d'exercer sa profession avec soin et diligence (cf. Michel Valticos, in Commentaire romand de la loi sur les avocats, 2010, n° 58 ad art. 12 LLCA). Selon la jurisprudence, le non-respect d'une clause de confidentialité et l'utilisation en procédure du contenu de pourparlers transactionnels constituent une violation de l'obligation résultant de l'art. 12 let. a LLCA (arrêt 2C_900/2010 du 17 juin 2011 consid. 1.4; cf. arrêt 2A.658/2004 du 3 mai 2005 consid. 3.4). Le Tribunal fédéral a relevé que l'interdiction pour l'avocat de se prévaloir en justice de discussions transactionnelles confidentielles est fondée sur l'intérêt public à favoriser le règlement amiable des litiges, les parties devant pouvoir s'exprimer librement lors de la recherche d'une solution extrajudiciaire (arrêt précité du 3 mai 2005 consid. 3.3). 
En présence d'un courrier désigné expressément comme confidentiel, dont les propositions transactionnelles avaient été caviardées, le Tribunal fédéral a posé que la règle de la confidentialité doit être interprétée dans un sens absolu et appliquée strictement (arrêt précité du 3 mai 2005 consid. 4.3). A ce propos, il faut admettre qu'un courrier confidentiel ne peut pas être déposé en justice, même caviardé, à moins que, manifestement, seule une partie du texte n'ait un caractère confidentiel (François Bohnet/Vincent Martenet, Droit de la profession d'avocat, 2009, n° 1191 p. 511). La pesée des intérêts prévue à l'art. 152 al. 2 CPC est en outre réservée. 
 
3.2. En l'espèce, le moyen de preuve litigieux est la lettre du 30 avril 2010 adressée par le conseil de l'intimée au conseil de la recourante; ce dernier l'a produite caviardée devant le premier juge, avec l'autorisation du Bâtonnier de l'Ordre des avocats genevois.  
La question est de savoir si cette preuve a été déposée en violation de la règle de la confidentialité déduite de l'art. 12 let. a LLCA et, partant, si elle est illicite au sens de l'art. 152 al. 2 CPC. S'agissant de déterminer s'il y a eu violation d'une norme de droit fédéral, édictée dans l'intérêt public, l'avis du Bâtonnier, dont la recourante fait grand cas, est dénué de pertinence. 
Frappé des réserves d'usage, le courrier litigieux mentionne expressément son caractère confidentiel; au surplus, il n'est pas contesté que les passages caviardés portent sur des propositions transactionnelles. Conformément au principe exposé plus haut, déduit de la règle de la confidentialité appliquée strictement, un tel courrier ne peut pas être produit en justice, sauf si la partie non caviardée ne présente manifestement pas un caractère confidentiel. 
Selon l'arrêt attaqué, la déclaration visible de l'intimée figurant dans le courrier du 30 avril 2010 est une "offre de renoncer à la prescription", "une proposition de renonciation". Pour sa part, la recourante prétend qu'il s'agit d'une renonciation unilatérale et inconditionnelle à la prescription, qui ne présente aucun caractère de confidentialité. 
Les termes mêmes utilisés dans le passage en cause accréditent la qualification retenue par la cour cantonale et ne permettent en tout cas pas de retenir qu'à l'évidence, l'intimée renonçait unilatéralement et inconditionnellement à la prescription. Rompu au vocabulaire juridique et conscient de la portée des mots, le conseil de l'intimée, mandataire professionnel, a écrit en effet que sa cliente était "prête à renoncer (...) à invoquer l'exception de prescription", et non simplement qu'elle renonçait à cette exception. Or, celui qui est prêt à une action n'a pas encore agi et se déclarer prêt à accomplir un acte ne signifie pas nécessairement l'exécuter par la suite sans conditions. En l'occurrence, comme le courrier produit contient des propositions transactionnelles, il n'est nullement exclu de voir dans la déclaration en cause, interprétée objectivement, une offre insérée parmi les autres propositions transactionnelles dont le contenu a été caviardé, et qui engage l'intimée uniquement si un accord global est conclu, en ce sens que les prétentions sur lesquelles les parties transigent seront dues même si elles sont prescrites. Contrairement à ce que la recourante soutient, il n'est dès lors pas manifeste que la déclaration litigieuse ait été émise indépendamment des propositions transactionnelles caviardées et, par conséquent, qu'elle présente un caractère non confidentiel. 
La conclusion est identique si l'on se place sous l'angle de l'interprétation subjective, faisant appel aux éléments postérieurs à la déclaration. En effet, si le passage en cause était une renonciation pure et simple à invoquer la prescription, on ne comprend pas pourquoi le conseil de la recourante a cherché à obtenir, en date du 30 juin 2010, une déclaration de renonciation unilatérale dénuée d'ambiguïté. 
Enfin, il est à noter que, dans une cause de nature patrimoniale soumise à la maxime des débats comme celle opposant les parties, l'intérêt à la découverte de la vérité matérielle, résultant prétendument du moyen de preuve illicite, ne saurait prévaloir face à l'intérêt public au respect strict de la règle de la confidentialité. 
En conclusion, la Cour de justice n'a violé ni l'art. 12 let. a LLCA, ni l'art. 152 al. 2 CPC en refusant de prendre en considération la lettre du 30 avril 2010. Par ailleurs, la solution adoptée dans l'arrêt attaqué étant confirmée, point n'est besoin de déterminer si la prescription est intervenue le 13 juin 2006 plutôt que le 13 juin 2010, comme l'intimée le plaidait. 
 
4.   
Dès lors que le courrier caviardé ne fait pas partie du dossier, la recourante prétend en vain que son comportement a été influencé par la prétendue déclaration de renonciation à la prescription contenue dans le pli en question. Le grief tiré d'une violation de l'art. 2 CC se trouve privé de substance. 
 
5.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. 
La recourante, qui succombe, prendra à sa charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 7'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 11 décembre 2013 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente: Klett 
 
La Greffière: Godat Zimmermann